revue trimestrielle juillet - août - septembre 2011 quarterly magazine July - A

revue trimestrielle juillet - août - septembre 2011 quarterly magazine July - August - September 2011 Turbulences vidéo # 72 • Troisième trimestre 2011 / Third quarter 2010 Directeur de la publication / director of publication : Loiez Deniel • Directeur de la rédaction / editor-in-chief : Gabriel Soucheyre Ont collaboré à ce numéro / editors : Raphaël Bassan, Alain Bourges, Nicole Brenez, Geneviève Charras, Jean-Paul Fargier, Jean Jacques Gay, Bidhan Jacobs, Marc Mercier, Rodolphe Olcèse, Gonzalo de Pedro, Ghislaine Périchet, Gabriel Soucheyre, Coordination & mise en page / Coordination & lay-out : Eric André-Freydefont • Mise en ligne / on line publishing : Pauline Quantinet Publié par / published by VIDEOFORMES, 64 rue Lamartine, 63000 Clermont-Ferrand cedex 1 • tél : 04 73 17 02 17 • videoformes@videoformes.com • www.videoformes.com • © les auteurs, Turbulences vidéo # 72 et VIDEOFORMES • Tous droits réservés / All rights reserved • La revue Turbulences vidéo # 72 bénéficie du soutien du ministère de la Culture / DRAC Auvergne, de la ville de Clermont-Ferrand, de Clermont Communauté, du conseil général du Puy-de-Dôme et du conseil régional d’Auvergne. 3 1 Le Sacre du printemps (SDP), Garry Stewart, BOnR © photo : JL Tangh 2 La Zone, retour à Tchernobyl, 2011 © Guillaume Herbaut / INSTITUTE 1 2 Gabriel Soucheyre Sommaire # 72 Chroniques en mouvement 6 Révolution de la mémoire ou mémoire de la révolution Marc Mercier 10 Dernier état de l’homme. De l’âme ? Jean-Paul Fargier 18 Festival Nouvelles : Danse / Performances / Strasbourg Geneviève Charras 26 Open Art : de Benayoun à Moben Jean Jacques Gay Portrait d’artiste : Johanna Vaude 34 Interview de Johanna Vaude Gabriel Soucheyre 37 Impressions de Johanna Vaude Raphaël Bassan 38 Icare dans l’intimité. Gonzalo de Pedro 40 Exploration de Johanna Vaude Rodolphe Olcèse 41 Johanna Vaude & Lowave : DVD « Hybride » Bidhan Jacobs 52 Samouraï de Johanna Vaude Nicole Brenez Sur le fond 55 L’Art en séries Alain Bourges 60 Tempête sur la Mer Morte Alain Bourges Les œuvres en scène 66 Trilogie Russe : Trésors enfouis ressucités Geneviève Charras 69 Stillness Ghislaine Périchet 4 VIDEOFORMES 2012 Prix de la Création vidéo / Video competition Appel à candidature / Call for entries XXVII VIDEOFORMES • 14>17 / 03 / 2012 Prix de la Création Vidéo / video competition Prix Videoformes Conseil Général du Puy de Dôme, Prix Videoformes Ville de Clermont- Ferrand, Prix du Jeune Spectateur (avec le soutien de la Fondation Varenne) Ce concours international est ouvert à tous. Les œuvres présentées doivent témoigner d’une écriture originale où la recherche artistique est prédominante sur les moyens techniques utilisés. The competition is open to all video and media makers. Video works should be original or display a personal approach in which artistic research overshadows technicity. DATE LIMITE D’INSCRIPTION : 3 octobre 2011 DEADLINE FOR SUBMISSION : October 3rd, 2011 Règlement et formulaire ici / Regulation and submission form here http://www.videoformes-fest.com/inscriptions-prix-de-la-cr%C3%A9ation-vid%C3%A9o-2012/ Cela faisait longtemps, mis à part les traités d’astronomie, que le mot « révolution » n’avait surgi sur le devant de la scène de l’Histoire avec toute sa fraîcheur émotive et émancipatrice. Ce sont les peuples arabes qui ont su en ce début 2011 le réactualiser et lui redonner une force subjective attrayante. La révolution est une voie pour passer d’un état à un autre en imposant une rupture qualitative. Révolution de la mémoire ou mémoire de la révolution par Marc Mercier Chroniques en mouvements On retrouve aussi cela dans la nature quand par exemple l’eau, en atteignant les 100° se transforme radicalement en vapeur. Mais que reste-t-il de son état antérieur ? La table rase du passé est un leurre. La mémoire travaille le présent, et inversement. C’est dans ce balancier que se situe l’acte de création. Samedi 12 février, encore tout émoustillé par la joie contagieuse des Egyptiens, qui la veille, ont vu s’enfuir le dictateur qu’ils exècrent à juste titre, je me rends au 25, rue Thubaneau à Marseille où s’ouvre le Mémorial de la Marseillaise scénographié par la plasticienne Anne Van den Steen et l’artiste vidéo Dominik Barbier. Ce dernier a imaginé un dispositif vidéo sophistiqué et pertinent dans le lieu même d’où partirent les Fédérés marseillais pour rejoindre à pied le Palais des Tuileries de Paris, en entonnant le chant de l’Armée du Rhin qui deviendra plus tard l’hymne national français : La Marseillaise. Cette collision historique franco-égyptienne provoquée par l’actualité immédiate ne fut pas sans conséquence dans mon approche du dispositif proposé. De la collision hasardeuse des dates, on passe parfois hâtivement à une collusion des faits. Sans compter que les textes issus des doléances populaires de 1789, les valeurs d’égalité, de fraternité et de liberté rappelées quand est évoquée la fameuse déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen, font non seulement écho aux aspirations exprimées sur la place Tahrir du Caire, mais aussi aux mécontentements grandissants d’une large partie de la population française d’aujourd’hui. Il y a dans ce Mémorial une salle où siègent des bustes de personnages historiques de l’époque. Sur chacun est projeté le visage d’un habitant marseillais anonyme d’aujourd’hui. L’effet est tellement bien réussi, que quand 6 Mémorial de la Marseillaise - le banquet républicain © Dominik Barbier ces sculptures vivantes s’activent, débattent, expriment par des mimiques leurs sentiments, nous sommes littéralement obligés de faire le grand écart entre l’histoire ancienne et notre actualité, et, justement, de mesurer cet écart. La vidéo prend les mesures de l’Histoire avec un œil de géomètre. Ce va-et-vient incessant, vertigineux, fragilisant entre la mémoire et notre présent, n’est accessible dans toute sa complexité qu’à se confronter à la parole des poètes, de ces femmes et hommes qui ont déserté l’armée des certitudes qui occupent le sens commun. Déserter, c’est quitter son pays pour se réfugier dans le désert, là où tout est trop immense, où toutes les limites sont impalpables, où toutes les constructions humaines sont sujettes à l’ensevelissement. Sait-on combien de fois les pyramides égyptiennes furent dissimulées sous le sable ? Etonnant paradoxe : le vide du désert cache et protège simultanément les vestiges de la mémoire des hommes. Il faut donc écouter et scruter les images des poètes qui fouillent les sables toujours mouvants de la mémoire. Je pense notamment à ce délicat travail de la réalisatrice québécoise Geneviève Allard, Doucement… repartir (6’- 2009), soutenu par le centre d’artistes Vidéo Femmes. Les premières images, comme des clignotements dans la nuit, émergent du désert de l’écran noir. C’est le corps d’une femme qui, lentement, se dresse comme un oiseau longtemps évanoui, engourdi, qui tente de redéployer ses ailes. Soudain, la surface noire se déchire pour laisser entr’apercevoir des images d’archives, vestiges, vertiges du souvenir. C’est une invitation au voyage, qu’il conviendrait d’ailleurs de mettre ici au pluriel, à des voyages tant les pistes sont multiples… disons même une invitation aux errances, aux erreurs de parcours. Des parcours sur des sentiers lumineux d’images trouvées, de films de famille, d’extraits de documentaires. Une profusion de signes, d’indices, d’atmosphères…semblent orienter nos pas de spectateurs… pour aussitôt nous perdre à nouveau. Le son aussi est déchiré. Il laisse espérer un horizon (horizontal comme le clavier d’un piano), mais l’espace qu’il promet (comme un chant de sirène) n’est jamais gagné d’avance. Le son se froisse, épouse la matière fragile des images, s’interrompt pour reprendre plus loin. On ne sait jamais si les souvenirs qu’exhument ces matières audio- visuelles, favorisent un élan vers le futur ou l’empêchent. Je pense aussi à la vidéo Strands de l’artiste montréalais Paul Neudorf, réalisée avec la complicité de trois danseurs, Marc Boivin, Jonathan Turcotte et Clara Furey. Les premières images nous montrent les doigts d’une main d’où se détachent ces lignes qui sont nos empreintes digitales, qui sont la signature administrative de notre identité, qui sont ce par quoi l’on nous reconnaît parmi la multitude. D’entrée de jeu, Paul Neudorf décharge de ce Doucement...repartir, 2009 © Geneviève Allard 7 fardeau le corps de son danseur. Délesté de ses marques identitaires, le corps est détaché dans le double sens de « lavé » et de « libéré ». Deleuze dit quelque part que notre identité, c’est tout le chemin que nous parcourons pour nous éloigner de nos origines. Il dit que l’identité, contrairement aux idées reçues, n’est pas donnée par le passé, elle est une construction d’avenir. Les lignes digitales tombent. Toute la mémoire s’échappe du corps comme de minuscules serpents. Cela pourrait le libérer d’un poids. Non. L’homme est perdu. Il s’effondre, écartelé, manipulable à merci. Il demeurera une marionnette tant qu’il n’aura pas pris conscience des traces irrécupérables qu’il a laissées derrière lui. Il est seul comme un grand accidenté de la vie au centre d’un monde qui tourbillonne autour de lui. C’est dans la rencontre avec les autres qu’il trouvera une possibilité de libération, une possibilité de se trouver lui-même. C’est par l’écriture du corps dans l’espace qu’il se prononcera : danser, c’est condenser en arabesques l’indicible. C’est par le partage chorégraphique des gestes qu’une communauté soucieuse des individualités pourra émerger. uploads/s3/ turbulences-video-pdf.pdf

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