Troubles neuro-développementaux et/ou comportementaux à l’âge adulte Aurélie Ri

Troubles neuro-développementaux et/ou comportementaux à l’âge adulte Aurélie Richard-Mornas et Catherine Thomas-Antérion  Introduction - Troubles neuro-développementaux et/ou comportementaux diagnostiqués à l’âge adulte : savoir y penser !.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�p. 44 Catherine Thomas-Antérion 1  Trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) de l’adulte : une pathologie de l’enfance, mais des handicaps tardifs.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�p. 45 Aurélie Richard-Mornas 2  Diagnostic à l’âge adulte d’un retard mental : l’évaluation d’un retard mental léger.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�p. 48 Aurélie Richard-Mornas 3  Dyslexie diagnostiquée tardivement : les troubles des apprentissages et/ou psychopathologiques durent toute une vie... .�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�p. 51 Aurélie Richard-Mornas 4  Dys, vulnérabilité et dégénérescence ? L’aphasie primaire progressive et les dégénérescences fronto-temporales comportementales .�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�p. 55 Aurélie Richard-Mornas Conclusion - Le rôle du neurologue… .�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�.�p. 59 Catherine Thomas-Antérion dossier Neurologies • Février 2015 • vol. 18 • numéro 175 43 Correspondance Dr Aurélie Richard-Mornas Service de Neurologie Fonctionnelle et d’Epileptologie, Hospices Civils de Lyon Hôpital Pierre Wertheimer 59 Bd Pinel / 69500 BRON E-mail : aurelie.richard-mornas@chu-lyon.fr Dr Catherine Thomas-Antérion Résidence Plein Ciel 75 rue Bataille - 69008 Lyon et EA3082, Laboratoire EMC (Etudes des Mécanismes Cognitifs), Université Lyon 2 E-mail : c.thomas-anterion@orange.fr dossier 44 Neurologies • Février 2015 • vol. 18 • numéro 175 L a plainte cognitive est un motif fréquent de la consul- tation chez le neurologue. Certaines plaintes cognitives ou comportementales peuvent non pas traduire des pathologies neurocognitives acquises, mais traduire des pathologies du déve- loppement. Cela concerne majori- tairement des adultes jeunes (ex- clus des consultations de mémoire orientées vers les maladies neuro- dégénératives). • Evidemment, le symptôme n’est pas récent. En dehors des patients déjà diagnostiqués et qui consultent peu, on peut repérer des situations dans lesquelles le sujet sait (même s’il n’a pas fait le lien) que le trouble est ancien. Ainsi, un patient de 66 ans raconte qu’il a toujours été “excité” et que l’institutrice de CP le ficelait à sa chaise avec ses bretelles, et une femme de 30 ans raconte que sa jumelle écrivait ses lettres, ses de- voirs et même plus tard ses lettres de motivation manuscrites lors de la recherche d’un emploi. Le plus souvent, le trouble est vécu et raconté comme récent car son retentissement l’est, par exemple lorsque des changements inter- viennent dans le poste de travail. • Certaines personnes néanmoins ne se doutent pas du diagnostic. Les situations sont très nom- breuses. Il s’agit de difficultés co- gnitives sélectives – comme avoir toujours eu du mal à lire, à écrire, à dessiner, à calculer, à se concen- trer, être très maladroit/malha- bile, etc. – et/ou de difficultés com- portementales, notamment en termes de socialisation, de régula- tion de l’impulsivité et/ou de diffi- cultés intellectuelles plus globales. • L’entretien est un temps-clé pour savoir y penser. Il faut, en plus de l’anamnèse habituelle, s’intéresser au développement psychomoteur, aux évènements de l’enfance, et poser un certain nombre de questions. En plus de connaître l’âge, le niveau d’éduca- tion, la/les langue(s) parlée(s), il convient de préciser le parcours scolaire (difficile, redoublement), le parcours professionnel (échec, changements), le parcours socio- familial (adaptation). Il faut faire attention aux faux-fuyants et à ne pas brusquer les choses, car le récit est souvent douloureux ou vécu comme honteux. Le point le plus difficile est celui des comor- bidités psychiatriques fréquentes : dépression, addiction, passage à l’acte suicidaire, etc. • La question des comorbidités est complexe car un certain nombre de psychopathologies peuvent être un diagnostic différentiel de troubles de l’adaptation, d’échecs socioprofessionnels, d’hyperacti- vité, etc. De plus, certains adultes viennent d’eux-mêmes lorsqu’un trouble a été diagnostiqué chez un proche, et le neurologue doit prendre garde au vécu très violent de la tare transmissible. • Enfin, et c’est loin d’être une si- tuation rare, de nombreux adultes consultent avec un autodiagnos- tic sur Internet… Ceci rappelle si nécessaire qu’aucune échelle ne peut permettre un diagnostic positif sans entretien clinique et sans choix délibéré de celle-ci. Les éléments d’hyperactivité, d’impul- sivité ou les troubles attentionnels peuvent être l’expression de très nombreuses psychopathologies, parfois plus difficiles (moins poli- tiquement correctes) à accepter par les patients. A l’inverse, dire que l’on n’aimait pas l’école est parfois plus facile que dire que l’on n’y trouvait pas sa place du fait de troubles neurocognitifs ou com- portementaux. Nous avons retenu dans ce dossier les situations fréquentes que tout neurologue doit s’attendre à ren- contrer : dyslexie, retard mental, TDAH. n Catherine Thomas-Antérion Troubles neuro-développementaux et/ou comportementaux diagnostiqués à l’âge adulte Savoir y penser ! introduction Troubles neuro-développementaux/comportementaux à l’âge adulte Neurologies • Févier 2015 • vol. 18 • numéro 175 45 Un diagnostic tardif Il est important de se rappeler que les symptômes du Trouble Déficitaire de l’Attention avec ou sans Hyperactivité (TDAH) se manifestent dès l’enfance, mais que, parfois, les handicaps ne de- viennent évidents que beaucoup plus tard. Le diagnostic du TDAH adulte im- plique donc la présence de symp- tômes dans l’enfance, même s’il est possible que le diagnostic n’ait pas été posé avant l’âge adulte. Les études de suivi ont permis d’établir que plus de la moitié des enfants atteints de TDAH gar- deront des symptômes à l’âge adulte [1]. Des études récentes ont évalué à 4 à 6 % la prévalence du TDAH chez l’adulte dans la population générale [2]. Parmi les symptômes du TDAH, l’inattention se norma- lise dans 60 % des cas chez l’adulte, contre 40 % pour l’impulsivité. Le critère d’âge du DSM-IV (appa- rition des symptômes avant 7 ans) est difficilement applicable en clinique lors de l’évaluation d’un adulte, et il y a consensus entre experts pour dire que, si un adulte rapporte rétrospectivement que les symptômes ont débuté avant l’âge de 12 ans, on retrouve le même tableau clinique et le même profil d’évolution et de réponse aux trai- tements que pour les adultes qui rapportent un début des symp- tômes avant l’âge de 7 ans. Ce qu’il faut rechercher Les adultes atteints de TDAH sont surtout handicapés par : • les troubles cognitifs atten- tionnels (distractibilité, “bou- geotte des idées”) ; • la désorganisation associée (procrastination, difficulté à ter- miner ses tâches, éparpillement) ; • et l’impulsivité résiduelle ; qui leur nuisent autant dans leur travail que dans leur vie privée (encadré 1). Les adultes atteints peuvent aussi présenter une difficulté à moduler leurs émotions. Ils se décrivent comme à fleur de peau, la mèche courte. Ils s’emballent pour un projet pour l’abandonner rapidement quand l’intérêt baisse. Cette variation de l’expression des émotions peut ressembler à une maladie de l’humeur si l’on ne re- marque pas le caractère d’hyper- réactivité émotionnelle des fluc- tuations rapportées, qui n’ont pas le caractère cyclique des maladies de l’humeur. Souvent, les adultes atteints de TDAH remarquent que l’hype- ractivité motrice est moins intense, vécue surtout comme un inconfort en situation d’inactivité ou d’attente. Ils ont appris à com- poser avec le besoin irrésistible de bouger (impatience motrice) en le canalisant dans leur travail et, pour certains, dans le sport. Certains se “traitent” avec des psychostimulants en vente libre (nicotine, caféine) ou non. En raison des symptômes invali- dants associés au TDAH, plusieurs souffrent aussi d’une faible estime d’eux-mêmes et d’un sentiment de sous-performance chronique. 1 Trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) de l’adulte Une pathologie de l’enfance, mais des handicaps tardifs n « Docteur, mon enfant a un TDAH et c’est ma copie conforme, pouvez-vous m’aider ? » De plus en plus de cliniciens sont confrontés à cette question... Aurélie Richard-Mornas dossier 46 Neurologies • Février 2015 • vol. 18 • numéro 175 Une échelle de repérage (ASRS-V1.1) L’échelle d’auto-évaluation des troubles déficitaires de l’atten- tion avec hyperactivité de l’adulte (ASRS-V1.1) est un test de dépistage pour aider à identifier les symp- tômes d’un TDAH de l’adulte [3]. C’est une échelle courte à remplir (moins de 5 minutes). La consigne est : « Répondez aux questions suivantes en vous auto-évaluant sur chacun des critères à l’aide de l’échelle à droite de la page. Pour répondre aux questions, cochez la case qui décrit le mieux vos sen- timents ou vos comportements au cours des six derniers mois. » Les réponses retrouvées dans les cases grisées valent 1, les autres 0 ; le score global correspond à la somme et une note obtenue > 3 est en faveur d’un diagnostic de TDAH. Les questions de l’ASRS- V1.1 sont en accord avec les cri- tères du DSM-IV et se focalisent sur les manifestations du TDAH chez les adultes (encadré 2). En parallèle, il faut évaluer le re- tentissement fonctionnel, l’impact du trouble dans la vie quotidienne du sujet : au niveau familial, social et professionnel. Des comorbidités associées Plus de la moitié des adultes souf- frant d’un TDAH vont développer une pathologie psychiatrique co- morbide, telle que : • des troubles de l’humeur ou une anxiété ; • un trouble oppositionnel avec provocation ; • parfois, un abus de substances (alcool, cannabis) avec une toxico- manie ; • voire des conduites délinquantes qui peuvent amener à une margi- nalisation. Ce risque de comorbidités par abus de substances uploads/Sante/ troubles-neuro-developpementaux-et-ou-comportementaux-age-adulte.pdf

  • 7
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Apv 17, 2022
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.3303MB