ART CINÉTIQUE Joël Stein, Neuf trièdres ou Trièdre à 9 cellules, 1963 Aluminium
ART CINÉTIQUE Joël Stein, Neuf trièdres ou Trièdre à 9 cellules, 1963 Aluminium poli, liège peint à l'acrylique blanc, bois, mélaminé, inox poli, 160x95x20 cm Éloge de l’instabilité Une histoire d’appellation Les origines Caractéristiques communes et divergences Les artistes et leurs œuvres • Victor Vasarely, Bi-forme , 1962 • Yacoov Agam, Double métamorphose III - Contrepoint et enchaînement, 1968-1969 • Carlos Cruz-Diez, Physichromie n° 506 , 1970 • Jésus Raphael Soto, Gran doble escritura (Grande écriture double), 1977 • François Morellet, Néon bilingue et aléatoire , 1971 • Julio Le Parc, Multiple, 1970 • Joël Stein, Neuf trièdres ou Trièdre à 9 cellules, 1963 • Francisco Sobrino, Sculpture permutationnelle , 1967-1968 • Vassilakis Takis, Musicale , 1977 • Piotr Kowalski, Identité (n°2 ), 1973 Textes de référence Chronologie Bibliographie ÉLOGE DE L’INSTABILITÉ UNE HISTOIRE D’APPELLATION L’expression Art cinétique est pour la première fois employée par une institution muséale, le Kunstgewerbemuseum, actuel Museum für Gestaltung de Zürich, en 1960. L’exposition MAT-Kinetische Kunst — Multiple Art Transformable-Art cinétique, que l’artiste Daniel Spoerri y organise, présente « des œuvres d’art de Paris qui se meuvent ou sont mues », où se côtoient les réalisations de Jacoov Agam, Josef Albers, Pol Bury, Marcel Duchamp, Bo Ek, Karl Gerstner, Heinz Mack, Frank Malina, Enzo Mari, Bruno Munari, Man Ray, Dieter Roth, Jésus Rafael Soto, Jean Tinguely et Victor Vasarely. Ces œuvres sont alors dites multiples, non seulement parce qu’elles sont produites en série mais aussi du fait qu’elles bougent et se transforment à vue. Outre les expositions d’Art cinétique qui s’organisent de par l’Europe au début des années 1960, des groupes d’artistes se forment avec cette volonté de faire du mouvement un médium à part entière et de libérer la création en touchant un public jusqu’alors exclu par une tradition jugée trop intellectuelle. C’est ainsi qu’en 1961 naît à Paris le G.R.A.V., Groupe de Recherche d’Art Visuel et, dans les années 60, le Groupe N à Padou, le Groupe T à Milan, à Düsseldorf le Groupe Zéro, en Hollande le Groupe Nul, à Moscou le Groupe Dvizhenie [1], aux États-Unis le Groupe Anonima de Cleveland, dans l’Ohio… La plupart de ces groupes témoignent d’un intérêt commun pour l’organisation d’expositions et de manifestations hors du circuit officiel des galeries et des musées. Ils veulent incarner des modes de production collectifs, allant jusqu’à remettre en cause la figure sacralisée de l’artiste. Mais si les années 1960 connaissent un développement spectaculaire de pratiques fondées sur le mouvement, si de nombreux groupes s’agrègent autour des idées libératrices qu’il synthétise, que des expositions lui sont consacrées à travers toute l’Europe, souvent sous la bannière de la Nouvelle Tendance, et que les jeunes artistes du continent américain s’y adonneront très vite, l’histoire de l’Art cinétiques’inscrit dans le prolongement d’expériences antérieures. Œuvres de Jacobsen, Soto, Tinguely, Duchamp, Calder et Agam dans l’exposition Le Mouvement, galerie Denise René, avril 1955 Avant d’en venir à ses origines, rappelons que l’épopée de l’Art cinétique débute en 1955, date à laquelle la galerie Denise René ouvre au public la retentissante exposition Le Mouvement, sur une proposition de Victor Vasarely. Considéré comme l’un des précurseurs les plus influents de la mouvance cinétique, Vasarely y présente ses premières pièces abstraites en noir et blanc, aux côtés de figures tutélaires telles que Marcel Duchamp [2] et Alexander Calder et de réalisations de jeunes artistes : Agam, Bury, Jacobsen, Soto et Tinguely. La galerie Denise René avait ouvert ses portes à Paris en 1945 quelques mois avant la Libération, avec l’exposition des travaux figuratifs de Vasarely réalisés à la fin des années 1930. Dès 1946, la galerie se consacrait à l’abstraction, puis à l’abstraction géométrique. Son rôle allait être central dans la diffusion de ce qui serait désigné sous les termes « d’art cinétique » et plus tard « d’Op’art ». L’expression Art cinétique recoupe alors des pratiques très diverses, aussi bien des œuvres motorisées que des œuvres modifiées par l’intervention des spectateurs ou par celle d’éléments naturels tels que le vent ou l’eau. Elle inclut également toute œuvre qui a pour caractéristique de se mouvoir dans l’œil du spectateur au cours de son déplacement, sans que celle-ci soit en elle-même mobile. L'appellation Op’art, qui s’impose en Europe à partir de 1965 et concurrence celle d’Art cinétique, est importée des États-Unis, générant alors un débat sur les distinctions à établir ou non entre les deux formes d’art. L’appellation trouve son origine dans l’abréviation de l’expression Optical art qui a cours en Angleterre pour désigner des travaux axés sur des jeux d’optiques, comme ceux que présente lagalerie One [3] à Londres. En 1962, celle-ci programme la première exposition personnelle de Bridget Riley, jeune graphiste marquée par les travaux de Vasarely [4]. L’artiste remporte un rapide succès. L’Optical art se répand à Londres comme traînée de poudre. Le terme Op’art apparaît pour la première fois dans le Time’s Magazine en 1964 et se généralise aux États-Unis l’année suivante, suite à l’ouverture au MoMA de New York de l’exposition considérée comme fondatrice de l’Op’art, The Responsive Eye. Organisée par son directeur, William C. Seitz, cette exposition est montée en collaboration avec la galerie Denise René, qui propose près de la moitié des œuvres présentes [5]. Mêlant productions parisiennes et américaines, elle tend ainsi à légitimer une nouvelle forme d’art qui renouerait avec l’abstraction tout en offrant une alternative au Pop’art, récemment promulgué dans le pays. Comme le Pop'art mais de manière moins frontale, l’Op’art instaure un dialogue avec la société technique et industrielle, employant le plus souvent des matériaux industriels et faisant appel aux compositions géométriques, aux aplats impeccables de l’abstraction froide [6]. Accessible à un large public par son caractère spectaculaire, l'exposition est globalement accueillie par la presse avec un enthousiasme qui n’a d’égal que celui du public. [7] Que l’on parle donc d’Op’art ou d’Art cinétique, l’histoire de la nouvelle tendance qui émerge dans les années 1960 semble immanquablement liée à celle de la galerie Denise René et de l’École dite alors de Paris. Mais, force est d’admettre que le mouvement en art n’était pas une nouveauté en 1955. Interrogée sur l’exposition Le Mouvement, Denise René ne s’en défend d’ailleurs pas : il était simplement « dans l’air », elle s’en était saisie. Les origines de l’implication du mouvement dans les arts plastiques nécessitent de remonter plus avant dans l’histoire du vingtième siècle. LES ORIGINES Dans un texte que Pontus Hulten consacre en 1955 à l’œuvre du jeune Jean Tinguely, le futur directeur du Musée national d‘art moderne dresse un bref historique des pratiques artistiques liées au mouvement dans l’art du vingtième siècle. [8] En remontant aux sources de l’Art cinétique, il met en évidence l’écart idéologique qui s’est creusé entre les œuvres du début du siècle et celles des années 1960-1970. Une bonne partie des productions récentes réinvestissent les recherches entreprises par les aînés mais en en perdant leur dimension révolutionnaire. Ayant fait de la défense de l’Abstraction géométrique puis de l’Art cinétique une ligne de conduite, la galerie Denise René développe également ce travail de mise en perspective historique, avec notamment l’exposition d’œuvres de Malévitch en 1957, alors que celui-ci est totalement oublié en Europe et qu’aucun musée français ne souhaite accueillir cette rétrospective. FUTURISTES, CUBISTES, SUPRÉMATISTES Kasimir Malévitch, Dessin suprématiste, [1915] Crayon sur papier ligné, 16,5x10,8 cm Aux origines de l’Art cinétique, les intentions qui conduisent les artistes à introduire le mouvement dans leurs œuvres sont déjà divergentes. Les Futuristes italiens de la première génération [9] font de la vitesse et du mouvement mécanique un idéal esthétique et moral. Certains d’entre eux se réfèrent aux recherchespointillistes et aux valeurs anarchistes que colportent leurs images, en ce qu’elles mettent en branle une réalité jusqu’alors tenue pour stable et immuable, la soumettent aux secousses de la subjectivité, démolissant les représentations de l’ancien monde. Les Cubistes et les Orphistes, dans un même temps, s’intéressent au caractère mouvant de la perception, à la simultanéité des points de vue qui se conjuguent au sein de représentations mentales : assemblages précaires pour les uns, sublimations pour les autres. Ils développent ainsi la vision d’un réel multiple et insaisissable. Le Suprématisme, dont Kasimir Malévitch [10] rédige le manifeste en 1915, se réfère quant à lui à un mouvement cosmique, suprasensible, donnant à expérimenter, au travers ses compositions, la vibration universelle, l’excitation de la matière telle qu’elle se manifeste en chacune de ses particules, jusque dans le mouvement des planètes. LES CONSTRUCTIVISTES Viennent ensuite des réalisations auxquelles les œuvres cinétiques renvoient plus directement. Le Manifeste Réaliste, publié en Russie par les frères Naum Gabo et Anton Pevsner en 1920, inaugure le Constructivisme en faisant du mouvement un médium à part entière. L’idée de concevoir des objets qui conjuguent le mouvement, l’espace et la lumière y est présentée comme porteuse de l’esprit moderne. Au-delà des théories qui lui sont liées, l’emploi du mouvement dans les arts trouve déjà sa mise en œuvre dans le projet de Monument à la troisième internationale que Vladimir Tatline conçoit au cours de cette même année. Importées au Bauhaus de Weimar entre uploads/s3/ art-cinetique-mnam.pdf
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- Publié le Jui 21, 2022
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