Cardiopathies congénitales F Heitz L a connaissance et le traitement des cardio
Cardiopathies congénitales F Heitz L a connaissance et le traitement des cardiopathies congénitales ont bénéficié de progrès considérables depuis 25 ans : diagnostic devenu fiable grâce à l’échocardiographie-doppler, avec possibilité de dépistage prénatal dès la 18e semaine d’aménorrhée, action spectaculaire des prostaglandines intraveineuses dans certaines situations de détresse vitale néonatale, adaptation du matériel et des techniques de chirurgie cardiaque au très jeune l’enfant. © Elsevier, Paris. I Épidémiologie La prévalence des cardiopathies congénitales est estimée entre 4 et 8 pour 1000 naissances vivantes, elle est légèrement supérieure chez le garçon (sex-ratio M/F : 1,08). La distribution par fréquence des cardiopathies varie avec : – la race et le groupe ethnique ; – le sexe : prédominance chez le garçon des lésions obstructives du cœur gauche et des cardiopathies « conotroncales » : tétralogie de Fallot, atrésie pulmonaire à septum ouvert, tronc artériel commun, ventricule droit à double issue, atrésie pulmonaire, interruption de l’aorte type B, arc aortique droit ; prédominance chez la fille de la communication interauriculaire (CIA) et du canal artériel ; – l’âge de révélation (tableau I) : les cardiopathies les plus sévères se révèlent habituellement dès la naissance ou sont dépistées in utero. I Rappels embryologiques et physiologiques ‚ Organogenèse du système cardiovasculaire Elle résulte de processus complexes, transformant le tube cardiaque primitif, d’origine mésenchyma- teuse, en un cœur achevé et fonctionnel dès la 6e semaine de gestation ; la croissance ultérieure sera influencée par les flux sanguins et les paramètres hémodynamiques de la circulation fœtale. Celle-ci est caractérisée par : – la circulation ombilicoplacentaire assurant l’hématose fœtale ; – le niveau très élevé et suprasystémique de la résistance vasculaire pulmonaire ; – la présence de communications vasculaires (canal artériel, ductus venosus) et intracardiaques (foramen ovale), responsables du fonctionnement en « parallèle » des ventricules avec débit cardiaque « combiné ». Elles permettent la tolérance in utero de cardiopathies devenant sévères ou létales lors de la fermeture postnatale de ces communications. ‚ Adaptation cardiocirculatoire à la vie extra-utérine Expansion alvéolaire et vasodilatation artériolaire pulmonaire active entraînent la chute immédiate de la résistance pulmonaire et l’accroissement du débit pulmonaire. La fermeture du canal artériel et du foramen ovale, fonctionnelle durant les premiers jours de vie, devient définitive après plusieurs semaines. L’adaptation de la fonction myocardique néonatale est immédiate puisque les ventricules fonctionnent désormais « en série », chacun devant assurer la totalité du débit cardiaque. Enfin, la maturation vasculaire pulmonaire se poursuit durant plusieurs mois, avec diminution de la résistance vasculaire pulmonaire : amincissement progressif de la média des parois artériolaires, croissance des branches pulmonaires et prolifération capillaire accompagnant l’alvéologenèse jusqu’à la deuxième enfance. Ces mécanismes physiologiques pourront être perturbés par la présence d’une cardiopathie, avec pour conséquences la persistance des communica- tions fœtales et de la résistance vasculaire pulmonaire élevée. I Étiologies Les malformations correspondent à l’arrêt du développement cardiaque à un stade donné de l’organogenèse, et les mécanismes pathogènes demeurent hypothétiques (Clark et al) : anomalies du situs auriculaire et de la boucle ventriculaire ; anomalies de migration cellulaire et notamment des crêtes neurales (population de cellules induisant le Tableau I. – Distribution des cardiopathies selon l’âge de révélation (%) (valeurs moyennes à par- tir de plusieurs séries publiées). Nouveau-né Tous âges confondus Transposition gros vaisseaux 13,0 CIV 32,1 Tétralogie de Fallot 10,0 Sténose pulmonaire 9,0 Hypoplasie cœur gauche 9,8 CIA ostium 2 7,7 CIV périmembraneuse 9,8 Canal AV 7,4 Canal AV 7,0 Tétralogie de Fallot 6,8 CIV musculaire 5,4 Transposition gros vaisseaux 4,7 Atrésie pulmonaire 4,6 Coarctation AO 4,6 Hétérotaxie 4,5 Hypoplasie cœur gauche 3,8 Coarctation aorte 4,3 Sténose aortique 2,9 Sténose aortique 3,9 Canal artériel 2,4 Sténose pulmonaire 3,2 Hétérotaxie 2,3 VDDI 2,9 VDDI 2,9 CIA 2,4 Cardiomyopathie 1,9 Divers 16,6 Divers 10,6 AO : aorte ; CIV : communication interventriculaire ; AV : atrioventriculaire ; VDDI : ventricule droit à double issue ; CIA : communication interauriculaire 1 AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 8-0680 © Elsevier, Paris 8-0680 développement d’autres structures), fréquemment liées à des microdélétions chromosomiques 22q1 1 ; perturbations hémodynamiques in utero ; anomalies de la matrice extracellulaire et du développement des bourgeons endocardiques ; défauts de croissance tissulaire ; mort cellulaire. Près de 90 % des cardiopathies n’ont pas d’étiologie reconnue. La coïncidence d’une prédisposition génétique individuelle et de facteurs environnementaux encore mal connus aboutit à une malformation cardiaque, selon le concept « d’hérédité multifactorielle à seuil » développé par Nora et al. I Diagnostic des cardiopathies ‚ Principales situations cliniques et conduite à tenir Dépistage systématique I Le dépistage prénatal par échographie morphologique de routine à 20 semaines d’aménorrhée, ou par échocardiograhie spécialisée motivée en raison de facteurs de risques cardiologiques ou d’anomalies suspectes a pour objet d’informer les parents, de préparer la naissance et d’organiser les soins périnataux en milieu spécialisé. Une interruption médicale de grossesse peut être envisagée si la cardiopathie est jugée létale ou à l’origine d’un handicap majeur ; l’analyse du caryotype fœtal est nécessaire. I Le dépistage postnatal est soit précoce, en maternité et chez le nourrisson, soit plus tardif, à l’école et lors d’une demande de certificat d’aptitude au sport ; il est essentiellement basé sur la découverte d’un souffle cardiaque, d’une hypertension artérielle (HTA) ou d’une abolition des pouls fémoraux. Il est indispensable de pouvoir distinguer un souffle innocent d’un souffle organique, lequel motivera des examens spécialisés. Cardiopathies symptomatiques I Les cardiopathies à révélation néonatale présentent le plus souvent un caractère d’urgence : insuffisance cardiaque aiguë, détresse respiratoire, cyanose intense, survenant après un intervalle libre de quelques jours, lors de la fermeture du canal artériel si la cardiopathie est « ductodépendante ». Le transfert médicalisé de l’enfant en milieu spécialisé est indispensable, pour une prise en charge médicochirurgicale immédiate. Le tableau II résume les principales étiologies. I Principauxsymptômeschezlenourrisson : – insuffisance cardiaque progressive : fatigabilité et tachypnée d’effort, difficultés alimentaires, hypotrophie staturopondérale, hypersudation chronique. L’enfant est pâle, souvent irritable, ou au contraire trop calme et ne réclamant pas ses repas. L’examen met en évidence une tachycardie, parfois un bruit de galop, une hépatomégalie avec reflux hépatojugulaire, des râles humides aux bases pulmonaires. Une cardiomégalie radiologique avec surcharge vasculaire et/ou œdème pulmonaire est habituelle. L’échographie constitue l’exploration à visée étiologique la plus efficace ; – hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) : évoquée principalement dans un contexte de shunt gauche-droite (G-D) volumineux, en présence d’une cyanose et d’une tachypnée d’effort, et à l’auscultation d’un B2 unique et claqué au foyer pulmonaire ; le souffle de communication est discret ou absent ; hépatomégalie, troubles respiratoires chroniques et retard de croissance sont constants ; – cyanose : coloration bleutée des téguments et des muqueuses, localisée à la région péribuccale et aux extrémités, ou plus diffuse ; la mesure transcutanée de la saturation en oxygène du sang (SO2 Tc) confirme des valeurs abaissées inférieures à 93 % (N : 95-100 %). L’administration d’O2 n’a pas d’effet en cas de cardiopathie cyanogène, ce qui définit l’état d’hypoxémie réfractaire, mais améliore en revanche la SO2 en cas d’insuffisance de l’hématose de cause respiratoire. D’autres symptômes sont associés à la cyanose : tachypnée d’effort superficielle, modification comportementale du nourrisson (anxiété, agitation, économie des efforts) et léger retard staturopondéral. La présence d’une cyanose implique un diagnostic urgent. I Cardiopathies de l’enfant et de l’adolescent : le plus souvent, l’enfant bénéficie à cet âge d’une surveillance cardiologique pour antécédents de cardiopathie, déjà opérée ou non. Les symptômes à type de dyspnée d’effort, de douleurs thoraciques ou de palpitations, de malaise, seront rapportés directement par le patient et pourront plus facilement être analysés. Les cardiopathies relativement silencieuses comme la CIA, les anomalies partielles du retour veineux pulmonaire, la bicuspidie aortique ou d’autres anomalies valvulaires, la cardiomyopathie hypertrophique, seront découvertes à cet âge ou chez l’adulte. I Les troubles du rythme cardiaque peuvent révéler ou plutôt compliquer l’évolution de certaines cardiopathies par une insuffisance cardiaque : bradycardie régulière entre 50 et 80 b/min évocatrice de BAV congénital, ou tachycardie régulière et paroxystique au-delà de 200 b/min essentiellement d’origine supraventriculaire. ‚ Examens complémentaires I Échocardiographie : méthode non invasive et reproductible, essentielle. Le mode Tm permet le calcul précis des dimensions et de la cinétique ventriculaire. Le mode 2D offre la possibilité d’analyser l’architecture cardiaque en deux dimensions, et autorise l’évaluation des débits et des fractions d’éjection ventriculaires. L’échographie par voie œsophagienne est surtout utile chez l’adolescent et l’adulte, ou dans le contexte postopératoire. L’imagerie en trois dimensions, très prometteuse, est d’apparition plus récente. I Doppler : la mesure des vélocités sanguines par effet doppler permet une approche hémodyna- mique non invasive des cardiopathies : calcul des Étiologies des cardiopathies congénitales Anomalies génétiques : – les aberrations chromosomiques sont responsables de 5 % des cardiopathies : trisomie 21 surtout (1/700 naissances), avec cardiopathie dans 50 % des cas ; – les anomalies monogéniques suivent les lois de l’hérédité mendélienne, mais avec une pénétrance variable. L’action pléiotrope des gènes explique la fréquence des syndromes polymalformatifs dont la cardiopathie n’est qu’un élément. Facteurs tératogènes spécifiques : ils sont responsables d’embryofœtopathies et de 2 % des cardiopathies uploads/Sante/ cardiopathies-congenitales.pdf
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- Publié le Nov 12, 2022
- Catégorie Health / Santé
- Langue French
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