Accidents d'électrisation Conférences d'actualisation SFAR 1997 PY Gueugniaud,

Accidents d'électrisation Conférences d'actualisation SFAR 1997 PY Gueugniaud, G Vaudelin, M Bertin-Maghit, P Petit Centre universitaire de réanimation et de traitement des brûlés, service d'anesthésie-réanimation VII, hôpital Édouard-Herriot, 3, place d'Arsonval, 69437 Lyon cedex 03 POINTS ESSENTIELS · Parmi les accidents dus à l'électricité (AE), il faut distinguer ceux provoqués par un courant à basse tension et ceux induits par un courant à haute tension. · La gravité des AE par basse tension est essentiellement liée au risque d'accidents cardiovasculaires aigus. · Les arrêts circulatoires induits par le courant de basse tension sont en règle générale dus à une fibrillation ventriculaire, plutôt de bon pronostic si la chaîne des secours est efficace. · Les AE par haute tension, avec passage du courant à travers l'organisme, provoquent une brûlure profonde par effet Joule le long des axes vasculonerveux, entre les points d'entrée et de sortie qui sont le siège de lésions délabrantes. · Les phénomènes d'arc et de flash électrique, responsables d'un fort dégagement de chaleur, entraînent des lésions cutanées d'origine thermique. · En cas de brûlure électrothermique par haute tension, le remplissage vasculaire estimé à partir des lésions cutanées visibles doit être augmenté jusqu'à 8 à 12 mL · kg-1/% de surface cutanée brûlée pour les 24 premières heures. · La prévention de l'insuffisance rénale aiguë repose également sur l'alcalinisation, afin de maintenir un pH urinaire neutre, et sur le recours précoce aux diurétiques. · En cas d'anurie, la technique d'épuration extrarénale de choix est l'hémodiafiltration continue. · L'indication d'amputation des segments de membres nécrosés doit par ailleurs être rapidement discutée. · Le traitement des lésions électrothermiques impose des gestes chirurgicaux d'urgence (escharrotomies, aponévrotomies), puis des interventions itératives dont les suites sont marquées par des séquelles fonctionnelles invalidantes. · La prévention des AE est fondamentale en particulier pour les accidents de travail au sein des professions exposées, et vis-à-vis des accidents domestiques chez les enfants. L'électrisation désigne l'ensemble des manifestations physiopathologiques liées à l'action du courant électrique sur le corps humain, alors que le terme plus couramment employé d'électrocution correspond à un décès par électrisation [1] . Pour qu'une électrisation se produise, il faut que deux points du corps de la victime soient soumis à une différence de potentiel. Elle résulte soit d'un contact direct avec un conducteur, soit d'un contact indirect par l'intermédiaire d'une masse mise sous tension par défaut d'isolement. Le passage de courant électrique dans l'organisme se fait entre un ou plusieurs points d'entrée et de sortie appelés " marques électriques de Jellineck " [2] . Le point d'entrée est souvent situé sur un membre supérieur, en contact avec le conducteur électrique. Le point de sortie est alors en contact avec le sol. Les points d'entrée et de sortie sont caractérisés par des brûlures profondes et bien limitées, sur une faible surface cutanée. Entre les deux, le courant électrique passe dans l'organisme en générant des lésions électriques vraies au niveau cardiaque, neurologique et musculaire, et des lésions électrothermiques par production de chaleur sur le trajet du courant. Les lésions électrothermiques sont le plus volontiers situées au niveau des masses musculaires et des axes vasculonerveux, générant un tableau apparenté au crush syndrome . Les brûlures dues à l'électricité se caractérisent par une évolution insidieuse et torpide. Il existe une dissociation entre la clinique initiale et l'étendue exacte des lésions, qui sont souvent sous-évaluées en raison des atteintes sous- jacentes initialement inapparentes. HISTORIQUE Des accidents liés à l'électricité naturelle sont observés depuis l'Antiquité. La foudre en est la forme la plus connue et aussi la plus dangereuse. Certains animaux peuvent aussi produire de l'électricité : c'est le cas du gymnote, poisson osseux muni de deux appareils électriques, qui produit des décharges suffisantes pour paralyser les poissons dont il se nourrit [3] . À partir de 1650, l'invention de différentes machines électrostatiques donna lieu aux premiers accidents liés à l'électricité produite par l'homme. En 1774, une décharge électrique appliquée sur un jeune homme en état de mort apparente a été suivie d'une reprise de la ventilation spontanée. Les découvertes se sont rapidement succédées au cours du 19e siècle, posant les fondements des connaissances actuelles à propos de l'électricité. En 1879 survint le premier accident du travail mortel par électrisation avec un courant alternatif de 250 volts (V) chez un machiniste de théâtre à Lyon [4] . En 1890 eut lieu la première exécution par chaise électrique. D'Arsonval, puis Prevost et Batelli ont étudié à la fin du 19e siècle les effets physiologiques du courant électrique et la cause des décès par électrisation. Les accidents électriques (AE) se sont multipliés avec le développement de l'utilisation domestique et industrielle de l'électricité au 20e siècle. ÉPIDÉMIOLOGIE Le nombre d'AE est très difficile à estimer précisément, car certains d'entre eux ne donnent pas lieu à une consultation ou à une hospitalisation. Ils représentent 2,7 à 6 % du recrutement des centres de traitement des brûlés dans les pays occidentaux [2] . Dans des pays où l'électricité n'est pas aussi répandue comme la Chine ou la Turquie, les AE sont plus fréquents et représentent 6,5 à 16,9 % des admissions en centres de brûlés [5] [6] . Les AE sont responsables d'une mortalité non négligeable, qui atteint entre 3 et 15 % des victimes [4] [7] . En Europe, il survient 5 AE mortels par million d'habitants et par an, soit environ 200 morts par an en France, dont 10 à 20 par la foudre. Aux États-Unis, 1 000 électrocutions sont relevées chaque année, dont environ 200 foudroyés [1] . La morbidité engendrée par les AE est considérable, avec selon les séries entre 25 et 71 % d'amputations, et des séquelles en particulier neurologiques et psychologiques qui peuvent être très invalidantes. Il existe deux principaux types d'AE en fonction de la tension du courant. En dessous de 1 000 V on parle de courant à basse tension. Ce sont essentiellement des accidents domestiques, dont les deux tiers des victimes sont des enfants. Au-dessus de 1 000 V, il s'agit d'AE par haute tension survenant surtout lors d'accidents du travail. L'homme jeune est le plus souvent concerné par ce type de traumatisme [7] . Les accidents domestiques représentent 55 % des AE recensés, et les électrisations par courant à haute tension 45 % [2] . Le chiffre des accidents domestiques est sans doute sous- évalué, car un certain nombre d'entre eux ne donne pas lieu à une consultation en centre spécialisé. PHYSIOPATHOLOGIE Les lésions occasionnées par le passage du courant électrique dépendent des différents paramètres qui caractérisent le contact avec le conducteur : intensité, tension, résistance au passage du courant lorsqu'il est continu ou impédance en courant alternatif, fréquence du courant, temps et surface de contact. Lors du passage du courant électrique dans un conducteur, il se produit un dégagement de chaleur qui obéit aux lois physiques de Joule : Q = I2RT et d'Ohm : I = V/R. Dans ces équations, Q représente le dégagement de chaleur produit en joules, I est l'intensité du courant en ampères, R la somme des résistances en ohms, V le voltage en volts et T le temps de contact en secondes [7] . Intensité du courant Le chiffre de l'intensité ne peut pas souvent être précisé en raison des variations des résistances au passage du courant. Son rôle dans la physiopathologie des AE est pourtant primordial. En effet, elle est responsable de la contraction musculaire et de la sidération des fibres nerveuses. Lorsque l'intensité augmente, on définit des seuils successifs à partir desquels apparaissent les différentes réactions au courant électrique [8] . Pour un courant alternatif tel qu'il est distribué en Europe (50 Hz), le seuil de perception est entre 1 et 2 milliampères (mA). La douleur apparaît à 5 mA. Le seuil de contraction musculaire se situe autour de 10 mA. Il s'agit de contractions diffuses qui disparaissent immédiatement si le courant est interrompu. Au niveau des membres supérieurs, elles prédominent sur les extenseurs pour les faibles intensités de courant, engendrant un phénomène de projection du sujet au loin. Si l'intensité est plus forte, les contractions prédominent au niveau des muscles fléchisseurs, et entraînent une réaction d'agrippement à la source de courant qui ne cédera qu'à l'interruption de ce dernier. Si l'intensité se situe entre 30 et 100 mA, on peut observer une tétanisation du diaphragme si le courant passe par la cage thoracique. Chez l'homme, le seuil de fibrillation ventriculaire (FV) est déterminé par interpolation des résultats expérimentaux obtenus sur des animaux. À partir de 30 mA, un courant électrique peut déclencher une fibrillation ventriculaire s'il passe par la région cardiaque lors de la phase réfractaire partielle du cycle cardiaque (onde T de l'ECG) [9] [10] . Le seuil d'apparition de la fibrillation ventriculaire diminue lorsque le temps d'application du courant électrique augmente. Une sidération des centres bulbaires ou un laryngospasme peuvent également se produire, responsables d'une mort subite. C'est donc " l'intensité qui tue ". Tension du courant Elle est généralement connue lors d'un AE. Elle détermine la quantité de chaleur libérée par le courant selon uploads/Sante/ electrisation.pdf

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  • Publié le Oct 04, 2022
  • Catégorie Health / Santé
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