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Ouvertures PAGE 138 • LA REVUE PRESCRIRE FÉVRIER 2013/TOME 33 N° 352 Pour mieux soigner : des médicaments à écarter La prudence dans le choix d’un médicament est de préférer les plus éprouvés, dont les effets nocifs sont rendus acceptables par une efficacité démontrée sur des conséquences concrètes. Mais chaque année, de nombreux nouveaux médicaments sont autorisés, souvent sans preuve d’un progrès par rapport aux médicaments de référence. Parfois, ils sont en fait moins efficaces ou plus nocifs. Et en général, une promotion massive leur assure une image positive aux yeux des soignants et des patients. Des leaders d’opinion renommés interviennent en leur faveur dans des congrès et les médias spécialisés. Ces opinions sont relayées de proche en proche par des spécialistes du domaine. Des campagnes de presse mettent en avant le problème de santé visé par le médicament, ce qui pousse les patients concernés à demander le médicament. Etc. Pour d’autres médicaments, plus anciens, les espoirs initiaux d’efficacité sont défaits par les avancées de l’évaluation. Ou bien leurs effets indésirables s’avèrent plus importants qu’on ne pensait. Au final, pour ces divers motifs, de nombreux médicaments sont utilisés, alors qu’ils sont plus dangereux qu’utiles. Mais, les données en défaveur des médicaments et les mises en garde sont peu audibles, noyées dans le flot de la promotion. Les soignants de première ligne qui veulent agir dans l’intérêt premier des patients se retrouvent en difficulté, à contre- courant de l’opinion de nombreux spécialistes, des autorisations de mise sur le marché et des décisions de remboursement des assureurs maladies. En agissant par demi-mesures et en laissant des médicaments plus dangereux qu’utiles sur le marché, les autorités de santé ne font pas leur travail de protection des patients. Prescrire, financée uniquement par les abonnés, n’a pas les moyens de faire le travail des autorités de santé. Et n’y prétend pas. Mais Prescrire s’est organisée pour aider les soignants à mieux soigner. Dans le texte qui suit, l’Équipe Prescrire rappelle les principaux médicaments plus dangereux qu’utiles, à écarter au terme des analyses publiées dans Prescrire de 2010 à 2012. Les patients et soignants ont intérêt à réviser les traitements en cours, à écarter ces médicaments plus dangereux qu’utiles, et à préférer les traitements éprouvés. Sans attendre que les autorités décident enfin les retraits du marché qui s’imposent au vu des données d’évaluation. ©Prescrire Préambule Téléchargé sur prescrire.org le 01/02/2013 Copyright(c)Prescrire. Usage personnel exclusivement G En France, début 2013, trop de médi- caments à balance bénéfices-risques défavorable restent commercialisés. Les autorités de santé n’ont pas fait leur tra- vail de protection des patients en auto- risant ou en laissant ces médicaments plus dangereux qu’utiles sur le marché malgré des signaux d’alerte manifestes. G Pour inciter les autorités à un sursaut salutaire et aider les soignants et pa- tients à se préparer aux retraits du mar- ché justifiés par les données de l’éva- luation, ce texte liste les principaux médi- caments à écarter, au terme des analyses publiées dans Prescrire de 2010 à 2012. G Souvent d’autres options plus favo- rables existent. Parfois, dans certaines situations, un médicament n’est pas le meilleur choix. Mieux vaut prendre le temps de les chercher avec les patients. Rev Prescrire 2013 ; 33 (352) : 138-142. C haque mois, Prescrire apporte des informations permettant à chaque soignant de faire évo- luer peu à peu sa liste de médica- ments à utiliser. Ces informations mettent aussi en évidence des médi- caments plus dangereux qu’utiles pour les patients, qu’il vaut mieux déconseiller. Force est de constater que début 2013, un grand nombre d’entre eux restent commercialisés. Certains sont anciens, disponibles depuis plusieurs dizaines d’années ; d’autres sont récents, avec des auto- risations de mise sur le marché (AMM) accordées imprudemment par les agences du médicament. En pratique, comment faire face à cette situation ? Les autorités sanitaires ont la res- ponsabilité de retirer ces médica- ments du marché. Plus elles tardent, plus elles laissent les patients exposés aux dangers injustifiés de ces médi- caments, prescrits ou conseillés par des soignants trop peu informés de la réalité de la balance bénéfices- risques, ou sous-estimant souvent l’ampleur de la pression des firmes pharmaceutiques, y compris sur les experts sollicités par les autorités. Les soignants sont alors dans la difficile position d’expliquer aux patients que ces médicaments sont à éviter alors qu’ils sont officiellement autorisés, et prescrits par des pro- fessionnels de santé, parfois spécia- listes, parfois hospitaliers. D’ici à des décisions de retrait, c’est aux autorités sanitaires de faire savoir largement aux soignants et aux patients la réalité de ces médicaments. D’ici là, les patients comptent sur les soignants pour les éclairer, en particulier les pharmaciens et les médecins. Sur la base des analyses publiées dans Prescrire de 2010 à 2012 (concer- nant les nouveaux médicaments, mais aussi d’anciens), voici une liste des principaux médicaments à écarter des soins et retirer du marché. Nous les présentons par domaine théra- peutique, puis par ordre alphabétique de dénomination commune inter- nationale (DCI). Il s’agit : −de médicaments actifs mais qui exposent à des risques dispropor- tionnés par rapport aux bénéfices qu’ils apportent ; −de médicaments anciens dont l’uti- lisation est dépassée, car d’autres ont une balance bénéfices-risques plus favorable ; −de médicaments récents dont la balance bénéfices-risques s’avère moins favorable que celle de médi- caments plus anciens ; −de médicaments dont l’efficacité n’est pas prouvée au-delà d’un effet placebo, et qui exposent à des dom- mages disproportionnés ; −d’associations à doses fixes, qui cumulent l’exposition aux effets indésirables et aux interactions des médicaments qui les composent, sans apporter de gain notable d’efficacité. Souvent, une meilleure option est disponible ; nous l’énonçons briè- vement quand elle existe. Cardiologie −L’aliskirène (Rasilez°), un antihy- pertenseur sans efficacité démontrée en termes de diminution des acci- dents cardiovasculaires, expose à un surcroît de troubles cardiovasculaires et d’insuffisances rénales (n° 341 p. 183 ; n° 349 p. 820). Autant en rester par exemple aux diurétiques et aux inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) éprouvés ; −le fénofibrate (Lipanthyl° ou autre), le bézafibrate (Befizal°) et le ciprofibrate (Lipanor° ou autre), des hypocho- lestérolémiants sans efficacité cli- nique démontrée, exposent à de nombreux effets indésirables, notam- ment cutanés, hématologiques et rénaux (n° 329 p. 193). Le gemfibrozil (Lipur°), le seul fibrate avec une cer- taine efficacité démontrée, est un recours, à manier avec prudence, quand un fibrate est choisi ; −l’ivabradine (Procoralan°), sans avan- tage dans l’angor et dans l’insuffisance cardiaque, expose à des troubles visuels, des bradycardies parfois sévères et autres troubles du rythme cardiaque (n° 350 p. 900). Autant en rester aux traitements éprouvés ; −le nicorandil (Adancor° ou autre), un vasodilatateur avec une compo- sante nitrée, sans efficacité démon- trée au-delà de l’effet symptomatique dans l’angor, expose à des ulcérations cutanéomuqueuses parfois graves (n° 342 p. 268 ; n° 345 p. 516). Autant en rester par exemple à un dérivé nitré ; −la trimétazidine (Vastarel° ou autre), une substance aux propriétés incer- taines utilisée dans l’angor sans effi- cacité démontrée au-delà de l’effet symptomatique, expose à des syn- dromes parkinsoniens, des halluci- nations et des thrombopénies (n° 342 p. 260-261). Autant en rester aux traitements éprouvés ; −les “vasodilatateurs”, particulière- ment ceux dérivés de l’ergot de sei- gle, utilisés dans les “déficits cognitifs neurosensoriels liés à l’âge” : la dihy- droergocryptine (dans Vasobral°), la dihydroergocristine (Iskédyl°), la dihy- droergotoxine (Hydergine°), la nicer- goline (Sermion° ou autre), sans effi- cacité prouvée, exposent à des risques de fibroses notamment pulmonaires ou rétropéritonéales (n° 342 p. 260- 261 ; n° 343 p. 361). Autant ne pas compter sur les médicaments dans ces situations ; −l’association à doses fixes cafédrine + théodrénaline (Praxinor°), des sym- pathomimétiques d’intérêt non démontré sur les hypotensions, et qui exposent à des effets indésirables cardiovasculaires graves ainsi qu’à des dépendances (n° 344 p. 421). En cas d’hypotension, mieux vaut se concentrer sur des mesures non médicamenteuses (bas de con- Résumé LA REVUE PRESCRIRE FÉVRIER 2013/TOME 33 N° 352 • PAGE 139 Téléchargé sur prescrire.org le 01/02/2013 Copyright(c)Prescrire. Usage personnel exclusivement Ouvertures Pour soigner au mieux, des médicaments à écarter tention, régime salé, etc.), voire utiliser avec précaution la midodrine (Gutron°), faute de mieux (n° 294 p. 263) ; −la triple association à doses fixes amlodipine + valsartan + hydrochloro- thiazide (Exforge HCT°), qui expose à une utilisation abusive d’une tri- thérapie dans l’hypertension arté- rielle avec multiplication des effets indésirables et des interactions, à des risques d’erreurs de dosages liées au conditionnement inadapté (n° 325 p. 809). Mieux vaut adapter avec précision la dose de chaque antihy- pertenseur quand une trithérapie semble nécessaire. Cancérologie - Hématologie Parmi les cytotoxiques commer- cialisés en France, 5 cytotoxiques cités ci-dessous sont à retirer du mar- ché soit parce qu’ils ont une balance bénéfices-risques moins favorable que d’autres cytotoxiques mieux éprouvés, soit parce que des soins symptomatiques sans cytotoxique sont une meilleure option : −le catumaxomab (Removab°) n’aug- mente pas la durée de vie dans l’as- cite maligne, et expose plus de trois quarts des patients à des effets indé- sirables graves (n° 319 p. uploads/Sante/ medicaments-la-liste-noire.pdf
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- Publié le Oct 05, 2022
- Catégorie Health / Santé
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