Non, Monsieur Denis ! On ne peut plus accepter vos amalgames Nous avons fait al
Non, Monsieur Denis ! On ne peut plus accepter vos amalgames Nous avons fait allusion dans notre bulletin précédent à « l’affaire Gréa », du nom de ce prêtre lyonnais forcé à quitter un ministère très apprécié parce qu’il voulait se marier. La notoriété de l’intéressé a fait gonfler la polémique et l’hebdomadaire La Vie en a même fait son éditorial du 21 février. Mais le ton du journaliste et ses arguments ont choqué une fois de plus pas mal d’entre nous, et une petite communauté de croyants de Montpellier lui a écrit cette lettre avec laquelle nous nous sentons bien d’accord ! (P.C.) Monsieur Jean-Pierre Denis, Nous avons bien lu votre éditorial du 23 février 2017. Nous, c’est-à-dire un groupe composé d’abonnés de l’hebdo La Vie et de non-abonnés de la région de Montpellier, un petit groupe de chrétiens qui se retrouvent régulièrement tous les deux mois depuis au moins 8 ans pour partager leur foi, leurs espérances, leurs engagements dans la vie de tous les jours. Et nous avons décidé de vous faire part de nos réflexions. Dans La Vie, un article sur un prêtre qui s’en va ? C’est presque courageux ! Et pas n’importe quel article : l’éditorial carrément ! Très bon signe que cela… Las ! Notre impression favorable se dissipe dès les premières lignes de lecture ! « Un homme quitte sa femme. Une femme quitte son mari. Un prêtre quitte le sacerdoce. » Pourquoi donc cette analogie avec les couples qui se séparent ? Un prêtre qui s’en va ne quitte personne, ni Dieu, ni humain ! Et suit un amalgame entre fidélité, sincérité, obligation, individuation… vraiment peu pertinent ! Est- ce sur le même plan « quitter son conjoint et quitter le sacerdoce » ? On ne quitte pas Dieu lorsque l'on quitte le célibat; le sacerdoce n'est pas une personne, c'est un état. Dans le cas du couple, il y a une notion d'amour qui n'existe pas dans l'engagement au sacerdoce et c'est là toute la différence. Le sacerdoce est un service des communautés. L'engagement au célibat dans l'Église se situe dans le cadre d'une règle ecclésiale : « l'amour de Dieu » est indépendant de cet engagement. Dans l'évangile, on trouve cette phrase « Heureux ceux qui ont tout quitté pour me suivre » ; cela peut être vécu dans la vie de chacun sans le lier à une loi du célibat et à un engagement dans l'Église qui n'existait pas dans l'évangile. Un peu plus loin vous racontez comment David Gréa, plein de qualités missionnaires, a obtenu de sa hiérarchie ecclésiale une attention toute particulière : le cardinal Barbarin lui a ménagé un rendez- vous avec le pape. Il y aurait donc les bons, les très bons qui ont droit à un rendez-vous papal et les autres qui ne le méritent pas ! Mais les dizaines, les centaines, les milliers de prêtres qui ont, eux aussi, consacré l’essentiel de leur temps, de leurs compétences, de leur force à servir en église, et qui s’en sont allés, avec discrétion en général, dans la souffrance souvent ? Eux aussi, à leur mesure, avaient « révolutionné leur paroisse, suscité des conversions, parlé aux périphéries », en dépit même du conservatisme et des peurs de la hiérarchie cléricale. Ont-ils au moins été accompagnés de cette parole : « Soyez-en remerciés ! » ? Pas souvent ! Ils ont le plus souvent entendu ce qui sonnait comme un refrain bien aligné : « Partez le plus loin et le plus vite possible ! », et sans aucun pécule d’accompagnement, eux qui ne roulaient déjà pas sur l’or durant leurs années de Ministère ! Vous le savez bien. Mais qui s’en est offusqué ? Pourquoi l’Église catholique condamne-t-elle encore ses ministres ordonnés à une obligatoire mutilation affective, sexuelle dans une société où ce sacrifice est très largement jugé inadéquat, incompris, incongru, quasi ridicule. Cette « croix », inutile à notre époque, pourrait disparaître. Les chrétiens, les paroissiens, et la société en général, sont très majoritairement prêts à accueillir des prêtres, des curés mariés, et en même temps leurs confrères qui souhaitent rester dans le célibat. Les exégètes pensent aujourd’hui que la plupart des Douze et des disciples étaient mariés ; ne pas l’être était mal apprécié dans la société juive de Jésus. Pourquoi donc cette singularité qui n’a rien à voir avec l’évangile ? Les autres églises sont-elles moins chrétiennes parce qu’elles ordonnent des hommes mariés ? Bien sûr, le mariage des prêtres ne solutionnerait pas tout, de la crise des vocations à la pédophilie. Mais il n’aurait pas plus d’inconvénients que le célibat imposé. « L'ascétisme sexuel et affectif est une croix… une blessure » Si le célibat est vécu quotidiennement comme cela, il vaut mieux le supprimer car l'évangile nous appelle à la joie, au bonheur, au plaisir et non pas à « se faire mal ». Le célibat doit être vécu comme un épanouissement de sa personne dans cet état de vie, et non pas comme une blessure. Nous rencontrons des croix dans notre vie et c’est le lot de tous, encore que certaines d’entre elles, les plus lourdes comme la maladie grave ou la perte d’un enfant, épargnent les célibataires ; mais de là à les rechercher et les choisir pour vivre l'évangile : non ! Il faut en finir avec cette théologie de la mortification volontaire. Si des prêtres ne sont pas heureux dans leur choix de vie, mieux vaut qu’ils en tirent les conséquences. « Le célibat sacerdotal demeure un pilier que l'on ne peut abattre sans menacer l’édifice… » Un pilier ? Diable ! Si c'était le cas, cela voudrait dire que cette institution n'est pas très solide et qu'il vaut mieux s'en tenir à l’écart ! Nous qui pensions que le pilier fondamental, c’était l’amour fraternel universel ! Le célibat sacerdotal, un pilier ? Nous n’avions jamais entendu cela ! Et surtout assorti de la menace de voir s’écrouler l’édifice en cas de changement de la règle ! Pendant 11 siècles, (c’est long 11 siècles !) l’édifice a pourtant bien tenu sans ce pilier !! Longtemps, la diffusion de la Bonne nouvelle s'est faite sans lui ! Remettons les choses à leur place : aujourd'hui, dans la structure actuelle de l'église, il occupe une place excessive au détriment des laïcs et surtout des femmes. Il est assez regrettable que ce qui semble vouloir caractériser aujourd’hui l’église catholique romaine, comme le célibat des prêtres et l’absence de femmes dans les organes de responsabilité et les ministères dits « ordonnés », ne doive rien à l’évangile. « Je crois que je préférerais que David Gréa se marie et reste curé de Lyon-Centre… » Que voilà une bonne parole ! Nous partageons votre préférence et la hiérarchie devrait réfléchir à la manière dont elle se tire une balle dans le pied en rejetant ces hommes de conviction qui ont généreusement donné de leurs meilleures années de vie pour dire, en la partageant, cette Bonne Nouvelle. Mais nous regrettons par contre la suite de votre phrase : David Gréa serait-il devenu subitement « perdu pour la mission » ? Chrétiens, levez- vous ! Voici une injure qui vous est faite et elle est de taille ! Pourquoi le concept de Peuple de Dieu a-t-il encore tant de difficulté à percer ? L’une d’entre nous écrit : « Nous tous qui sommes « peuple de dieu » avons le devoir et la mission de diffuser la Bonne Nouvelle de Jésus. L'amour que David portera à sa femme l'empêchera-t-il de penser aux autres ? Personnellement, je ne suis ni prêtre (l'église ne veut pas de la gente féminine dans ses structures) ni religieuse, mais en tant que laïque baptisée, je me suis fait un devoir, certes, mais surtout accompagné d’une grande joie, d’un épanouissement de ma personnalité, de militer et de prendre des responsabilités dans les mouvements d'action catholique pour rencontrer les autres jeunes de chez moi, mes frères, et progresser avec eux. J'ai aimé très fort mes parents, ma famille, ces jeunes avec qui on militait et plus tard mon mari : quel obstacle y aurait-il à conjuguer les deux ? » Il se trouve que nous connaissons quelques-uns de ces prêtres qui ont ainsi été exclus de leur ministère. Ils ont bien souvent gardé au cœur ce souci du vivre ensemble, de la fraternité, de la solidarité, du partage au nom de Jésus qui bâtissent un autre monde. Ne restreignons pas « la mission » à cette dimension structurelle autrefois définie par « Hors de l’église, point de salut ! » Par contre les nombreux départs de prêtres qui se chiffrent par centaines de milliers, dit-on, à l’échelle mondiale, ne peuvent pas être considérés comme une succession de faits divers, de cas individuels. C’est une situation globale qui impose à la hiérarchie et à toute la communauté des chrétiens une prise en compte, une analyse, une réflexion fondamentale et le courage de repenser traditions et règlements. Non, le célibat sacerdotal n’est uploads/Religion/ 564-lettre-a-j-p-denis-pdf.pdf
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- Publié le Aoû 23, 2021
- Catégorie Religion
- Langue French
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