17 Prévention et aide au sevrage tabagique au cabinet dentaire Enquête auprès d

17 Prévention et aide au sevrage tabagique au cabinet dentaire Enquête auprès de 218 dentistes, avec la collaboration de la Société de Médecine de Dentaire, dans le cadre de la formation interuniversitaire en tabacologie coordonnée par le FARES (Fonds des Affections Respiratoires) Thérèse VAN VYVE Dentiste L.S.D. - Tabacologue Docteur Thierry MICHIELS Pneumologue - Tabacologue Introduction Pourquoi aider le patient fumeur au cabinet dentaire ? Quel est le rôle, la place du dentiste dans la lutte contre le taba- gisme? Les dentistes sont-ils réellement bien placés pour parler de la cigarette à leurs patients ? Mais surtout, qu’en pensent-ils ? Pour répondre à ces questions, une enquête a été réalisée auprès de 218 dentistes en Belgique francophone. Après une brève introduction sur la dépendance tabagique et ses conséquences, les résultats de cette enquête sont présentés. La dépendance tabagique Le fumeur n’est pas « coupable » de fumer, mais il est la victime de son tabagisme : le tabac induit en effet une triple dépen- dance : physique, psychologique et comportementale. La nicotine en est la principale responsable. Elle est surtout absorbée au niveau des poumons. Via les alvéoles pulmonai- res, elle passe très rapidement dans la circulation sanguine et atteint le cerveau en quelques secondes. A ce niveau, elle se fixe sur des récepteurs spécifiques, ce qui entraîne la libération de dopamine au niveau du noyau accum- bens, le centre du plaisir. Au fil du temps, les récepteurs nicoti- niques deviennent moins sensibles aux stimulations répétées : le fumeur doit progressivement fumer plus pour se procurer les mêmes sensations et éviter les symptômes de sevrage, ingérant alors une quantité plus importante de nicotine et de substances toxiques qui l’accompagnent dans la fumée de cigarette. Cette dépendance, qui s’installe rapidement, est la dépendance physique. A cela s’ajoutent les habitudes du fumeur. La cigarette s’ancre dans les contacts sociaux et dans la routine du fumeur, elle s’immisce dans le déroulement habituel d’une journée. C’est la dépendance psychique et comportementale. Il est d’autant plus difficile de s’en débarrasser que la nicotine et la fumée de cigarette ont des propriétés antidépressives et anxiolytiques démontrées. L ’aide au sevrage tabagique s’appuie à la fois sur le traitement médicamenteux destiné à traiter la dépendance physique, et une thérapie comportementale permettant de gérer la dépendance psychique et le changement d’habitu- des. [60][61][62] Répercussions du tabac sur la santé L ’habitude de fumer est considérée comme le facteur de risque évitable le plus important pour la santé. Parmi les principales maladies provoquées par le tabac, on compte les cancers pulmonaires, les bronchopathies chroniques obstructives ou BPCO, les maladies cardiaques, les atteintes artérielles péri- phériques, les accidents vasculaires cérébraux, les atteintes fœtales chez les enfants de mères fumeuses… Un fumeur sur deux meurt d’une pathologie liée à son taba- gisme, en moyenne 14 ans avant les non-fumeurs, dont un quart entre 35 et 69 ans. Chaque cigarette fumée coûte en moyenne au fumeur 10 minutes de vie. En Belgique, le tabac est responsable de 20.000 décès prématurés chaque année. Malgré des progrès au cours des dernières décennies, pres- que 1 adulte Belge sur 3 est fumeur. [60] Au niveau buccal, le patient ignore trop souvent la gravité des conséquences de son tabagisme : atteintes des dents et des muqueuses, maladies parodontales, pertes de dents, 18 complications chirurgicales lors de traitements buccaux, parodontaux et d’implantologie, risque aggravé de cancers buccaux et d’anomalies congénitales. [1] à [14] Effets néfastes et maladies bucco-dentaires associés au tabac adapté de [1] à [14] Préoccupations principales du fumeur Atteinte des muqueuses Atteinte du parodonte Atteinte des dents Effets sur les traitements Lésions précancéreuses Cancer buccaux Anomalies congénitales Colorations, tâches dans la cavité buccale, halitose, besoin accru de soins buccaux [17][38] Candidoses buccales, palais du fumeur, mélanose tabagique Parodontite du fumeur, gingivite ulcéro-nécrotique, parodontite chronique, à progression rapide [30][45][52] Caries, pertes dentaires [27] Complications chirurgicales, saignements post-extraction, échecs d’implan- tation [24][41] Leucoplasies [49] Carcinome épidermoïde [26] [28] [47] [53] Bec-de-lièvre et fente palatine [54] [55] Arrêt tabagique, difficultés… et place du dentiste « Arrêter de fumer est plus facile à dire qu’à faire… » Les fumeurs sont souvent confrontés aux remarques de leur entourage, aux publications, aux médias, aux restrictions dans les espaces publics, professionnels et familiaux pour les inciter à arrêter et protéger la société du tabagisme passif. Mais les politiques existantes concernant la santé, les taxes et accises, et les attitudes vis-à-vis des fabricants, n’encoura- gent pas suffisamment les fumeurs à l’arrêt. La dépendance est souvent trop forte et gagne malgré tout la partie. Les politiques de santé mettent beaucoup de temps à changer et le pro- blème de la cigarette est encore trop souvent minimisé. Les fumeurs restent les seuls arbitres de leur santé et de leur décision. Les professionnels de la santé peuvent les aider, en leur expliquant les dangers du tabagisme, en leur donnant des pistes à suivre pour vivre une vie sans tabac, et pour améliorer leur santé en général. L ’espérance de vie est augmentée par l’arrêt du tabac, même chez ceux qui arrêtent de fumer après 65 ans. En finir avec la cigarette avant l’âge de 35 ans élimine presque toutes les conséquences du tabagisme sur la santé. Il est utile et urgent d’encourager l’abstinence tabagique, moyen le plus efficace pour diminuer le risque individuel de cancer. L ’arrêt du tabac est aussi la mesure préventive et thérapeutique la plus im- portante pour les atteintes du parodonte. [1][10] Le dentiste bénéficie d’une situation privilégiée pour informer et motiver ses patients. Il voit des patients en bonne santé, de tous les milieux, de tous âges. Les visites chez le dentiste sont (en principe) régulières, parfois plus fréquentes que chez le médecin traitant. [2] La bouche du fumeur est le premier organe en contact direct avec la fumée toxique du tabac.[3] Les signes du tabagisme sont visibles très tôt en bouche. Le dentiste est donc la personne qui, en premier, pourrait parler rapidement des effets néfastes du tabac. D’autant plus que beaucoup d’atteintes sont réversibles à l’arrêt. [1] à [10] Les dentistes sont également bien placés pour le dépistage précoce des cancers. Trop de cancers de la bouche auraient pu être détectés et traités plus tôt. [3][6][7] Comme profes- sionnel de la santé, le patient écoute le dentiste et lui fait confiance. Son avis, ses remarques ont de l’importance. Les avis ont plus de poids s’ils sont cohérents et répétés. Son rôle est donc important auprès du patient fumeur. 19 Questionnaire auprès des dentistes Quelles sont les habitudes des dentistes? Qu’en pensent-ils ? Abordent-ils la question de la cigarette avec leurs patients ? Y attachent-ils de l’importance ? Le questionnaire destiné aux dentistes pour étudier la situation actuelle en Belgique francophone comportait 37 questions concernant 3 thèmes : 1. Abord du tabac au cabinet dentaire 2. Connaissances générales des dentistes sur le tabagisme 3. Opinions, craintes et attentes des dentistes Le questionnaire a été distribué avec la collaboration de la Société de Médecine Dentaire lors d’une formation continue sur l’occlusion le 27 novembre 2009 à La Hulpe. Sur les quelque 250 dentistes présents, 220 ont remis leur questionnaire : 218 ont été retenus pour l’étude, 2 exemplaires étant incomplets. Les dentistes sont en majorité des généralistes, mais aussi plusieurs spécialistes en prothèse, parodontologie, implantologie et orthodontie. Globalement, le groupe de 218 dentistes qui ont répondu à l’enquête est probablement représentatif des dentistes francophones, sur le plan de l’âge, du sex-ratio, du type d’activité professionnelle. Plus de deux tiers ont moins de 50 ans. La quasi-totalité des dentistes interrogés (90 %) travaillent en cabinet privé, 14 % travaillent dans un centre médical, et 6 % en centre universitaire (plusieurs lieux de travail étant possi- bles, le total est > 100 %). 95 % ont un statut d’indépendant. 45 % sont diplômés de l’UCL, 40 % de l’ULB, 12.5% de l’ULG et 2,5% d’autres uni- versités belges ou françaises, ce qui est lié au lieu et à l’orga- nisateur de la conférence. 96 % n’ont jamais suivi de formation en tabacologie. Vu le sujet de l’étude, nous avons posé la question du statut tabagique des dentistes : 16 % se disent fumeurs, 84 % non- fumeurs, dont 24 % d’ex-fumeurs (qui ont fumé plus de 100 cigarettes dans leur vie), et 60 % qui n’ont jamais fumé. Une revue de la littérature récente compare le tabagisme chez les dentistes dans différents pays : dans la majorité des études internationales, le taux de fumeurs chez les dentistes est inférieur à 10 % (entre 1 et 8 % aux Etats-Unis). Le taux de dentistes fumeurs est en général inférieur à celui de la popu- lation de référence, et semble diminuer au fil du temps.[42] 1. Abord du tabac au cabinet dentaire Les dentistes sont sensibles au problème du tabagisme mais ils donnent très peu d’information aux patients. 74 % demandent à leurs patients s’ils sont fumeurs. Ils le font surtout lors de la première visite et si les patients souffrent de symptômes ou d’affections liés au tabac. 42 % notent régulièrement le statut tabagique uploads/Sante/ tabac-224 1 .pdf

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  • Publié le Aoû 12, 2022
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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