COLLÈGE DE FRANCE PUBLICATIONS DE L'INSTITUT DE CIVILISATION INDIENNE Diffusion

COLLÈGE DE FRANCE PUBLICATIONS DE L'INSTITUT DE CIVILISATION INDIENNE Diffusion De Boccard PARIS Fascicule 66 Abhinavagupta LA LUMIÈRE SUR LES TANTRAS chapitres 1 à 5 du Tantraloka traduits et commentés par Lilian Silbum t et André Padoux LA LUMIÈRE SUR LES TANTRAS Le Tantraloka d'Abhinavagupta, chapitres 1 à 5 COLLÈGE DE FRANCE PUBLICATIONS DE L'INSTITUT DE CIVILISATION INDIENNE Série in-8° Fascicule 66 Abhinavagupta LA LUMIÈRE SUR LES TANTRAS chapitres 1 à 5 du Tantrâloka Traduits et commentés par Lilian Silhurn t et André Padoux Deuxième tirage révisé PARIS 2000 Dépositaire exclusif : ÉDITION-DIFFUSION DE BOCCARD 11, rue de Médicis - 75006 Paris La photo de couverture a été achetée à Monsieur Enrico Isacco. Elle représente Bhairava, terre cuite du Népal, 15e siècle. © Collège de France - Paris ISBN: 2-86803-066-1 PRÉFACE Ce volume est un signe, parmi d'autres, de la présence toujours vivante de Lilian Silburn. Elle s'était attachée pendant des années à la traduction du Tantraloka avec le commentaire de Jayaratha. Elle avait étudié les douze volumes de ce vaste traité. Elle l'avait lu et discuté, au Cachemire, avec le swami Lakshman Joo, auprès duquel elle avait, au cours des ans, passé de nombreux mois. Elle s'est souvent référée, dans ses travaux, à ce texte d'Abhinavagupta, ainsi qu'au commentaire qu'en avait fait, quel- que deux siècles plus tard, Jayaratha. C'était une des sources de sa pensée comme de sa recherche. Elle y trouvait analysés ou décrits des états et des expériences qu'elle connaissait. Lilian Silburn souhaitait depuis longtemps en publier une traduction française. Mais l'ouvrage d' Abhinavagupta est d'une vaste étendue et de lecture difficile, et le commentaire de Jayaratha, indispensable pour comprendre ces stances souvent obscures, est diffus, parfois peu clair ou, comme elle le disait elle-même, indige.ste. D'où l'idée de ne donner en traduction que le Tantraloka lui-même en l'accompagnant d'explica- tions qui, tout en s'appuyant sur le commentaire de Jayaratha et en en citant des passages, seraient plus claires et surtout plus appropriées au public actuel. Mais traiter ainsi tout le Tantraloka eût été une œuvre considérable, supposant des références à des tantras souvent devenus inaccessibles et, qui plus est, amenant à exposer des pratiques rituelles et de yoga complexes ainsi que des spéculations ésotériques déroutantes pour qui ne connaît pas le monde social, religieux et intellectuel où vivait, au Cachemire, il y a quelque mille ans, Abhinavagupta. Plus importante, essentielle même, était la description que donnait ce traité des voies que ron peut suivre vers la libération. L'être humain, en effet, ne change guère dans son fond et ces voies, ces ouvertures sur la Réalité ultime sont de tous les temps. Ce ne furent donc que les cinq premiers chapitres du Tantraloka que Lilian Silburn décida de traduire et de présenter en français: les chapitres 2 à 5 traitant des quatre voies, précédé du chapitre 1 qui est une intro- duction générale à l'ensemble de l'ouvrage. Ce travail, elle ne l'entreprit toutefois qu'en 1990 (après avoir achevé une traduction des Spandaka- rika), à un moment où sa santé déclinait et où, surtout, sa vue faiblissait 8 LA LUMIÈRE SUR LES TANTRAS considérablement. L'œuvre se fit dès lors en commun, sur la base d'une traduction qu'elle avait précédemment notée sans l'avoir mise au point et qui fut reprise, examinée et discutée sous sa direction, puis annotée et saisie sur ordinateur. Le chapitre 3, qu'André Padoux avait eu an térieu- rement l'occasion de traduire, fut revu avec elle. Il fallait encore rédiger l'introduction, ajouter un index et préparer le livre pour l'impression : Lilian n'était plus là pour le faire. Nous nous sommes donc chargés de ce travail (qui aura pris plus de temps qu'on ne l'avait prévu !), en nous efforçant de rester fidèles à l'esprit de son. œuvre. Ce livre n'est assuré- ment pas ce qu'il eût été si elle avait pu le mener elle-même à bien. Il ressort, par exemple, des notes qu'elle a laissées qu'elle voulait, à l'occa- sion du Tantrâloka, « présenter un exposé complet de la mystique telle qu'elle se trouve dans [ce traité] »,ce que nous ne pouvons guère faire à sa place. Elle pensait aussi que« vu son importance, la grâce méritait d'être traitée d'emblée » car elle explique la progression dans les voies : cela supposait une étude détaillée du chapitre 13, qui n'est envisagé ici qu'assez brièvement. Il va de soi que nous avons tenu compte autant que nous le pouvions des indications et des vœux de Lilian Silburn, que nous connaissions, mais dans la mesure seulement de nos capacités. Du moins le travail accompli pour achever cet ouvrage aura-t-il été pour nous une œuvre d'attachement affectueux et de fidélité et, comme nous le disions en commençant, le témoignage d'une continuité. J. CHAMBRON A. PADOUX PRINCIPALES ABRÉVIATIONS UTILISÉES BhG ÏPK ÏPV jfip Kir KSTS MatPar MM MVT MVV NT PHr PS PTlv PTV Rau SD SpK SS ssv SvT TA TAY TS VBh Bhagavadgfüi Ïsvarapratyabhijfüikârika d 'U tpaladeva Ïsvarapratyabhijiiavimarsinï d 'Abhinavagupta jfiiinapiida Kira9agama Kashmir Series of Texts and Studies Matangaparamesvaragama Maharthamafijarï Malinïvijayottaratantra Mâlinîvijayavarttika d' Abhinavagupta Netratantra Pratyabhijfüihrdaya de K~emarâja Paramarthasara ParâtrïSikalaghuvrtti d'Abhinavagupta Paratrirpsikâvivaral).a d 'Abhinavagupta Ra uravagama Sivadr~ti de Somânanda Spandakarika Sivasütra Sivasütravimarsinï de K~emarâja Svacchandatantra Tantrâloka d'Abhinavagupta Tantrâlokaviveka: commentaire du TA par Jayaratha Tantrasara d' Abhinavagupta Vijfianabhairava INTRODUCTION Le Tantràloka, « La Lumière sur les Tantras», est l'œuvre la plus étendue d' Abhinavagupta qui, comme on le sait, vécut au Cachemire vers la fin du 1 oe et au début du 11 e siècle de notre ère. Il fut sans conteste un des plus grands esprits de l'Inde. Esthéticien, philosophe, il avait la vaste culture d'un brahmane érudit : la connaissance des «membres auxiliaires du Veda», les vedânga (grammaire, poétique, exégèse des rites, etc.), comme celle des systèmes traditionnels de pensée, les darfana. Vivant au Cachemire, où le bouddhisme du Grand Véhicule avait brillé d'un vif éclat, il connaissait également bien la pensée bouddhique, celle notamment de l'idéalisme vijfianavadin, à laquelle il se réfère souvent dans ses travaux philosophiques. Mais Abhinavagupta était sivaïte et d'une tradition tantrique non dualiste, et c'est cette forme de sivaïsme que - sans ignorer d'autres systèmes- il expose dans le vaste ouvrage qu'est le Tantràloka (TA) dont nous présentons ici les cinq premiers chapitres ou« journées» (ahnika). N'oublions pas, enfin, car c'est essen- tiel, qu'Abhinavagupta avait atteint les sommets de la vie mystique: sa description des voies de la libération est toujours éclairée à la lumière d'une expérience profonde, vécue. Sans doute n'est-il pas nécessaire de revenir ici sur Abhinavagupta lui-même. En effet, s'il fait partie du petit nombre de penseurs indiens anciens qu'il est possible de situer avec quelque précision dans le temps, puisqu'il avait indiqué la date de composition de trois de ses œuvres 1, nous ne savons cependant presque rien de sa vie. On a d'ailleurs déjà dit ailleurs 2 le peu que l'on puisse savoir sur lui et sur sa famille qui, originaire du centre de l'Inde du nord 3, vint au Cachemire au se siècle, invitée par le roi Lalitaditya. 1. L'Ïsvarapratyabhijfüivivrtivimarsinï en 990-991, le Kramastotra et le Bhairavastotra en 1014-1015. 2. Notamment dans l'introduction de la traduction du Paramarthasara (de Boccard, 1957) et celle des Hymnes de Abhinavagupta (Institut de Civilisation Indienne, 1970). 3. madhyadefo (TA 37.38), c'est-à-dire la région gangétique centrale ou au sud de celle-ci, qu'Abhinavagupta décrit comme nilJse~aSiistrasadanam, «patrie de toutes les Ecritures», indication peut-être intéressante quant à la région d'origine des textes tantri- ques sivaïtes. 12 LA LUMIÈRE SUR LES TANTRAS Notons pourtant quant au TA que, selon ce qu'il nous dit à la fin de cet ouvrage, il le composa pour répondre au souhait de son frère cadet Manoratha et à la demande de quelques jeunes faiva qui se firent ses disciples (TÂ 37.64). Il ne le rédigea toutefois pas chez lui, mais auprès de l'un de ces disciples, nommé Mandra, chez qui il s'installa pour y trouver le calme, loin des agitations du monde, en un lieu où tous «jusqu'aux enfants et aux bouviers» (aba/agopamapi - ibid. 72) se consacraient à l'adoration de Siva Mahesvara. Outre ses disciples, amis ou parents de Mandra, il y avait là, pour veiller sur lui, une cousine de Mandra, Vatsalikâ, qui était, nous dit-il, « la patience même, la compassion incarnée, un joyau de toutes les vertus » (74). C'est ainsi, dit-il encore (ibid. 82-83), que,« dans la maison mise à sa disposition par Vatsalika, se concentrant, il attacha sa réflexion et son intelligence sur les nombreux anciens traités, en en recueillant l'essence. Ainsi composa-t-il cette œuvre riche de sens où la vérité sur les tantras est exposée selon la tradition et la logique: qui bénéficie d'une telle lumière (iiloka) s'orientera sans peine parmi les actions rituelles ». La tradition qui était celle d' Abhinavagupta, comme les différents systèmes auxquels il se réfère ou dont il reprend certaines ccnceptions dans le TA et dont on décrira plus loin les caractéristiques, font partie d'un ensemble sivaïte plus vaste, tantrique par son idéologie comme par ses pratiques. Sans doute a-t-il existé un sivaïsme non tantrigue uploads/Religion/ abhinavagupta-la-lumiere-sur-les-tantras-chapitres-1-a-5-du-tantraloka-silburn-and-padoux-edition-pdf.pdf

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  • Publié le Mar 09, 2021
  • Catégorie Religion
  • Langue French
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