Culture & Musées L’écriture de l’exposition : expographie, muséographie, scénog
Culture & Musées L’écriture de l’exposition : expographie, muséographie, scénographie Jean Davallon Citer ce document / Cite this document : Davallon Jean. L’écriture de l’exposition : expographie, muséographie, scénographie. In: Culture & Musées, n°16, 2010. La (r)évolution des musées d’art (sous la direction de André Gob & Raymond Montpetit) pp. 229-238; doi : 10.3406/pumus.2010.1574 http://www.persee.fr/doc/pumus_1766-2923_2010_num_16_1_1574 Document généré le 09/06/2016 229 Cahier C U L T U R E & M U S É E S N ° 1 6 Klüser (Bernd) & Hegewisch (Katharina) (sous la dir. de). 1998. L’Art de l’expo s ition. Paris : Éd. du Regard. Mairesse (François). 2009. « O Muséo graphie aigre château des aigles » in Actes du colloque de Neuchâtel, jan- vier 2009. Neuchâtel : À paraître aux éditions Alphil. Malraux (André). 1947. Le Musée imagi- naire. Lausanne : Skira. McLuhan (Marschall), Parker (Harley) & Barzun (Jacques). 2008. Le Musée non linéaire : Exploration des méthodes, moyens et valeurs de la communica- tion avec le public des musées. Lyon : Éd. Aléas. [Publication originale 1969.] Nouvelles de l’icom, 1, 2004. O’Doherty (Brian) (sous la dir. de.). 1972. Museums in Crisis. New York : Bra- ziller. O’ Doherty (Brian). 1976. Inside the White Cube. The Ideology of the Gallery Space. Berkeley : Éd. University of California. Office international des musées (Collec tif). 1935. Muséographie, architecture et aménagement des musées d’art, Conférence internationale d’études, Madrid 1934. Paris : Éd. Société des Nations et Office international des mu- sées, 1935. Rosenthal (Norman) & Adams (Brooks). 1998. Sensation : Young British Artists from the Saatchi Collection. London : Thames and Hudson. Schuiten (François) & Peeters (Benoît). 2000. Voyages en utopie. Bruxelles : Casterman. Werner (Paul). 2005. Museum, Inc. : Inside the Global Art World. Chicago : Prickly Paradigm Press. Weschler (Lawrence). 1997. Le Cabinet des merveilles de monsieur Wilson. Paris : Gallimard. (Le Promeneur.) Jean Davallon l’écriture de l’exposition : expographie, muséographie, scénographie P arler de scénographie, c’est parler de scène – et donc d’espace –, mais aussi de graphie, autrement dit d’écriture. Mais qu’est-ce donc que l’écriture d’une exposition ? Qu’est-ce qu’écrire l’exposition ? Et par conséquent, qu’y a-t-il de commun – et de différent – entre la scénographie, la muséographie et « l’expogra- phie », pour reprendre le terme d’André Des- vallées ? Avant de chercher plus avant comment dé- crire ce qui caractérise le processus d’écriture de l’exposition, il faut noter que, dans la pra- tique courante, la scénographie – puisque c’est le terme proposé à discussion dans ce séminaire – désigne toujours autre chose que l’exposé : une création – la scénographie se rapporte à l’acte de produire l’exposition –, accom pagnée d’une intention de faire quelque chose pour quelqu’un ou, si l’on veut, de faire de l’ex- position une production culturelle qui excède ce qui est exposé. Un tel constat attire aussitôt l’attention sur la question de l’intérêt, voire de la légitimité, d’une telle création, tout au moins dans le monde de l’exposition d’art. Car une telle ques- tion est loin de se poser en ces termes dans les expositions scientifiques dont la dimension médiatique est au contraire on le sait parfaite- ment admise par tous. Est-il Convenable d’« écrire » l’exposition ? Il existe une ligne de partage très nette entre deux conceptions de l’exposition. La première estime qu’« exposer, c’est dis- poser des choses dans l’espace de manière à les donner à voir ». L’exposition répond alors à ce que l’on pourrait appeler une technologie de la présence puisqu’elle vise essentiellement à rendre les objets exposés présents au visiteur, à magnifier leur apparaître. Dans ce cas, la si- gnification – ce que l’on cherche à dire – revient aux textes placés à côté de ces objets, sans pour autant interférer avec eux. La chose, manifeste dans presque toutes les expositions 230 Cahier C U L T U R E & M U S É E S N ° 1 6 d’art, prend un relief encore plus net dans l’ex- position d’art contemporain. L’exposition est alors prioritairement un agencement technique, formel, esthétique dont la visée est de permettre une rencontre du visiteur avec les objets. Selon la seconde conception, « exposer, c’est donner à voir pour faire comprendre – autrement dit, pour dire – quelque chose ». L’important est en ce cas le sens qui sera cons truit par une mise en exposition qui choisit, rassemble, articule des composants, parmi les- quels les objets, mais aussi des textes, des vi- déos, des photos, des dessins, des dispositifs interactifs, etc. L’exposition a alors une finalité communicationnelle qui suppose qu’elle soit un ensemble organisé destiné à produire de la signification pour le visiteur, autrement dit qu’elle soit un texte. Elle répond dès lors à une technologie de l’écriture. Dans la réalité, chacune de ces deux con ceptions a ses partisans. Pour les uns, il convient d’éviter que l’exposition ne vienne troubler la rencontre des objets – des œuvres –, tandis que pour les autres l’exposition doit tenir un discours, voire raconter une histoire. On com- prend sans difficulté que pour les uns et pour les autres, la scénographie n’aura pas du tout ni la même fonction ni le même statut. Tandis que pour les premiers, elle se réduira à un trai- tement formel de l’espace qui devra rester sé- miotiquement le plus neutre possible et peser le moins possible sur les objets exposés, elle devra au contraire, pour les seconds, participer à la construction d’un texte et contribuer à ra- conter une histoire. L’objectif n’est pas ici de rallier l’un ou l’autre camp et de chercher à défendre soit la présence des objets soit les vertus pédagogiques de la mise en exposition. Plus intéressant est le constat que ces deux conceptions ne font ja- mais qu’exacerber ce qui fait la spécificité de l’exposition. D’être, fondamentalement, à la fois un agencement technique de choses – et non de signes, comme peut l’être par exemple un texte en langue naturelle ou même une image –, et en même temps toujours aussi, plus ou moins, un texte, c’est-à-dire un ensemble signifiant organisé destiné à être interprété par le visi- teur. À ce détail près que nous sommes en présence d’un texte fait d’objets et non de signes. Une spécificité que l’exposition partage avec la représentation théâtrale, bien qu’elle soit a priori plus encore que celle-ci éloignée du monde de la signification, du fait de la présence muette et têtue des choses – en lieu et place de la présence d’un acteur, qui tient un discours. Ces considérations liminaires ont pour fonc- tion de rappeler qu’il faut toujours garder à l’esprit cette particularité de l’exposition lorsqu’il est question de scénographie. Quelle en est la raison ? Parce que cette particularité est à la fois la force et la faiblesse médiatique de l’ex- position. Elle est sa faiblesse, car pour tenir un propos dans une exposition, il est nécessaire de le vouloir et de développer une stratégie. Mais elle est aussi sa force puisque le visiteur sera au milieu du média, en face des « vraies choses » qui seront présentes à lui de manière sensible. Dans de telles conditions, technologie de la présence et technologie de l’écriture sont à considérer moins comme une alternative que comme les deux faces indissociables de l’ex- position. Ce qui ne manque pas de soulever une question de fond : qu’est-ce donc qu’écrire l’exposition, si celle-ci est une « écriture de choses » ? Que signifie au juste « écrire » ? Malheureusement – ou heureusement –, aucune réponse simple n’existe à cette question, qui viendrait nous dire ce qu’en définitive il convient d’entendre sous le suffixe « graphie » de scéno- graphie, muséographie ou expographie… La première difficulté tient au fait que l’écriture est un objet de débats et de controverses entre historiens du langage, philosophes, sémioti- ciens, linguistes, anthropologues, etc. Il n’en existe pas de définition simple. Dans le périmètre réduit qui est le nôtre ici, il est toutefois possible, en s’appuyant sur les travaux de l’anthropologue Jack Goody (1979) et ceux du sémiologue Roy Harris (1993), d’in- troduire une distinction entre une définition restreinte de l’écriture et une définition que je qualifierai volontiers de générique. Pour la pre- mière, qui correspond plutôt à la définition du sens commun, l’écriture correspond à la trans- cription de la parole au moyen de signes graphi ques conventionnels. Elle est une sorte de « notation » de la parole, celle-ci étant alors con çue comme la référence dernière en matière de capacité sémiotique et langagière humaine. L’écriture est alors la servante de la parole et sert à garder trace de celle-ci. La seconde dé- finition peut être dite « générique » en ce qu’elle part du prin cipe que l’acte d’organiser, de tracer, de placer, de ranger, etc. – bref, l’acte d’inscrire 231 Cahier C U L T U R E & M U S É E S N ° 1 6 des éléments dans l’espace d’un support – est en soi producteur de signification, car produc- teur d’une signification nouvelle par rapport uploads/s3/ l-x27-ecriture-de-l-x27-exposition-expographie-museographie-scenographie.pdf
Documents similaires










-
31
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Fev 04, 2021
- Catégorie Creative Arts / Ar...
- Langue French
- Taille du fichier 0.2111MB