DISSERTATION DE DROIT CONSTITUTIONNEL La loi est-elle l’œuvre du Parlement sous
DISSERTATION DE DROIT CONSTITUTIONNEL La loi est-elle l’œuvre du Parlement sous la V ème République ? « La loi est votée par le Parlement », article 34 de la Constitution. Il s’agit ici de la principale activité de cette institution, « faire la loi ». Aux termes de l’article 24 de la Constitution de 1958, le Parlement est composé de deux chambres, l’Assemblée Nationale et le Sénat. Il s’agit d’un bicamérisme inégalitaire, notamment lors du vote des lois : en cas de désaccord entre les deux chambres, l’Assemblée Nationale aura le dernier mot, sauf pour les lois constitutionnelles et certaines lois organiques. En 1958, les constituants ont voulu mettre un terme à la dérive vers le régime parlementaire, qui avait caractérisé la IIIème et la IVème République. La hiérarchie des pouvoirs a donc été modifiée, au profit de l’exécutif, et au détriment du Parlement. Il en résultera, sous la Vème République, une forte rationalisation de la procédure législative. Bien que le Parlement continue à voter les lois, il s’agit en réalité de lois d’origine gouvernementale, dans plus de 90% des cas (contre 70% sous la IVème République). Nous pouvons alors nous demander si la loi est véritablement l’œuvre du Parlement sous la Vème République. Pour ce faire, nous étudierons, dans une première partie, l’importance du Gouvernement tout au long de la procédure législative puis nous nous intéresserons aux prérogatives dont il dispose pour s’opposer aux parlementaires. I. Une rationalisation de la procédure législative, au profit du Gouvernement… Conformément à l’article 39 de la Constitution, l’initiative des lois appartient « concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement ». Lorsque le texte émane du chef du Gouvernement, on parle de « projet de loi » ; lorsqu’il émane des parlementaires, on parle de « proposition de loi ». Le cheminement suivi ne sera pas le même, au début de la phase d’élaboration de la loi. A. Au niveau de l’élaboration de la loi : L’article 39 alinéa 2 de la Constitution prévoit que les projets de loi doivent faire l’objet d’un double examen, par le Conseil d’état, puis par le Conseil des ministres. Les propositions de loi, quant à elles, font l’objet d’un examen de recevabilité, examiné par rapport aux articles 40 et 41 de la Constitution, et opéré après le dépôt des textes sur l’un des bureaux du Parlement. Un examen en commission est ensuite prévu, pour le projet de loi comme pour la proposition de loi. Les textes sont ensuite étudiés au Parlement, selon leur inscription à l’ordre du jour : cette inscription est parfois difficile à obtenir pour les propositions de loi car, dans un souci de rationalisation du travail parlementaire, c’est le Gouvernement qui fixe l’ordre du jour prioritaire. Il y inscrit ses projets de loi, ainsi que les propositions de loi qu’il a acceptées (article 48 de la Constitution). Les propositions des parlementaires peuvent figurer à l’ordre du jour « complémentaire », c'est-à-dire ce qui reste une fois les priorités du Gouvernement épuisées. Cependant, cet ordre du jour est rarement utilisé pour voter des lois. Par conséquent, les parlementaires, ayant peu d’espoir de voir leurs propositions examinées, ne sont pas incités à exercer leur pouvoir d’initiative des lois, malgré la révision constitutionnelle du 4 août 1995 : une séance par mois doit être réservée à un ordre du jour fixé par les parlementaires eux-mêmes. En outre, un décalage important apparaît concernant les textes pris en compte et ayant débouché sur la promulgation d’une loi : pour la période 1997-2002, 784 projets de loi ont été pris en compte, et 351 ont été adoptés, contre 5103 propositions de lois, et seulement 81 adoptés. Un certain nombre de lois sont donc prises sur l’initiative du Gouvernement. Nous allons maintenant étudier l’influence qu’a le gouvernement dans la phase d’adoption de la loi. B. Au niveau de l’adoption de la loi : Dans cette 2ème phase, le Gouvernement dispose d’une influence conséquente sur le déroulement de la procédure législative. Le droit d’amendement, autrement dit le droit de proposer la modification du texte inscrit à l’ordre du jour d’une assemblée, est un droit fondamental qui, selon l’article 44 de la Constitution, appartient aux parlementaires et au Gouvernement. Bien qu’il reste encore largement exercé, le droit d’amendement des parlementaires a été fortement limité par la Constitution de 1958. En effet, l’article 44 alinéa 2 énonce que le Gouvernement est en mesure de s’opposer à « l’examen de tout amendement qui n’a pas été antérieurement soumis à la commission », jusqu’au dernier stade de la procédure législative. De plus, le Gouvernement peut déposer autant d’amendements qu’il le souhaite. L’irrecevabilité des articles 40 et 41 de la Constitution peut également être opposée aux amendements parlementaires. En outre, le Gouvernement peut, en cas de désaccord entre les deux chambres, intervenir par le biais de la commission paritaire mixte, et du dernier mot de l’Assemblée Nationale. En effet, le Premier ministre peut provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire, en vertu de l’article 45 de la Constitution. Cette commission est composée de sept sénateurs et sept députés, désignés de manière à permettre la représentation de l’opposition. Elle a pour mission de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion. Le texte qui en résulte peut être soumis, ou non, par le Gouvernement pour approbation aux deux assemblées. Si la procédure échoue, le Gouvernement peut demander à l’Assemblée Nationale de statuer définitivement, ce qui lui permet d’éviter l’opposition du Sénat. Le mécanisme opéré en cas de désaccord est donc totalement orchestré par le Gouvernement, la commission mixte paritaire étant considérée comme un « élément supplémentaire de rationalisation de la procédure législative au profit du Gouvernement ». Nous avons donc étudié dans quelles mesures il était possible de parler d’une rationalisation de la procédure législative. Nous allons maintenant nous intéresser aux prérogatives dont dispose le Gouvernement pour contrer les parlementaires. II. Les prérogatives du Gouvernement contre les parlementaires : Outre la maîtrise de l’ordre du jour et la possibilité de réunir la commission mixte paritaire, le Gouvernement dispose de nombreux moyens pour contrer ou freiner les initiatives parlementaires, ou imposer ses projets. Nous allons, tout d’abord, étudier la plus radicale de ses solutions, puis nous nous intéresserons aux autres prérogatives. A’. L’article 49.3, une arme efficace : Cette procédure, surnommée la « Grosse Bertha », combine question de confiance et motion de censure. Son but étant de faire passer un texte de loi, il s’agit d’une procédure de mise en jeu de la responsabilité gouvernementale, et d’une procédure d’adoption des lois. Le Premier ministre, après délibération du conseil des ministres, peut engager la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée Nationale sur le vote d’un texte de loi. Ceci montre alors qu’il s’agit d’un texte primordial pour le Gouvernement, qui est prêt à prendre le risque de se faire renverser : c’est ce qui arrivera en cas de refus, c'est-à-dire si une motion de censure est déposée dans les 24h suivant l’annonce à l’Assemblée Nationale. Si aucune motion de censure n’est déposée, ou si elle ne recueille pas la majorité requise (la même que pour une motion de censure hors de cette procédure spéciale), le texte de loi est considéré comme adopté, alors même qu’il n’a été ni discuté, ni voté. Cette procédure a été utilisée maintes fois, et le résultat a toujours été l’adoption du texte soumis par le Gouvernement. Elle est donc d’une grande efficacité. Outre cette « artillerie lourde », le Gouvernement dispose de nombreuses prérogatives pour imposer sa volonté et s’opposer aux parlementaires, que ce soit au stade de la discussion, ou au stade du vote. B’. Les autres prérogatives du Gouvernement : Au stade de la discussion, le Gouvernement peut faire usage de plusieurs droits : tout d’abord, le droit d’amendement (article 44 de la Constitution), étudié précédemment. En second lieu, le droit de parole (article 31), qui lui donne le droit d’être entendu dès qu’il le souhaite. Les irrecevabilités sont aussi utilisées, lui permettant de refuser certains amendements contraires aux articles 40 et 41 de la Constitution, ou lorsqu’ils n’ont pas été soumis à la commission (en vertu de l’article 44). Le Gouvernement peut également retirer ses projets de loi jusqu’à leur adoption par le Parlement, et ceci à tout moment, alors que les propositions de loi ne peuvent être retirées qu’avant l’adoption en 1ère lecture. Le Gouvernement peut, enfin, provoquer l’accélération de la discussion, en demandant (en 1ère lecture, et avec la commission) un débat restreint, ou un vote sans débat, procédures au cours desquelles les moyens utilisés par les parlementaires pour tenter de retarder l’adoption d’un texte ne peuvent être utilisés (renvoi en commission, question préalable, exception d’irrecevabilité). Le Gouvernement peut également, en cas d’urgence sur le vote d’un projet ou d’une proposition de loi, réunir une commission mixte paritaire après une seule lecture par les chambres, au lieu de deux. Au stade du vote, la solution majeure, mise à part l’article 49 alinéa 3, est le « vote bloqué ». Cette procédure, présente à l’article 44 alinéa 3 de uploads/Politique/ la-loi-est-elle-l-oeuvre-du-parlement-sous-la-veme-republique.pdf
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- Publié le Apv 28, 2022
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