22 Antoni Jackowski, Elżbieta Bilska-Wodecka, Izabela Sołjan La géographie des

22 Antoni Jackowski, Elżbieta Bilska-Wodecka, Izabela Sołjan La géographie des pérégrinations de l’homme aux lieux sacrés Dans l’histoire de l’humanité, des civilisations et des cultures, la religion occupe l’une des places les plus importantes. Depuis tou- jours elle a joué un rôle très important, parfois le plus impor- tant dans la vie de différentes communautés, nations ou pays. Déjà à l’époque païenne, il existait un réseau d’endroits sacrés, but des pérégrinations de différentes tribus. Les déplacements à pied, inspirés par les croyances et la reli- gion, accompagnent l’homme à toutes les étapes du développe- ment des cultures et des civilisations. L’homme depuis toujours s’est dirigé à des endroits sacrés. L’un des modes de ces déplace- ments pédestres dans le but religieux est le pèlerinage. Le moment culminant de chaque pèlerinage est la visite d’un lieu sacré. Au- trement dit, le sens profond d’un pèlerinage découle du besoin, éprouvé par les fidèles, d’être en contact avec des choses sacrées. Certaines religions favorisent particulièrement les pèlerinages en constituant des règles très rigoureuses (dans l’islam) ou en en fai- sant la condition de s’assurer le salut éternel (par exemple en hin- douisme, ou en bouddhisme). Dans la religion chrétienne, les pèlerinages ont occupé, dès le début, une place secondaire en tant que pratique religieuse par rapport au culte liturgique qui était primordial dans l’Église. Les pèlerinages avaient leur source dans la spontanéité des fidèles provenant des besoins spirituels de l’homme. Pour un chrétien, le pèlerinage constitue une forme de voyage dans le but de ren- contrer Dieu de façon prolongée et profonde. On est persuadé, jusqu’à présent, que le fait de faire un pèlerinage mène au renou- vellement spirituel de l’homme. Certainement cet état des choses est dû à l’enseignement qui découle de la Bible. Selon la Bible, la vie terrestre est un pèlerinage perpétuel dirigé par le Christ qui nous mène à la vraie patrie, la « Jérusalem céleste » (La Lettre aux Hébreux 12, 22-24). On admet que, actuellement, dans le monde entier, plus de 300 millions de personnes par an, entreprennent des pèlerinages 23 La géographie des pérégrinations de l’homme aux lieux sacrés à des lieux du culte religieux. Si on y ajoute les migrations régionales ou locales, ce chiffre dépassera certainement un milliard de fidèles cherchant contact avec le sacré. À travers le temps, les principales routes des pèlerinages se sont constituées. Elles sont parcourues par des gens qui vont dans des endroits sacrés ou en reviennent. Certainement, les voyages de ce type ont eu lieu dans les reli- gions préhistoriques. Un grand rôle des pèlerinages a été visible dans le monde antique. Jusqu’à présent se sont conservées les sources qui permettent de reconstruire les itinéraires des pèleri- nages antiques, entre autres, en Egypte, en Mésopotamie, en Pa- lestine, en Arabie, en Perse, en Inde, en Chine, chez les Mayas, en Grèce ou à Rome. Les recherches archéologiques confirment l’existence d’endroits sacrés chez les peuples de l’époque d’avant Jésus-Christ dans le nord de l’Europe. Cela concerne les Celtes, les tribus germaniques ou slaves. Les pèlerinages ont pris de l’impor- tance au moment de l’apparition des grandes religions mondiales. La motivation religieuse a constitué l’une des premières inspi- rations de l’homme à se mettre en route, ce qui n’a pas été imposé ni par les événements d’ordre politique (par exemple les guerres ou les changements des frontières) ni les buts économiques ou sociaux (la famine, les épidémies, les fléaux). Beaucoup d’informa- tions sur les voyages de caractère religieux ont été transmises par l’Ancien Testament, les Védas hindoues ou des écritures des auteurs antiques. Hérodote dans son œuvre, les Histoires, mentionne que certaines fêtes religieuses en Egypte rassemblaient jusqu’à même 700 mille pèlerins. En Grèce, les événements sportifs et culturels constituaient une des formes du culte des dieux. Les plus popu- laires et répandues sur un grand territoire, étaient les jeux d’Olym- pia et de Némée (culte de Zeus), de Delphes (culte d’Apollon) et de Corinthe (culte de Poséidon). L’armistice, obligatoire pendant les Jeux Olympiques, garantissait une grande fréquence. Les routes de la Grèce antique ont été parcourues par des groupes de malades et d’handicapés qui, avec une foi fervente, cherchaient la guérison dans l’un de nombreux temples. Le plus fréquenté a été celui d’As- clépios à Epidaure. À l’époque de l’Empire romain, il y avait deux temples célèbres d’Asclépios : sur l’île de Kos et à Pergame. Les ma- lades se dirigeaient aussi aux oracles. Parmi eux, il y avait des gens de toutes les couches sociales, en commençant par des pauvres sans instruction jusqu’aux représentants des élites de l’époque. ANTONI JACKOWSKI, ELŻBIETA BILSKA-WODECKA, IZABELA SOŁJAN 24 En Israël antique, existaient des pérégrinations des patriarches, ordonnées par Dieu (Yahweh), que l’on peut considérer comme des migrations dans le but religieux. De nombreux lieux sacrés ont apparu sur le chemin de pérégrination d’Abraham ou de Moïse. À partir de l’époque de Salomon et de David, c’est Jérusalem qui est devenu le principal centre religieux. Vers l’an 1005 avant Jé- sus-Christ, David y a fait venir l’Arche d’Alliance. À partir de ce temps-là, on a pratiqué à Jérusalem trois grandes fêtes de pèle- rinage : Pessah, Chavouot (en hébreux « semaines ») et Souccot (fêtes des Tentes). Comme le mentionne le Livre de l’Exode, pen- dant ces fêtes, les Israélites devaient venir pour se présenter devant le Seigneur (Livre de l’Exode 23, 14-17; Isaïe 55, 3-5). Quant au monde chrétien, le début des pèlerinages de masse se situe au IVe siècle mais les voyages des particuliers dans le but religieux ont été observés avant. Il faut chercher les origines de ces pérégrinations dans la Bible. Le terme de « pérégriner » que nous y rencontrons, a un caractère métaphorique et se réfère à la pérégrination de l’homme vers l’éternité ou vers Dieu. Tous les chrétiens ont été nommés « pèlerins ». Vu le caractère éphémère de ce monde, ils devraient se prendre pour les migrateurs sans do- micile, en route sans cesse. Ceci est souligné plusieurs fois dans le Nouveau Testament, particulièrement dans les lettres de saint Paul aux Hébreux et aux Philippins. Le chrétien dirigé par le Christ se trouve, tout le temps, en route vers sa vraie patrie, « la Jérusa- lem céleste » (Hbr 12,22-24). Sans aucun doute, la vie terrestre, assimilée dans le Nouveau Testament au pèlerinage, a stimulé le développement des pèlerinages dans le christianisme. Sous cette forme de piété on comprenait une partielle réalisation du chemin terrestre vers « la patrie céleste ». Anne Dumoulin a bien dit que « le pèlerinage est une prière dans l’espace »1 Suivant l’histoire et l’image contemporaine du pèlerinage dans le christianisme, nous pouvons discerner cinq types principaux de migrations, dépendant, avant tout, des motivations et de l’objet. Ce sont, en premier lieu, les pérégrinations vers la Terre Sainte (Jérusa- lem a été traitée pendant longtemps comme le centre du monde) ; deuxièmement, celles liées au culte de la Passion, aux reliques et 1 Anne Dumoulin, « Towards a Psychological Understanding of the Pilgrim », Lumen Vitae, 32/1977, p. 109. 25 La géographie des pérégrinations de l’homme aux lieux sacrés aux images miraculeuses de Jésus Christ ; troisièmement, celles liées au culte des ermites et au monachisme se développant rapi- dement ; quatrièmement, celles liées au culte des saints et des mar- tyres ou bien de leurs reliques et, finalement, celles liées au culte marial et à la vénération des images miraculeuses de Notre-Dame. Au deuxième siècle, nous observons le développement du culte des martyres et de leurs reliques. Dans le Nouveau Testament, le martyre est la forme la plus complète de la sainteté chrétienne. L’emplacement du tombeau d’un martyre ou l’exposition de ses reliques dans une localité, a apporté beaucoup, du point de vue fi- nancier, aux tuteurs de différents sanctuaires. Le culte des martyres a eu de bonnes conditions de se développer dans le christianisme de l’ouest. Sur les territoires influencés par Rome, il y avait de nombreux tombeaux des saints. Rome a joué un rôle particulier dans ce domaine. À partir du Ve siècle, la ville française de Tours, située au bord de la Loire, est devenue un centre de pèlerinage très connu, grâce à Saint Martin, évêque de Tours dans les années 371-397. Son culte s’est développé surtout dans la deuxième moi- tié du Ve siècle, au moment où ce saint est devenu patron de l’église locale et au moment où on a construit une spacieuse basilique au-dessus de sa tombe. Grâce à Saint Martin, de nombreux mi- racles ont eu lieu, avant tout des guérisons. C’est pourquoi les ma- lades ou handicapés y venaient en grand nombre. À partir du VIIIe siècle, s’est développé le culte de saint Michel au Mont Saint-Mi- chel. À travers le temps, se sont créés en Europe, des chemins qui mènent à ce sanctuaire et qui fonctionnent jusqu’à présent. La tradition des pèlerinages dans l’islam remonte à l’époque préislamique et se réfère aux coutumes qu’on a notées en Arabie Déserte (Arabia Deserta), surtout au Hedjaz où cette religion est née. uploads/Religion/ la-geographie-des-peregrinations-de-l-x27-homme-aux-lieux-sacres.pdf

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  • Publié le Nov 25, 2022
  • Catégorie Religion
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