Edward Sapir (1921) ANTHROPOLOGIE Tome 2 : culture Un document produit en versi

Edward Sapir (1921) ANTHROPOLOGIE Tome 2 : culture Un document produit en version numérique par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi Courriel: jmt_sociologue@videotron.ca Site web: http://pages.infinit.net/sociojmt Dans le cadre de la collection: "Les classiques des sciences sociales" Site web: http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/index.html Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi Site web: http://bibliotheque.uqac.uquebec.ca/index.htm Edward Sapir (1921), Anthropologie. Tome 2 : culture 2 Cette édition électronique a été réalisée à partir de : Edward Sapir (1921), anthropologie Tome 2 : culture Paris : Éditions de Minuit, 1969, 225 pages. Collection Le sens commun Traduction de Christian Baudelot et Pierre Clinquart. Introduction et notes de Christian Baudelot. Edward Sapir (1921), Anthropologie. Tome 2 : culture 3 Table des matières QUATRIÈME SECTION : Culture Ethnologie et histoire : question de méthode Introduction Plan détaillé de l'article I. Les preuves 1. Les documents écrits 2. Les témoignages indigènes 3. Le témoignage de l’archéologie, les strates II. Les indices 1. Les indices livrés par l’anthropologie physique 2. Les indices livrés par l’ethnologie A) la mise en évidence de séries culturelles B) les combinaisons culturelles C) la distribution géographique de la culture D) aires culturelles et strates culturelles 3. Les indices livrés par la linguistique A) langue et culture B) déductions opérées à partir des mots et des formes grammaticales C) distribution géographique des mots de culture D) distribution géographique de souches linguistiques E) distribution géographique des traits phonétiques et morphologiques Conclusion Note sur la transcription phonétique des mots indiens L'organisation sociale des Indiens de la côte Ouest Cultures authentiques et cultures inauthentiques Éclaircissements de quelques termes et références du texte de Sapir Index des tribus et des langues Biographie d’Edward Sapir Bibliographie des travaux de l’auteur Œuvres sur Sapir Edward Sapir (1921), Anthropologie. Tome 2 : culture 4 quatrième section culture Retour à la table des matières Edward Sapir (1921), Anthropologie. Tome 2 : culture 5 Ethnologie et histoire: question de méthode 1 Introduction Retour à la table des matières L'anthropologie culturelle se considère de plus en plus comme une science strictement historique. Les données qu'elle rassemble restent incompréhensibles, à la fois en elles-mêmes et dans leurs rapports réciproques, tant qu'on ne les interprète pas comme les aboutissements de séries spécifiques d'événements remontant à un passe éloigné. Si certains d'entre nous s'intéressent aux lois psychologiques du développement humain que nous nous croyons capa- bles d'abstraire des matériaux bruts fournis par l'ethnologie et l'archéologie plus qu'à l'établissement des faits précis et des relations historiques qui rendraient ces matériaux intel- ligibles, il ne s'ensuit pas que la formulation de ces lois ressortisse plus aux fonctions de l'anthropologue qu'à celles de l'historien, au sens étroit du mot. Si, plus souvent que l'histo- rien, l'anthropologue a utilisé les données descriptives comme des moyens d'atteindre à la psychologie des peuples, c'est que deux séries de facteurs l'y conduisaient. Et d'abord, l'ab- sence fréquente de repères chronologiques qui caractérise l'étude de la culture des peuples primitifs : cette lacune conduit le chercheur à négliger ou à sous-estimer l'importance de la dimension historique et l'incite à chercher une compensation dans l'élucidation des lois géné- rales du fonctionnement, en dehors de toute référence temporelle. En second lieu, les cultures qu'examine l'anthropologue se révèlent, dans leur ensemble, moins complexes que celles sur lesquelles nous possédons des documents écrits ; cette simplicité le conduit à supposer que les premières, parce qu'elles sont moins chargées de développements secondaires et atypi- ques, se prêtent mieux aux généralisations psychologiques. Il n'est pas indifférent non plus que les données dont dispose l'anthropologue lui permettent d'embrasser d'un seul coup d’œil 1 Publié pour la première fois dans Canada, Department of Mines, Geological Survey, Memoir 90, Anthropological Series no 13, 1916. Édition Mandelbaum, pp. 389-462. Edward Sapir (1921), Anthropologie. Tome 2 : culture 6 une plus grande variété de cultures que l'historien ; il est de ce fait, ou du moins le croit-il, mieux armé pour appréhender les types principaux de développements culturels. Ces fac- teurs, qui ne sont d'ailleurs pas les seuls, expliquent que l'anthropologie culturelle ait tant mis l'accent sur le général et le schématique. On ne saurait pourtant soutenir que les données actuelles de notre science doivent fournir aux folkloristes une matière plus appropriée que celles des cultures évoluées d'aujourd'hui et lui être abandonnées comme un corpus vile. Même en admettant que les travaux du folkloriste aient leurs fins en soi, il reste que les cul- tures dites primitives sont intégralement composées de phénomènes qui, du point de vue de l'ethnologue, doivent être expliqués historiquement, c'est-à-dire comme des événements his- toriques qui, si hypothétiques qu'ils soient, sont les moments d'une séquence spécifique, se sont produits dans un lieu spécifique et ont entretenu entre eux des rapports spécifiques. Il ne viendrait à l'idée de personne de prétendre que l'interprétation historique viendra un jour à bout de la masse considérable et sans cesse croissante des matériaux ethnographiques, mais il est essentiel que la compréhension historique des faits soit proposée au chercheur comme l'objectif proprement ethnologique de son étude. Ainsi, une fois admis que nous désirons recourir, dans l'interprétation de la culture amé- ricaine aborigène, à une méthode historique aussi rigoureuse que nous le permettront les cir- constances, une question surgit aussitôt : comment injecter une chronologie dans cette masse indifférenciée de faits purement descriptifs ? Outre les informations éparses que nous pou- vons réunir à propos de son histoire extérieure, qui ne couvrent d'ailleurs qu'un espace de temps relativement court, les connaissances que nous possédons sur une tribu se limitent, la plupart du temps, à savoir qu'a un certain moment (a un moment récent) on se servait de tel instrument ou de telle technique, que telle coutume était en honneur et que telle croyance était admise. Lorsque notre connaissance s'appuie sur des témoignages recueillis par des au- teurs anciens, comme c'est le cas pour les cultures aztèque, maya et péruvienne, nous avons encore affaire, la plupart du temps, à des faits très ponctuels, ou qui se sont produits, dans le meilleur des cas, pendant un laps de temps très bref ; trop bref pour éclairer l'évolution de la culture dans son ensemble. Notre problématique se définirait métaphoriquement par la pro- jection d'une photographie de la réalité à deux dimensions en une photographie à trois di- mensions. Est-il possible de saisir sur la surface plane de la culture américaine une profon- deur temporelle comme nous saisissons la profondeur de champ sur la surface plane d'une photographie ? Avant d'être en mesure de répondre à cette question, nous devons préciser ce que nous attendons au juste de notre perspective temporelle. Tout d'abord, il est évident que la nature même de nos matériaux nous impose des limitations que l'historien ignore, ou connaît sous une forme moins contraignante. C'est seulement dans des limites très étroites que nous pour- rons espérer établir une chronologie absolue, c'est-à-dire assigner des dates précises à des événements. Nous nous contenterons dans certains cas de dates approximatives, en tolérant une marge d'erreur variant de quelques années à plusieurs siècles, allant même, pour le passe lointain, jusqu'à des millénaires. Dans d'autres cas, et ce seront peut-être les plus nombreux, nous renoncerons tout à fait à établir une chronologie pour viser simplement à reconstituer une séquence déterminée d'événements. Une deuxième limitation s'impose aussi nettement. L'histoire étudie toujours les individus. Encore qu'on ne doive pas sous-estimer le rôle impor- tant des événements individuels et des grands hommes dans l'évolution de l'humanité, les re- constructions historiques de l'anthropologie culturelle ne peuvent procéder, à de très rares exceptions près, que par généralités. Au lieu de parler, par exemple, de l'influence spécifique Edward Sapir (1921), Anthropologie. Tome 2 : culture 7 exercée dans une tribu par un shaman particulier à une époque inaccessible du passé, l'an- thropologie culturelle devra généraliser en regroupant un certain nombre de ces phénomènes et décrire l'influence exercée par la classe des shamans à une époque et en un lieu plus ou moins bien définis. Ou, s'il s'agit des relations sociales entre deux tribus, par exemple les Haïda et les Tsimshian, on est souvent obligé de se contenter de définir à grands traits ces relations, en considérant les Haïda et les Tsimshian dans leur ensemble comme les unités en- trant directement en jeu, tout en sachant parfaitement que les mécanismes réels de ces rap- ports dépendent dans tous les cas d'individus, de « maisons », de clans, c'est-à-dire des subdi- visions des unités historiques apparemment impliquées. La substitution du tout à la partie est inévitable en ethnologie. Si l'on doit reconnaître ouvertement ces deux limitations, elles n'empêchent aucunement d'appliquer des méthodes historiques à l'objet de l'anthropologie culturelle. Elles introduisent une correction purement quantitative, et non qualitative, dans notre idéal originel de traitement historique. L'étude d'un processus historique récent permet- tra souvent au chercheur de reconstituer une chaîne déterminée d'événements et d'attribuer une date précise à chacun d'eux, avec une marge d'erreur raisonnable ; il pourra même par- fois définir clairement la nature des unités sociales, individuelles ou collectives, impliquées à chacun des moments du uploads/Societe et culture/ anthropo-2.pdf

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