Jean-Pierre LAPORTE LES SOCIÉTÉS SAVANTES HISTORIQUES ET GÉOGRAPHIQUES D'AFRIQU

Jean-Pierre LAPORTE LES SOCIÉTÉS SAVANTES HISTORIQUES ET GÉOGRAPHIQUES D'AFRIQUE DU NORD AVANT LES INDÉPENDANCES, p. 40-51. LES SOCIÉTÉS SAVANTES ET L'OUTRE-MER LEUR RÔLE SCIENTIFIQUE, CULTUREL ET SOCIAL HIER, AUJOURD'HUI ET DEMAIN Colloque tenu à Paris, les 22 et 23 novembre 2011 sous la présidence de Paul BLANC entre l'Académie des sciences d'outre-mer (ASOM) et le Comité des travaux historiques et scientifiques (CTHS) organisé avec la participation de l'Association des amis du CTHS et des sociétés savantes édité par Bruno DELMAS et Ange ROVÈRE SOMMAIRE Préface Pierre Gény et Claude Mordant 5 Introduction Bruno Delmas, membre de l'Académie et du CTHS, Les sociétés savantes en France et outre-mer : des phénomènes parallèles ? 7 Louis Bergès, membre du CTHS, À la recherche des sources relatives à l'histoire des sociétés savantes d'outre-mer 19 1. Apparition et destin des sociétés savantes locales du temps des colonies à nos jours Pascal Even, membre du CTHS, Les sociétés savantes de la côte charentaise et l'outre-mer; les destins contrariés des sociétés de géographie de La Rochelle et Rochefort au tournant du XX e siècle 25 Martine François, membre du CTHS, Les sociétés de géographie et l'expansion coloniale. 34 Jean Pierre Laporte, membre du CTHS, Les sociétés savantes historiques et géographiques d'Afrique du Nord avant les indépendances. 40 Hubert Gerbeau, ancien vice-président du centre universitaire de la Réunion, Les sociétés savantes de la Réunion. 52 Danielle Bégot, membre correspondant du CTHS, Les sociétés historiques de la Caraibe, (XX e-XXI e siècles), état des lieux. 63 II. Les sociétés savantes nationales et l'outre-mer aujourd'hui et demain Bernard Vandermeersch, membre du CTHS, La société française d'anthropologie et l'étude des hommes. 79 Jean-Pierre Mahé, membre de l'Institut, La société asiatique et l'orientalisme européen. 83 Christian Coiffier, ancien secrétaire général de la société des océanistes, Genèse de la société des océanistes. 88 Bernard Dupaigne, membre de l'Académie, La société des études euro-asiatiques. 96 Jacques Frémeaux, membre de l'Académie, Quatre-vingt-dix ans d'histoire de l'Académie des sciences d'outre-mer. 99 Conclusion/Synthèse Philippe Bonnichon, membre de l'Académie 107 LES SOCIÉTÉS SAVANTES HISTORIQUES ET GÉOGRAPHIQUES D'AFRIQUE DU NORD AVANT LES INDÉPENDANCES par Jean-Pierre LAPORTE1 Résumé Les sociétés savantes d'Afrique du Nord sont nées d'un apport notable de population européenne après les occupations, 1830 pour l'Algérie, 1881 pour la Tunisie, 1912 pour le Maroc. Elles sont liées à l'installation d'une société coloniale, mais aussi à des individus dont les intérêts matériels et les curiosités intellectuelles étaient très variés. Nous considérons ici plutôt les sociétés locales ayant traité d'histoire et d'archéologie en les replaçant dans le contexte de leur temps, et en voyant ce qu'elles peuvent apporter aujourd'hui à la connaissance de divers domaines. La synthèse a déjà été faite, une première fois en 19052, et de manière plus succincte en 19353, mais les temps ont bien changé. Elles méritent d'être réexaminées de manière plus moderne, dans leur contexte local, mais aussi avec l'ensemble du mouvement associatif français dont elles faisaient partie4. Comme en métropole, l'apparition et le maintien de sociétés savantes furent liés à plusieurs facteurs : une population urbaine importante, la présence d'une élite locale en nombre suffisant, une période de prospérité économique. Elles furent créées souvent autour d'un homme, et reflétèrent au départ une vision assez aristocratique. Jusqu'à la loi de 1901, leur création était sujette à une autorisation administrative préalable, ce qui permet dans quelques cas de détecter une certaine volonté de l'administration. 1. Les fondations L'élite intellectuelle des nouveaux venus en Algérie et en Tunisie était constituée de militaires, d'administrateurs, d'ecclésiastiques, mais aussi de prisonniers politiques (déportés de 1848). Ces témoins, avec leur curiosité personnelle, avec leurs connaissances, même limitées, mais aussi leurs préjugés, ceux de leur temps (comme pour nous ceux du nôtre), purent observer et décrire des phénomènes nouveaux pour eux. Chercheurs et simples curieux eurent plaisir et intérêt à se réunir pour mettre en commun leurs découvertes. 1.1. Sociétés savantes d'Algérie Curieusement, l'une des premières sociétés savantes d'Algérie vouées à l'histoire et à l'archéologie fut créée à Bougie en 1837, trois ans seulement après la prise de la ville par les troupes du général Trézel. Elle fut réunie à l'initiative du colonel de La Rochette sous le nom 40 1 Je tiens à remercier pour leurs renseignements N. Benseddik, J. Desanges, S. Ferdi, E. Gran-Aymerich, A. Khelifa, A. Mrabet. 2 Capitaine Jugue, «L'œuvre des sociétés savantes algériennes et tunisiennes », Revue africaine, 49, 1905, pp. 463-485. 3 Discours d'ouverture de Gustave Mercier lors du premier Congrès de la Fédération des Sociétés savantes d'Afrique du Nord, Revue africaine, 76, 1935, pp. 12-28. 4 Cf. Sylvie Guillaume (dir.) , Les associations dans la Francophonie, 2006, 333 p., Jean-Pierre Chaline, Sociabilité et érudition. Les Sociétés savantes en France, Paris, CTHS, 1998 (réédition au format de poche d'un ouvrage publié en 1995), 479 p. de Société d'essais et de recherches5. Même si elle ne dura que quelque mois et ne survécut pas au changement d'affectation de son fondateur, elle permet d'illustrer le rôle tout particulier des militaires français dans l'exploration archéologique de l'Algérie6. Les premières associations connues en Algérie concernaient l'agriculture (1840) et la médecine (1847), donc des questions vitales. Géographie et histoire ne vinrent qu'après. La population civile d'origine européenne ne progressa que lentement, même après l'affirmation d'une volonté de peuplement dès 1847. La première vraie (et durable) société savante « civile » d'Algérie fut la Société archéologique de Constantine, créée en 1852 autour du général de Creully7. Les intentions et les ambitions ont été clairement présentées8 : « Coupcd'oeil sur les antiquités de la province de Constantine : la création d'une société scientifique dans un pays à peine ouvert aux conquêtes de la civilisation, est une entreprise qui peut sembler téméraire. Aussi n'est-ce point une académie que nous avons prétendu fonder. Nous ne sommes, la plupart, ni des érudits, ni même seulement des gens de loisirs, deux espèces à peu près inconnues sur cette terre d'Afrique, où chacun est par état, tout entier aux affaires, soit publiques, soit privées. Mais dans le cercle restreint que nous nous sommes tracé, et qui est défini par ces mots : RECUEILLIR, CONSERVER, DECRIRE9, la bonne volonté pourra suppléer au défaut de savoir. Le manque de temps sera compensé par les facilités que procure à plusieurs d'entre nous l'exercice des fonctions publiques. Nous osons croire que notre association est appelée à rendre d'utiles services à la science dans le curieux champ d'exploration que nous allons esquisser rapidement. » (la province de Constantine à l'époque romaine essentiellement)10 La seconde fut la Société historique algérienne, fondée à Alger, en 1856 plus ou moins par la volonté du maréchal Randon, gouverneur général de l'Algérie11, et présidée aussitôt par Adrien Berbrugger12. L'année suivante naquit la Société de géographie d'Alger. On ne connaît guère que le nom de la Société archéologique de Cherchel, créée en 1860. En revanche, l'Académie d'Hippone (Bône, 1865) produisit un bulletin fort important en attirant des contributions venues de toute l'Afrique du Nord. Pour nos études, suit la Société de géographie d'Oran, fondée en 187813 par le lieutenant de vaisseau Trotabas, directeur du port 41 5 «Monsieur le colonel de Larochette fut nommé commandant supérieur de Bougie, où il montra un grand talent d'organisation et devint le fondateur d'une Société d'essais et de recherches, à laquelle appartenaient les personnes lettrées de la population européenne et tous les officiers de la garnison. Ce fut sous les auspices de ce chef éclairé que deux jeunes archéologues pleins de zèle, M. Faulte, lieutenant à la 4e compagnie du Génie et M. Paul Prieur, payeur militaire de la place, ont trouvé des inscriptions », Charles-Benoît Hase, «Rapport sur quelques inscriptions latines récemment découvertes dans l'ancienne province d'Alger », Journal des Savants, 1837, p. 662. (CIL 8930-8931). 6 On trouvera ci-dessous, en Annexe I, une liste des sociétés savantes d'Algérie connues à ce jour. 7 Cf. U. Hinglais, «Le premier demi-siècle de la Société archéologique de Constantine, 1852 à 1902 », RSAC, 35[36], Cinquantenaire 1853-1902, pp. 1 à 48. A. Berthier, « L a Société archéologique du département de Constantine a célébré son centenaire », revue Algeria, n.s. 30, janv.-févr. 1953, pp. 45-51. 8 Annuaire de la Société archéologique de Constantine, t. I, 1853, p. 13. 9 Les majuscules figurent dans le texte d'origine. 10 Ce champ allait s'élargir par la suite, notamment à l'archéologie. 11 A. Berbrugger, «Introduction », Rev. af., I, 1856-1857, pp. 8-9. 12 Adrien Berbrugger fut également le créateur et le premier conservateur de la Bibliothèque-Musée d'Alger. C'était aussi un ami personnel de l'émir Abd el-Kader et un grand découvreur de manuscrits arabes. 13 Début du premier Bulletin de la Société de géographie d'Oran, I, 1878, p. 3 : «Les études géographiques, naguère si négligées en France, viennent enfin d'y prendre quelque importance. Les programmes d'examen pour l'obtention de divers diplômes et pour l'admission aux écoles du gouvernement font une large place à la géographie, et plusieurs sociétés se sont formées dans le but de propager l'étude de la surface du globe. Un certain nombre d'habitants d'Oran, loin de rester indifférents en présence de c e nouveau courant uploads/Societe et culture/ les-societes-savantes-historiques-et-geo.pdf

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