u INITIATIO$ P HILbSOPHIQUE 1 Collection dirigée par Jean LACROIX • Comité de p
u INITIATIO$ P HILbSOPHIQUE 1 Collection dirigée par Jean LACROIX • Comité de patronage : ALQUIÉ (Ferdinand), Professeur à la Sorbonne. BACHELARD (Gaston), Professeur à la Sorbonne, BASTIDE (Georges), Professeur à l'Université de Toulouse. BERG'.Ek ( Gaston), Directeur de l'Enseignement supérieur. HussoN (Léon), Professeur à l'Université de Lyon. ·MADINIER (Gabriel), Professeur à l'Université de Lyon. RxcœUR (Pa.ut), Professeur à l'Université de Strasbourg. VIALATOUX (Joseph), Professeur aux Facultés catholiques de Lyon. • 1 cc I NITI ATION. PHILOSOPHI QUE» Collection dirigée par Jean LACROIX /MALADIE MENTALE ET PERSONNALITÉ . / par Michel (UCAULT / PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE 108, BoULEVARD SAINTGERMAIN, PARIS 1954 f: .. ' . ' . l f<t lf-·o F Dl1:POT Ll1:GAL lte l!d.ition • • 28 trimestre 1954 TOUS DROITS de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour tous pays COPYRIGHT hy Presses Universitaires de France, 1954 :) INTRODUCTION Deux questions se posent à toute pathologie mentale : sous quelles conditions peut-on parler de maladie dans le domaine psychologique ? Quels rapports peut-on définir entre les faits de la pathologie mentale et ceux de la pathologie organique ? Toutes les psychopathologies 1 se sont ordonnées à ces deux problèmes . : il y a les psychologies de l'hétérogénéité, qui se refusent comme l'a fait Blondel, à lire en termes de psychologie_ normale les structures de la conscience morbide ; et, au contraire, · les psychologies, analytiques ou phénoménologiques, qui cherchent à ressaisir l'intelligibilité de toute conduite même démente, dans ses significations antérieures à la distinction du norm:tl et du pathologique. Un partage analogue se fait également dans le grand débat de la ) psycho-genèse et de l'organo-genèse : recherche de · l'étiologie organique, depuis la découverte de la paralysie générale, avec son étiologie · syphilitique ? ou analyse de la causalité psychologique, à partir des troubles sans · fondement organique, définis à la fin du XIX8 siècle comme syndrome hystérique ? Tant de fois repris, ces problèmes, aujourd'hui, rebu tent, et il serait sans profit de résumer les débats qu'ils ont fait naître. Mais on peut se demander si l'embarras ne vient pas de ce qu'on dollJle le même sens aux notions • 2 MALADIE MENTAL!! ET Pl!RSONNALITB de maladie, de symptômes, d'étiologie en pathologie mentale et en pathologie organique. S'il apparaît tel lement malaisé de définir la maladie et la santé psycho logiques, n'est-ce pas parce qu'pn s'efforce en vain de leur appliquer massivement des concepts destinés éga lement à la médecine somatique ? La difficulté à retrou ver l'unité des perturbations organiques et des altérations de la personnalité, ne vient-elle pas de ce qu'on leur sup pose une causalité de même type ? Par delà la pathologie mentale et la pathologie organique, il y a une pathologie générale et abstraite qui les domine l'une et l'autre, leur· imposant, comme autant de préjugés, les mêmes concepts, et leur indiquant les mêmes méthodes comme autant de postulats. Nous voudrions montrer que la racine de la pathologie mentale ne doit pas être dans une spéculation sur une quelconque « métapathologie », mais seulement dans une réflexion sur l'homme lui-même. Toutefois un bilan rapide est nécessaire, à la fois pour rappeler comment se sont constituées toutes les psycho pathologies, traditionnelles ou récentes, et pour montrer de quels postulats la médecine mentale doit se libérer pour devenir rigoureusement scientifique. . 1 · CHAPITRE PREMIER MÉDECINE MENTALE ET MÉDECINE ORGANIQUE Cette pathologie générale dont nous venons de parler s'est développée en deux étapes principales. Comme la médecine organique, la médecine mentale a tenté, d'abord de déchiffrer l'essence de la maladie dans le groupement cohérent des signes qui l'indiquent. Elle a constitué une symptomatologie où sont relevées les corrélations constantes, ou seulement fréquentes, entre tel type de maladie et telle manifestation morbide : l'hallucination auditive, symptôme de telle structure déli rante ; la confusion mentale, signe de .telle forme démen tielle. Elle a constitué, d'autre part une nosographie, où sont analysées les formes elles-mêmes de la maladie, où sont décrites les phases de son évolution, et où sont restituées les variantes qu'elle peut présenter : on aura les maladies aiguës et les maladies chroniques ; on décrira les manifestations épisodiques, les alternances de symp tômes, et leur évolution au cours de la maladie . Il peut être utile de schématiser ces descriptions clas siques, non seulement à titre d'exemple, mais aussi pour fixer le sens originaire de termes classiquement utilisés, . . : .. 4 MALADIB MENTAL! BT PBRSONNALIT! Nous emprunterons aux vieux ouvrages du début de ce siècle des descriptions dont l'archaïsme ne doit pas faire oublier qu'elles ont été des points de départ. Dupré définissait ainsi l'hystérie : cc État dans lequel la puissance de l'imagination et de la suggestibilité, unie à cette synergie particulière du corps et de l'esprit que j'ai dénommée psychoplasticité, aboutit à la simulation plus ou moins volontaire de syndromes pathologiques, à l'organisation mythoplastique de troubles fonctionnels, impossibles à distinguer de ceux des. simulateurs ( 1 ). » Cette définition classique désigne donc comme symp tômes majeurs de l'hystérie, la suggestibilité, et l'appa rition de troubles comme la paralysie, l'anesthésie, l'ano rexie, qui n'ont pas, en l'occurrence, de fondement fonc tionnel, mais une origine exclusivement psychologique. La psychasthénie, depuis les travaux de Janet, est carac térisée par l'épuisement nerveux avec des stigmates orga niques ( asthénie musculaire, troubles gastro-intestinaux, céphalées); une .asthénie mentale (fatigabilité, impuis sance devant l'effort, désarroi en face de l'obstacle; insertion difficile daris le réel et le présent : ce que Janet appelait 1i la perte de la fonction du réel ») ; enfin des troubles de l'émotivité (tristesse, inquiétude, anxiété paroxystique). Les obsessions : « apparition sur un état mental habituel d'indécision, de doute et d'inquiétude, et sous· la forme d'accès paroxystiques intermittents, d?obsessions'."'impul sions diverses » (2). On distingue de la phobie, caracté risée par des crises d'angoisse paroxystique devant des objets déterminés (agoraphobie devant les espaçes vides), (I) DU'Ptœ, La constitution émotive (x9rr). (2) DELMAS, La pratique psychiafri(J'IU (1929}. ,._ ! I,· ! i MtDBCI MBNTALB BT M:âDBCINB ORGANIQUB la névrose obsessionnelle, où sont surtout marĀuées les défenses que le malade érige contre son angoisse (pré-- cautions rituelles, gestes propitiatoires). . . Manie et dépression : Magnan a dénommé << folie mter Inittente » cette forme pathologique, dans laquelle on voit alterner, à des intervalles plus ou moins longs,_ deux syndromes pourtant o_pposés : 1ā syndrome Ăru1;1aqăe, et le syndrome dépressif. Le I_>remier coĄporte 1 agitation motrice, une humeur euphonque ou colereuąe, 'llll:e exal tation psychique caractérisée par la verbigération, la rapidité des associations et la fuite des idĆes. 1:,8 déprć• sion à l'inverse se présente comme une merue motnce sur fond d'hum;ur triste, accompagnée de ralentissement psychique. Parfois isolées, la manie et la dépression Ĉont liées le plus souvent par un système d'alternancĉ Ċegu lier ou irrégulier, dont Gilbert-Ballet a dessine les différents profils (x). .. , . La paranoïa : sur un arnere-plan d ex_alċap.on pas• sionnelle ( orgueil, jalousie), et d hypeČčct1v1te psycĎo logique, on voit se développer un delire systemauďé, cohérent, sans hallucination, cristallisant dans unĐ đté pseudo-logique des thèmes de grandeur, de persecuuon et de revendication. . La psychose hallucinatoire chronique est elle aussi Ēe psychose délirante ; mais le délire est mal systéēausé, souvent incohérent ; les thèmes de grandeur finissent par absorber tous les. autres dans une exaltation puérile du personnage ; enfin et surtout il est soutenu par des hallucinations. L'hébéphrénie, psychose de l'adolescence· est class1- (I) G. BALLET, I,a psychose paiodiq'1e, Journtd de P$yc1fologü, x90g-191O. 1 ,:1 ,,, \ 1 6 MALADIE MENTALE ET PERSONNALITÉ quement définie par une excitation intellectuelle et motrice (bavardage, néologismes, calembours ; manié risme et impulsions), par des hallucinations et un délire désordonné, dont le polymorphisme s'appauvrit peu à peu. La catatonie se reconnaît au négativisme du sujet (mutisme, refus d'aliment, phénomènes appelés par Kraepelin « barrages de volonté »), à sa suggestibilité (passivité musculaire, conservation des attitudes impo sées, réponses en écho), enfin aux réactions stéréotypées et aux paroxysmes impulsifs ( décharges motrices brutales qui semblent déborder tous les barrages instaurés par la maladie). Observant que ces trois dernières formes patholo giques, qui interviennent assez tôt dans le développement, tendent vers la démence, c'est-à-dire vers la désorgani sation totale de la vie psychologique (le délire s'effrite, les hallucinations tendent à faire place à un onirisme décousu, la personnalité sombre dans l'incohérence), Kraepelin les a groupés sous la dénomination commune de Démence précoce (1). qest cette même entité nosogra phique qu'a reprise Bleuler, en l'élargissant vers certaines formes de la paranoïa; et il a donné à l'ensemble le nom de schizophrénie, caractérisée, d'une manière générale, par un trouble dans la cohérence normale des associations - comme un morcellement (Spaltung) du flux de la pensée - et d'un autre côté, par une rupture du contact affectif avec le milieu ambiant, par une impossibilité à entrer en communication spontanée avec la vie affective d'autrui (autisme). (1) KRAEPELIN, Lehrbuch der Psychiatrie (1889). (2) E. BLEULER, Dementia praecox odet' gruppe der sch-izophre n-ien, 19n. 1,)1_·,_, !: ,. MÉDECINE MENTALE ET uploads/Sante/ foucault-maladie-mentale-et-personnalite-scan-pdf.pdf
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- Publié le Mar 15, 2021
- Catégorie Health / Santé
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