INSTITUT SAINT EUGENE DE MAZENOD THEOLOGAT KINSHASA / KINTAMBO COURS D’HOMILETI
INSTITUT SAINT EUGENE DE MAZENOD THEOLOGAT KINSHASA / KINTAMBO COURS D’HOMILETIQUE Par Prof. Abbé Jacques-Marie NZIR NYANGA Notes préparées à l’intention des Etudiants de la 4ème année de Théologie. Année Académique 2009-2010. 2 INTRODUCTION GENERALE Préambule Communiquer, interpréter et expliquer la Parole de Dieu, fait partie du ministère de la Parole au même titre que la catéchèse, qui est la pédagogie de la foi. Cette explication de la parole de Dieu se nomme tantôt « prédication », tantôt « homélie ». Elle soulève une série de questions. En liturgie, elle soulève non seulement le problème de l’explication, mais aussi celui de l’éloquence et de l’efficacité dans l’homélie, de sa force locutrice, élocutoire et illocutoire. C’est ce qu’on peut appeler « le problème homilétique ». Si dans le passé ce problème se posait en termes purement et simplement de l’éloquence sacrée, il se pose actuellement comme une question de la capacité pour l’homélie d’être efficace et opératoire, et surtout de susciter des conversions permanentes dans les comportements des auditeurs. En effet, jamais la parole de Dieu n’a été autant commentée comme c’est le cas de nos jours. Un peu plus qu’à l’époque du Moyen Âge, beaucoup de prophètes, sous l’appellation de ‘pasteurs’, ‘évangélistes’ ou autres, se sentent investis et se lèvent pour revendiquer le droit d’exercer le « métier de prédicateur ». Ce dernier finit, à peu de choses près, par se présenter comme une profession parmi d’autres. Il ne rentre pas dans notre propos d’examiner l’authenticité de ces mouvements religieux ni la véracité des doctrines qu’ils véhiculent. Ce qui nous préoccupe ici c’est le surgissement d’un certain nombre de questions qui nous hantent par rapport à la responsabilité des ministres de l’Eglise et des fidèles, auditeurs, face à la prédication ecclésiale et liturgique: la parole commentée, répond-elle aux critères d’authenticité, d’orthodoxie et de véracité ? Si elle est herméneutiquement contextualisée, est-elle suffisamment perceptible et efficace ? Qu’est-ce que finalement une homélie ? A quelles conditions peut-elle répondre aux attentes des fidèles, correspondre elle-même aux critères d’incarnation et de corrélation (fidélité à Dieu et à l’homme), et donc être efficace, c’est-à-dire susceptible d’opérer des conversions et de produire des effets manifestes dans les comportements quotidiens ? Les réponses à cette mosaïque des questions constitueront l’essentiel de notre étude consacrée à la prédication ou à l’homélie dans la pratique catéchétique et pastorale de l’Eglise. Pour ce, nous allons avant tout nous étendre sur un long parcours de la tradition sur la prédication, avant d’examiner ce que le deuxième concile du Vatican pense de l’homélie. Nous terminerons notre exposé par quelques lignes conclusives et prospectives. 3 Signification étymologique Le mot homélie vient du grec « homilia », qui signifie « réunion, compagnie, entretien familier. Dans le Nouveau Testament, ce terme est employé au sens d’entretien à propos des disciples d’Emmaüs (Lc 24, 14) et de Saint Paul s’adressant aux chrétiens de Troas après avoir rompu le pain, enfin à propos de Saint Paul et de Félix (Ac 24, 26). Chez les Pères grecs, dès le début du 3ème siècle, Homilia sert à désigner les entretiens sur les Ecritures. Origène l’emploie dans son commentaire sur l’Evangile de Saint Jean et donne lui-même ce nom à ses homélies sur Saint Luc. Saint Athanase utilise ce terme dans son premier discours contre les Ariens (hérétiques) et dans son commentaire sur l’Ancien Testament ou le Nouveau Testament. Du grec, le mot « Homilia » passe en latin grâce à Saint Jérôme. Mais Homilia reste un vocable encore étranger, jusqu’à ce que Saint Augustin lui attribue le sens de « traité populaire » ou « sermon ». C’est cette dernière signification que cela prend en latin1. Définition L’homélie est généralement définie comme étant l’explication, donnée au cours d’une assemblée liturgique, d’un texte de l’Ecriture, lu ou chanté, au cours de la même assemblée sainte. Ce n’est pas une leçon d’exégèse, mais plutôt l’explication et l’application qu’un « pasteur » fait à sa communauté des richesses doctrinales et morales contenues dans la parole de Dieu entendue dans le cadre de la liturgie2. Par contre, l’homilétique est la science de la parole, l’art de prêcher au nom de l’Eglise. En d’autres termes, elle est la science qui a pour objet l’homélie. L’ère homilétique a ses débuts au 19ème siècle avec Walter Kepler. Selon ce dernier, la source et le centre de la prédication est la Sainte Ecriture, alors que l’homélie est la proclamation classique de la foi. Contextes historiques L’office synagogal juif comportait déjà ce système de la lecture biblique : le Seigneur Jésus prit la parole (Lc 4, 16 ; Mc 1, 21), et les apôtres prirent la parole dans les mêmes circonstances (Ac 13, 15). Dans les premiers temps, la liturgie chrétienne a dû employer l’homélie. Le témoignage de Saint Justin dans sa première apologie rapporte ce qui suit : 1 Cf. L. DELLA TORRE, Omelia, dans D. SARTORE – A.- M. TRIACCA (éd.), Nuovo dizionario di liturgia, Rome, Paoline, 1983, p. 923-943 ; R. LE GALL, Dictionnaire de liturgie, p. 131. 2 Cf. A.-M. TRIACCA, Omelia, dans J. GEVAERT( éd.), Dizionario di catechetica, p. 467-469. 4 « Après la lecture faite par les Apôtres, celui qui préside fait un discours pour avertir et exhorter à l’imitation de ces beaux enseignements. » A partir du 3ème siècle, nombreux sont les documents qui nous aident à nous faire une idée précise de l’homélie, au point qu’on peut distinguer au moins trois variétés du « genus homileticum », c’est-à-dire trois espèces d’homélies : homélie proprement dite ; le sermon pour les jours de fêtes ; et enfin l’homélie monastique. Il sied toutefois de rappeler que quand on parle d’homélie, on doit opérer quelques clarifications logiques et terminologiques avec d’autres mots et expressions. Il s’agit de la distinction à faire entre la catéchèse, le kérygme et, bien entendu, l’homélie. La Catéchèse est la transmission vive du dépôt de la foi aux nouveaux membres de l’Eglise, ainsi que la proclamation systématique et organique de la Parole de Dieu pour accompagner la croissance de la personne humaine en vue de sa maturité dans la foi et du développement de sa mentalité de foi et ses attitudes de foi3. Elle constitue ainsi un aspect particulier de l’exercice du Magistère. Il ne faut donc pas en négliger l’importance ni la considérer comme un facteur, sinon accessoire, du moins secondaire de l’enseignement de l’Eglise. Elle est réellement proclamation de la Parole de Dieu, et, en tant que telle, elle fait partie intégrante de la Tradition dont elle est un élément constitutif. Elle possède donc une identité propre qui la caractérise. Le Kérygme est considéré comme l’annonce de la Bonne Nouvelle de la Résurrection. Pris dans sa signification technique, il veut dire la toute première annonce de la Bonne Nouvelle. Les Actes des Apôtres nous en donnent plusieurs exemples avec Pierre, Etienne et Paul (cf. 2, 14-39 ; 3, 34-43 ; 7, 2-53 ; 13, 16-41 ; 17, 22-30). Cette annonce a comme caractéristique première celle d’être une proclamation officielle. La personne qui parle le fait de manière officielle, au nom de Dieu dont il est le héraut. Le kérygme porte en outre sur ce qui concerne l’essence même du mystère, sans développements ni détails, et a pour objet essentiel la Résurrection de Jésus-Christ. L’homélie, par contre, est l’enseignement ordinaire donné à la communauté des fidèles lors d’une assemblée liturgique. Elle est beaucoup plus développée que le kérygme, sans toutefois avoir le même déroulement systématique que la catéchèse. On pourrait même dire qu’elle tend vers un enseignement approfondi. En tout cas, elle suppose que ceux à qui elle s’adresse connaissent le contenu de leur foi. L’homélie est, du reste, en rapport étroit avec la liturgie, par le fait qu’elle trouve son point de départ dans le texte même de 3 Cf. NZIR NYANGA J.-M., La Catéchèse contextualisée au Congo, Kinshasa, Ed. Baobab, 2002. 5 l’Ecriture du jour. On sait combien les « sermons » constituent une partie importante de la littérature antique sur l’homilétique. Qu’on pense par exemple à Saint Jean Chrysostome et à Saint Augustin. Passons sous silence le fait que, au cours des premiers siècles, la prédication ne présentait pas le caractère anarchique que nous constatons de nos jours. L’homélie obéissait à des canons fixes, à des normes établies, comme celles de la liturgie. Chaque homélie avait un contenu bien déterminé ; et on ne pouvait improviser qu’en partant de ces principes. Enfin, il sied de rappeler que l’homélie est aussi plus particulièrement orientée vers des applications morales, pratiques et concrètes. Elle tend vers un approfondissement spirituel, par lequel on propose de faire découvrir aux auditeurs les répercussions que le texte de la Parole peut avoir dans leur vie concrète de chaque jour. Qu’est devenue l’homélie de nos jours ? Quels sont les principes qui la régissent ? Qui doit faire l’homélie ? Comment prêche-t-on ? Quelles sont les modalités didactiques de nos homélies ? Que pensent nos fidèles de nos homélies ? Des normes existent-elles ? Les pasteurs et prédicateurs s’y conforment-ils encore ? uploads/Religion/ cours-d-x27-homiletique-prof-nzir-1011.pdf
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- Publié le Dec 20, 2022
- Catégorie Religion
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