CORÉE DU SUD : LES STRATÉGIES D'UNE PUISSANCE SCIENTIFIQUE ET TECHNOLOGIQUE ÉME
CORÉE DU SUD : LES STRATÉGIES D'UNE PUISSANCE SCIENTIFIQUE ET TECHNOLOGIQUE ÉMERGENTE Guy Faure L’Esprit du temps | « Outre-Terre » 2014/2 N° 39 | pages 91 à 104 ISSN 1636-3671 ISBN 9782847952872 DOI 10.3917/oute1.039.0091 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-outre-terre2-2014-2-page-91.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour L’Esprit du temps. © L’Esprit du temps. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. 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La fusée sud-coréenne a décollé de la base de Naro, dans le sud du pays, avant de libérer le satellite scientifi que STSAT-2C qui recueille des données sur les radiations cosmi- ques. Le ministre des Sciences, Lee Ju-ho, a évoqué un « succès pour tout le peuple » sud-coréen. Ce lancement est hautement symbolique de la situation coréenne en science et technologie en termes de réalisations et d’ambitions. Car le pays est à la fois lancé dans une course de rattrapage avec le Japon dans les domaines de pointe, et talonné par la montée en puissance des autres pays émergents, comme la Chine qui menace ses positions dominantes dans trois industries, principalement l’automobile, l’électronique et les chantiers navals. Comme le Japon dans les décennies d’après- guerre, la Corée a marqué une nette préférence pour les transferts de technologies des États-Unis et du Japon et dans une moindre mesure de l’Europe ainsi que de la Russie2. Compte tenu de la concurrence avec les autres pays industriels, cette situa- tion n’est plus tenable ni acceptable aujourd’hui. Dès lors, la Corée du Sud cherche à réorienter son système scientifi que de la recherche fi nalisée à la recherche fonda- mentale grâce aux politiques volontaristes et ambitieuses des gouvernements récents qui attribuent des budgets conséquents à la recherche scientifi que. Ainsi la Corée qui traditionnellement allouait plus de 80 % de son budget aux sciences appliquées a commencé à rééquilibrer ce ratio en faveur de la recherche fondamentale (70 % pour les recherches appliquées contre 30 % pour les fondamentales). Le gouvernement de Madame Park Geun-hye, élue fi n 2012, a prévu un équilibre plus important marqué en faveur des sciences fondamentales (45 % dans le budget 2013). 1 Directeur du bureau Asie du Nord du CNRS, à Tokyo 2 Le propulseur de la fusée Naro 1 est de fabrication russe. © L?Esprit du temps | Téléchargé le 29/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 82.76.1.42) © L?Esprit du temps | Téléchargé le 29/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 82.76.1.42) 92 Guy Faure Tableau 1 : Dépenses intérieures brutes en R&D aux prix PPA courants Pays Budget en MDS $ 2010 Croissance 2000-2010 1. États Unis 401,5 40% 2. Chine 178,9 660% 3. Japon 140,8 40% 4. Allemagne 86 60% 5. Corée 53,18 300% 6. France 49,99 50% 7. Royaume-Uni 39,13 40% 8. Russie 32,8 300% 9. Italie 24,2 60% 10. Canada 24 30% 11. Taiwan 23 260% Source : OCDE, Principaux indicateurs de la science et de la technologie, vol.2012, n° 1, 2012 La Corée a connu des avancées technologiques qui se traduisent sur les marchés extérieurs par les succès commerciaux de ses entreprises. Mais cette réussite écono- mique recouvre un eff ort scientifi que pas moins considérable. Le pays est passé en dix ans de la 16e à la 12e place en tant que producteur d’information scientifi que. Les eff ectifs de la recherche coréenne sont à la hauteur de ses ambitions. Avec un total équivalent plein temps de 264 118 chercheurs, elle est au 7e rang devant la France avec un taux pour mille emplois de 11,1 qui la place au quatrième rang mondial derrière la Finlande (17), le Danemark (12,6), et Taiwan (12,2). Dans un premier temps, nous présenterons les diff érentes étapes du développe- ment du système d’innovation coréen. Ensuite nous décrirons son organisation, les principaux acteurs scientifi ques et ses réalisations. Enfi n, pour conclure nous évo- querons les défi s à relever et les ambitions scientifi ques du nouveau gouvernement de Madame Park Geun-hye. 1. LE DÉVELOPPEMENT DE LA POLITIQUE SCIENTIFIQUE ET TECHNOLOGIQUE Après la période d’extrême pauvreté (de 1953 à 1960) qui a suivi la guerre de Corée où le pays dépendait à plus de 70 % de l’aide internationale pour couvrir ses importations, l’arrivée au pouvoir du président Park Chung-hee va ouvrir la voie au © L?Esprit du temps | Téléchargé le 29/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 82.76.1.42) © L?Esprit du temps | Téléchargé le 29/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 82.76.1.42) 93 Corée du Sud : les stratégies d’une puissance scientifi que et technologique émergente développement rapide du pays3. Un premier plan quinquennal de développement économique accorde la priorité aux industries légères orientées vers l’export avec une politique de substitution aux importations. Ce plan incluait déjà des stratégies pour le développement de la science et la technologie. Cette politique de substitution aux importations basée sur une main-d’œuvre bon marché demandait des usines et du personnel qualifi é. La Corée, qui ne possédait ni l’un ni l’autre, a dû acquérir des usines clef en main et assimiler rapidement des technologies. Il a fallu créer des insti- tutions scientifi ques. La première fut le Korea Institute for Science and Technology (KIST) en 1967. L’année suivant un ministère de la Science et de la Technologie fut établi. Depuis le début de l’histoire du développement économique coréen, la poli- tique scientifi que et technologique (S&T) du pays a toujours fonctionné de concert avec les politiques économiques et industrielles (cf. tableau 2 infra) On peut distinguer dans l’histoire du développement scientifi que coréen une pre- mière phase de construction, ex nihilo, d’institutions pour les besoins d’un système national d’innovation tout au long des années 1960 et 1970. Dans les deux décen- nies suivantes, de 1980 à 2000, les politiques de la S&T coréennes vont se fi xer pour cap de se mettre à niveau pour les technologies les plus avancées. Soit une politique très volontariste de rattrapage. Au cours de cette phase les pays industriels avancés sont de plus en plus réticents à procéder à des transferts de technologies vers un pays que l’on perçoit comme un concurrent agressif à l’international. La Corée n’a plus d’autre choix que de développer ses propres technologies et de promouvoir le pro- cessus par des programmes de recherche et développement (R&D) nationaux. Au tournant du siècle, elle change de paradigme scientifi que et technologique en étant à la pointe dans certains domaines technologiques comme les semi-conducteurs et les télécommunications. Depuis 2000, les politiques scientifi ques se sont consacrées à l’amélioration des capacités à produire une innovation locale et à conforter une position de leadership international en science et technologie dans une palette de domaines scientifi ques de plus en plus large. 3 Cf. Yongsuk Jang, STI in History, Evolution of Korean STI Policies, STI Policy Review, vol.2, n° 2, Séoul, 2012. © L?Esprit du temps | Téléchargé le 29/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 82.76.1.42) © L?Esprit du temps | Téléchargé le 29/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 82.76.1.42) 94 Tableau 2 : Le développement de la Corée en S&T Source : Yongsuk Jang, STI in History, Evolution of Korean STI Policies, STI Policy Review, vol.2, n° 2, Séoul, 2012 Années 60 70 80 90 2000 2010 Époque Orientée sur l’export Tirée par les exportations Libéralisation économique Démocratisation Progrès Leader mondial Industries cibles Industries légères Industrie lourde Industrie de montage et d’assemblage STIC (sciences et technologies de l’information et de la communication) Industries de la connaissance Knowledge Service/ New converging/ Green Industries Facteur de compétition Main-d’œuvre bon marché Main-d’œuvre qualifi ée Investissement en capital Technologies Innovation en S&T Innovation avancée en S&T Politiques S&T Importation de capital clé en main/ apprentissage technologique Internalisation de technologies importées/ Reverse Engineering Modifi cation de technologies importées/ Développe- ment de technologies nationales Rattrapage des technologies avancées/ Grands programmes gouvernemen- taux en S&T Accent sur les technologies domestiques Accent sur les convergences/ S&T mondialisées Guy Faure © L?Esprit du temps | Téléchargé le 29/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 82.76.1.42) © L?Esprit du temps | Téléchargé le 29/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 82.76.1.42) 95 2. 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- Publié le Oct 27, 2022
- Catégorie Science & technolo...
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