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CuratorsinContext.ca Art curators talk about curating The position of the visual-art curator today is based in critique, examination, and assumption. There are assumptions that are implicit in the perceived role of curating and the practice of curating. Can curating be a practice? How do you define that? What is curating? What are the objects of curating? Testing the assumptions present in the field that are specific to language and historical impli- cations of the terminology, we intend to move towards a clear expression towards new thinking about curating. Where are the unspoken assumptions? Can a lan- guage of curating be defined? This round-table discussion examines the history and responsibility to that language and opens discussion for multiple definitions of curating without simply presenting different models of practice. Bonjour, merci d’abord pour cette belle occasion qui m’est offerte de réfléchir sur ma pratique, sur notre pratique. On nous demande souvent sur quoi on travaille mais pas très souvent comment on travaille. Alors l’exercice a été stimulant et éclairant pour moi, j’espère qu’il le sera un peu pour vous. Je commence avec une question de définition. Le mot anglais « curator » trouve en français deux traductions : « conservateur » lorsqu’il concerne notre action au- près des collections, et « commissaire » lorsqu’on s’occupe d’une exposition—au MNBAQ, où je suis conservatrice de l’art actuel (2000 à ce jour), je change même de statut et relève de deux directeurs différents selon les cas. Comme il s’agit d’un trop vaste champ pour le couvrir entièrement en vingt minutes, et comme la con- stitution et le soin des collections me semblent beaucoup mieux balisés pour le moment parce qu’ils sont étudiés depuis plus longtemps, encadrés par les grandes associations muséales et qu’ils s’effectuent toujours dans le cadre institutionnel, je me suis concentrée pour les besoins de cette discussion sur l’organisation des expositions. Mais il y a plusieurs autres raisons qui motivent mon choix de me pencher sur le commissariat. D’abord, c’est la multiplication tous azimuts des « commissaires » Anne-Marie Ninacs Towards More Ethical Curatorial Practices © Anne-Marie Ninacs 2005 Used by permission 1/20 CuratorsinContext.ca Art curators talk about curating Towards More Ethical Curatorial Practices © Anne-Marie Ninacs 2005 Used by permission et l’élasticité du terme et des manifestations qui ont suscité chez moi au cours des dernières années les plus nombreuses questions. Ensuite, si je conçois la conserva- tion comme une profession, je considère le commissariat comme une pratique, et ces deux mandats ne font pas appel tout à fait aux mêmes compétences, même s’ils en ont certaines en commun : ils sont chez moi principalement différenciés par la part de créativité qui incombe aux expositions et qui n’a pas lieu d’être dans les col- lections (sauf pour la recherche de dons et de financement!). Je constate d’ailleurs que c’est mon travail de commissariat et d’écriture—à savoir le temps que je passe dans un étroit contact conceptuel, physique et spatial avec les œuvres et au plus près de mes intuitions—qui me rend (j’espère!) de plus en plus compétente dans mon travail de conservation et guide mes décisions tant au niveau du choix des œuvres pour la collection, que de la manière d’agir pour assurer leur bonne conser- vation et leur éventuelle remise en exposition. Sans mon travail de commissaire, mes décisions seraient, me semble-t-il, essentiellement intellectuelles, visant à une représentation des différents courants de l’heure, alors que je cherche bien d’autres choses que cela, quelque chose comme des œuvres qui seront d’actualité des siècles durant et, pour dénicher celles-là, seules une profonde introspection et une anal- yse poussée des moteurs de création peuvent vraiment nous guider. Mais enfin, et surtout, je me suis concentrée sur l’organisation des expositions parce que c’est précisément, je crois, cette part de créativité et d’intimité, cette part de subjectivité qui la caractérise qui nous donne tant de fil à retordre dans la définition de notre activité. Mais j’y reviendrai. Dans un premier temps, avant de proposer de nouvelles définitions du commis- sariat, il me semble prudent de retourner voir, brièvement, ce qui est déjà là, car si on cherche une nouvelle réflexion, il faut d’abord savoir par rapport à quoi nous la situons. D’autant que comme la plupart d’entre vous, j’imagine, je suis plus oc- cupée au quotidien de définir mon travail par l’action qu’à lire des théories sur ma profession : le temps que j’ai pour lire va d’ailleurs systématiquement au contenu de mes expositions et je lis beaucoup pour mon travail, mais très peu sur mon tra- vail. J’ai donc ressenti le besoin de vérifier si je ne colportais pas trop à son égard de préjugés et de trous de mémoire. 2/20 CuratorsinContext.ca Art curators talk about curating Towards More Ethical Curatorial Practices © Anne-Marie Ninacs 2005 Used by permission Au Québec (et je pense que c’est à peu près pareil pour le Canada), l’histoire du commissariat est très courte puisque les premiers conservateurs reconnus comme tels ne sont nommés que vers le début des années 1960 et sont rattachés aux col- lections des grands musées de Québec et de Montréal. On voit leur nombre aug- menter de manière exponentielle au cours des années 1970 avec la création de plusieurs musées régionaux, mais ce n’est encore qu’après le milieu des années 1980 qu’apparaissent les premiers commissaires indépendants, alors appelés « conservateurs-invités » ou « conservateurs-indépendants » même s’ils ne sont responsables d’aucune collection. Cette profession n’a fait que s’élargir depuis et ses acteurs se multiplier : ceux-ci proviennent de divers horizons, ont différentes formations, opèrent pour les employeurs les plus variés—tantôt pour les musées, tantôt pour des corporations privées—sont souvent désignés de fait après avoir initié un ou quelques projets par eux-mêmes et ont de leur métier des conceptions parfois divergentes—le terme « commissariat » englobe en effet aujourd’hui tant l’exposition thématique internationale et la rétrospective d’envergure que la signa- ture d’un feuillet de texte dans un opuscule. Il s’agit donc chez nous d’un très jeune métier qui demande effectivement encore à être pensé. En Europe, le scénario est à peu près le même, à la différence qu’il se produit une vingtaine d’années en avance sur le nôtre. On s’entend généralement pour dire que la figure du commissaire indépendant apparaît à la fin des années 1960 avec le ren- voi d’Harald Szeemann de la Kunsthalle de Berne, bien que Szeemann lui-même rappelle ainsi une histoire commencée avant lui : Le métier, relativement récent, d’organisateur d’exposition, dénommé « anima- teur » en France, s’est développé à une allure folle depuis la Seconde Guerre mon- diale. Il s’est tout d’abord distingué de celui de conservateur pour avoir pris con- séquemment le parti de l’artiste contre la science de l’art puis, dernièrement, il est devenu davantage le mandataire de l’idée de l’œuvre d’art totale, art que les artistes ont abandonné progressivement à la suite de l’imminence de la nécessité sociale de l’individualisation du travail et de la spécialisation. Ce qui distinguait l’artiste, depuis l’autonomie de l’œuvre et l’irrationalité supposé de ses associa- tions dans la réception, jusqu’à la revendication de l’utopie dans la production et, 3/20 CuratorsinContext.ca Art curators talk about curating Towards More Ethical Curatorial Practices © Anne-Marie Ninacs 2005 Used by permission par conséquent, ses relations difficiles avec le pouvoir, est maintenant dévolu à l’organisateur de l’exposition ou au directeur de la Kunsthalle . Ce qui frappe dans son propos, outre l’apparition de la fonction de commissaire beaucoup plus tôt qu’on ne le pense habituellement, sa négociation avec le pou- voir que l’on connaît bien pour la pratiquer quotidiennement et la conception qu’a Szeemann de l’exposition comme « œuvre d’art totale » à laquelle il reviendra avec insistance au cours des années mais qu’on pourrait discuter, ce qui frappe donc est cette idée que le statut de l’« organisateur d’expositions » « s’est tout d’abord distingué de celui de conservateur pour avoir pris le parti de l’artiste contre la sci- ence de l’art ». Qu’est-ce à dire, sinon que le commissaire a pris le parti du sujet sur l’objet (Szeemann écrit même contre), et qu’il inscrit de ce fait, et ce dès son entrée en scène, la subjectivité au cœur même de son action? Qu’est-ce à dire, sinon que le commissaire « à la sensibilité artistique » se pose d’emblée dans un rapport de tension, voire d’opposition vis-à-vis du conservateur de musée « aux visées scien- tifiques »? Et ne voit-on pas déjà se profiler dans une telle dichotomie le germe des divergences d’opinions qui animent notre profession, voire de la schizophrénie qui habite souvent le commissaire lui-même? Par ses expositions très affirmatives et ses convictions personnelles clairement affichées, Harald Szeemann, on le sait, aura mené cette subjectivité du commis- saire à son apogée de sorte qu’on lui reproche souvent d’avoir été à l’origine d’une « dérive narcissique » qui a ouvert la voie à tous les commissaires vedettes qui par- courent la planète. À mon sens, il a fait bien plus et bien mieux que cela. Quoiqu’on pense toutefois de son approche du métier, Szeemann demeure uploads/s3/ ninacs 1 .pdf

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