LA RUSSIE INQUIÉTANTE DE POUTINE Après près de quinze ans d'un pouvoir de plus
LA RUSSIE INQUIÉTANTE DE POUTINE Après près de quinze ans d'un pouvoir de plus en plus personnel et autoritaire, retour sur le parcours et les méthodes du nouveau Tsar. Un livre numérique reprenant les meilleurs reportages et analyses de nos spécialistes. Table des matières ▪ Couverture ▪ La Russie inquiétante de Poutine ▪ Table des matières ▪ A la recherche du père patrie ▪ Aux ordres ▪ Le dur qui dure ▪ HISTOIRE D'UNE PRISE DE POUVOIR ▪ La Tchétchénie, rampe de lancement ▪ Une mise au pas implacable du contre-pouvoir ▪ Anna Politkovskaia, la vérité assassinée ▪ UNE FAUSSE SORTIE ▪ Medvedev, président sans vrai pouvoir ▪ Claque électorale surprise pour le parti du chef ▪ Quand la Russie se mutine contre Poutine ▪ La machine Poutine met de l’huile dans ses truquages ▪ «Un président, c’est un bon manager» ▪ VERROUILLER ET RÉPRIMER ▪ Pussy Riot, les chattes qui chatouillent la Russie ▪ Mordovie, la privation à tout bout de camp ▪ Zara, huit ans dans les camps de Poutine ▪ Les ONG russes dans le collimateur de Poutine ▪ En Russie, direction rétrograde ▪ Un bon business de Russie et Paris ferme les yeux ▪ Kasparov: «La peur est la dernière ligne de défense du régime» ▪ La tactique de l'indulgence 4/126 A la recherche du père patrie ANALYSE. Pour l'opinion russe, Poutine a su restaurer l'orgueil national et améliorer le quotidien. Son autoritarisme affole les occidentaux et l'économie stagne mais rien ne semble ébranler son pouvoir. Par Hélène DESPIC-POPOVIC (Texte inédit) A son arrivée au pouvoir, d'abord comme Premier ministre en 1999, puis comme président en 2000, Vladimir Poutine était un inconnu. Aujourd'hui, quinze ans et trois mandats plus tard, la Russie ne connait plus que lui. Qu'il pilote un avion de chasse, pose à cheval torse nu, commande un sous- marin, chasse l'ours ou le tigre, pêche un brochet de 20kg, terrasse un adversaire au judo, ou joue du piano, Poutine s'est bâti une image de surhomme, viril et sportif, et d'homme accompli, un idéal dont le but est de persuader les Russes que la patrie est dans de bonnes mains. Adoubé par son prédécesseur, Boris Eltsine, Poutine se devait de faire oublier le côté sombre et gris qu'évoquait son passé d'espion du KGB dans cette Allemagne de l'est d'avant la chute du Mur. Il fut servi par les circonstances. Bon nombre de Russes s'étaient sentis ridiculisés par un Eltsine vieillissant, trébuchant à sa descente d'avion comme l'ivrogne cardiaque qu'il était devenu. Ils s'étaient crus trompés par un dirigeant finalement jugé mou de n'avoir pas pu - ou pas su - faire entendre la voix de la Russie contre l'Otan au Kosovo et d'avoir cédé devant les indépendantistes en Tchétchénie. Poutine sera donc l'anti-Eltsine. Le concurrent et non l'ami des occidentaux, de Bagdad à Damas, en passant par Tbilissi ou Kiev, le champion de la puissance russe. Une phrase a suffi pour en faire aux yeux des hommes un nouveau héros russe : «J'irai buter les Tchétchènes jusque dans les chi- ottes». Aux femmes, il offre un profil érotisé. Devient l'objet d'une nouvelle chanson de geste à la gloire de l'homme idéal: «Je veux un mec comme Poutine/ Un qui est plein de force/ Un qui ne boirait pas/ Un comme Poutine qui ne me ferait pas de peine/ Un comme Poutine qui ne s'enfuirait pas/ Je l'ai vu hier aux infos/ Il disait que la paix est à notre portée/ Avec un mec comme lui/ On est bien chez soi et chez les amis...» Poutine s'est contre toute évidence défendu d'inciter à un nouveau culte de la personnalité. Mais il aime qu'on l'aime. Et surtout il n'aime pas qu'on ne l'aime pas. Les premiers à s'en être rendus compte sont les 6/126 marionnettistes des Koukly, une émission de la chaine NTV sur le modèle des Guignols français, suspendue en 2000 après avoir présenté Poutine comme un nain. Nez morveux. La Russie de Eltsine était un pays ouvert. On y trouvait toujours un conseiller du président prêt à vous expliquer sa stratégie, qu'elle soit politique ou économique. Celle de Poutine est fermée. En 2008, un journal qui avait eu l'audace de prêter au président une liaison avec une gym- naste a même dû mettre la clé sous la porte. Poutine avait à l'époque réfuté ces rumeurs en mettant en garde ceux «qui s'ingèrent dans la vie des autres avec leur nez morveux et leurs fantasmes érotiques». Il annoncera lui-même son di- vorce cinq ans plus tard. Histoire de bien faire comprendre qu'il est le seul maître de son image. S'il est convenu de dire que Poutine a mis du baume au coeur de l'orgueil russe, réconcilié vieux communistes et néo-libéraux autour de symboles comme l'hymne soviétique avec un texte dépoussiéré de ses références idéologiques, il faut aussi dire qu'il a mis du beurre dans les épinards de Monsieur Tout-le-Monde. A l'époque de Boris Eltsine, salaires et retraites étaient versés très irrégulièrement. Avec Poutine, cela change, même si pensions et traitements restent bas. L'expulsion déguisée, puis l'arrestation d'oligarques re- présentatifs de la période Eltsine, Vladimir Goussinski, Bor- is Berezovski, en exil dès 2000, puis Mikhaïl Khodorkovski, 7/126 arrêté en 2003 puis envoyé en prison où il restera dix ans, sont cependant perçus à tort comme un tournant vers plus d'égalité. Il faudra des mois pour que l'opinion comprenne que les proches de Poutine sont à leur tour autorisés à s'enrichir. Grâce à un pétrole à plus de cent dollars (contre 13 à l'époque Eltsine), la fortune des milliardaires russes est décuplée en dix ans. Poutine lui-même, dénoncent d'anciens proches, serait devenu immensément riche. L'argent du pétrole et du gaz, une arme redoutable aux mains du monarque qui fera chanter l'Europe, et plier l'Ukraine, ne servira malheureusement pas à un développe- ment durable du pays. La modernisation tarde toujours. Et le rouble baisse, entraîné dans sa chute par le ralentisse- ment de la croissance (1,4% prévus pour 2013 contre 3,4% en 2012 et 4,3% en 2011) d'une économie gangrenée par la corruption. C'est à elle que le parti de Poutine, Russie Unie, devra d'être surnommé le «parti des escrocs et des voleurs» lors des législatives contestées de décembre 2011. Sur le plan de l'idéologie, Poutine ne renouera pas avec les soviets. Il leur substitue une sorte de paternalisme autoritaire qui s'appuie sur l'orthodoxie d'une part et le rejet de tout ce qui vient de l'étranger de l'autre. L'avant-gard- isme artistique est de nouveau réprouvé, comme le montre la condamnation à deux ans de prison de deux jeunes femmes appartenant au groupe Pussy Riot, qui avaient osé chanter une prière anti-Poutine dans la grande cathédrale 8/126 orthodoxe de Moscou. L'homosexualité est perçue comme un mode de vie importé, étranger aux coutumes locales. Et les ONG des droits de l'homme, y compris les plus presti- gieuses, qui ont consacré leur existence à recenser les crimes du stalinisme et les errements de la politique caucasienne du nouveau pouvoir, sont priées de se faire en- registrer comme «agents de l'étranger». A l'étranger, l'essentiel est d'affirmer la puissance russe. Poutine a réussi, à la faveur de la crise syrienne, à ramener la Russie sur l'échiquier international, d'où elle avait été pratiquement exclue depuis l'intervention américaine en Irak, et l'enchaînement des printemps arabes. Dans ce qu'il considère comme sa zone d'influence, son «étranger proche», autrefois soviétique, il a réussi à empêcher ses voisins de se rapprocher de l'Otan, quitte à faire une guerre comme en Géorgie en 2008. Mais même la puissance de l'Union Soviétique s'était révélée être un colosse aux pieds d'argile. Alors, à chaque fois qu'un attentat réveille dans la douleur une ville endormie de Russie, il n'est pas inutile de se demander si la pacification du Caucase russe, réalisée dès l'arrivée de Poutine, par une guerre impitoyable en Tchétchénie, n'est pas finalement qu'un trompe-l'oeil. 9/126 Aux ordres EDITORIAL. Il ne fait pas bon s’opposer à Vladimir Poutine. Président pour la troisième fois, l’ancien colonel du KGB, qui ne supporte aucune contestation de son pouvoir absolu, gouverne désormais par le contrôle et la répression. Par François SERGENT (Paru le 19 juillet 2013) Condamné à cinq ans de colonie pénitentiaire, Alexeï Navalny, le principal opposant au président russe, ne pourra se présenter ni à la mairie de Moscou ni à la prochaine présidentielle. Les Pussy Riot coupables de s’être ri du tsar sont dans des camps de travail ; Khodorkovski, oligarque devenu critique impitoyable du régime, survit en Sibérie sous le coup de condamnations aussi injustes que répétées. D’autres, journ- alistes, activistes, militants des droits de l’homme, ont été tués par les hommes de main du régime ou trans- formés en légumes. Les ONG considérées comme des «agents de l’étranger» par une loi ad hoc sont plombées. Dans la Russie de Poutine, la justice comme la police, les médias comme la Douma, sont aux ordres du Kremlin comme aux bonnes heures de l’Union soviétique. La Russie n’est pas un Etat de droit. Vladimir Poutine est pourtant reçu par François Hollande comme un uploads/Politique/ libe-la-russie-de-poutine-pdf 1 .pdf
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- Publié le Jul 03, 2021
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