La Religion traditionnelle est-elle une réalité du passé ? INTRODUCTION : QU'ES

La Religion traditionnelle est-elle une réalité du passé ? INTRODUCTION : QU'EST-CE QUE LA RELIGION ? 1. Considération générale sur le thème de la conférence Je commence cette conférence en disant que de toutes les conférences auxquelles vous avez participé ici, celle de ce matin risque d'être la moins intéressante, car le conférencier n'a aucune expérience interne du sujet dont il parle. N'étant ni sociologue ni anthropologue, tout ce qu'il partagera avec vous ne sera que le fruit de l'observation et de l'écoute ainsi que le fruit des lectures des livres qui abordent le sujet. D'avance, je présente donc mes excuses à ceux qui maîtrisent ce sujet plus que moi dans l'auditoire. Je leur dis que je ne suis qu'un enfant dans le domaine de la religion traditionnelle et que si j'abuse du langage, ils ne m'en tiennent pas rigueur. Cette précision faite, nous commencerons par dire, que pour aborder notre thème de ce matin, nous avons pensé qu'il serait important, même judicieux, de voir le sens de la religion afin d'y découvrir toutes les significations possibles. 2. Définition de la religion :  Définition : L'Étymologie de la religion est discutée depuis l'antiquité. De Cicéron, qui la rattache au verbe religere, à A. Ernout et A Meillet qui préfèrent religio, une dérivation de religare, dans leur Dictionnaire étymologique de la langue latine (Paris, 1932), plusieurs réflexions et définitions ont été données sur ce mot. De tout ceci, nous pouvons admettre, avec le Père de Grandmaison, la synthèse liminaire donnée par Morris Jastrow avant d'essayer de donner une définition finale. Pour Morris Jastrow, « la religion se compose de trois éléments : 1. la reconnaissance d'un pouvoir ou de pouvoirs qui ne dépendent pas de nous ; 2. un sentiment de dépendance à l'égard de ce ou de ces pouvoirs ; 3. l'entrée en relation avec ce ou ces pouvoirs. Si l'on réunit ces trois éléments dans une seule proposition on peut définir la religion comme la croyance naturelle à un ou à des pouvoirs qui nous dépassent, et à l'égard desquels nous nous sentons dépendants, croyance et sentiment qui produisent chez nous : 1. une organisation (communauté) ; 2. des actes spécifiques (des rites) ; 3. une réglementation de la vie ayant pour but d'établir des relations favorables entre nous mêmes et le ou les pouvoirs en question (des Lois) ». (Morriss Jastrow, The Study of religion, New York, 1901, p. 170) Cité par le P. De Grandmaison, dans Christus, 2e éd., 1916, p. 6).  Les éléments constitutifs de la religion : Si on veut analyser les divers éléments de la religion, on y constate que l'âme y est intéressée dans toutes ses fonctions principales. 1. Il y a un sentiment religieux qui rassemble deux éléments dans son contenu qualitatif : le mystérieux qui a un élément répulsif (le tremendum auquel se rattache la majestas) et qui exerce en même temps un attrait particulier, qui captive, fascine et forme avec l'élément répulsif une étrange harmonie de contrastes (Rudolf Otto, Le Sacré, 1ère Ed. allemande, 1917, p. 57). 1. Il y a dans toute religion un corps de doctrine au moins ébauché et qui tend, tout au moins, à devenir obligatoire. C'est l'élément intellectuel de la religion (Émile Boutroux, Science et religion, Paris, 1908, p.384) 2. Toute religion impose à l'homme un certain nombre de règles pratiques, règles qui ne sont pas simplement des injonctions de la société ou de la conscience individuelle, mais « des commandements de Dieu ». P. de Grandmaison, Christus, p. 8). 3. Enfin toute religion se traduit par un culte et des rites. Ceci d'abord est un fait, facile à constater, et c'est également une nécessité à la fois psychologique et sociale. (Émile Boutroux, Science et religion, p. 338.)  Conclusion : De tout cela, nous pouvons tirer cette conclusion que la religion est l'ensemble des croyances, des sentiments, des règles et des rites, individuels ou collectifs, visant (ou imposés par) un Pouvoir que l'homme tient actuellement pour souverain, dont il dépend par conséquent, avec lequel il peut entrer (ou mieux : il est entré) en relations personnelles. Plus brièvement, la religion est la conversation de l'homme, individuel et social, avec son Dieu - Christus, p. 10. Pour terminer avec la définition de la religion, nous pouvons dire que la somme des connaissances accumulées, en Afrique et ailleurs a beaucoup progressé, malgré les erreurs et les redites, depuis Durkheim. Et curieusement, il semble que la réflexion théorique en matière d'anthropologie religieuse n'ait pas avancé du même pas. S'il faut en croire un anthropologue américain, Clifford Geertz, « l'étude anthropologique de la religion se trouve en fait dans un état de complète stagnation » et tout l'apport contemporain aux travaux antérieurs, dominés par les noms de Durkheim, de Weber , de Freud, de Malinowski, consiste « seulement [à] quelques corrections marginales nécessitées par la tendance naturelle à l'excès des esprits créateurs ou par la masse croissante des données descriptives » (Louis Vincent THOMAS, René LUNEAU, La Terre africaine et ses religions, Paris, L'Harmattan, 1980, 18). Face à cette définition, que devons-nous dire ? La Religion Traditionnelle ou les Religions Traditionnelles ? I - ORIGINES ET BASES DE LA RELIGION TRADITIONNELLE AFRICAINE Aux origines des religions traditionnelles, il y a la vie. Et d'après les principaux traits de l'animisme de Burnett Tylor, professeur à Oxford (ouvrage, Primitive culture, Londres 1872), quatre constats de la vie peuvent expliquer ses origines. 1. L'homme vivant se forme premièrement à l'idée de quelque chose de différent du corps, l'âme. Il y est acheminé par la considération des deux groupes de faits biologiques : d’une part le sommeil, le ravissement, la maladie et la mort ; d'autre part, les rêves et les visions. Les premiers révèlent à l'homme primitif un état du corps abandonné plus ou moins par le principe vital et laissé à lui-même. Les seconds lui font voir ce principe incorporel, l'âme, exerçant en pleine indépendance certaines activités. L'idée d'âme ainsi obtenue ne vaut originairement que pour l'homme. Elle s'enrichit bientôt de la foi en la survie de l'âme après la mort et en des migrations de l'âme (1e édit., t.l, p.377 sq. ; t. II, p. 5, sq, p. 76 sq. (Séparation corps et âme : Dualité) 2. Pour l'homme primitif, son être personnel était le type de tous les autres. N'ayant l'expérience intime que de soi-même, il concevait tout le reste d'après son propre cas, spécialement les animaux et les plantes, qu'il imaginait composés comme lui d'un corps et d'une âme. La condition des autres êtres ne pouvait non plus être différente. Cette identique constitution étant supposée, l'idée d'une diversité de nature entre l'homme et les autres êtres n'entrait pas dans son esprit. Lui et eux étant apparentés (Ibid., t. II, p. 99 sq.). Cela peut expliquer la relation de respect et de vénération envers les éléments de la création. 3. Le culte des ancêtres, c'est-à-dire de devanciers qui, n'ayant plus de corps terrestre, représentaient de purs esprits, conduisit l'homme à la notion d'esprits séparés. Ces esprits pouvaient à leur gré prendre possession, fut-ce pour un temps, de corps étrangers. Ainsi s'expliqueraient pour le primitif les cas de possession. Les maladies et la mort elle-même provenaient de l'action néfaste de quelque esprit qui avait pénétré dans le corps de l'intéressé. Le fétichisme, le culte de morceaux de bois et de pierres et enfin l'idolâtrie proprement dite étaient à interpréter de la même manière (Ibid., t. II, p. 101 sq., 147 sq). 4. La notion ainsi obtenue de purs esprits allait être appliquée à la nature. Au sentiment du primitif, ses diverses parties étaient animées par des esprits et les phénomènes dont elles étaient le siège relevaient de leur activité. Ainsi apparut le culte de la Nature. L'eau en général, les fleuves, la mer, les arbres et les bois, les animaux, le totem, le serpent devinrent l'objet d'hommages religieux. L'évolution atteint ici son plus haut point dans la notion et l'adoration du dieu espèce, conçu non comme un individu, mais comme une espèce de catégorie (Ibid, t. II, p. 224 sq., 231 sq., 235 -285). II - LA RELIGION TRADITIONNELLE OU LES RELIGIONS TRADITIONNELLES ? Chaque société humaine demeure très largement dépendante du cadre de vie qui est le sien, dans lequel elle puise la quasi-totalité de ses ressources. Et le langage qu'elle-même élabore trouve ses signifiants dans le monde concret de son expérience. La vie prête son visage à la pensée. Aussi comprend-on que le monde religieux du forestier n'est pas celui du paysan de la savane, que le lagunaire et le nomade n'ont pas la même mythologie de l'eau. Autre la religion du paysan attaché à sa terre, à ses bosquets et à ses marigots, autre celle du pasteur qui va sans relâche à la suite de son troupeau et dont toute la richesse, toute la symbolique aussi, se fondent sur l'existence du troupeau. Au constat de cette situation, nous pouvons affirmer qu'il est préférable de parler de religion traditionnelle africaine au pluriel. III - LES uploads/Religion/ la-religion-traditionnelle-africaine.pdf

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  • Publié le Fev 04, 2021
  • Catégorie Religion
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