Le Swing, Jazz Classique, "Middle Jazz" (1930-1940) A. CONTEXTE GÉNÉRAL 1. La n
Le Swing, Jazz Classique, "Middle Jazz" (1930-1940) A. CONTEXTE GÉNÉRAL 1. La naissance des big bands À l’aube des années trente, le jazz se déplace à nouveau, vers New York et plus précisément à Harlem où se produisent déjà des pianistes stride (forme modernisée du ragtime reposant sur une alternance de basses sur les temps forts et d’accords à l’octave sur les temps faibles) tels que James P. Johnson et Fats Waller. Une évolution se dessine dans la conception orchestrale du jazz, abandonnant la polyphonie du style New Orleans au profit de la structure « classique » de l’orchestre en sections instrumentales(trompettes, trombones, anches, rythmique) telle que la conçoit le pianiste Fletcher Henderson dès 1924. Les grands orchestres (ou big bands) font leur apparition. Dès lors, la place prépondérante du soliste et son intervention sont encadrées et soutenues par les parties écrites ; cette architecture musicale prend le nom d’« arrangement ». Les mesures à quatre temps se substituent par ailleurs aux rythmes à deux temps. 2. Les clubs de jazz au faîte de leur gloire Les stations de radio se multiplient, l’industrie du disque tourne à plein régime (les 78 tours rencontrent un succès notable), les ballrooms (salles de danse) s’implantent dans toute la ville et les clubs de jazz connaissent leur heure de gloire : le Savoy ouvre ses portes dès 1926, le Cotton Club s’oriente vers un jazz de qualité un an plus tard et l’Apollo accueille la communauté noire. Le jazz et la danse (dans les clubs, les casinos et les grands hôtels) permettent à l’Amérique de s’étourdir dans un climat de crise économique consécutive au krach boursier de 1929. 3) Le jazz s’intègre à la culture américaine En 1928, l’orchestre de Duke Ellington fait les beaux soirs du Cotton Club avec la revue The Blackberries of 1930. Il est remplacé par l’orchestre Cab Calloway (chanteur, danseur et animateur), auquel succède un orchestre « pour danseurs seulement », celui de Jimmy Lunceford. Au Savoy, baptisé home of happy feet (soit la « maison des pieds joyeux »), se déroulent de mémorables joutes musicales, à l’instar de celle opposant l’orchestre du batteur Chick Webb — Ella Fitzgerald y fait des débuts prometteurs en 1935 — à celui de Benny Goodman. S’y produisent également les grandes formations des pianistes Earl Hines et Count Basie. L’Amérique vit à l’heure du swing (terme associé aux grands orchestres blancs de cette époque, à ne pas confondre avec le mot désignant la pulsation rythmique propre au jazz) et le jazz, pour la première fois de son histoire, est devenu une musique populaire. Le clarinettiste Benny Goodman est sacré « roi du Swing » en 1938. Son orchestre « mixte » (il est le premier à avoir engagé des musiciens de couleur) bénéficie des arrangements de Fletcher Henderson et touche un vaste public au-delà des seuls amateurs de jazz. Parmi ses rivaux blancs, figurent les formations du tromboniste Tommy Dorsey (dans lequel chantera Frank Sinatra), du trompettiste Harry James, des clarinettistes Artie Shaw et Woody Herman et du batteur Gene Krupa. B. CARACTÉRISTIQUES MUSICALES : 1. les instruments La grande formation, dite big band, est constituée de "sections", autrement dit de "sous- groupes" d'instruments. On distingue: section "mélodique": la section des anches : saxophones et clarinettes; la section des cuivres : trompettes et trombones; la section des cordes (rarement) : violons, altos, violoncelles, contrebasses (jouées à l'archet); section "rythmique": le piano, la guitare, la contrebasse (jouée en pinçant les cordes), la batterie. Le nombre total d'instrumentistes au sein de ces orchestres était variable, fréquemment situé autour de la douzaine, mais pouvant aller jusqu'à seize ou vingt. Il est important de noter, cependant, que tout le jazz de l'époque Swing ne fut pas joué par des big bands. Le swing exista aussi bien en trio qu'en quartette, quintette ou sextette..., dits "combos". En effet, le swing résulte d'une organisation rythmique indépendante du nombre de musiciens qui jouent. A propos de big bands, précisons que tous ne jouaient pas du jazz, mais aussi de la musique de danse (type salon). Profitons de ce rappel pour en effectuer un autre: le swing est un principe rythmique fondamental pour toute la musique de jazz. Aujourd'hui encore, nombre de musiciens de jazz jouent swing. D'autres en revanche, et ce depuis les années '60, ont rompu le lien originel, au profit d'organisations rythmiques différentes, ou dans un but de désorganisations rythmiques, ainsi que nous le verrons plus loin. Mais lorsqu'on parle de période Swing, il s'agit de désigner essentiellement le jazz des années '30 qui, indiscutablement, conduisit la mécanique rythmique swing à son apogée. Les deux significations du terme swing se trouvaient là conjuguées. Impossible, enfin, d'oublier un instrument soliste parmi les plus importants: la voix. C'est à l'époque Swing que s'illustrèrent notamment les chanteuses Ella Fitzgerald et Billie Holiday. 2. L'organisation mélodique et harmonique Résumons les explications données aux chapitres précédents, particulièrement celles consacrées au New Orleans. On sait que dans ce style de jazz, les musiciens "collent" au thème, quand bien même ils se prêtent à de multiples paraphrases et variations au moment des improvisations. D'autre part, l'importance donnée aux solistes augmente à mesure qu'évolue le New Orleans. Au cours des années '20, l'organisation décrite - à savoir une polyphonie mélodique à trois (trompette, clarinette, trombone) jouée sur les accords et notes principales du morceau (banjo, tuba) - cède de plus en plus la place à des solos individuels. Dans tous les cas, des conventions bien connues des musiciens et mémorisées par eux sont seules nécessaires pour que l'on puisse jouer ensemble d'emblée, sans erreurs musicales, sans égarements, sans fausses notes, qu'il s'agisse d'improvisation à trois ou de solos soutenus par le band. Mélodiquement, on constate un affranchissement progressif du musicien par rapport à la mélodie (au thème) de base du morceau. Les improvisations, en effet, ne sont plus des paraphrases et des variations, mais de vraies inventions qui tiennent compte principalement des accords joués par le piano ou la guitare, ainsi que des notes principales des accords, émises par la contrebasse. Souvent, dans les big bands, les musiciens des sections mélodiques jouent en-dessous du soliste pour le soutenir, le mettre en valeur, relancer son inspiration, en lui donnant du répondant. Leur jeu est alors plus rythmique que mélodique, et souvent il s'agit de "riffs", phrases musicales assez courtes et efficaces, pouvant même se limiter à une ou deux notes, sortes de "shoots" orchestraux (trompettes, trombones, saxophones, clarinettes) parfois nommés en français : "pêches". Mais il peut s'agir aussi d'interventions mélodiques plus élaborées, dont regorgent les arrangements de la période swing. Enfin, les accords se complexifient par rapport aux harmonies basiques du New Orleans. Leur sonorité s'enrichit de notes ajoutées qui donnent aux solistes plus de possibilités. Cette notion est facile à comprendre à la lumière des explications fournies en nos précédents chapitres : on sait que les musiciens jouent en tenant compte des notes émises par le banjo, la guitare ou le piano (accords). S'il s'agit d'accords de trois notes, les musiciens improviseront sur une gamme qui correspond à ces accords, mais en faisant régulièrement entendre dans leurs phrases musicales les pôles de ces accords, en l'occurrence les trois notes qui le composent. Il est évident que si l'accord est constitué de quatre ou cinq notes, voire plus encore, les points d'appui du musicien s'en trouveront augmentés et diversifiés. Les retours aux notes de base seront moins contraignants. Moins il est coincé par le contexte harmonique, plus le soliste est libre mélodiquement. Une modification importante dans le langage du Swing consiste en l'abandon définitif des improvisations simultanées propres au New Orleans - initial surtout. L'ère du solo est ouverte. Fini le front commun trompette - clarinette - trombone. Fini le parallélisme. Désormais les improvisateurs s'expriment individuellement, accompagnés par le band. La liberté de l'improvisateur Swing se matérialisa en des mélodies d'une fluidité et d'une souplesse inconnues des musiciens de la période New Orleans. Ces qualités générèrent trois autres caractéristiques moins séduisantes : abondance, prolixité, gratuité... annoncées dès les années '30. De même, il faudra apprécier le Swing en tenant compte de ses qualités et de ses défauts, d'un musicien ou d'un disque à l'autre. L'étiquette "swing", enfin, s'adapta aussi bien à des Coleman Hawkins (sonorité richement timbrée et très expressive, swing nerveux, improvisations lyriques, abondance du discours) qu'à des Lester Young (recherche d'une sonorité dense mais peu vibrante, swing nonchalant, improvisations contrastées, réserve). Notons, pour terminer, qu'appartient au Swing un genre particulier intitulé "Jungle" (à ne pas confondre, bien entendu, avec le courant Jungle actuel, lié au Trip hop notamment), bien décrit par Lucien Malson en son Histoire du jazz: "Le rythme sèchement battu, les lamentations des anches, les vociférations grumeleuses des trompettes et des trombones bouchés, évoquent l'angoissante épaisseur de la forêt et agitent les fantasmes d'une Afrique originelle". Duke Ellington illustra magnifiquement ce genre. 3) L'organisation rythmique Remontons quelques instants aux années '20, pour parler du boogie woogie. Voici une forme de musique pianistique dérivée du blues dont il emprunte la structure tout en uploads/s3/ le-swing.pdf
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- Publié le Fev 07, 2021
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