ΕΝΝΟΔΙΑ ΚΟΡΟΥΤΑΡΡΑ (« CELLE QUI DOTE DE NOURRITURE, DE CROISSANCE ») ET AUTRES
ΕΝΝΟΔΙΑ ΚΟΡΟΥΤΑΡΡΑ (« CELLE QUI DOTE DE NOURRITURE, DE CROISSANCE ») ET AUTRES DIVINITÉS KOUROTROPHES EN THESSALIE José Luis García Ramón, Bruno Helly Klincksieck | « Revue de philologie, de littérature et d'histoire anciennes » 2007/2 Tome LXXXI | pages 291 à 312 ISSN 0035-1652 ISBN 9782252036730 DOI 10.3917/phil.812.0291 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-de-philologie-litterature-et-histoire- anciennes-2007-2-page-291.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Klincksieck. © Klincksieck. Tous droits réservés pour tous pays. 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La déesse Ennodia en Thessalie, le dossier. La géminée comme hyperdialectalisme. – § 3. Thessalien -tarra forme dialectale du suffi xe de nom d’agent féminin *-t°ri̯a-. – § 4. Le lexème sous-jacent Korou° (att. korw< : instrumental !) ne peut être autre que celui de kovro" « satieté » (*« nourriture », « croissance » : *k̂órh1-o-), cf. att. korevnnumi « rassasier ». – § 5. Koroutarra comme nom d’agent féminin *korṓ- t(e)ri̯a- « celle qui fait grandir », plus précisément « celle qui dote de nourriture / croisssance » correspondant à *korw< du type stefanw< « couronner », *« doter d’une couronne » (aor. stefanw<sa<, secondairement prés. stefanovo/e<). – § 6. Noms d’agent en <wthvr (<wvth"), <wvtria correspondant au système du type stefanw< (aor. <w`sa<, prés. -ovo/e-). – § 7. Le caractère kourotrophe de la déesse En(n)odia « qui dote les enfants de nourriture/croissance ». – § 8. En(n)odia, Artémis, Brimô, Hékatè à Phères de Thessalie. – § 9. Le caractère kourotrophe d’Artémis dans d’autres cités de Thessalie. – § 10. Autres divinités à caractère kourotrophe en Thessalie : Leukathéa, Pasikrata. – § 11. Apollon kourotrophe à Pagasai et à Pythion. – § 13. Conclusion. § 1. En 2001, P. Chrysostomou, auteur d’un ouvrage consacré à la déesse En(n)odia qui fait référence 1, a publié une stèle qui se trouve dans les collec- tions du Musée Bénaki à Athènes et qui porte une dédicace à la déesse Ennodia désignée comme Koroutarra 2. Le texte de l’inscription, gravée en deux lignes, l’une sur le bandeau, l’autre juste au dessous, ne comporte que deux mots : Rev. de philologie, 2007, LXXX, 2. * Les textes thessaliens publiés dans IG IX 2 sont mentionnés par leur seul numéro suivi éven- tuellement de l’abréviation du nom de la cité (e.g. LARI = Larisa) à laquelle ils sont attribués et le cas échéant une date. Pour les éditions postérieures à IG, nous ne mentionnons que leur reprise dans SEG. Dans tous les cas nous précisons aussi le n° du document dans les archives thessaliennes de Lyon précédé de GHW, par exemple GHW 6226. Les formes dialectales épigraphiques sont transcrites sans accent. 1. Chrysostomou 1998. 2. Chrysostomou 2001, p. 11-20 et fi g. 1 (SEG 51 : 739 ; Heinz, Votivstelen, Kat. n° 184a ; GHW 6226). © Klincksieck | Téléchargé le 12/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 152.168.151.230) © Klincksieck | Téléchargé le 12/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 152.168.151.230) 292 JOSÉ LUIS GARCÍA RAMÓN ET BRUNO HELLY Ennodia Koroutarra. Comme l’a précisé l’éditeur de ce petit monument, la provenance thessa- lienne semble assurée à la fois par la nature du marbre, la typologie de la stèle 3, le dessin des lettres 4 et la forme dialectale de l’épiclèse divine. Il n’est même pas exclu que cette pierre provienne de la région de Phères, une des grandes cités de la Thessalie orientale, cité où Ennodia était en quelque sorte chez elle, puisqu’on lui a souvent attribué l’épiclèse Feraiva. C’est précisément sur l’épiclèse Koroutarra et son interprétation que nous voulons revenir aujourd’hui 5. § 2. Le culte de la déesse ∆Ennodia est bien connu en Thessalie 6, surtout par des dédicaces, où le nom apparaît au datif, comme c’est le cas aussi dans notre texte. La fi nale <a> qui marque ce datif féminin refl ète l’amuissement du deuxième élément de la dipthongue <ai, qui est d’ailleurs bien attestée au 5e siècle, cf. les fl ottements des graphies comme Afroditai/ta dans IG 236 ou ken taga ken atagiai dans l’inscription 256 (dite de Sotairos). Le théonyme ∆En(n)odiva désigne à l’origine une divinité locale thessalienne, qui correspondait pour l’essentiel à Hékatè et qui, déjà à l’époque classique, était devenue une épiclèse après syncrétisme avec Hékaté et avec Artémis. On rappellera ici deux éléments importants : (a) comme déesse thessalienne proprement dite, ∆En(n)odiva est accompa- gnée par des épithètes comme Ûastikav (575 = GHW 4105 LARI, 3e quart du 5e s., métrique), ∆Alexea`ti" (576 = GHW 4106 LARI 2e s. ap.), Mukaika (= GHW 3315 LARI fi n 3e s., cf. muvkh : qhvkh Souda), Staqmiva (577 = GHW 4107 LARI 1re m. 2e s.), Pat(t)rwva (358 = GHW 4077 PAGA fi n 5e s./début 4e s., Chrysostomou 3. Ce type de stèle terminée en haut par un simple bandeau horizontal en saillie sur un talon est répandu partout en Thessalie. Margarete Heinz dans son étude des stèles votives de Thessalie et leur typologie a défi ni cette forme comme « Schaftstele Typus 4 » (Heinz, Votivstelen, p. 144 sq.). 4. Pour la forme des lettres, Chrysostomou (2001) donne pour parallèle une autre dédicace à Ennodia appelée Patrôa attribuée à Pagasai (o.c., fi g. 2) : il s’agit de la dédicace IG IX 2, 358, trouvée murée dans l’église Agios Nikolaos à Volos (Chrysostomou 1998, p. 51-52 et pl. 6 b). L’attribution de cette pierre à Pagasai repose sur la datation par l’écriture, que le premier éditeur a placée dans la première moitié du 4e s. av., donc antérieurement à la fondation de Démétrias au début du 3e s. Quelle que soit l’imprécision que l’on peut avoir pour la datation par l’écriture, il est assuré que la notation de la longue de Patrôa par omicron peut confi rmer que le texte est antérieur à la générali- sation de la koinè dans l’épigraphie de la Magnésie macédonienne. 5. Dans son commentaire, Chrysostomou a interprété à juste titre le mot Koroutarra comme une épiclèse accompagnant le nom de la divinité. L’explication du mot comme un composé de kovro" et de l’adjectif tarsov" / tarrov" « claie », « surface plaine », « rame », est morphologiquement impossible et conduit à un contre-sens, raisons pour lesquelles elle nous paraît devoir être catégoriquement reje- tée, comme on verra ci-après. 6. Données chez L. Robert, « Une déesse à cheval en Macédoine », Hellenica XI-XII (1960), p. 588-595, Chrysostomou 1998 et 2002 ; cf. aussi Jessen, RE V : 2, 1905, p. 2634 sq. © Klincksieck | Téléchargé le 12/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 152.168.151.230) © Klincksieck | Téléchargé le 12/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 152.168.151.230) 293 ENNODIA KOROUTARRA 2002 = GHW 5977 LARI 3e quart du 5e s.), Patrwvia (1286 = GHW 4202 PYTH fi n 3e s./2e s.), et aussi ÔOsia (Béroia, 3e s.). On trouve le nom sans épithète à Phères, Larisa, Gonnoi, Thèbes de Pthiotide, mais également en Macédoine. On complètera le dossier avec quelques textes récemment publiés, notamment deux dédicaces de Thèbes de Phthiotide (Aristo/kleia / Mikina / Ennodi/a. SEG 34 : 572 et Aris/tou Enno/dia≥ ibid. 574 = GHW 5917 et 5918, ca. 300 av.) et la dédicace Ennodia Koroutarra 7. (b) ∆En(n)odiva comme épiclèse d’Artémis est le résultat du syncrétisme avec cette déesse : on trouve la double dénomination à Démétrias (SEG 3 : 485 = GHW 4394, 3e/2e s. 8) et à Phères (SEG 48 : 668 = GHW 6464, ép. hellénis- tique). Quant à la forme, le nom En(n)odia est attesté normalement, mais pas toujours, avec géminée 9. Ainsi on trouve la géminée à Pagasai (358 = GHW 4077), à Larisa (576 = GHW 4106 ; Chrysostomou 2002 = GHW 5977 ; le cas de <Enodiai> dans 575 = GHW 4105 avec syllabe initiale longue assurée par la métrique est particulier), à Phères (SEG 48 : 666 = GHW 4510 ; SEG 48 : 667 = GHW 6462 milieu 4e s.), à Gonnoi (Helly 1973, n° 201 = GHW 4351 3e s.), à Pythion (1286 = GHW 4202), à Thèbes (SEG 48 : 671 = GHW 6463 ; SEG 34 : 572 et 574 = GHW 5917 et 5918 fi n 4e s.). On trouve Enodia sans géminée à Larisa (577 = GHW 4107 2e s. av. et 578 = GHW uploads/s3/ ennodia-koroutarra-celle-qui-dote-de-nourriture-de.pdf
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