Hypnose et hypnothérapie E Collot Résumé. – Le terme hypnose fut créé par le ch
Hypnose et hypnothérapie E Collot Résumé. – Le terme hypnose fut créé par le chirurgien d’origine écossaise Braid (1795–1860) pour désigner un ensemble de manifestations psychophysiologiques induites par suggestion, souvent comparé à tort au sommeil. Bien que connues depuis l’Antiquité, l’étude systématique et l’utilisation à des fins thérapeutiques de l’hypnose débutent en Europe avec Mesmer, médecin souabe né à Iznang (1734–1815). De nombreuses études sociologiques et cliniques, ainsi qu’un ensemble de recherches en neurophysiologie et en psychologie expérimentale, ont montré que l’hypnose possédait suffisamment de critères spécifiques pour être considérée comme un état de conscience à part. Ni veille ni sommeil, avec lequel elle fut longtemps confondue et comparée, elle ne peut pas davantage être assimilée au somnambulisme, même si le « somnambulisme provoqué » fut parfois le terme utilisé pour la désigner, ni à aucun des stades du coma. L’hypnose partage pourtant certains traits de chacun de ces états, et n’est pas sans évoquer par ailleurs certaines formes de transe (les « états » de transe se caractérisent par de profondes modifications psychologiques et neurophysiologiques, en particulier perte des repères spatiotemporels avec trouble de l’identité pouvant aller jusqu’à la dissolution partielle du Moi et vécu hallucinatoire, insensibilité partielle ou complète) dont elle pourrait constituer un modèle « occidental », voire expérimental. © 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : hypnose, hypnothérapie, transe. Introduction Les premières applications mesmériennes de l’hypnose ne recouvraient certes pas les différents états et situations complexes de l’hypnose contemporaine. La formalisation actuelle de l’hypnose est très éloignée du mesmérisme, tout comme des conceptions de Charcot, Bernheim ou Freud. Ainsi, l’hypothèse de l’existence d’un « fluide magnétique », qui fonda la pratique de Mesmer, tomba-t- elle en désuétude dès l’époque de Puységur. Toutefois, l’hypothèse fluidique a toujours fait des émules. De nos jours encore, reliquat d’une lointaine tradition, elle persiste parmi les guérisseurs [20, 40]. Ceux-ci se réclament de pratiques utilisant des « passes magnétiques » et se nomment « magnétiseurs », ou expliquent en termes énergétiques leur action thérapeutique, utilisant volontiers des aimants, des cristaux… D’ailleurs, le langage a conservé la coutume : ne dit-on pas parfois de quelqu’un qu’il possède « beaucoup de fluide » ou encore qu’il possède un « regard magnétique » ? Suggestion ou non, des guérisons « psychosomatiques », indéniablement obtenues par Mesmer, aux mains qui « pansent » les douleurs, les ulcères variqueux, les brûlures… le ou les facteurs de soin en jeu échappent aujourd’hui encore à l’entendement. L’influence de Mesmer fut considérable : Lapassade [39] en évoque la trace jusque dans différents systèmes de transe et dans les rituels vaudous. Finalement, après plus d’un siècle de recherches qui aura vu naître la psychologie scientifique, et cependant que les sciences « exactes » ont réalisé de véritables miracles, l’énigme de la guérison « par l’esprit » subsiste, comme l’exposait Sweig, comparant Mesmer, Freud et Baker Eddy… [59]. L’hypnotisme (les pratiques) et l’hypnose (ce qui en découle pour le patient) sont loin d’être des phénomènes clairs. Il s’agit, de toute évidence, de mécanismes fort complexes, pour lesquels il n’existe que des hypothèses et des explications parcellaires. Il faudrait, pour expliciter l’hypnose avec certitude, posséder une théorie des mécanismes psychophysiologiques de la « conscience », qui en explique la nature et le fonctionnement. En conséquence, les applications médicales à proprement parler de l’hypnose, l’hypnoanalgésie par exemple, reposent sur une approche empirique. Quant aux applications psychothérapeutiques, elles s’étayent sur des modèles de la conscience qui ne constituent pas une réalité en soi, mais d’hypothétiques représentations analogiques : le conscient ou l’inconscient sont des catégories, des « boîtes noires » sans contrepartie neurophysiologique. Indispensables et constructifs, ces modèles ne doivent pas être pris au sens d’une phénoménologie. L’hypnose n’est pas étrangère à l’élaboration de différentes approches thérapeutiques : il existe de fait une filiation directe entre l’hypnose et le comportementalisme (Pavlov avait beaucoup d’intérêt pour l’hypnose), tandis que la psychanalyse est née après la mise en acte de l’hypnotisme. A posteriori, ces théories éclairent en retour la phénoménologie de l’hypnose. C’est ainsi que l’hypnopsychothérapie contemporaine a largement bénéficié des travaux de Janet (1859-1947) [37] concernant la théorie de la désagrégation psychologique et, bien sûr, de la psychanalyse, qui fournit une représentation du fonctionnement psychique. Les pratiques actuelles ont en commun d’introduire l’hypnose et d’en utiliser certaines propriétés dans les différents cadres théoriques classiques, tels ceux des psychothérapies cognitives, comportementales, analytiques ou psychocorporelles (rebirth par exemple). Certaines techniques telles que la sophrologie, le rêve Edouard Collot : Psychiatre, psychanalyste, institut Paul Sivadon/Association « L’Élan retrouvé », 23, rue de La Rochefoucauld, 75009, Paris, France. Encyclopédie Médico-Chirurgicale 37-820-B-50 37-820-B-50 Toute référence à cet article doit porter la mention : Collot E. Hypnose et hypnothérapie. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Psychiatrie, 37-820-B-50, 2002, 13 p. éveillé dirigé, la relaxation analytique, la relaxation de Schultz… utilisent l’état hypnotique, nommé différemment selon la conceptualisation : « état sophronique » en sophrologie par exemple. En médecine générale, et malgré ce relatif vide conceptuel, l’hypnose est susceptible d’aider au traitement de la plupart des affections psychosomatiques ou psychogènes (telles que certaines maladies de la peau, de l’appareil cardiovasculaire, hypertension labile par exemple, de l’appareil digestif…). L’hypnose est un traitement d’appoint en anesthésiologie (hypnosédation), ou encore dans le traitement d’algies chroniques ou rebelles, et de certains syndromes associant inflammation et algie, comme le syndrome polyalgique idiopathique diffus… Définition L’état d’hypnose le plus léger est un état naturel, spontané, de la conscience en éveil, survenant fréquemment, sans sollicitation, au cours de la journée… Différent du sommeil, c’est un état de veille qui débute volontiers comme une rêverie ou qui survient lorsque, ne prêtant plus attention à l’environnement, le sujet ne semble plus réagir facilement : il « n’entend » par exemple plus une question banale formulée par une personne… il est « dans ses pensées », dans son être intérieur, se laissant aller dans un vécu imaginaire. Cette hypnose naturelle, spontanée, se traduit par un effet de « distraction » (ou d’absorption) plus ou moins approfondi. Traditionnellement, l’état d’hypnose est induit par suggestion ou autosuggestion. Il existe un continuum d’états depuis les états légers, telle la rêverie, jusqu’à l’hypnose profonde. Les manifestations spécifiques à l’hypnose apparaissent plus ou moins fortement selon la personnalité du sujet, le mode d’induction de l’hypnose et la « profondeur » de la transe. Notons, parmi les manifestations les plus typiques, la distorsion temporelle, l’augmentation de la suggestibilité, la possibilité de réalisation de suggestions posthypnotiques, la catalepsie, l’analgésie, l’amnésie ou l’hypermnésie, ainsi qu’un ensemble de modifications cognitives, émotionnelles et physiologiques. Ces capacités, survenant avec ou sans la détermination et le contrôle volontaire du sujet, sont mises à profit dans différentes applications thérapeutiques. Une grande variété de vécus hypnotiques est obtenue selon différents paramètres parmi lesquels la profondeur de la transe, la personnalité du sujet, l’objectif recherché, la méthode d’induction (ou d’auto-induction), le type de relation mis en place par l’opérateur et le sujet… Des différences parfois importantes ont pu être interprétées comme différents états, plutôt que comme différentes « configurations » d’un même état. Cette variabilité a amené des chercheurs comme Weitzenhoffer et Hilgard [36, 57, 58], dans les années 1960, à créer plusieurs échelles de mesure de l’« hypnotisabilité », échelles que Michaux [45] a utilisées en France dans une version simplifiée. Historique [3, 20, 29] Depuis l’Antiquité, différentes formes de transe apparentées à l’hypnose ont été utilisées par les guérisseurs et les sorciers. Malgré les condamnations dont elle fut l’objet au XVIIIe siècle, l’hypnose survécut en grande partie grâce au spectacle (qui en faisait usage comme technique de manipulation grâce à l’augmentation de la suggestibilité), à la mode « spirits », sous l’impulsion de Kardec au début du XXe siècle, et enfin grâce à une certaine « médecine parallèle »… Les conséquences de ces filiations ont été lourdes pour l’hypnotisme, qui fut associé à une représentation très particulière, plutôt d’ordre magique, qui n’a que peu à voir avec l’état en soi et avec son utilisation psychologique ou médicale. C’est pourtant cette image qui s’est fixée dans la représentation sociale collective et dont pâtissent encore aujourd’hui les praticiens et les chercheurs. GRANDS PRÉCURSEURS ¶ Mesmer (1734–1815) Grâce à Mesmer, ce phénomène de transe « à l’occidentale », appelé bien plus tard « hypnose » par Braid (1795-1860) fit l’objet d’une théorisation et d’une utilisation médicale empirique. La pratique de Mesmer était inspirée de sa théorie du « fluide magnétique animal », nommée ainsi en raison de l’analogie avec la découverte, alors récente, du magnétisme minéral, et de la toute jeune théorie newtonienne de la gravitation. Ces théories invitaient à penser que des actions, par une force invisible à distance, étaient possibles, et fournissaient une alternative physicaliste à la tradition astrologique. Mesmer est à l’origine d’une rupture épistémologique : pour la première fois, les interprétations métaphysiques et magiques sont abandonnées au profit d’hypothèses physiques. À la suite d’un conflit qui l’opposait à la famille d’une jeune patiente, il fut rejeté par la communauté scientifique viennoise ; uploads/Sante/ hypnose-et-hypnotherapie.pdf
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Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Sep 12, 2021
- Catégorie Health / Santé
- Langue French
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