Le combattant a besoin de la science et de la technologie par le docteur J. dou

Le combattant a besoin de la science et de la technologie par le docteur J. douglas Beason, colonel (c.f.), usaf* le docteur Mark lewis D epuis le début de la deuxième guerre mondiale, nous avons assisté à l’introduction du radar, des armes à guidage de précision, des bombes atomiques, des missiles balistiques, des tran- sistors, des semi-conducteurs, des ordinateurs, des avions à réaction, de la technologie de la furtivité, des satellites, des téléphones porta- bles, des lasers, du système mondial de locali- sation (Global Positioning System – GPS), etc. La liste des applications scientifiques et techni- ques que l’on rencontre dans la guerre est stupéfiante. Chacune de ces technologies a eu un profond impact sur la façon dont nous combattons et, ce qui est tout aussi important, sur celle dont nous maintenons nos combat- tants à l’abri du danger. En outre, le rythme de l’incorporation des technologies maîtres- ses va s’accélérant. Au cours des millénaires écoulés depuis que l’humanité a laissé des traces, les estimations qui ont été faites indi- quent que le monde a connu un doublement – c.-à-d., une croissance de 100 pourcent – du savoir entre la nuit des temps et les années 50. Ce savoir, qui a doublé plusieurs fois depuis lors, a gagné le combattant. Dans de nom- *Certains passages de cet article sont extraits de l’ouvrage du docteur Beason intitulé DOD Science and Technology: Strategy for the Post– Cold War Era (La science et la technologie au Secrétariat de la défense : Stratégie pour l’après-guerre froide), (Washington, DC: National Defense University Press, 1997). 34 SCIENCE ET TECHN0LOGIE 35 breux cas, ce sont en fait les besoins de celui- ci qui en ont été le moteur. Les guerriers d’aujourd’hui combattent avec des armes d’une technologie plus sophis- tiquée que par le passé. C’est la raison pour laquelle ils sont moins nombreux sur le champ de bataille. De plus, la précision accrue du combat a introduit un changement profond de la nature même des conflits nationaux : les chefs d’état ne peuvent plus mener une guerre mettant en danger la vie de leur peuple sans mettre leur propre sécurité personnelle elle aussi en danger. Les progrès technologiques réalisés en matière de combat sont devenus une arme à double tranchant, c’est-à-dire que, bien que la densité numérique des combat- tants (leur nombre par kilomètre carré) puisse avoir diminué au fil des ans (Fig. 1), leur puis- sance de feu a augmenté grâce à l’introduction d’armes d’avant-garde. On peut comprendre l’augmentation de la puissance de feu en exa- minant la façon dont la technologie a permis aux combattants de causer plus de dégâts à de plus grandes distances : la portée des armes fut constamment allongée, passant successivement de celle d’une lance à celles de l’arc et de la 10,000 7,500 5,000 2,500 0 Guerre de 1e guerre Sécession mondiale Densité des combattants sur le champ de bataille (par kilomètre carré) flèche, de la balle, de l’obus d’artillerie et enfin du missile. De nouvelles technologies telles que les missiles hypersoniques, qui peuvent franchir des centaines de kilomètres en quel- ques minutes, ou les armes à énergie dirigée, qui peuvent engager l’ennemi à la vitesse de la lumière, nous permettent d’allonger la portée d’une arme au-delà des frontières nationales, voire même autour du monde, et ainsi de réduire encore plus la densité du personnel sur le champ de bataille. L’accroissement de l’efficacité militaire imputable à la science et à la technologie En 1945, J. F. C. Fuller cita le rayon d’ac- tion, la puissance de frappe, la précision de visée, le volume du feu et la mobilité comme paramètres qualitatifs caractérisant la puis- sance d’une arme, donnant au rayon d’action la priorité absolue.1 Le général de brigade Simon P. Worden (c.f.), de l’armée de l’air, développa ce concept en extrayant l’efficacité militaire comme mesure de base de la puis- 8,200 5,900 2,200 400 0.5 2e guerre Europe, 1989 2e guerre du mondiale Golfe Figure 1. Densité du personnel sur le champ de bataille, basée sur des données présentées dans l’étude de Kenneth L. Adelman et Norman R. Augustine, The Defense Revolution: Intelligent Downsiz ing of America’s Military (La révolution de la défense : Une réduction intelligente des effectifs militaires américains), San Francisco: Institute for Contemporary Studies Press, 1990, p. 55, et par Cable News Network (CNN). 36 AIR & SPACE POWER JOURNAL Tableau 1. Efficacité des armes Epoque Arme Tempsa (année après J.-C.) 1000 flèche 6 mois 1500 balle 3 mois 1800 artillerie 1 mois 1900 artillerie 1 semainer 1930 aéronef 1 jour 1950 aéronef 1 jour 1970 ICBM 1 heure 2015 SBKKVc 1 heure 2020 laser 5 minutes Luminance (joule/stéradian) 108 109 1012 1014 1019 1023 1023 1023 1022 Cadence de tir Efficacitéb (par sec.) (joule/stéradian/sec.) 10-2 106 10-1 108 10-1 1011 10 1014 10-1 1018 10-2 1021 10-1 1022 10 1023 10 1024 Source : Reproduit de l’étude de Simon P.Worden, SDI and the Alternatives (L’initiative de défense stratégique et les alternatives),(Washington,DC: National Defense University Press, 1991, 14. a Temps = la période de combat, ainsi que le temps qu’il faut pour se mettre en position pour mettre en œuvre les armes b Efficacité = luminance x cadence de tir c SBKKV = engin tueur à énergie cinétique basé dans l’espace sance militaire d’une arme.2 On peut définir l’efficacité en termes de luminance (un terme utilisé fréquemment par les ingénieurs spécia- listes des lasers pour mesurer la capacité de ceux-ci) par unité de temps ou de mesure de la portée, de la précision et de la puissance par unité de temps d’une arme, combinées en un même chiffre (Tableau 1). Notez la présentation de l’efficacité militaire sous une forme compacte comme chiffre expo- nentiel – ce qui signifie, naturellement, que les balles ont une efficacité militaire 102 ou 100 fois supérieure à celle des flèches (108 divisé par 106) et que les missiles balistiques intercon- tinentaux (ICBM) sont 108 ou 100 millions de fois plus efficaces que l’artillerie en 1900 (1022 divisé par 1014). Worden présente les lasers comme dix milliards de fois plus efficaces que l’artillerie. Bien que les tactiques et la stratégie militaires aient joué un rôle dans l’accroisse- ment de l’efficacité de ces armes, les progrès accomplis en termes d’efficacité militaire déri- vèrent principalement de l’exploitation de la science et de la technologie (S et T) (Fig. 2). On remarque l’augmentation spectaculaire de cette efficacité sur une échelle logarithmique ; c’est-à-dire que l’axe vertical sur la figure fait apparaître des puissances exponentielles de 10. La valeur maximum de 25 n’est donc pas supérieure d’un simple facteur de cinq à 20 mais de 105 –soit 100 000 fois supérieure. Quand cette augmentation de l’efficacité militaire s’arrêtera-t-elle ? Au rythme actuel, elle ne cessera pas dans un avenir prévisible, dans la mesure où la technologie présente sur le champ de bataille continue à s’étendre. Pour le combattant, cela signifie que les armes utili- sées pour gagner la guerre de demain différe- ront autant des armes d’aujourd’hui que ces dernières diffèrent de celles utilisées pendant la deuxième guerre mondiale. Cela ne se pro- duira toutefois que si nous continuons à inves- tir dans la science et la technologie car les pro- grès dans ce domaine doivent venir de quelque part –n’oubliezpasquelesarmesd’aujourd’hui sont le résultat des investissements d’hier. Si nous n’investissons pas, nous livrerons la guerre de demain avec la technologie d’aujourd’hui – mais il est possible que cela ne soit pas le cas de nos adversaires. Ou, ce qui ne vaut pas mieux, le fait que nous inventons quelque chose ne signifie pas que nous serons les premiers à l’ex- ploiter. Le pays qui inventa l’avion se retrouva obligé d’utiliser des avions construits dans d’autres pays lors de la première guerre mon- diale. L’historien de l’aviation Richard Hallion a fait remarquer qu’une décennie après le pre- mier vol des frères Wright, les avions militaires américains ne représentaient que 2,5 pourcent SCIENCE ET TECHN0LOGIE 37 30 25 20 15 10 5 0 1000 1500 1800 1900 1930 1950 1970 2015 2020 Année Figure 2. Efficacité militaire au fil des ans, basée sur des données présentées dans l’étude de Simon P. Worden, SDI and the Alternatives (L’initiative de défense stratégique et les alternatives), Washington, Log (efficacité militaire) “Luminance par unité de temps” DC: National Defense University Press, 1991].) du nombre total d’avions militaires alors en service dans le monde.3 Sans un programme soutenu de science et de technologie, les brillantes idées de nos chercheurs scientifiques et de nos ingénieurs dépériront ou, ce qui serait pire, tomberont peut-être dans les mains de futurs adversaires. Si toutefois nous continuons à investir dans la science et la technologie et à exploiter les progrès accomplis dans celles-ci, le champ de bataille de demain consistera en réseaux inter- connectés à l’échelle planétaire assurant la poursuite des objectifs au moyen de capteurs répartis, sophistiqués, intelligents et reconfi- gurables ; de micro combattants ; de platefor- mes aériennes / terrestres / maritimes / spa- tiales furtives et de systèmes d’armes à longue portée, conventionnels (non nucléaires), uploads/Science et Technologie/ beason.pdf

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