Lire et Faire lire la Bible* 1. Introduction Le chapitre VI de Dei Verbum, cons
Lire et Faire lire la Bible* 1. Introduction Le chapitre VI de Dei Verbum, constitue le premier traité organique sur la relation vitale qui unit la Sainte Écriture à tous et à chacun des fidèles1 ; et on peut le qualifier d’authentique charta magna de la rencontre de chaque chrétien avec la révélation divine, spécialement en ce qui concerne la parole écrite2. Là se manifeste, en effet, un échange de perspective sur le rôle et la fonction de la Sainte Écriture dans la vie de l’Église, comme le fruit mûr de l’étude de la Bible dans les années immédiatement antérieures à la Constitution conciliaire. On peut dire que la Dei Verbum est venu jeter une lumière nouvelle sur beaucoup d’aspects qui étaient en fait déjà présents, de façon implicite, au sein de l’Église : "l'Eglise a toujours témoigné son respect à l'égard des Ecritures, tout comme à l'égard du Corps du Seigneur lui-même, puisque, surtout dans la Sainte Liturgie, elle ne cesse, de la table de la Parole de Dieu comme de celle du Corps du Christ, de prendre le pain de vie et de le présenter aux fidèles"3. D’où l’intérêt de souligner la primauté et le caractère central de l’Écriture sur le Magistère : celui-ci "n'est pas au-dessus de la Parole de Dieu; il la sert, n'enseignant que ce qui a été transmis"4 ; c’est cela qu’il faut déduire encore de ce qui suit : "la prédication ecclésiastique tout entière, tout comme la religion chrétienne elle-même, il faut donc qu'elle soit nourrie et guidée par la Sainte Ecriture"5. Ce qui favorise ainsi une délicate et fine symbiose, un continuel échange entre l’usage pratique de la Bible et son étude scientifique, approfondie par l’exégèse et l’herméneutique6. Aussi bien dans les premiers siècles du christianisme comme au moyen-âge, elle était le livre fondamental pour la formation des fidèles. Le De Doctrina christiana de saint Augustin7 est un bel exemple d’instruction théologique fondée sur la Sainte Écriture. Mais si la Bible est essentiellement le livre qui contient la révélation de Dieu aux hommes, elle est aussi le lieu où le Père s'avance de façon très aimante à la rencontre de ses fils, en engageant une conversation avec eux. Les fidèles y trouvent, de leur côté, la nourriture qui éclaire leur esprit, fortifie leur volonté et les pousse à l'amour de Dieu. La réception des Écritures est donc l'ouverture * Article published in «Rivista teologica di Lugano» 14 (2009) 499-515. 1 Cf G. GHIBERTI, «Cento anni di esegesi biblica», in C.M. MARTINI, G. GHIBERTI, M. PESCE, Cento anni di cammino biblico, Milano 1995, 24. 2 Cf R.A. FERREIRA, La Sagrada Escritura en la vida de la Iglesia según la Const. "Dei Verbum" n. 21, Pamplona 1985. 3 DV 21. 4 DV 10. 5 DV 21. 6 Cf C.M. MARTINI, «La Bibbia nella vita del credente oggi» in C.M. MARTINI, G. GHIBERTI, M. PESCE, Cento anni di cammino biblico, 109. 7 CCL 32, 1-167. 2 de toutes les facultés à une parole transcendante, qui se manifeste dans la lecture ou l'audition d'un texte déterminé8. Pour l’ensemble des fidèles, la lecture de l’Écriture se réalise avec la profonde conscience d’être Église, d’appartenir au Corps du Christ en qualité de communauté des croyants. Dans l’Église, tous reçoivent le même esprit et participent à la même foi dans la diversité des fonctions. L’Église nourrit l’union entre les pasteurs et les fidèles, les prêtres et les laïcs, les exégètes de profession et les simples lecteurs de la Bible. Elle aide les uns et les autres en éclairant les passages difficiles à interpréter, en résolvant les doutes. En somme, Elle conduit les uns et les autres à écouter avec humilité la Parole de Dieu transmise dans la Bible sans jamais se perdre dans des discussions purement humaines9. Les diverses fonctions de Pasteur, de mystagogue, de philologue, d’historien et d’interprète s’unissent, dans l’unique corps de l’Église, pour approfondir et accroître la connaissance de la Parole et, par voie de conséquence, la vie divine dans l’Église. La parole suscite la foi et convoque l’Église. De son côté, la foi de l’Église accueille, défend, interprète et transmet la parole. C’est donc à partir du même mystère de la parole qu’on déduit les critères d’interprétation et de compréhension de la Sainte Écriture10. C’est sur ce même mystère de la parole qu’on se fonde pour affirmer, d’une part, l’identité à la foi divine et humaine du livre sacré et, d’autre part, son insertion vitale dans l’ensemble de la foi de l’Église. La vie dans l’esprit en dedans du Corps mystique du Christ permet souvent de confronter la propre interprétation du texte sacré avec celle qui surgit, enrichie, du sensus fidei. Il faudra, de surcroît, tenir compte de l’approfondissement qui provient des lumières reçues de l’étude attentive de la Bible11. Enfin, on peut affirmer qu’ « une si grande force, une si grande puissance se trouve dans la Parole de Dieu, qu'elle se présente comme le soutien et la vigueur de l'Eglise, et pour les fils de l'Eglise, comme la solidité de la foi, la nourriture de l'âme, la source pure et intarissable de la vie spirituelle »12. Pour comprendre la parole de Dieu et la faire propre dans la vie personnelle, il est nécessaire de suivre un modus agendi qui, sans exclure la légitime pluralité des méthodes existant dans l’Église, contient néanmoins certaines normes d’interprétation13 : - En premier lieu, contempler le mystère de l’Incarnation, dont fait partie la parole écrite dans sa sobre « essentialité », moyennant l’usage du sens littéral-historique pour découvrir ce que 8 Cf DV 23. 9 Cf C.M. MARTINI, «La Sacra Scrittura, nutrimento e regola della predicazione e della religione» in S. LYONNET, K. HRUBY, M. ZERWICK ET AL., La Bibbia nella Chiesa dopo la "Dei Verbum", Roma 1969, p. 171. 10 Cf «La Bibbia nella vita della Chiesa» in E. LORA (ed.), Enchiridion de la Conferenza Episcopale italiana, 5: 1991-1995, Bologna 1996, 2926. 11 "Divina eloquia cum legente crescunt". S. GREGOIRE MAGNE, Omelie su Ezechiele 1,VII,8, CCL 142, 87. 12 DV 21. 13 Cf La Bibbia nella vita della Chiesa, 2930-2932; CCC, 111-114. 3 les auteurs sacrés ont bien voulu nous transmettre. À cet effet, il est nécessaire de faire une exégèse correcte, une exégèse qui évite des interprétations arbitraires et considère en même temps, le mystère du Christ et de l’Église ; - Confronter le passage étudié à d’autres textes de la Bible de façon que chaque partie soit lue dans l’ensemble; et en particulier, lire le Premier Testament à la lumière du Deuxième – où le Premier trouve son sens plénier. Le Nouveau Testament doit aussi être lu à la lumière de l’Ancien afin de reconnaître la pédagogie divine qui conduit l’humanité à travers le chemin historique du Salut ; - Lire le texte dans le contexte ecclésial et sacramentel, pour partager et vivre la foi de l’Église. En revenant quelque peu en arrière, nous pouvons dire qu’en ouvrant la Bible, nous trouvons le Père qui nous parle dans le Christ par la force de l’Esprit. L’attitude de fidélité à la parole fait partie, en même temps, du mystère de l’Église. Celle-ci – Corps du Christ et Épouse de l’Esprit – a son origine dans le décret salvateur de Dieu le Père. - Chercher dans le texte la réponse aux grandes interrogations d’aujourd’hui. L’Écriture est une parole vivante et efficace14 ; et elle l’est pour tous et chacun des lecteurs, elle les aime, les illumine et les conforte. Bien que générée dans le passé, la Parole possède la force de l’Esprit ; et l’Esprit donne la réponse aux inquiétudes et aux problèmes de notre temps ; - Enfin, il ne faut pas oublier que Dieu lui-même a voulu intervenir dans l’histoire des hommes avec des faits et gestes, avec sa parole vivifiante qui font, dès lors, partie de la vie des hommes. La dimension transcendante de la parole de Dieu se conjugue avec les exigences du langage et de la littérature, suivant la condition et les exigences des destinataires. 2. La « Lectio Divina » La Bible n’est pas seulement un témoignage écrit et un support de foi pour l’Église ou encore une réalité qui – avec le Corps du Christ – illustre le mystère du salut, qui se transforme par la suite en expérience de vie et en témoignage de service et de charité. Elle est aussi objet de méditation et d’annonce, d’interprétation, de réflexion spirituelle et de communication. Tout cela se réalise dans la lectio divina, d’où naît l’amour constant et effectif pour la parole de Dieu – source de vie spirituelle et de fécondité apostolique – ; et la lectio divina suscite aussi un meilleur approfondissement et une adéquate connaissance du mystère révélé. Dans le document "L'interprétation de la Bible dans l'Église", il en est question en ces termes : "lecture, individuelle 14 Cf Heb 4,12. 4 o communautaire, d'un passage plus ou moins long de l'Écriture accueillie comme parole de Dieu et se développant sous la motion de l'Esprit en méditation, prière uploads/Religion/ lire-bible.pdf
Documents similaires
-
20
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Aoû 09, 2021
- Catégorie Religion
- Langue French
- Taille du fichier 0.2287MB