Focus sur les JHTA - Quel objectif tensionnel en 2017 ? cardiologie-pratique.co

Focus sur les JHTA - Quel objectif tensionnel en 2017 ? cardiologie-pratique.com/journal/article/0025731-focus-sur-jhta-quel-objectif-tensionnel-en-2017 En effet, un atelier, une session plénière et plusieurs interventions étaient dédiés à cette question. Pendant l’atelier intitulé « Quel objectif tensionnel en 2017 ? », Faiçal Jarraya (Sfax, Tunisie) a tout d’abord fait une revue de la littérature afin de faire le point sur l’objectif tensionnel dans les différentes recommandations. Il a d’abord rappelé quelques données épidémiologiques sur le poids de l’hypertension dans le monde : 1er facteur de mortalité et 2e facteur de morbidité considérant le nombre d’années de vie perdues sans incapacité. Depuis la fin des années 60, le bénéfice de la baisse de pression artérielle est parfaitement démontré avec des objectifs tensionnels qui ont évolué avec dans le temps pour passer de 160/95 à la fin des années 80, à 150/90, 140/90, 130/80 quelques années puis un retour à 140/90 alors que l’objectif de 120/70 se pose aujourd’hui. Recommandations actuelles Dans les recommandations européennes de 2003(2), on trouve un objectif de 140/90 mmHg pour tous les hypertendus. En 2007, l’objectif est ramené à 130/85 dans les populations ayant un ATCD d’AVC, d’infarctus du myocarde (IDM) ou une insuffisance rénale mais une révision de 2009 reprend les objectifs antérieurs(3). La première raison de ce « retour » à un objectif plus élevé, étant premièrement la difficulté d’atteindre une pression artérielle systolique (PAS) inférieure à 130, et ce dans les essais thérapeutiques, alors que les participants bénéficient d’un suivi d’une qualité supérieure à la pratique quotidienne. De plus, une publication de Zanchetti alerte sur le non-bénéfice à ramener la PAS en dessous de 130 mmHg(3,4) suite aux études ABCD, ONTARGET, INVEST(5,6). En effet, l’étude ABCD, réalisée dans une population d’hypertendus diabétiques, n’a pas montré de bénéfice ni sur la fonction rénale ni sur le nombre d’événements cardiovasculaires pour un objectif entre 125-130 mmHg de PAS versus 135-140, mais un petit bénéfice sur la survenue d’AVC. L’étude ONTARGET fait réapparaître le concept de la courbe en J en montrant une augmentation de la mortalité cardiovasculaire et du nombre d’IDM sous 120 mmHg de PAS, malgré encore une fois un bénéfice sur la survenue d’AVC. Dans INVEST, la baisse de la PAS n’est pas associée à une réduction de la mortalité et une baisse de la PAD sous 70 mmHg est associée à une augmentation de la survenue d’IDM. En 2013, les recommandations européennes confirment un objectif inférieur à 140/90 mmHg, quels que soient le niveau de pression initial et les comorbidités. Chez les patients âgés de 60 à 75 ans, l’objectif de PAS est supérieur : entre 140 et 150, et il est recommandé d’initier le traitement seulement pour une PAS supérieure à 160 mmHg. Dans ses recommandations de 2013, la Société française d’hypertension artérielle fixe, elle, un objectif entre 130 et 140 de PAS et inférieur à 90 de PAD pour tout le monde sauf pour les personnes de plus de 80 ans, pour qui la cible de PAS est de moins de 150 mmHg SANS hypotension orthostatique et en se limitant à une trithérapie(7). Il y est toutefois précisé que « des objectifs plus ambitieux peuvent être préconisés sur avis spécialisé ». Outre-Atlantique, les recommandations sont très proches, l’American Society of Hypertension (ASH) recommande un objectif à 140/90 chez le « jeune adulte » avec une cible de PAD inférieure à 90 mmHg à atteindre en priorité ; une PAS inférieure à 150 mmHg chez les plus de 80 ans. Cependant, sur opinion d’experts, une cible inférieure à 130/90 est proposée pour les patients insuffisants rénaux avec protéinurie. Les limites du « lower is better » 1/7 Outre l’étude SPRINT, Olivier Hanon (Paris, France) a cité une métaanalyse d’essais contrôlés randomisés publiée en 2016 montrant le bénéfice d’un traitement intensif avec une réduction de 30 % du risque d’AVC, de 20 % du risque d’IDM et de 21 % du risque de mortalité cardiovasculaire(8). Cependant, il a rappelé en opposition à SPRINT les études ayant mis en évidence un effet délétère d’une PAS inférieure à 120, notamment deux études de cohortes retrouvant une augmentation du risque d’insuffisance rénale aiguë pour la première(9) et une augmentation du risque coronaire pour la seconde(10). Il a ensuite soulevé la question de l’âge, et notamment de l’objectif tensionnel chez les sujets âgés. En effet, dans SPRINT, le bénéfice du traitement intensif est presque plus important chez les plus de 75 ans. Ce résultat est en contradiction avec les résultats de l’étude de cohorte TAMPERE qui avait retrouvé chez les plus de 85 ans une courbe en U, et de l’étude PARTAGE réalisée chez des sujets âgés de 88 ans en moyenne et institutionnalisés qui retrouvait une survie moins bonne lorsque les sujets avaient une PAS inférieure à 130 mmHg. Cependant, il faut être vigilant sur l’âge physiologique des sujets dans ces différentes études. Dans SPRINT, les sujets étaient certes âgés, mais n’étaient pas diabétiques, avaient une clairance de la créatinine supérieure à 20 ml/min, n’étaient pas en insuffisance cardiaque, n’avaient pas de perte d’autonomie… En résumé, la population âgée de SPRINT était composées d’hypertendus « en bonne santé », avec peu de comorbidités, et les résultats ne sont pas applicables à des sujets institutionnalisés. Chez les sujets âgés fragiles, la surmortalité associée à des niveaux de pression plus bas peut être un marqueur du mauvais état de santé et/ou la conséquence de l’augmentation des chutes liée à l’hypotension orthostatique secondaire à l’introduction d’un traitement antihypertenseur. En effet, le risque de chute augmente de 24 % chez le sujet âgé sous traitement antihypertensif. Ce risque étant plus grand pendant les 2 à 3 semaines suivant l’introduction du traitement. En conclusion, la cible de 150 de PAS chez le sujet âgé semble rester raisonnable et doit s’accompagner d’une recherche et d’une prise en charge d’une éventuelle hypotension orthostatique. Impact de la PA sur le risque coronarien Emmanuelle Vidal-Petiot (Paris)(10) a présenté les résultats du registre CLARIFY publiés dans le Lancet en 2016 qui soulève la question de l’objectif tensionnel chez le coronarien. En effet, ce registre a permis de suivre 23 000 coronariens stables « en situation de vie réelle » sur une durée médiane de 5 ans. Les résultats de CLARIFY réintroduisent le phénomène de courbe en J puisqu’on y retrouve une augmentation des événements cardiovasculaires chez les patients avec des chiffres de pression artérielle inférieurs à 120/70. Si cette étude est observationnelle et donc a priori de niveau de preuve inférieur à un essai randomisé, il a été souligné que pour éviter le phénomène de causalité inverse (un niveau tensionnel bas est en fait le marqueur d’un mauvais état de santé), les sujets avec des comorbidités sévères étaient exclus des analyses. Prudence donc chez les patients coronariens… Les recommandations vont-elles changer ? Finalement, Jacques Blacher (Paris) a tenté de répondre à cette question, est-ce que les résultats de SPRINT vont amener les futures recommandations à diminuer les cibles tensionnelles ? Après une nouvelle revue des études citées précédemment, il a cité une publication intéressante parue en 2016 qui traduit les résultats de SPRINT : tout d’abord, la réduction absolue du risque dans SPRINT est finalement peu importante : de 1,6 %. Ce qui veut dire en termes de « nombre de sujets à traiter » que pour 1 000 hypertendus ramenés sous 120/70, 16 vont tirer un bénéfice en termes d’événements cardiovasculaires pour 22 qui auront un effet adverse « grave » (insuffisance rénale aiguë, dyskaliémie…) et pour 962 qui n’en tireront ni bénéfice ni maléfice(11). 2/7 Il a ensuite été rappelé que finalement la « courbe en J » qui est au centre de la controverse sur la question de l’objectif tensionnel est un phénomène « hétérogène » et dépend des différentes populations et de leurs comorbidités. Pour finir, il est revenu sur la méthodologie même de l’essai où la pression artérielle a été mesurée par un dynamap automatisé où le sujet était laissé seul dans une pièce. Or dans tous les essais, la pression artérielle correspond à une mesure de consultation mesurée de façon manuelle par des opérateurs entraînés. Une publication de Filipovsky(12) de 2016 a justement comparé ces différentes mesures pour mettre en évidence que des chiffres de pression à 147/85 « en consultation » correspondaient à des chiffres de 138/79 en automesure et à 130/77 par dynamap automatisé (méthode utilisée dans SPRINT). Donc, le 120 de PAS atteint dans SPRINT correspondrait en fait au 135 mmHg de consultation… Ce qui est finalement la cible donnée dans les recommandations de la SFHTA où l’objectif est entre 130 et 139 mmHg. Donc, finalement, beaucoup de débat pour rien ? Discours d’ouverture : le point sur les recommandations françaises actuelles et futures Dans son discours d’ouverture des 36 es JHTA, Jacques Blacher, président de la Société française d’hypertension artérielle (SFHTA) a rappelé que l’HTA était, toujours en 2016, responsable de 200 millions d’années de vie perdues. Après les recommandations de 2013 de la SFHTA sur la prise en charge de l’hypertension, des recommandations sur la prise en charge uploads/Sante/ focus-sur-les-jhta-quel-objectif-tensionnel-en-2017.pdf

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  • Publié le Jan 09, 2022
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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