Introduction DSM : manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux Les
Introduction DSM : manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux Les premiers manuels de statistiques sur les maladies mentales qui précèdent l’apparition du DSM ont surgi aux USA dans un contexte bien particulier : celui de l’immigration d’une part, et dans le contexte militaire d’autre part. Beaucoup de personnes sont allées aux Etats-Unis : mexicains, irlandais, bretons, juifs. C’est une population extrêmement bigarrée. La question s’est posée de savoir si les maladies mentales étaient les mêmes dans toutes les populations ou s’il y avait des spécificités. Les premiers manuels statistiques sont venus de ce genre d’initiatives. Ca n’était pas au départ initialement orienté sur le psychisme, au début c’était vraiment sur les maladies physiques : est-ce qu’il y a des populations qui sont vectrices de certaines maladies ? Ces questions se sont posées au niveau de l’immigration. Deuxièmement, toujours avant le DSM avant les années 50, on voulait savoir dans l’armée le nombre de schizophrène, de choc post-traumatique, de militaires inaptes à prolonger les actions de guerre. C’est de là que ça vient ce réflexe statistique, à remettre dans le contexte d’une politique de la santé. Ca a changé la médecine. Aujourd’hui la médecine est encadrée de façon très étroite. Le management de la médecine, de la santé, aujourd’hui chez nous s’installe de plus en plus et nous vient d’une pratique américaine qui date déjà d’un demi-siècle. Presser pour vider les lits, enchaîner les patients. Nous subissons l’influence américaine. Pour revenir au DSM, dans les années 50, il est dans ce moment là encore assez marqué de l’empreinte de la psychanalyse, le premier DSM. Beaucoup de psychanalystes d’Europe centrale étaient juifs, Freud par exemple. Lorsque le nazisme a opéré sa percée en Allemagne, en Autriche, et exerçait une pression de plus en plus forte sur les pays limitrophes, les juifs se sont sentis de plus en plus menacés et beaucoup ont émigré vers les Etats-Unis qui paraissaient le pays de la liberté. Mais la psychanalyse, il faut dire, s’est adaptée aussi à l’americain way of life, qui était déjà contaminé par un capitalisme galopant et donc la psychanalyse a glissé du côté d’une thérapeutique de l’adaptation, d’une thérapeutique « caméléon » qui s’adapte au milieu ambiant dans lequel elle figure. Il y a eu un culturalisme qui a modifié qui a modifié l’approche psychanalytique, la théorie psychanalytique. On reconnaissait encore les grands axes de la psychanalyse dans le DSM à ce moment-là. Puis de plus en plus ça a dérivé, sous la pression de différents déterminants. Plusieurs choses ont modifié la situation. D’une part une poussée très forte du comportementalisme (behaviorisme), qui existait aux Etats-Unis. En Europe on avait Pavlov (comportementaliste). C’est pour dire que la psychanalyse, quand elle arrive aux EU n’arrive pas sur un terrain vierge mais sur un terrain déjà travaillé. Le comportementalisme s’adapte très bien au marketing du capitalisme : comment influencer les gens, les dresser pour qu’ils fassent de bons achats. La psychanalyse arrive sur « un terrain miné » et il a fallu qu’elle s’adapte au terrain. C’est un des influences qui a modifié la psychanalyse. La seconde l’ayant modifié est l’essor des neurosciences grâces aux technologies médicales. La troisième est l’essor de la pharmacologie : découvertes pharmacologiques, psychotropes. Les molécules découvertes pour traiter des psychoses sont européennes, françaises même pour certaines, mais les EU avec leur puissance financière ont développé des laboratoires très importants et développé la production de médicaments. Tout ça convergeant à modifier l’approche de la psychopathologie, et c’est ce qui a fait évolué (dans un sens que le prof déplore) le DSM vers une nomenclature. Au point qu’on arrive aujourd’hui (de façon un peu caricaturale) : aujourd’hui l’idéal non avoué du DSM c’est de pouvoir faire correspondre à un tableau clinique une molécule qui viendrait soigner la maladie. Il y a derrière ça une opération marketing de la pharmacie, au point qu’on peut se poser la question de savoir s’il n’y aurait pas aujourd’hui des molécules orphelines dont on ne sait que faire. Il n’y a pas que des maladies orphelines il y a des molécules orphelines, à qui il faut absolument trouver une maladie. Pour en arriver là il a d’abord fallu massacrer, dépiauter, déstructurer les grands axes sur lesquels on s’appuyait pour penser la psychopathologie. Par exemple, l’hystérie qui est une très longue histoire dans la pathologie, n’est plus un terme présent dans le DSM. Aujourd’hui l’hystérie est découpée en branches : c’était des possibilités de l’hystérie et on les retrouve maintenant en morceaux dans le DSM. Dépiauter, casser, puis le tout vendu au détail : presque symptômes par symptômes. L’idée sous-jacente mais non-avouée c’est qu’on va pouvoir trouver la molécule adaptée au symptôme. Pour ça il faut réviser constamment le DSM. Dans une opération d’ajustage, constamment ajuster les deux variables : celle des symptômes changeant et celle des molécules revisitées. Ils disent même le contraire : le DSM quand il se présente se dit « athéorique » : nous ne faisons pas de théories. https://www.youtube.com/watch?v=DP1Hp7QqClM Steeves Demazeux http://www.dailymotion.com/video/x1agfgd_michel-minard-le-dsm-roi-la-psychiatrie-americaine-et-la-fabrique-des- diagnostics_news Michel Minard Même des auteurs américains, même des auteurs qui ont soutenu le DSM font aujourd’hui un coming-out, une espèce d’autocritique. Ils dénoncent les dérapages qui ont abouti au DSM V. Il y a une autocritique qui vient de l’intérieur même du mouvement des psychiatres. Les symptômes peuvent être changeants, et la manifestation peut être anecdotique, secondaire par rapport à la structure. On parle aujourd’hui beaucoup des addictions : livres, internet, sexe. Que veut-on dire quand on parle d’addiction ? Est-ce qu’il y a autant de pathologies que d’objets d’addiction ? Faut-il prendre la question dans ce sens ou le prendre autrement : qu’est-ce qui caractérise une addiction ? Le fait de ne pas résister à se ruer sur l’objet d’addiction. Ce qui fait qu’aujourd’hui on parle beaucoup des addictions sexuelles est qu’on baigne dans la pornographie. L’addiction aux voitures n’existait pas quand il n’y avait pas de voitures. Si on se laisse happer par les symptômes on risque de se laisser partir à la dérive, et découvrir autant de maladies qu’il y a de manifestations de la maladie. Or il est mieux de retrouver de manière sous-jacente le fondement de la pathologie. Dans le domaine de la neurologie, il y a des apraxies : des gestes qui ne peuvent plus être accomplis suite à une atteinte cérébrale. Exemple de « l’apraxique de la boutonnière ». La difficulté qu’il a à se vêtir est la même que sa difficulté à faire manger. Si vous ne parvenez pas à ressaisir les choses sous le symptôme, au niveau de la structure, vous êtes dans une errance. C’est là le problème du DSM. Parce que notre environnement va changer, nos pathologies vont changer. Mais nos pathologies ne changent pas, elles changent simplement d’objet. Importance de cela. Critique épistémologique. Il y a eu un certain nombre de conflits d’intérêts entre les laboratoires pharmaceutiques et ceux qui font le DSM : quelle est leur objectivité dans ce cas là ? On sait aussi que certaines décisions prises par des psychiatres du DSM ont été prises à la majorité des voies « on vote » : ce n’est pas tout à fait sérieux. Ce n’est pas un débat scientifique. Comment est-ce que le DSM est arrivé jusqu’à nous ? Au départ dans la première édition dans les années 50, c’est une association de psychiatres qui est à l’initiative du DSM. Ils se sont dit que pour pouvoir conduire sérieusement des études comparatives il faut qu’on se donne des critères diagnostics communs. Donc il faut une définition le plus clairement possible des maladies, et il faut établir des critères pour reconnaitre les maladies : que les diagnostics soient identiques partout pour tout le monde (aux Etats-Unis au départ). Puis ça a eu un grand succès de libraire, ça s’est bien vendu, et ils se sont dit « on va faire du business ». Ca s’est exporté, ça a été porté par les laboratoires pharmaceutiques. Le premier DSM : les labo organisaient des journées pour présenter le manuel du DSM. Ca s’est de plus en plus imposé comme manuel de référence, entrant d’ailleurs plus ou moins en concurrence avec la classification internationale de maladies. A ce moment le problème a surgi de savoir comment faire converger la CIM et le DSM. Aujourd’hui la psychiatrie est dans la panade. Feys : Quel système pour la psychiatrie ? Elle est aujourd’hui dans un bricolage, il n’y a pas de modèle solide derrière. C’est bio-psycho-social. On pense qu’il y a des déterminants biologiques, mais pas que. On pense qu’il y a des déterminants proprement psychiques, et des conditions sociales qui font que les gens peuvent tomber malades, déprimés. Faute de modèle épidémiologique, consistant. Appui sur des modèles pour penser en tant que système la psychopathologie (démarche à contre-courant du DSM). Ca ne veut pas dire que le DSM ne mérite pas qu’on s’y intéresse mais : ne pas en être dupe. Parler de la psychanalyse : des névroses, des psychoses, des perversions. Il y a plusieurs types de névroses, uploads/Sante/ psychanalyse-amp-dsm.pdf
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- Publié le Dec 12, 2021
- Catégorie Health / Santé
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