ÉTUDES SUR ARISTOTE V\ Paris. — Typograpiii»; de Ad. R. I,ainé, rue Jacob, 56.

ÉTUDES SUR ARISTOTE V\ Paris. — Typograpiii»; de Ad. R. I,ainé, rue Jacob, 56. ETUDES SUR ARISTOTE ÏMILITIOIE, DIALECTIOIE, RHÉTORIOIE PAR CHARLES THUROT Professeur à la Kacnlte ile^ leltiv- Je CU'riiiuiit-I'.'rrjiul % DURAND, LIBRAIRE-ÉDITEUR ^ KUE DES GRÉS, 7 1860 ' fi ' £ PREFACE Dans ces études sur Aristote je me suis proposé de discuter certains textes de ses écrits et d'expo- ser quelques points de ses doctrines (i). Je ne me suis attaché qu'aux difficultés qui me semblaient n'avoir pas encore été aperçues et aux questions sur lesquelles j'ai cru avoir trouvé quelque chose de plus plausible ou de plus exact que mes devanciers. Ce qui me paraissait avoir reçu une solution sa- tisfaisante, ou ce que je sentais ne pas pouvoir mieux résoudre, je l'ai laissé de côté. Sur certains points je me suis aperçu trop tard que j'avais été devancé : j'ai rendu à chacun ce qui lui apparte- nait. La plupart des observations critiques portent sur (I) Une partie de ces recherches a été publiée dans le Nene Jahr- biicher fur Philologie und Paedagogik (novembre 1860) , et dans le Journal ?:cnéral de l'Instruction publique (^\ août et 7 septembrp 185V), ir. et 16 juin ISfio). V, l»REFACE. la P()lili(|iic (l'Xiistote. Il est peu d'ouvrages tl'\- rislote qui soient aussi célèbres et aujourd'hui aussi j)(>j)ulaires : il en est peu dont le texte, quoique in- telligible dans l'ensemble, nous soit parvenu en aussi mauvais état (i j. La Politique parait avoir été très-peu étudiée, même à l'époque où la pliiloso- pliie d'Aristote avait repris laveur. On ne trouve pas dans d'anciens conunenlateurs les ressources ((u'un savant éditeur de la Métaphysique, Bonitz, a employées avec luie sagacité circonspecte (2) ; et les manuscrits, connue on peut s'en convaincre parle granil travail de Bekker, n'offrent que peu de secours. In i^rand nouibre de fautes leur sont com- niiuies : ainsi, non-seulement l'ordre des livres y est bouleversé, et ils reproduisent tous les inter- polations faites pour justifier l'ordre vicieux qui a été substitué au véritable plan d'Aristote (3) ; mais encore ils s'accordent à omettre, à ajouter, à trans- (I) C'est l'opinion d'un critique distingué, et qui s'est beaucoup occupe d'Aristote, Spengel , Uebcr cite PoUlïk des Aristolelcs, Mé- nioiios de r.Vcadiinie (ieliavicrc, XXIV, p. G, 1847. (•}.) Ot)S('rvalioncs crilice in Ari^tolelis libres metaphysicos, 1842. — Arisloleiis melapliysiia rccoguovit et enanavit II. Bonitz, 1848- 184!). (;») M. Itartli.lfiny St.-llilaiie a remis en honneur l'opinion de Scaino et de Coniing.qui avaient vu (jue le septième et le huitième livre (le la Politique devaient être placés immédiatement après le Iroisieuie, et il a démontré le premier que le sixième livre devait suivre le (pialri.nie et précéder le cinfiuicme (Politique d'Aristote, traduite en français d'après le texte coliationné sur les manuscrits et les éditions principales, 1837). Ses vues ont été conlirmées par Spcn^el mémoire cité plus haut), par Nickes (De Aristotelis politi- 'onim lihris. IM..1). <l adoptées par RekkorfOc Hopuitlici lihri Vlfl. PRKFACE. vil poser, ou à altérer certains mots (i). Us dérivent donc tons d'un seul manuscrit. La traduction la- tine très-littérale faite au xur siècle par le domi- nicain (luillaume de Moerbeka (2) suggère parfois ime meilleure leçon ; mais, comme elle offre en la plupart des passages suspects les mêmes altéra- tions, il faut en conclure cpie le manuscrit sur le- (\ue\ cette traduction a été faite, tout en différant de celui d'où dérivent tous nos manuscrits grecs, provenait pourtant de la même source. Ainsi, en dernière analyse, le texte de la Politique nous est parvenu par l'intermédiaire d'un seul manuscrit déjà fautif, et aujourd'hui perdu. On est donc au- torisé à employer la critique conjecturale ; et c'est vainement qu'on essayerait d'échapper à cette né- cessité par des artifices d'interprétation . Quand on est en présence d'un texte contraire à la logique ou à la grammaire, celui qui ^eut comprendre ou 1856). C'est UD service des plus importants rendu à l'ouvrage d'A ris- tote, et je le reconnais d'autant plus volontiers qu'à mon avis la traduction de M. Barlhélemy St.-Hilaire ne doit pas faire oublier celle que Fr. Thurot a publiée en 1824. (1) J'ai relevé dans l'appendice 14 les fautes les plus généralement reconnues. (2) Voir M. Barthélémy St.-flilaire, p. clxxix. Sclincidcr avait déjà supposé que Guillaume était l'auteur de cotte traduction ; M. Barthé- lémy .St.-Hilaire l'a vérifié sur le manuscrit de l'Arsenal (19, sciences et arts). Ce manuscrit porte en effet en tête de la Politique : Incipil liber Aristotdis polilicornm a frntre Cuilllelmo ordinis prcdicafa- rum degvcco in latinum translalus. On lit à la fin : Ifuc nsquc Iraus- tulil immédiate de ijreco in ladnum frntvv Ctiilielmiis de oïdiiie frafrum pvedicaforum re.sidiitim niilem hiiiiis nperis in t/rrco }n>r,. <hi)n iiiiiriiif. un PKÉIACE. faire comprendre ia pensée de l'auteur est ])ien ohlii^é d'en restaurer l'expression. Un traducteur a beau se défendre d'admettre aucune leçon qui ne soit autorisée par les manuscrits, toute traduc- tion raisonnable d'un texte absurde ou barbare est par cela même une restitution conjecturale. Sans doute ime conjecture peut changer arbitrai- rement la pensée et l'expression de l'auteur ; mais, quand on traduit fidèlement un texte altéré, ou qu'on n'en tire un sens qu'en forçant la construc- tion ou la signification des mots, l'interprétation n'altère-t-elle pas aussi arbitrairement la pensée et l'expression originales ? Je ne sais même si l'excès de la défiance n'est pas plus utile à l'intelligence des textes anciens que l'excès de la sécurité. On est plus exposé à laisser échapper des fautes, et même des fautes énormes, (ju'à voir des difficultés là où il n'y en a pas. Schneider et Coraï, malgré leur sagacité, onl laissé dans le texte de la Polilicjue des fautes «'\i(lentes à corriger à Spengel. I.es points de doctrine fjue j'ai examinés sont re- latifs à la Poiiii(|uc. à la Dialectique et à la Rhéto- ri(jiic. (Jnoi(|ut' je me sois attaché à Aristote, je n'ai pas cru j)ou\oir laisser de côté les vues de Platon sur les mêmes sujets ; car elles ont évidennuent sci\i de point (le (léj)arl aux théories d'Aristote. (!<'sl ^(• condaimuM ii inr(>oiinaitro le \érilable ca- rartrrc de I \rislot('lisinc que de le niellrcen oppo- PRÉFACE. IX sitioii coustanle avec le Plaloiiisine. 11 y a entre Aristote et Platon les rapports qui doivent exister entre un disciple et un maître d'un génie égal, quoi- que différent. Le Platonisme diffère de l'Aristoté- lisme, comme le germe diffère de son épanouisse- ment, comme la jeunesse d'un homme diffère de sa maturité. Aristote n'est arrivé à contredire Platon qu'en le développant. On en trouve précisément un exemple frappant dans le point de la Politique que j'ai traité. Quoique Aristote ait complètement adopté les principes de la politique platonicienne, qui sont d'ailleurs ceux de l'antiquité en général , quoique pour lui la science politique n'ait d'autre objet que d'enseigner à rendre les hommes vertueux, on s'obstine encore à oppo- ser la politique expérimentale et utilitaire d'Aris- tote à la politique idéaliste de Platon. C'est pour combattre cette erreur généralement répandue en France que j'ai cru devoir insister sur cette ques- tion. La théorie aristotélique de la science a été l'ob- jet de travaux aussi étendus qu'approfondis de la part de MM. Ravaisson (i), Heyder (2), Brandis (3), (1) Essai sur la Métaphysique d'Aristote, 1837-1846. (2) Kritische Darstellung und Vergleichung der Aristotelischen und Hegel'schen Dialektik, 1845. La première partie a seule paru. (3) Aristoteles und seine academischen Zeitgenossen , 1853-1857. Uebersicht ùber das Aristotelische Lehrgebaûde und Erôrterung der Lehren seiner uâchsten Nachfolger, 18 60. X l^RÉFACE. Wait/ ( 1 j. .le ne me suis attaché qu'à un détail qui m'a paru devoir être mis en lumière, même après le travail neuf, juste, ingénieux, d'un homme distin- i^ué et excellent, que la mort a enlevé prématuré- ment à la science et à l'amitié (2). J'ai voulu mon- trer en quoi diffèrent Platon et Aristote, et en quoi ils sont d'accord dans la manière de définir et d'emplover la dialectique. Il m'a semblé que ce qui obscurcissait beaucoup cette question, c'est qu'on a souvent perdu de vue que, pour Aristote comme pour Platon, la dialectique n'était pas la science du raisonnement, mais l'art de disputer, à prendre ce mot dans le sens qu'on lui donnait au moyen âge. Cette vue m'a dirigé dans mes recherches sur la Khétorique d'Aristote. Je n'ai pas prétendu refaire ce que M. Havet a si bien fait (3). Je me suis borné à exposer les rapports entre la dialectique et la rhé- l<)ri(|ne tels que les concevait Aristote. La persua- sion (jue la dialectique est pour Aristote la science (I) Aristotulis Orpanon gracce, 1844-1846. Le commentaire est très utile pour l inlelli^ence du texte et des idées d'Aristote. Le petit livre de Trendolciiburg (Elementalogices Aristoteleœ, 1846) explique avec bcaiiroup (le clarté ot de précision la terminologie d'Aristote et les modilicatioiis qu'i-llo .1 subies pour devenir la lanjiue philosophique des modernes. Quant à l'ouvraj^e de Prantl (Geschichte der Logik, 1855), je regrette de n'en avoir eu connaissance que trop tard pour uploads/s1/ etudes-sur-aristote-politique-dialectique-rhetorique-thurot-charles-1823-1882-pdf.pdf

  • 19
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Mar 16, 2021
  • Catégorie Administration
  • Langue French
  • Taille du fichier 12.5409MB