1 La nature (Physique, chap. II) Aristote Collection dirigée par Laurence Hanse

1 La nature (Physique, chap. II) Aristote Collection dirigée par Laurence Hansen-Løve Introduction et commentaire par Jean-Claude Fraisse Traduction O. Hamelin Edition numérique : Pierre Hidalgo La Gaya Scienza, © novembre 2011 2 Table des matières Introduction .................................................................. 4 Note sur la vie et les écrits d’Aristote ............................... 4 1. L’objet de la Physique ................................................... 7 Introduction : sens du mot « physique » .............. 7 Nature et changement ......................................... 10 Qu’est-ce qu’un être naturel ? .............................. 13 Définition par la matière ...................................... 15 Définition par la forme ......................................... 16 2. Place de la physique parmi les sciences ..................... 20 Physique et mathématiques ................................. 21 Comparaison avec les arts ................................... 24 Physique et science du divin ................................ 27 3. Les différents sens du mot cause ............................... 31 Combinaison des causes et degrés de détermination ............................................................ 34 4. Confusions des prédécesseurs d’Aristote ................... 37 La fortune (chance) et le hasard .......................... 37 5. La prétendue explication par la fortune ..................... 41 6. Qu’est-ce que le hasard ? ........................................... 46 7. L’unification des causes et leur fondement immobile 50 8. Critique du mécanisme .............................................. 55 Son insuffisance .................................................. 56 3 Ses incohérences ................................................. 59 9. Les divers sens du mot nécessité ................................ 62 Conclusion ..................................................................... 68 Note bibliographique ...................................................... 71 Aristote, Physique II .................................................... 73 Chapitre premier ............................................................ 73 Chapitre II ...................................................................... 78 Chapitre III .................................................................... 81 Chapitre IV ..................................................................... 86 Chapitre V ...................................................................... 89 Chapitre VI ..................................................................... 93 Chapitre VII ................................................................... 96 Chapitre VIII .................................................................. 97 Chapitre IX................................................................... 103 Lexique ....................................................................... 107 À propos de cette édition électronique ....................... 112 4 Introduction Note sur la vie et les écrits d’Aristote Aristote naquit en 384 av. J. -C. à Stagire, en Chalci- dique, d’un père qui était le médecin du roi de Macédoine, père de Philippe et grand-père d’Alexandre le Grand. Sa mère était originaire de Chalcis, dans l’île d’Eubée. Il arri- va à Athènes en 366, et entra à l’Académie, école fondée par Platon. Il y resta jusqu’à la mort de celui-ci, en 348, collaborant à l’enseignement qui y était donné. L’Académie étant prise alors en charge par Speusippe, neveu de Platon, il fonda une sorte de filiale de l’Académie en Troade, puis dut se transporter à Mytilène, dans l’île de Lesbos, patrie de Théophraste, qui devait devenir son suc- cesseur. Il fut appelé en 343 à la cour de Macédoine, pour être le précepteur d’Alexandre, avant que ce dernier ne s’engageât dans ses brillantes campagnes militaires. Après la mort de Philippe, et l’accession d’Alexandre au trône, il revint vers 335 à Athènes, où il fonda une école rivale de l’Académie, le Lycée, appelée plus tard Péripatos. Devenu suspect au parti antimacédonien à la mort d’Alexandre, en 323, il retourna à Chalcis, où il devait mourir en 322. L’œuvre d’Aristote, très étendue, a connu un destin singulier. Ses ouvrages destinés à la publication ont été perdus, malgré leur grand succès littéraire auprès des an- ciens, et nous n’en possédons que des fragments sous 5 forme de citations. Nous possédons en revanche des trai- tés destinés à des cours ou à des conférences, comportant parfois des remaniements, des redites, et des sortes de notes, sans grand artifice de présentation. Ces traités ont été réunis au premier siècle av. J. -C. par Andronicos de Rhodes, lointain successeur d’Aristote à la tête du Lycée ; il en a composé un corpus, où il a réuni, sous un certain nombre de rubriques, traités de logique, ou de méthode, sous le nom d’Organon – ou instrument -, de Physique, de psychologie et de biologie, de Métaphysique ensuite. Sui- vent deux versions de l’Ethique aristotélicienne, dont la principale est l’Ethique à Nicomaque, un recueil de huit livres sur la Politique, puis trois livres sur la Rhétorique, et un fragment d’une Poétique. Les anciens y ont joint cer- tains traités apocryphes ou d’origine mal déterminée. La composition du corpus a donc quelque chose d’artificiel : les « livres » d’un même ouvrage ne sont parfois que mal enchaînés les uns aux autres, et peuvent dater d’époques différentes. Aristote y fait parfois allusion à des traités publiés, que nous ne possédons pas. D’où une grande part laissée à la perspicacité des interprètes et des historiens, voire à leur ingéniosité et leur invention. Cela explique sans doute en partie l’innombrable quantité de commen- taires dont l’œuvre d’Aristote a été l’objet. Ajoutons que notre Moyen Âge a eu connaissance des commentaires arabes d’Aristote avant d’avoir accès au corpus d’Andronicos. La découverte de celui-ci, au XIIe siècle, devait susciter un renouveau philosophique et scientifique qui a conduit toutes les doctrines classiques à se référer à lui. D’où cette admiration qui faisait d’Aristote, aux yeux de nos ancêtres médiévaux, « le Philosophe », sans autre 6 précision, et l’opposait à une tradition plus ancienne, transmise à travers l’augustinisme, celle de la philosophie platonicienne. Cette opposition, pour réelle qu’elle soit, n’est évidemment pas aussi tranchée qu’on a pu le croire, si l’on songe à la filiation de Platon lui-même à Aristote dans l’Académie. Mais elle fonde suffisamment l’idée d’une évolution progressive d’Aristote vers l’originalité de sa propre doctrine. Cette originalité se manifeste cependant tout de suite dans l’étendue de l’œuvre scientifique d’Aristote, dans son attention à l’étude des phénomènes naturels, dans la somme d’enquêtes qu’il a consacrées à la description du monde, des vivants, des propriétés des corps, etc. Elle se manifeste aussi dans son effort pour définir des principes de connaissance objectifs, et adaptés aux objets considé- rés. Là où Platon s’interrogeait surtout à propos des ma- thématiques et de la manière dont les nombres régissaient l’univers, à la suite des pythagoriciens, Aristote envisage des moyens plus souples de rendre les choses intelligibles. C’est notamment l’objet de sa Physique. Celle-ci, comme ses autres « œuvres », est faite de traités différents et plus ou moins bien liés les uns aux autres : I. – Les conditions générales du changement : contraires, matière et forme. II – L’idée de Nature. III-IV. – Le mouvement, l’infini, le lieu, le temps. V. – Les espèces du mouvement. VI. – La continuité comme condition du mouvement. VII – Mou- vement, moteur et mobile. Existence d’un premier moteur. VIII. – Nécessité d’un premier moteur immobile et unique. 7 On peut ajuste titre considérer que le livre II est le plus synthétique de tous pour la définition de l’objet de la phy- sique et de ses principes. Il est également certain, cepen- dant, qu’il fait parfois allusion à d’autres développements, donnés dans d’autres traités. D’autre part, la nature même de cet écrit fait qu’Aristote, très souvent, s’adapte à une objection possible, revient de différentes manières sur un même point. C’est ce qui explique la difficulté de lecture d’un pareil texte et la nécessité, parfois, de le suivre en ses méandres. 1. L’objet de la Physique Introduction : sens du mot « physique » Le premier chapitre du livre II de la Physique s’attache d’abord à définir ce qu’est cette science : celle de la phusis ou nature. Il faut d’abord comprendre que dans la pensée grecque, et dans celle d’Aristote en particulier, le mot n’a pas le même sens que pour nous, à la fois en vertu de son étymologie et parce que l’histoire de la physique, en tant que science déterminée, n’a pas encore eu lieu. L’étymologie impose de considérer comme relevant de la physique tout ce qui pousse, vit, croît à la surface de la Terre (du verbe phuein), tous les organes de ces êtres, éventuellement les éléments dont les transformations ré- ciproques sont au principe de cette vie (les vivants respi- rent l’air, ont besoin d’eau, en appellent par leur chaleur intérieure à quelque chose d’igné1, retournent à une terre 1 Qui a les caractères du feu. 8 qui semble constituer, au prix de certaines modifications, leur matière même). On voit donc que ce que nous appel- lerions biologie, ou science de la vie, par exemple, fait par- tie de la physique, ou de ce que nos ancêtres appelaient encore, au XVIIIe siècle, « philosophie naturelle ». L’histoire de la physique, d’autre part, n’en a pas encore fait, comme ce sera le cas à la fin du XVIe et au XVIIe siècle, notamment avec Galilée, une science où les ma- thématiques trouvent leur application ; elle n’a donc re- cours ni à des données purement quantitatives ni à des descriptions abstraites, où la géométrie, puis l’algèbre, rendraient compte du mouvement. La physique aristotéli- cienne s’oppose bien plutôt aux mathématiques, dont les objets ne sont pas des objets sensibles, ou du moins n’existent que par abstraction, et n’ont pas, comme le dit Aristote, d’existence « séparée », c’est-à-dire séparée d’une matière où ils doivent nous être présentés et qui n’intéresse pas le mathématicien en tant que telle2. Ajou- tons que les objets mathématiques sont, aux yeux d’Aristote, immobiles, ce qui les rend totalement diffé- rents des objets étudiés par la physique. Plus riche de sens apparaît à Aristote la distinction entre la physique, qu’il appelle « philosophie seconde », et la « philosophie pre- mière », qui uploads/Sante/ aristote-fraisse 1 .pdf

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  • Publié le Mar 16, 2021
  • Catégorie Health / Santé
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