Aurora Consurgens Figura I Nous sommes entre deux moments de l'oeuvre: la noirc
Aurora Consurgens Figura I Nous sommes entre deux moments de l'oeuvre: la noirceur et la blancheur. C'est donc au régime de Jupiter ou peut-être même de la Lune qu'il faut placer les hiéroglyphes qui sont ici dépeints. Nous trouvons ainsi le Rebis, androgyne hermétique, mixte conçu à partir des extrémités du vaisseau de nature, qui se dépouille progressivement de son obscurité: c'est véritablement la Lumière sortant par soy- même des Ténèbres, pour remployer ce beau titre du traité de Crasselame. Au second plan, voici l'aigle qui symbolise la sublimation: il s'agit de l'aigle d'airain dont parle Berthelot dans les Alchimistes Grecs, XXIX. Notre attention est également attirée par les animaux que le monstre androgyne tient: une chauve-souris d'un côté et un lapin de l'autre. Que cachent ces symboles? Voyons d'abord la chauve-souris: rate-penade ou pipistrelle désignent le même mammifère. En grec νυκτερις, c'est-à-dire “voyant dans la nuit”, n'est-ce pas là l'épithète de l'Artiste, sûr de lui, quand il dispose au tombeau ses matières - i.e. au creuset brasqué - afin que la lumière surgisse de l'ombre? Et la rosée de mai n'apparaît-elle pas lors des nuits claires et calmes? Quoi qu'il en soit, cet animal est de l'ordre des divinités chthoniennes et de l'ordre des génies qui procèdent à la génération des métaux et des minéraux, à en croire les Mayas. Ce n'est pas tout: elle est maître du FEU et rejoint l'Hadès par-delà la TERRE. En ce sens, elle se rapproche du Ploutos grec. Quand on saura par ailleurs qu'elle annonce la PLUIE, n'aura-t-on point comme une sorte de compendium des principaux arcanes de l'oeuvre? Dédié à la Renaissance à Artemis, la chauve-souris protège la naissance et la croissance: aussi bien faut-il y voir comme un talisman que l'alchimiste peut mettre à la porte de son laboratoire afin qu'il se garantisse du malin... ou du loup. Ce n'est pas tout: la pluie - l'EAU en un mot - est l'élément fondamental qui permet de comprendre pourquoi l'aigle [dans lequel on peut reconnaître les traits de saint Jean, cf. notre retable d'Issenheim et saint Jean Baptiste] est associé à la chauve-souris. Voyons cela: les Adeptes préviennent l'impétrant contre le danger de la sècheresse mais plus encore, ils le préviennent contre celui du déluge, de l'inondation; l'iconographie montre cela en forme d'hydropisie dans plusieurs emblèmes, sur lesquels nous nous sommes attardés [cf. en particulier le chapitre XLVII de l'Atalanta fugiens]. Philalèthe, exceptionnellement, s'est montré charitable et à écrit ceci: “Quand la Lune brillera en son plein, donne des ailes à l'Aigle, qui s'envolera, laissant mortes derrière elle les colombes de Diane qui, si elles ne sont pas mortes à la première rencontre, ne peuvent servir à rien. Réitère sept fois cette opération, et enfin tu trouveras le repos, n'ayant simplement qu'à faire cuire; c'est la plus parfaite tranquillité, un jeu d'enfant et un ouvrage de femmes.” [Introïtus, VII - Entrée ouverte au Palais fermé du Roi] Dire que Philalèthe est charitable est certes chose certaine, mais enfin, il est aisé de comprendre ceci: que les sublimations correspondent au processus d'assation dont parle Fulcanelli dans son Mystère des Cathédrales. L'aigle [aquila, i.e. aqua par cabale] est aussi bien lié à qu'à l'AIR , cette dualité permettant, d'ailleurs, de donner son sens plein à ce concept de sublimation philosophique. Car cette lutte entre le transfert [sublimation procédant de la dissolution] et la projection [réincrudation] témoigne de la lutte qu'opposent et , par la médiation du FEU qui leur est commun comme en atteste la † présente dans leurs hiéroglyphes. Cet amoncellement d'oiseaux disposé aux pieds de l'androgyne témoigne donc des “assauts” mercuriels ainsi que donne à le penser Philalèthe dans cet autre extrait: «Lorsque les mages parlent de leurs Aigles, ils en parlent au pluriel, et ils en comptent entre trois et dix. Ils ne veulent néanmoins pas dire par là qu'il faille joindre à un poids donné de terre autant de mesures d'eau qu'ils mettent d'aigles, mais il faut comprendre qu'ils parlent du poids interne ou de la force du feu, c'est-à-dire sans doute qu'on doit prendre de l'eau autant de fois aiguisée qu'ils comptent d'aigles [...]” [ibid.] Nous renvoyons ici le lecteur à notre Monade [cf. AC, II] et au commentaire de la figure XXXI. Poursuivons: le loup, par cabale, nous le voyons ici sous les traits de lepus - pour lupus. Le lapin ou lièvre - λαγως, animal véloce s'il en ait, est habituellement associé au Mercure. Il fait partie du bestiaire lunaire et n'est donc pas pour rien associé à la rate-penade. La mythologie égyptienne donne à Osiris - le symbole du Soufre - les traits d'un lièvre. Aussi bien faut-il y voir un Soufre dissous dans le Mercure: nous emploierons pour le qualifier un terme que Jung affectionnait, le sulphur dont l'idéogramme est . D'un côté, nous tenons donc avec la rate-penade le conducteur qui permet à l'Artiste de voir dans la nuit - l'exact équivalent de la lanterne qui permet au vieillard de l'emblème XLII de l'Atalanta fugiens - les traces de Diane sur son chemin boueux; et de l'autre côté, nous tenons avec le lièvre le préparateur de la panacée universelle ou drogue d'immortalité pour l'élixir du 3ème oeuvre. Ajoutons que la cabale nous autorise à poser que λαγως, par assonance, se rapproche de λαγων dont le sens est cavité, creux ou flanc de la montagne, toutes indications sur le lieu où l'on peut trouver le guhr vitriolique particulier qui permet la préparation de notre Soufre. Figura II Nous voici conviés - figure II - à un bien étrange concert où la mort et la putréfaction semblent tenir lieu de mélodie et d'harmonie. L'impétrant, qui ne serait pas informé des secrets alchimiques, pourrait être tenté de voir là une sorte de peinture surréaliste qui pourrait tenir d'un Dali ou d'un De Chirico. Peut-être même pourrait-on y voir le fameux musicien de la nouvelle de Lovecraft intitulée la Musique d'Eric Zann... Mais foin de ces supputations. En fait, le personnage sépulcral que nous voyons se trouve absolument décomposé: en effet, chacun de ses membres est différent et ressortit d'animaux monstrueux. Nous pouvons donc y voir une nouvelle version de Typhon. Le saurien, le simiesque, la carapace, la chitine, l'os se sont donnés rendez-vous dans ce carrousel de l'horreur. La seule note de nostalgie que l'on perçoive dans ce musée sépulcral est cette petite chouette jouant du biniou sur laquelle nous reviendrons. Et le tout sur fond de feu, c'est - à - dire de sang, i.e. par cabale de SOUFRE. Un vautour, dont on sait les relations privilégiées avec Apollon - cf. Atalanta XLIII, semble être le seul auditeur de ce concert funèbre. Du reste, c'est une singulière musique que doit jouer ce personnage mortifère: le violon n'est autre qu'un homard et l'archer du violon est un morceau de serpent qui paraît pétrifié. Le homard n'est guère présent au panthéon des symboles alchimiques. Toutefois, l'examen de l'emblème XXXII de l'Atalanta fugiens permet de rattacher la carapace chitineuse du homard au corail, et par delà, aux concrétions par lesquelles se signale le SOUFRE aux hermétistes. Ce n'est pas tout: on a attribué à ce crustacé la possibilité de régénérer sa carapace sans adjonction d'élément étranger, sans apport de calcium: ne peut-on pas voir là une autre version du phénix relevant de ses cendres, tel le Lazare que le Christ, après quatre jours passés au tombeau, invite à se lever? Veni Et Vide! Tel est la même interjection que nous lancent les alchimistes quand ils affirment opérer leurs transmutations. Il y a plus: le homard - αστακος - est proche par assonance de αστακτος: qui coule à flot, abondamment. Comment ne pas y voir la fontaine de Mercure de Bernard Le Trévisan? Admettons à présent qu'il s'agisse non point de homard mais de langouste, élément féminin et non point mâle du Soufre; Dans ces conditions, et toujours par cabale, ce n'est donc pas le Soufre ROUGE mais BLANC, qu'il faudrait voir dans ce crustacé. Καραβις est le nom grec de la sauterelle de mer, qui se rapproche de καραβος [escargot, scarabée] dont l'importance en matière de cabale alchimique est fondamentale, cf. en recherche. Et de l'étrange mélodie qui naît du frottement du serpent - entendez du Mercure - contre la coque saline imprégnée du Soufre solaire - entendez de la silice gélatineuse mêlée de quelque chaux - se détache une onde dans l'AIR des Sages qui n'est autre que l'eau permanente, à la fois métallique et étoilée des alchimistes. C'est cette onde dont parle E. Canseliet quand il aborde le domaine mystérieux de l'ionosphère ou sphère de la violette qui cache un joli trait de cabale. Le fétu de paille - par καρϕος - évoque la sécheresse et l'aridité, le désert en un mot, là où l'on retrouve la pureté et le silence. Mais καρϕος, c'est aussi tout corps sec obtenu à partir d'une écorce, ce qui, tout naturellement, permet de rapprocher l'image de l'une des sentences les plus célèbres du corpus alchimique: “rumpire libros et dealbate latonam.” que uploads/s3/ aurora-consurgens.pdf
Documents similaires
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/5z3UByUtEQgb4Wh5p4uHjZeLkbaE0SMVuH0B6bBRbV92sFn2McpZPaKJoP83TDIkMXSDHRDqK7rQ0CpsiFu7iyaU.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/cguFKoVP3le4m1wnClssjvOAD6HbFPFoBkjVXVJ5BIATgUuFbwEdWP6w7WaJlJ9bSLKo7Yf7JVHCAgUGMBaUtgRp.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/XS1qqHuuiGBbazKdVS1gCsB3JTZshu3uiGJhkukKsCjjLY8YbWss9jeKGzdARcVCoyjYDJqunlyp8ZT76dGcuy3f.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/G6CWDop246HL5QAZDdxX5oVCsVLCyofn4u2BY185pdwaSYT0gcmHOkljey0zqnMYT0LuNGsy0hiit5lufdcbJOpv.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/uhO2Hw5YmBAMmcmLftwDTHfGVIiLNVXwXVlnYA73IzoRSjv3oe1TFQMvDNGGjNnpleqw4Alf9LZbzRFNDsLyqt22.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/bJ8PoaxS8tvBq9lF4rnAw3HqBhs8nanTdobRqvaCuHFRC5tFSsPLppN2IJJDZ3iWYNzYQf890KLkudZVpzLQDKMg.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/ArA2hgiYgNtPKrsCvQT0B73lo4ZU3iyMbaILjYj4W8dWY5GjBLZp3R9eKhKWhifzY3x3gEyiHTODGSWD6WpwtIaO.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/ygeYyolynShVmilC34lvmZvwjxTx8u7SO89SbXez6ZZLKt3sihlpAUF6avfJo6jHeBsLynhVScodF8d9PbdNKLnu.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/DgYikinKNsOC0uR8nzLPxCPQeOIIFCp522eos3RyUwfKu7neeUcKS7Xfwu2JX9N0fUyfn2aWozBXrwMewAWkAnc8.png)
![](https://b3c3.c12.e2-4.dev/disserty/uploads/preview/rVx5o8CrgTCx79xtCafb411usAS8W3ydT5LZFQ0KxttuSGibgNQCJDV1rwT0u5uatdqFLcB54ugIuZy33f5cw5DC.png)
-
27
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Mar 19, 2021
- Catégorie Creative Arts / Ar...
- Langue French
- Taille du fichier 1.5527MB