123 DISCOURS SUR LE PSAUME CXXIII. SERMON AU PEUPLE. LA DÉLIVRANCE. L’Eglise ch
123 DISCOURS SUR LE PSAUME CXXIII. SERMON AU PEUPLE. LA DÉLIVRANCE. L’Eglise chante sa délivrance, ou des persécutions par la bouche des martyrs, ou des dangers de la vie présente par la bouche de tout chrétien qui meurt en Dieu. Elle a ses espérances du ciel lesquelles sont la vérité ou le Verbe en Dieu, ici-bas la voie qui y conduit ou le Verbe fait homme. En jetant un coup d’oeil sur les obstacles, ces bienheureux s’écrient : Si le Seigneur n’eût été avec nous Combien de difficultés de la part des hommes, et ces hommes ont succombé ; mais si Dieu n’eût été avec nous, ils nous eussent dévorés tout vivants. L’Eglise, pour nous absorber, tue en nous les inclinations mondaines, afin de nous faire ce que nous n’étions pas, et nous sommes mangés par la foi en Dieu. Etre dévoré tout vivant, c’est connaître la vanité de l’idolâtrie, et néanmoins offrir de l’encens aux idoles ; ou nous laisser détourner de Dieu par les langues trompeuses. La victoire nous vient par celui qui a vaincu le monde. Par lui nous traversons les eaux qui nous eussent absorbés. Les eaux sont celles du torrent, ou de la persécution qui ne doit durer qu’un moment. C’est là qu’a bu notre Chef qui est dans le ciel. Il est à peine croyable que nous ayons pu franchir cette eau, appelée eau sans substance, parce qu’elle est l’eau du péché ; et par le péché nous dissipons notre substance comme le prodigue. Elle est sans substance encore, parce qu’elle nous dépouille des biens réels. Le Seigneur seul est la véritable substance ; seul il nous fait échapper aux amorces de la vie, comme l’oiseau aux pièges du chasseur. 1. Vous savez, mes frères bien-aimés, qu’un cantique des degrés n’est autre que le cantique de noire ascension, et que cette ascension ne se fait point avec nos pieds, tamis par les élans du coeur. Nous vous l’avons dit souvent, et nous n’en parlerons plus, afin de nous occuper de ce qui n’a pas encore été dit. Donc, le psaume que vous venez d’entendre est intitulé « Cantique des degrés». Tel est son titre, et il est chanté par ceux qui montent, lesquels chantent souvent comme chanterait un seul, et souvent comme plusieurs; car plusieurs ne font qu’un, puisqu’il n’y a qu’un seul Christ, et que tous les membres ne font en Jésus- Christ et avec Jésus-Christ qu’un même corps, et de tous ces membres, la tête est au ciel. Le corps souffre encore sur la terre, et n’est pas néanmoins séparé de la tête, qui veille d’en haut sur le corps et le préserve. S’il ne veillait sur ce corps, il n’eût point crié à Saut qui le persécutait, et n’était point encore Paul: « Saul, Saul, pourquoi me persécuter 1? » Vous savez tout cela, on vous en a souvent parlé. Et toutefois, que le souvenir de ces paroles ne fatigue point ceux qui ne les ont point oubliées, afin que, grâce à leur patience, elles puissent revenir à la mémoire de ceux qui les avaient perdues. Ce sont des paroles salutaires, et qu’il faut souvent répéter. Qu’il n’y ait donc en notre psaume qu’un 1. Act. IX, 4. seul interlocuteur, ou qu’il y en ait beaucoup; plusieurs ensemble ne forment qu’un seul homme, et se rangent dans l’unité, et le Christ n’est qu’un, avons- nous dit, et tous les chrétiens sont les membres du Christ. 2. Dès lors, que chantent ceux-ci? Que chantent ces membres du Christ? Car ils aiment, et c’est par amour qu’ils chantent, c’est l’amour qui chante en leurs transports. Parfois, la douleur les fait chanter, et parfois l’allégresse, quand ils chantent leurs espérances. Car nos tribulations ne sont que pour cette vie, et notre espérance est pour le siècle à venir; et si l’espérance du siècle futur ne nous soutenait dans les maux de cette vie, nous péririons sans ressource. Donc, mes frères, notre joie n’est point réelle encore, mais elle entre déjà en espérance; or, cette espérance est aussi certaine que si nous jouissions déjà de la réalité. Nous n’avons, en effet, rien à craindre quand c’est la vérité qui nous fait des promesses. Car la vérité ne peut ni se tromper, ni tromper les autres; il nous est bon de nous y attacher, puisqu’elle nous délivre si nous demeurons fermes dans sa parole. Nous croyons maintenant, nous verrons alors; avec la foi, notre espérance est en ce bas monde; avec la claire vue, nous aurons la réalité dans le siècle à venir. « Nous verrons Dieu face à face 1». Et nous le verrons face 1. Cor. XIII, 12. 38 à face quand nos coeurs seront purifiés. « Bienheureux ceux dont le coeur est pur, parce qu’ils verront Dieu 1 ». Or, comment nos coeurs seront-ils purifiés, sinon par la foi, selon cette parole de saint Pierre dans les Actes des Apôtres : « C’est par la foi qu’il purifie leurs coeurs 2 ». Et la foi purifie nos coeurs afin de les disposer à la claire vue. Car nous vivons dans la foi, et non dans la claire vue, comme dit l’Apôtre : « Tant que nous sommes dans un corps, nous sommes éloignés du Seigneur». Qu’est-ce à dire, « nous sommes éloignés?» « Car nous marchons dans la foi», ajoute le même Apôtre, et non dans la claire vue 3 ». Donc, celui qui est dans l’exil, qui marche dans la foi, n’est point encore dans sa patrie, il est seulement dans la voie qui y conduit; tandis que l’homme qui n’a pas la foi n’est ni dans la patrie, ni dans la voie pour y arriver. Marchons, dès lors, comme si nous étions dans la voie, parce que le roi de cette patrie en est lui-même devenu la voie. Le roi de notre patrie est Notre-Seigneur Jésus-Christ. C’est là qu’est la vérité, ici-bas est la voie. Où allons-nous? A la vérité. Par où y aller? Par la foi. Où allons-nous? Au Christ. Par où y aller? Par le Christ qui, lui- même, nous a dit: « Je suis la voie, la vérité et la vie 4 ». Or, auparavant, il avait dit à ceux qui croyaient en lui : « Si vous demeurez en ma parole, vous serez véritablement nies disciples, et vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous délivrera 5». Vous connaîtrez la vérité, nous dit le Sauveur, mais à la condition de demeurer dans ma parole. Dans quelle parole? « Dans la parole de foi que nous prêchons 6 », a dit l’Apôtre. Tout d’abord donc, c’est la parole de la foi, et si nous y demeurons, nous connaîtrons la vérité, et la vérité nous délivrera. La vérité est immortelle, la vérité est immuable, la vérité, c’est le Verbe dont il est dit : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu ». Et qui peut voir cela, sinon l’homme au coeur pur? Qu’est-ce qui purifie nos coeurs? « Et le Verbe s’est fait chair, et il a demeuré parmi nous 7 ». Le Verbe donc, demeurant en soi, est la vérité vers laquelle nous nous dirigeons; mais ce Verbe de la foi que l’on prêche, et dans lequel Dieu nous ordonne de demeurer, 1. Matth. V, 8. — 2. Act. XV, 9. — 3. II Cor. V, 6. 7. — 4. Jean, XIV, 6. — 5. Id. VIII, 31, 32. — 6. Rom, X, 8. — 7. Jean, I, 1, 14. afin de connaître la vérité, c’est le Verbe fait chair et qui a demeuré parmi nous. Tu crois d’abord au Christ né dans sa chair, et tu arriveras au Christ né de Dieu, et Dieu en Dieu. 3. C’est donc avec transport que se chantent les psaumes que nous lisons; les membres du Christ chantent notre psaume dans leur allégresse. Mais qui peut se réjouir sinon dans l’espérance, comme nous l’avons dit? Que notre espérance soit donc ferme, et chantons avec joie. Car tous ceux qui chantent ne nous sont point étrangers, autrement ce psaume ne serait point le cri de notre âme. Ecoutez donc, comme si vous vous entendiez vous-mêmes ; écoutez comme si vous vous regardiez dans le miroir des Ecritures. Quand vous prenez le miroir des Ecritures, votre face en devient plus sereine; et quand la joie de l’espérance te montrera que tu ressembles à plusieurs membres du Christ qui ont chanté ce psaume, toi-même tu seras parmi ces membres, et tu le chanteras à ton tour. Pourquoi donc ceux qui chantent le font-ils avec joie? Parce qu’ils ont échappé au péril. Donc, l’espérance les fait chanter. Tant que nous sommes ici-bas, et comme étrangers, nous ne sommes pas délivrés. Sans doute, quelques membres de ce corps auquel nous appartenons nous ont précédés, et peuvent chanter en toute vérité. Les martyrs ont chanté ce cantique, ils sont délivrés et tressaillent avec le Christ, qui leur redonnera incorruptibles ces mêmes corps qu’ils ont eu dans la uploads/Religion/ saint-augustin-discours-sur-les-psaumes-ps-123-la-delivrance.pdf
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- Publié le Fev 03, 2022
- Catégorie Religion
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