Introduction En Islam, le Livre de Vérité est le Qor’an, la parole de Dieu rela

Introduction En Islam, le Livre de Vérité est le Qor’an, la parole de Dieu relayée par l’Ange Jibril et exprimée par la bouche de l’Envoyé, Mohammad, missionné pour rappeler les hommes à Dieu, à la rectitude du chemin de la Lumière révélée aux hommes depuis le commencement des temps. Et Dieu dit ainsi dans la sourate 41, verset 53 : « Nous leur ferons voir Nos signes dans les horizons et dans leurs âmes jusqu’à ce qu’ils discernent que Là est le Vrai ». L’ensemble des écoles du mysticisme islamique a trouvé dans cette ouverture le chemin conduisant à la reconnaissance de l’Œuvre divine dans le manifesté, Création dont l’éclat et la beauté doivent conduire le croyant jusque dans le sein de Dieu. À cette source tous ont convergé et se sont désaltérés de la saveur de la quête, cheminant vers le stade de la « proximité ». Un mystique islamique de notre temps, Bahrâm Elâhi, tente de cadrer la perspective de la voie mystique en Islam : « Cette voie est universelle ; elle est ici, dans notre univers de la matérialité, mais elle est également là-bas, dans l’univers de la spiritualité. [...] Cette école est universelle, [...] n’a pas de couleur, n’a pas de territoire, n’est pas fermée. C’est une école pour ceux qui ont soif de l’Esprit, qui désirent Dieu pour Dieu ». 13 par Albert Coudsy LA VOIE SOUFIE, MYSTIQUE DE L’ISLAM Revue Rose-Croix n° 223 - 2007 Définitions de la voie mystique en Islam Le mysticisme est à la fois une voie, une doctrine et un état: doctrine, il prête un sens caché aux révélations des Écritures et aux choses ; voie, il prétend conduire à la connaissance de choses divines sans intermédiaire, à pénétrer les mystères, et par un dévoilement atteindre aux réalités transcendantes face à face ; état, c’est un comportement spirituel issu de l’étude de la théologie et de la théogonie, et qui demeure attaché à la signification spiri- tuelle des êtres, de leurs rôles et de leurs actes. Nietzche disait que la grandeur d’un homme, c’est d’être un pont. Et la réalisation d’un mystique, c’est de devenir un pont par lequel les frères humains retrouvent la voie de Dieu et s’y enga- gent. Et le pont est construit avec l’amour de Dieu ; il ne tient que par le mortier de l’amour des hommes. Ceci est le secret de la mys- tique islamique, et en est aussi l’aboutissement. La voie mystique en Islam, notamment après avoir été désignée par le mot tasawwuf (soufisme), est devenue l’attribut des connais- sants, âlimûn, les gens de la connaissance, et maarifa, cette connais- sance : cette voie et méthode d’accès est une gnose, à condition d’entendre par ce terme non pas un savoir transmis et acquis, mais une connaissance révélée, dévoilée et expérimentée, vécue jaillie au cœur du cherchant en éclairs fulgurants, puis parfois en torrents de lumière, pour rejaillir sur les champs de la tradition et de la reli- gion et les imprégner des traces de vérité qu’elles reflètent dans les cœurs des autres croyants, à la mesure de leur propre ouverture. Le Livre saint, le Qor’an, ne dit-il pas dans la Sourate 2, dite de « La Vache », verset 269 : « Il dote de la sagesse qui Il veut ; et celui qui a été doté de la sagesse a déjà reçu un bien immense ». Cette approche qor’anique recèle une notion d’élection. Mais elle est tempérée par cet autre verset qui rappelle aux croyants qu’ils sont égaux au regard de Dieu, que ne les différencie que leur degré de piété. Il en découle que c’est par la piété que s’opère l’œuvre de « proximité » : là est le point originel des commentateurs et exégètes qui ont placé la voie mystique dans l’Islam des premiers temps et de leurs continuateurs immédiats. Ainsi, l’un des grands Chaykhs du soufisme, al-Quchayri (Abul-Qâçem, Abdul-Karim ibn Hawâzen al-Quchayri, né en 14 Revue Rose-Croix n° 223 - 2007 15 376 Hg., mort en 465 Hg. à Nishâpûr), commenté par le Chaykh-ul-islam Zakariya al-Ansâri, re - porte la formation de la soufiya à la perpétuation du savoir mohammadien par ses compagnons dits sahâbah. Ensuite vint la seconde génération, ceux qui ont été les compa- gnons de ces premiers et qui furent appelés tâbi’în, puis ceux qui leur succé - dèrent, appelés atbâa at-tâbt în (les suivants des suivants). Plus tard surgirent des dissensions et des différences d’ap - préciation ; on en vint à appeler ceux qui étaient très attachés à la religion les zuhhâd (ascètes) et les oubbâd (orants). Finalement apparurent des sectes qui préten- daient à ces qualités : alors les vrais tenants de l’ascèse, ceux qui en étaient les privilégiés prirent le nom de tasawwuf pour leur pratique et furent connus comme tels, ce qui n’arriva qu’environ 200 ans après l’Hégire (donc vers les années 820/825 de l’ère chrétienne, en pleine période abbasside). Si l’on interroge le Littré qui orthographie Sofi ou Sophi (pour Soufi), il attribue ce terme à des philosophes musulmans qui ont établi une école panthéiste et dont les principes essentiels sont que Dieu seul existe, qu’Il est dans tout et que tout est Lui-même ; que tous les êtres visibles et invisibles en sont une émanation ; que le paradis, l’enfer et tous les dogmes des religions positives ne sont que des allégories dont le sofi a la clef ; qu’il n’existe pas réellement de différence entre le bien et le mal, puisque tout se réduit à l’uni - té, et qu’ainsi Dieu est en réalité l’auteur des actions de l’homme ; que l’âme est préexistante au corps et s’y trouve enfermée comme dans une cage ; que la mort, qui doit être souhaitée, est l’anéantis - sement en Dieu ; que c’est par la métempsychose que les âmes sont Revue Rose-Croix n° 223 - 2007 16 purifiées et obtiennent d’être réunies à Dieu, et que la principale occupation du sofi doit être de méditer sur l’unité et de s’avancer par les divers degrés de la perfection spirituelle. On voit, au travers de cette référence combien notre Occident, il y a à peine 150 ans, connaissait l’Islam avec de bien larges approximations. Avec le XXe siècle, nombreux furent les érudits occidentaux et orientalistes à se pénétrer de la pensée islamique et à l’approcher avec dignité et intégrité, notamment en France ; citons, parmi les plus grands noms, Blachère, Massignon, Guénor Berque, De Vitray- Meyerovitch, Corbin, Dermenghem, Laoust et bien d’autres. Le Soufisme intéresse aujourd’hui en Occident bien des per- sonnes attirées par la spiritualité, des gens qui ont effectivement mis de côté les contraintes des obligations religieuses qui leur sem- blent réduire leur liberté de comportement et de croyance. Ces gens recherchent assidûment le moyen de vivre une expérience intérieure de communion spirituelle profonde répondant à leurs aspirations, à travers une nouvelle naissance, qui évolue en leur conscience d’une manière parfois perceptible, parfois souterraine, afin de vivre une relation avec le Divin. Or, en définitive, à quoi se résout la voie soufie ? « À voir Dieu en chaque chose », ce qui est bien la doctrine de l’Unité (tawhîd) et unicité de l’Être ou de l’existence (tawhîd ul-wujûd) ; ceci est-il panthéiste ? D’une cer- taine façon, oui, car dans sa transformation continuelle et progres- sive, dans son ravissement intérieur et sa lucidité extérieure, l’homme de Dieu, le Soufi, entre « ivresse du divin » et « sobriété » vit les mystères d’une spiritualité profonde, tire une jouissance intense de la vie et de ses actions extérieures, imprégnée d’altérité, avec cette saveur inexprimable qui naît dans le « cœur » de celui qui se rapproche du « secret » de LUI. Un adepte soufi, notre contemporain Faouzi Sqâli tente de décrire l’approche et le contenu de la quête mystique en Islam : « Selon le Qor’an, Dieu se mani- feste aux hommes à la fois comme le Tout-Autre, l’Infini, l’Illimité, et comme Celui qui nous est plus proche que notre veine jugulaire. L’expérience de l’Amour (divin) en Islam est celle de la per- plexité qui naît de cette proximité- éloignement de ce qui ne nous a jamais « Gloire à la majesté de Dieu » Revue Rose-Croix n° 223 - 2007 17 quittés, mais que l’on cherche sans cesse à retrouver. La lumière qui jaillit de cette perplexité est la « Connaissance », la perception sub- tile de la manifestation de l’Être divin dans notre cœur. Ainsi, la sainteté en Islam est l’état de celui dont « la fine pointe de l’être » s’est plongée dans sa source divine. Ses vertus, son amour et sa sagesse ne sont que les manifestations spontanées d’une réalité inté- rieure, de cette pauvreté essentielle ». Sqâli dit par ailleurs que cet- te pauvreté n’est que la « pauvreté dans l’esprit » dont parlait Jésus, la réalisation de ce détachement intérieur, obtenu dans le dévoilement divin, créant cette ivresse perpétuelle au travers de laquelle et dans la clarté du cœur, tout l’univers, les uploads/Religion/ la-voie-soufie.pdf

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  • Publié le Apv 25, 2022
  • Catégorie Religion
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