■18-066-D-50 Néphropathies médicamenteuses immunoallergiques E. Renaudineau, S.

■18-066-D-50 Néphropathies médicamenteuses immunoallergiques E. Renaudineau, S. Morice, S. Picard, N. Rioux-Leclerc, M.-A. Laigneau En cas d’insuffisance rénale aiguë, une cause médicamenteuse doit être recherchée, en particulier chez la personne âgée. Un mécanisme allergique entraînant des lésions inflammatoires interstitielles aiguës est parfois en cause et peut être secondaire à un grand nombre de médicaments. En France, actuellement, plus de 90 % des cas de néphropathies immunoallergiques (NIA) médicamenteuses sont en lien avec quatre grandes classes thérapeutiques : les antibiotiques, les anti-inflammatoires non stéroïdiens, les inhibiteurs de la pompe à protons et les antivitamines K (représentés quasi exclusivement par la fluindione). Le tableau est souvent peu évocateur, pouvant même être isolé au rein. Rares sont les cas associant la triade classique à savoir fièvre, éruption cutanée et hyperéosinophilie. Dans les études, il est habituel de regrouper les différentes classes thérapeutiques entre elles. Cependant, il est important de comprendre que les mécanismes en cause pour chaque classe ne sont probablement pas les mêmes. Il y a ainsi des médicaments (tels que les antibiotiques) qui vont entraîner des néphropathies allergiques plus précoces et souvent avec plus de symptômes que certaines autres classes thérapeutiques (exemple : inhibiteurs de la pompe à protons). Une biopsie rénale est utile au diagnostic, mais celle-ci n’est pas toujours réalisée. Quand, après avoir éliminé une autre cause, le diagnostic de NIA médicamenteuse est porté, la première mesure consiste à interrompre le traitement incriminé. De plus, en cas de non-récupération rapide de la fonction rénale, il est habituel de prescrire une corticothérapie pendant plusieurs semaines, bien que toutes les études n’aient pas montré une efficacité de ce traitement. Cet article présente une partie des résultats issus d’études menées conjointement avec les néphrologues de l’interrégion Ouest ainsi qu’avec le centre de pharmacovigilance de Rennes. Ces résultats sont comparés aux données de la littérature. © 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : Néphropathie interstitielle aiguë ; Médicaments ; Allergie Plan ■Introduction 1 ■Épidémiologie des néphropathies interstitielles aiguës médicamenteuses 2 ■Physiopathologie des néphropathies interstitielles aiguës médicamenteuses 2 Généralités sur les effets indésirables des médicaments 2 Classification des allergies 2 Hypersensibilité et néphropathies interstitielles aiguës médicamenteuses 2 Causes non allergiques de néphropathies interstitielles aiguës médicamenteuses 2 ■Présentation des néphropathies interstitielles aiguës médicamenteuses 2 Présentation clinique 2 Présentation biologique 3 Présentation histologique 3 ■Poser le diagnostic de néphropathie interstitielle aiguë médicamenteuse 3 Éliminer les autres causes de néphropathie médicamenteuse aiguë 3 Éliminer les autres causes de néphropathie interstitielle aiguë 3 Établir le diagnostic de néphropathie interstitielle aiguë médicamenteuse 4 Place des tests allergologiques 5 ■Médicaments impliqués 5 Évolution des classes thérapeutiques impliquées 5 Données actuelles 5 ■Prise en charge thérapeutique 5 ■Conclusion 6 ■ Introduction La première description d’une insuffisance rénale aiguë (IRA) avec lésions inflammatoires du tissu interstitiel a été décrite par Councilman en 1898 [1] et était en lien avec une infection sous- jacente. Il a fallu attendre la première moitié du XXe siècle pour que la prise d’un médicament soit associée à un tableau de néphropa- thie interstitielle aiguë (NIA) [2]. La présentation clinique est très variable, il s’agit le plus souvent d’une insuffisance rénale aiguë à diurèse préservée. La présence d’une éruption cutanée ou d’une fièvre sans germe retrouvé est évocatrice. Au niveau biologique, la présence d’une hyperéosinophilie bien que non spécifique peut également orienter vers ce diagnostic. La présence de ces trois signes représente la triade classique retrouvée dans moins de 10 % des cas [3]. Il est habituel d’observer la présence d’une hématurie et d’une leucocyturie de moyenne abondance. Sur le plan histologique, on observe classiquement un infiltrat inflammatoire interstitiel pouvant s’accompagner d’un œdème EMC - Néphrologie 1 Volume 15 > n◦1 > janvier 2018 http://dx.doi.org/10.1016/S1762-0945(17)64384-5 18-066-D-50 ■Néphropathies médicamenteuses immunoallergiques et de tubulite. Il s’agit d’un infiltrat composé majoritairement de cellules mononucléées. Ces signes sont non spécifiques et doivent conduire, face à toute néphropathie interstitielle aiguë, à rechercher une autre cause. Parmi celles-ci, il faut commencer par rechercher une pathologie infectieuse, une maladie de système ou un TINU syndrome (néphropathie tubulo-interstitielle et uvéite) et, en présence de granulomes, une sarcoïdose ou une tuberculose. L’évolution peut se faire vers la récupération ou au contraire vers une évolution vers de la fibrose. Des études rétrospectives récentes ont permis de mettre en évidence une augmentation de l’incidence de ce type de néphro- pathie [4]. Les personnes âgées sont particulièrement exposées à ce risque [5]. Actuellement, trois grandes classes thérapeutiques sont retrouvées dans les pays occidentaux : les antibiotiques (ATB), les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) [6, 7], auxquelles il faut ajouter, en France, un antivitamine K (AVK) : la fluindione [8, 9]. ■ Épidémiologie des néphropathies interstitielles aiguës médicamenteuses Les NIA représentent la troisième cause de néphropathie aiguë médicamenteuse derrière les cas de nécroses tubulaires et les néphropathies fonctionnelles. Il est difficile de définir la préva- lence des NIA médicamenteuses parmi les cas d’IRA dans les études quand celles-ci ne reposent pas sur des registres histologiques. En France, les données disponibles ont été publiées en 1986 : dans cette étude menée dans 58 centres franc ¸ais, les IRA étaient en lien avec une origine médicamenteuse dans 18,3 % des cas ; la part des IRA en rapport avec une NIA médicamenteuse représentait 0,8 % des cas [10]. La prévalence actuelle des NIA médicamenteuses est probablement beaucoup plus élevée puisqu’au cours des der- nières décennies une augmentation significative de la part d’IRA liées à des NIA, en particulier chez les patients les plus âgés, a été constatée [11]. Il est possible que ceci s’explique en partie par l’emploi d’une polymédication croissante dans cette population, s’associant à une plus grande susceptibilité à développer une NIA en cas de lésions rénales préexistantes. Quand on étudie les séries reposant sur des données histolo- giques, les médicaments représentent environ 70 % des causes de NIA [7, 12] et 90 % quand on prend en compte les personnes de plus de 65 ans [5]. Il faut signaler que dans les cas de NIA avec granulomes, il est plus fréquent de retrouver d’autres causes, la part des médicaments représentant alors un peu moins d’un cas sur deux [13, 14]. Une NIA est retrouvée dans 5 à 18 % des cas d’IRA, et une NIA médicamenteuse est actuellement en cause en Europe et aux États-Unis dans près de 10 % des cas d’IRA dans les séries reposant sur des données histologiques [3, 4]. ■ Physiopathologie des néphropathies interstitielles aiguës médicamenteuses Généralités sur les effets indésirables des médicaments On classe les effets indésirables (EI) associés aux médicaments en deux catégories, les EI prévisibles et les EI non prévisibles. Parmi les EI non prévisibles, qui représentent environ 20 % des cas, on distingue plusieurs types de réactions : l’allergie, la pseudo-allergie, l’intolérance et l’idiosyncrasie [15]. L’allergie (ou hypersensibilité) correspond à une réaction immunologique au médicament (au principe actif et/ou à l’excipient) chez une per- sonne sensibilisée au préalable. Classification des allergies On utilise habituellement la classification de Gell et Coombs [16]. Dans les types I à III, les réactions sont médiées par une réponse humorale (type I : immunoglobuline E [IgE] ; type II : IgG et IgM ; type III : complexes immuns), contrairement au type IV qui est à médiation cellulaire (en relation avec des lymphocytes T et des macrophages). Dans l’hypersensibilité de type IV, le délai d’apparition de l’EI est retardé par rapport à l’administration/la prise du médicament (> 12 heures). Récemment, il a été proposé de séparer les réactions du groupe IV en quatre sous-classes (IVa à IVd) en fonction des cytokines et des principales cellules effec- trices impliquées [17]. La classe IVb, impliquant une réponse de type Th2 avec activation des éosinophiles, pourrait être la voie principale impliquée dans les NIA aux antibiotiques [18, 19]. Pour les IPP, il est évoqué une autre voie faisant intervenir des cellules Th1-Th17 [20]. Il existe plusieurs mécanismes pouvant conduire à l’activation de lymphocytes T par un médicament. Il est probable que, dans une majorité des cas, le médicament (ou un de ses métabolites) devient immunogène après fixation à une protéine (mécanisme haptène-prohaptène) ou en stimulant directement les lympho- cytes (p-i concept avec un médicament agissant comme un superantigène) [21]. Hypersensibilité et néphropathies interstitielles aiguës médicamenteuses Les NIA médicamenteuses semblent s’intégrer dans un tableau d’hypersensibilité retardée de type IV. Les arguments en faveur sont : un délai habituel de plusieurs jours ou semaines entre la prise du médicament et le tableau rénal, ainsi que la présence d’un infiltrat mononucléé avec présence importante de lympho- cytes CD4+. Certains médicaments, tels que la rifampicine et la méthicilline, peuvent entraîner une réaction mixte cellulaire et humorale avec présence de dépôts de complexes immuns le long de la membrane basale tubulaire [22, 23]. On associe classiquement la formation d’un granulome épi- thélioïde à une stimulation prolongée macrophagique. Les NIA granulomateuses médicamenteuses concernent majoritairement quelques classes parmi lesquelles on retrouve les ATB, les AINS et les diurétiques [24]. Causes non allergiques de néphropathies interstitielles aiguës médicamenteuses Il est probable qu’une NIA médicamenteuse puisse être en lien uploads/Sante/ nephrologie.pdf

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  • Publié le Fev 10, 2022
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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