Saint-Simon » s r — - - - - - - - - - - - - - , i . • ' • - ' i ' . . [ ÿ H flg

Saint-Simon » s r — - - - - - - - - - - - - - , i . • ' • - ' i ' . . [ ÿ H flg g fljfc ■ N N Duc de Saint-Simon : L a Cour d e Louis X I I © Introduction par Charles Sarolea T T a r is S J e l s o n , E d i t e u r s 189, rue Saint-Jacques Londres, Êdi »¡bourg, et N ero-York N N Ce qui met tout d’abord les Mémoires de Saint- Simon hors pair, c’est l’intérêt et l’ampleur du sujet ; ce qui revit dans les Mémoires, c’est la monarchie française à son apogée, c’est tout le siècle de Louis XIV, c’est-à-dire une époque critique dans l’histoire de l’Europe moderne, décisive dans l’histoire de France: époque critique pour l’Europe par l’influence qu’elle exerce, par les complications internationales qu’elle suscite, parle duel pour l’hégémonie du monde; époque décisive pour la France parce qu’elle engage la France dans une centralisation d’où elle ne sortira que par la Révolution, ou plutôt, d’où encore aujourd’hui, elle tâche en vain de sortir après un siècle de révolu­ tions incessantes... Ce qui revit dans les Mémoires, c’est un monde étrange, monstrueux, qui rappelle le monde romain du temps des Césars, c’est une cour féconde en tragédies, en comédies burlesques, où la nature humaine apparaît avec toutes ses vertus, mais surtout avec toutes ses bassesses, où non seulement les caractères se montrent sur une scène agrandie, mais où, exposés à toutes les tentations, ils montrent le mieux de quelle trempe ils sont faits ; en un mot, un de ces milieux qui offrent au moraliste un champ d’observations incomparable pour l’étude de l’âme humaine. Pour' faire revivre cette époque, il ne suffisait pas d’une histoire politique ou diplomatique, ni d’un jour­ nal intime à la manière des journaux de Pepys, ou d’Evelyn, ou de Dangeau. Un journal, si minutieux fût-il, une histoire politique, si lumineuse fût-elle, ne nous eussent révélé que les dehors, l’écorce des évé­ nements et des phénomènes. Pour faire revivre cette époque, cette cour prodigieuse du Roi-Soleil, il fal­ lait un esprit capable de pénétrer toutes les intrigues, de comprendre toutes les passions, de sonder tous les coeurs, un esprit prédestiné par les circonstances, par sa naissance, par son tempérament à devenir l’his­ torien définitif, le témoin irrécusable de son siècle. Que si même aujourd’hui, malgré son génie, malgré 1 intérêt de son œuvre, Saint-Simon n’est encore devenu ni un classique français, ni surtout un classique euro­ péen, il faut l’attribuer à la fois aux dimensions for­ midables des Mémoires et aux circonstances adverses de la fortune. La fortune a été contraire au terrible duc. Pendant trois quarts de siècle les Mémoires sont restés enfermés, séquestrés dans les archives de la mo­ narchie. Evidemment la monarchie avait peur d’élargir -----------„„IN TR O D U C TIO N ce témoin qui allait déposer contre elle. Quand enfin, à la veille de la révolution de 1830, on lève les scellés, les Mémoires ne paraissaient que tronqués, défigurés, ressuscitant d’ailleurs suffisamment le spectre de l’an­ cien régime pour contribuer pour leur part à la chute de Charles X. On peut dire que jusqu’à l’édition de Chéruel, qui est la véritable édition princeps, la France ne possédait pas une édition convenable de l’immortel historien. L’édition définitive, publiée par MM. Hachette sous la direction de M. de Boislisle et qui comprendra quel­ que quarante gros volumes in-8ü , est en cours de publication. Elle fait le plus grand honneur, et à l’éminent érudit qui en a eu l’initiative, et à l’illustre maison qui l’a entreprise. I. — L’Homme C’est presque devenu une tradition et un lieu com­ mun de l’histoire littéraire de rabaisser l’homme tout en exaltant l’artiste. Taine, plein d’ailleurs d’une admiration débordante pour son génie, ne voit en Saint-Simon qu’un grand écrivain victime de son imagination. M. Brunetière se contente de répéter le mot de Taine. La plupart des critiques, et M. Faguet lui-même, se contentent de répéter et de commenter ce mot fameux de Marmontel : « Saint-Simon ne voyait dans la France que l’aristocratie, dans l’aristocratie que les ducs, et dans les ducs que lui-même. ¡ > Que Saint-Simon ait de très graves défauts et de 7 ____________ .INTRODUCTION-------------------- très, petits côtés qui étonnent et détonnent chez un pareil génie, qu’il soit entaché de vanité et pétri d’or­ gueil, il faut bien l’accorder; c’est accorder tout sim­ plement que Saint-Simon n’a pas passé impunément la plus grande partie de sa vie dans l’atmosphère de Versailles. Et ce qu’il faut accorder bien plus, c’est qu’avec tous ses défauts qui sont ceux du milieu et de l’époque, Saint-Simon a des vertus qui lui appartien­ nent en propre, c’est qu’il est un caractère de grande envergure et de trempe superbe. Le moindre éloge que I on puisse faire de lui, c’est qu’il a traversé, sans se démoraliser et se déformer, le despotisme et la servilité du règne de Louis X IV et les ignominies de la Régence. Il est de grande noblesse, fils d’un favori de Louis XIII et s en souvenant. Toute sa vie, il ne cessera de parler avec tendresse et mélancolie du roi des gentils­ hommes et de 1 opposer à Louis XIV, le roi de la bour­ geoisie. Il oublie que c’est Louis XIII, ou plutôt Richelieu, avec la complicité tacite de Louis XIII, qui a fondé la monarchie centralisée et la bureaucratie bourgeoise et qui a brisé la puissance de l’aristocratie. II oublie plus encore, lui, le duc, entiché des privilèges des ducs et pairs, que son duché est de création toute recente et ne remonte qu’à une génération. C’est qu’il a au plus haut point, non pas, comme on l’a trop dit, la vanité, mais l’orgueil de sa classe. Sa mémoire pro­ digieuse semble lui servir surtout à apprendre par coeur la généalogie et l’histoire de toutes les familles nobles et souveraines de la France et presque de l’Europe. 8 -----------------INTRODUCTION-__________ La noblesse devient la clef de voûte de son système politique. Elle est plus qu’une classe, plus qu’une caste, elle devient un principe. Ajoutons, d’ailleurs, que s’il possède tant l’orgueil de son état, il possède aussi ce que la noblesse avait perdu . le sentiment de l’honneur, de l’indépendance, de la loyauté, c’est-à- dire qu’il possède (et il les possède au plus haut degré) des vertus qui sont fatales, funestes, néfastes dans une cour où l’on ne parvient plus guère que par la bassesse et la servilité. C’est évidemment à lui-même que Saint-Simon songe quand, dans son portrait de Louis XIV, il écrit les paroles suivantes : « L’esprit, la noblesse, se sentir, se respecter, avoir le coeur haut, être instruit, tout cela lui devint suspect et bientôt haïssable. » Malgré ses vertus, ou plutôt grace à^ses vertus, Saint-Simon non seulement tombe en disgrâce, mais devient bientôt l’un des hommes les plus Impopu­ laires de son temps. La fausseté de sa position — un caractère indépen­ dant dans une cour asservie, un noble ambitieux dans un gouvernement d’où les nobles sont systématique­ ment exclus — donne la clef de sa psychologie. C’est un mécontent et, ajoutons-le, un mécontent qui ne peut laisser paraître son mécontentement, qui doit flatter le Maître quand le Maître daigne lui adresser la parole, qui doit féliciter de leurs honneurs mal ac­ quis les bâtards qu’il déteste, qui doit s humilier de­ vant Mme de Maintenon qu’il abomine. L’état d’âme de Saint-Simon, c’est un peu l’état d’âme d un La Bruyère à la cour du prince de Condé. Comme lui, il ____________INTRODUCTION------------------- 9 -INTRODUCTION îonge son frein, comme lui il est aigri ; écœuré de la bassesse triomphante, il n’a pas, comme lui, renoncé a 1 ambition qui était interdite à La Bruyère par son umble extraction. Bien loin d’avoir renoncé à Tarn- bition, toute sa vie il aspire à jouer un rôle politique. II a conscience de son génie et déplore ses facultés sans emploi, son oisiveté forcée ; il abomine cette poli­ tique bourgeoise qui est en réalité une politique des­ potique et qui écarte les nobles et les princes des fonc­ tions publiques. La vie active lui étant fermée, il re­ garde autour de lui, d’autant qu’il est admirable­ ment placé pour voir aux premières loges de face et ! r® garde avec des 5 ™« rendus plus pénétrants par la haine. Ne pouvant pas prendre part à la comédie n ayant pas même le droit de siffler tout haut, il se dédommagé en écrivant, pour l’édification de la pos­ térité, .toutes les choses honteuses, ignominieuses dont il est témoin,^ il devient l’historien secret de la mo­ narchie à la fois le Suétone et le Tacite de la cour de Versailles. Il déverse sur le papier sa colère contenue bon activité comprimée se trouve à s’exprimer dans des pages qui, a deux siècles de distance, sont encore brûlantes d’indignation. Dans cette haine, dans cette indignation où je uploads/Religion/ la-court-de-louis-xiv.pdf

  • 11
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Jan 14, 2022
  • Catégorie Religion
  • Langue French
  • Taille du fichier 44.0595MB