Prolapsus valvulaire mitral J Bensaid Résumé. – Le prolapsus valvulaire mitral
Prolapsus valvulaire mitral J Bensaid Résumé. – Le prolapsus valvulaire mitral n’a été véritablement individualisé que depuis quatre décennies, à la suite des travaux de Reid et Barlow. Le diagnostic et le pronostic ont été progressivement clarifiés lors de ces 20 dernières années, après une confusion initiale liée à des biais de recrutement ou de sélection. L’utilisation de critères échocardiographiques rigoureux permet de chiffrer maintenant la prévalence à 2,4 % de la population générale. La meilleure définition du prolapsus valvulaire mitral est d’ordre anatomofonctionnelle. C’est histologiquement une dégénérescence myxoïde du tissu valvulaire mitral dont la couche spongieuse vient envahir et fragiliser la couche fibreuse. C’est, en échocardiographie bidimensionnelle, une hernie ou une protrusion de plus de 2 mm d’un ou des deux feuillets de la valve mitrale dans l’oreillette gauche en systole sur une coupe longitudinale parasternale grand axe. Cliniquement, il s’agit de sujets qui se plaignent d’une symptomatologie assez riche, mais non spécifique, en dehors des palpitations ou d’une hypotension orthostatique. L’auscultation cardiaque la plus évocatrice recueille un click méso- ou télésystolique, suivi d’un souffle télésystolique. On distingue deux types de prolapsus suivant que l’épaisseur des feuillets mitraux est égale ou supérieure (forme dite classique) ou inférieure (forme non classique) à 5 mm. La forme classique (1,3 % des cas) est répartie à peu près également entre les deux sexes. Elle comporte un risque de complications de l’ordre de 1 à 3/100 années-patient, sous forme d’insuffisance mitrale le plus souvent par rupture de cordages du feuillet postérieur, d’endocardite infectieuse, de troubles du rythme graves, voire de mort subite. Mais contrairement aux données initiales, le prolapsus est rarement la cause des accidents vasculaires cérébraux du sujet jeune de moins de 45 ans. Une prophylaxie anti-infectieuse rationnelle et une chirurgie réparatrice précoce de l’insuffisance mitrale doivent pouvoir en améliorer le pronostic. La forme non classique (1,1 % des cas) est à nette prédominance féminine et d’évolution généralement bénigne, d’où la nécessité de rassurer avant tout de tels sujets. Les progrès de la génétique, actuellement en pleine expansion, permettront peut-être une nouvelle classification moléculaire de cette affection à transmission autosomique dominante. © 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : prolapsus valvulaire mitral, échocardiographie, génétique, complications, insuffisance mitrale, endocardite infectieuse, troubles du rythme, mort subite, accidents vasculaires cérébraux. Introduction Le prolapsus valvulaire mitral (PVM) est connu depuis plus d’un siècle puisque la première description remonte à 1887, année où Cuffer et Barbillon [28] ont rapporté pour la première fois le click mésosystolique sous la dénomination de « bruit de galop mésosystolique », appelé par la suite « bruit de triolet » par Gallavardin [44]. En fait, le PVM n’est vraiment individualisé comme une affection cardiaque qu’à partir de 1961 par Reid [82] qui, contrairement aux anciens auteurs, attribue la nature des clicks à la mise en tension brutale des cordages de l’appareil valvulaire mitral, et de 1963 par Barlow et al [6] qui démontrent l’origine mitrale de l’association click mésosystolique-souffle télésystolique. Parmi les nombreuses dénominations proposées pour qualifier l’affection, la plus communément retenue est celle de prolapsus valvulaire mitral [27], le terme de maladie de Barlow étant parfois employé. Julien Bensaid : Professeur des Universités, praticien hospitalier, 51, avenue Garibaldi, 87000 Limoges, France. Définition. Étiologie Le PVM peut se définir d’une manière anatomofonctionnelle comme une dégénérescence myxoïde du tissu valvulaire avec, en échocardiographie bidimensionnelle, une hernie ou une protrusion de plus de 2 mm d’un ou des deux feuillets de la valve mitrale dans l’oreillette gauche en systole, désignée sous le nom de ballonnisation, et coaptation des deux feuillets mitraux postérieure au plan de l’anneau mitral, observée essentiellement en coupe longitudinale parasternale grand axe. Cette définition permet d’atteindre, selon Alpert et al [2], une sensibilité de 87 % et une spécificité de 97 %. Des valeurs supérieures peuvent être obtenues en recourant si nécessaire à la voie transœsophagienne [98]. Pour les chirurgiens [19], le terme de prolapsus implique une perte de coaptation des deux feuillets mitraux, qui s’accompagne alors nécessairement d’une insuffisance mitrale. On distingue deux formes de PVM : des formes dites classiques [43, 68] ou encore primaires [74] lorsque l’épaisseur maximale des feuillets mitraux est égale ou supérieure à 5 mm et des formes non classiques lorsque cette épaisseur est inférieure à 5 mm, la protrusion des feuillets mitraux dans l’oreillette gauche en systole étant Encyclopédie Médico-Chirurgicale 11-010-C-10 11-010-C-10 Toute référence à cet article doit porter la mention : Bensaid J. Prolapsus valvulaire mitral. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Cardiologie, 11-010-C-10, 2001, 10 p. supérieure à 2 mm dans les deux cas. Lorsque cette protrusion est inférieure ou égale à 2 mm, on peut considérer qu’il s’agit de variantes de la normale [73, 95]. Dans la très grande majorité des cas, le prolapsus est rencontré chez des sujets sans antécédents pathologiques et sans autre cardiopathie décelable. C’est une véritable entité clinique appelée PVM idiopathique. L’affection peut soit présenter un caractère familial avec une transmission génétique se faisant sur le mode autosomique dominant à pénétrance incomplète et expression réduite chez le sujet jeune et dans le sexe masculin [35], soit encore survenir de façon totalement isolée. Des travaux récents de biologie moléculaire [37, 59] ont permis de démontrer une hétérogénéité génétique de l’affection. Le PVM peut aussi être observé à l’occasion de certaines cardiopathies acquises, en particulier rhumatismales et ischémiques. Il est également noté dans les cas de dystrophie du tissu conjonctif type maladie de Marfan ou maladie d’Ehlers-Danlos, dans la communication interauriculaire et la myocardiopathie hypertrophique obstructive. On parle alors dans ces cas de prolapsus « secondaires ». Prévalence L’absence de rigueur dans l’appréciation échocardiographique du diagnostic de PVM a conduit, dans les premières années, à la description d’un nombre démesuré de cas, véritable « épidémie » qui s’est amendée par la suite avec l’adoption de critères plus stricts. Dans la population générale, la prévalence globale du prolapsus qui a été longtemps classiquement retenue est de 5 % suivant les résultats de l’enquête de Framingham en 1983 [86]. Deux études plus récentes, rapportées en 1999, donnent des valeurs encore moindres. La première est celle de Freed et al [43] qui porte sur le cinquième examen des descendants de la cohorte de l’étude de Framingham (3 491 sujets âgés de 54,7 ans ± 10 ans) avec une prévalence globale de 2,4 %, dont 1,3 % pour la forme classique selon les critères précédemment indiqués, et 1,1 % pour la forme non classique avec une prédominance féminine (deux tiers des cas environ) dans cette forme. La seconde est celle de Flack et al [42], qui porte sur 4 136 sujets âgés de 23 à 35 ans, recrutés dans quatre villes des États- Unis, avec une prévalence de 0,6 %, le critère retenu étant une protrusion systolique de l’un ou l’autre feuillet mitral de 2 mm ou plus dans l’oreillette gauche en coupe longitudinale parasternale grand axe, l’épaisseur des feuillets mitraux n’étant pas précisée. Constatations anatomopathologiques Le PVM n’est documenté au plan anatomopathologique que dans ses formes évoluées ayant nécessité une chirurgie valvulaire ou entraîné le décès avec autopsie. EXAMEN MACROSCOPIQUE Les valves sont volumineuses, épaissies, opaques avec parfois des zones amincies translucides. Elles sont de consistance molle, gélatineuse. Elles sont redondantes par excès d’étoffe (fig 1) et bombent anormalement dans l’oreillette gauche en systole. Elles ont un aspect flasque, avachi, justifiant la terminologie de floppy mitral valve (FMV). Dans les séries autopsiques, la prévalence des FMV varie de 1 % [78] à 5 % [30], étant un peu plus élevée chez la femme et augmentant légèrement avec l’âge [30]. Les lésions affectent plus volontiers la petite que la grande valve. Dans la série autopsique de Davies [30], sur 1 984 cas, la petite, la grande ou les deux valves sont respectivement intéressées dans 67 %, 10 % et 23 % des cas. Les cordages sont allongés et amincis, parfois épaissis et souvent rompus. Des ruptures de cordages sont relevées dans 40 à 60 % des cas chez les patients opérés d’insuffisance mitrale sévère par floppy valve [65, 76]. L’anneau mitral est habituellement dilaté, dépassant 10,5 cm, limite supérieure normale de sa circonférence [96]. Des transformations fibreuses de l’endocarde au niveau des piliers et des parois ventriculaires adjacentes ont été décrites. Des dépôts fibrineux tapissant des ulcérations endothéliales ont été notés sur le versant atrial des deux valves. Des thrombi ont pu être observés dans l’angle formé par la valve prolabée et la paroi auriculaire gauche. EXAMEN HISTOLOGIQUE De nombreuses études histologiques ont été publiées en microscopie optique, électronique et en immunohistochimie [4, 55, 81, 92]. Elles concordent sur la profonde désorganisation de la structure normale de la valve et cela en l’absence de toute réaction inflammatoire. Trois types d’altération sont notés. ¶ Dépôt de substances myxoïdes C’est la lésion histologique la plus évidente. Ces dépôts infiltrent et boursouflent la couche spongieuse (fig 2), refoulant ou envahissant la couche fibreuse et justifiant les appellations de transformation myxoïde, mucoïde ou myxomateuse [55, 81]. Ils répondent à des protéoglycanes (acide hyaluronique) facilement mis uploads/Sante/ prolapsus-valvulaire-mitral 1 .pdf
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- Publié le Apv 16, 2021
- Catégorie Health / Santé
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