Galerie Drouart nouvelles réalités 1946 - 1955 Exposition organisée par Arthur

Galerie Drouart nouvelles réalités 1946 - 1955 Exposition organisée par Arthur Cavanna et Daniel Schidlower, Galerie Drouart, en collaboration avec Domitille d’Orgeval. Cette exposition n’aurait pu être réalisée sans le soutien du comité du Salon des Réalités Nouvelles. Nous exprimons toute notre gratitude à M. Guy Lanöe et M. Louis Nallard, membres du Comité d’honneur, à M. Michel Geminiani, Président, à M. Henri Prosi, Vice- Président, ainsi qu’à M. Jacques Weyer. Nous remercions toutes les personnes qui ont contribué par leurs conseils et leur aide à son élaboration, et particulièrement M. Alain Anceau, M. Carmelo Arden-Quin, M. Tristan Azzi, Mme Franka Berndt, M. Bolivar, Mme Jeanne Busse, Mme Geneviève Claisse, M. Georges Coppel, Mme Lucy Del Marle, Mme Thérèse Delmer, Mme Ruth Domela, M. Charles Euzet, Mlle Claire Euzet, M. Pierre Fichet, M. François Jousselin, M. Nicolas Ionesco, M. Fabrice Lapelletrie, M. Serge Lemoine, M. Roger Malina, Mme Yvette Moch, Mme Sylvie Nordmann, M. et Mme Jean d’Orgeval, M. Alain Peyrissac, Mme Stéphanie Peyrissac, M. Arnauld Pierre, M. Alexis Poliakoff, M. Jean Radou, M. Othello Radou, M. Georges Richar-Rivier, Mme Catherine Santoni-Folmer, Mme Catherine Topal, M. Didier Vallens, Mme Dominique Szymusiak, Mme Sabine Vazieux, ainsi que la Galerie Arnoux et la Galerie Lahumière. réalités nouvelles 5 I l y a quelques jours, je fus invité à un de ces dîners très parisiens chez M. et Mme***, des clients de la Galerie. La conversation s’enferrait depuis plus d’une heure sur les affaires politiques. La table rassemblait l’élite à la mode de la bonne société française : artiste peintre, musicien, littérateur, membres intel- lectuels de diverses professions libérales, bref les habitués de M. et Mme ***. Seul un couple, cousin de la maîtresse de maison dont le mari était professeur d’histoire au lycée de Montauban, venait rompre la belle harmonie de ce repas. Je m’étais jusque-là bien gardé d’émettre la moindre opinion, préférant écouter l’aimable discordance des convives. Ce n’est qu’au moment du dessert, propice à un bref mais non moins embarrassant silence, que Mme *** me reprocha mon mutisme : « Mon cher, serait-il indiscret de vous demander à quoi vous pensez ? » La plupart de mes amis tournèrent vers moi leur regard dans un silence courtois. Un peu gêné d’avoir été surpris dans ma rêverie je répondis : « Nullement ! Je pensais …. » A quoi pensais-je, d’ailleurs ? « Je pensais…à la pensée, justement. Notre pensée est absolue dans le moment où nous pensons, elle a sa propre existence, elle déborde, en se heurtant à tout ce qui déborde, elle entreprend son petit voyage et devient l’objet d’une idée. » En fait l’idée, précisément, était de changer de conversation, et « je pensais » que certains, au moins, auraient reconnu le texte de Picabia. Je demandai alors : « Quelqu’un a-t-il vu l’exposition sur la peinture abstraite « l’Envolée Lyrique » au musée du Luxembourg ? - Oui, fit remarquer la cousine de Mme ***, j’y ai poussé mon mari et je dois reconnaître que tout ces gribouillis m’ont fait mal à la tête, mon petit fils de cinq ans pourrait en faire autant ! » Cette courageuse déclaration créa un nouveau silence et je ne résistai pas à l’envie de lui faire remarquer que déjà, près d’un siècle auparavant, une réflexion similaire avait été relevée chez Kahnweiler lors d’une exposition Picasso et que le peintre présent avait cinglé cette réponse : « Votre fils de cinq ans oui, mais vous certainement pas ! » C’est alors que son montabalnais de mari, se sentant un peu chahuté, me dit : « Et Ingres, qu’en pensez- vous, Monsieur le moderniste ? » - Ingres ? répondis-je, Merveilleux ! Extraordinaire ! La force de son trait, la limpidité de son dessin, en font un précurseur de l’art moderne, tout comme Cézanne pour les cubistes, et ce n’est pas parce que nous préparons une exposition d’art abstrait sur les Réalités Nouvelles que je vais stigmatiser tout l’art du 19ème siècle ! Vous ne me mettrez pas en défaut là-dessus !» Chacun sembla avoir pris fait et cause pour cette polémique et tous se rassemblèrent en trois clans : les « pour », les indécis et les « contre ». Très vite la discussion battit son plein, bien plus encore qu’au sujet des élections, et elle devint de plus en plus passionnée, tous les « -ismes » montaient au créneau, impressionnisme, cubisme, fauvisme, expressionnisme, surréalisme, « Constructivisme, suprématisme, et pourquoi pas l’onanisme cérébral de cer- tains critiques chers à Alfred Jarry ?», me fit remarquer mon voisin et confrère, P.B. Je compris qu’il était grand temps de calmer cette enthousiaste assemblée qui semblait avoir perdu tout contrôle, toute éthique, et qui n’était pas sans rappeler les meilleurs moments d’empoignades de 1947 à la Coupole ou au Select. J’en conclus qu’il restait encore de beaux jours aux manifestations artistiques et au marché de l’art et conseillai à tous, très diplomatiquement, devant la multitude de questions de plus en plus pertinentes, la lecture d’ouvrages spécialisés tel que : Qu’est ce que l’art abstrait ? , de Georges Roque, ou celle de notre catalogue de référence sur l’exposition des Réalités Nouvelles de 1946 à 1955, celui-là même que vous avez entre les mains et, bien évidement, de venir voir l’exposition à la Galerie Drouart. Le calme revenu, dans la crainte d’avoir fâché certains invités, je me rappelai, un peu tard peut-être, la phrase d’Ambroise Vollard « Pour vendre un tableau le mieux est encore de ne rien dire. » Arthur Cavanna 6 Première partie Analyse 6-9 La conquête de l’abstraction De sa naissance aux Réalités Nouvelles Daniel Schidlower 10-25 Le Salon des Réalités Nouvelles 1946-1955 Domitille d’Orgeval Documents 26-47 Documents 49 Seconde partie œuvres 49-139 Planches couleur 141 Troisième partie Biographies des peintres exposés 141-157 Biographies réalités nouvelles  réalités nouvelles 7 La conquête de l’abstraction De sa naissance aux Réalités Nouvelles Daniel Schidlower L’art « abstrait », né au début du vingtième siècle, continue aujourd’hui d’alimenter toute la création artistique, d’en être un ferment indéniable. Plus qu’une école ou un mouvement, il est d’abord à sa naissance, rupture avec toutes les conceptions développées antérieurement, et il donne en même temps a posteriori toute leur dimension à ce qu’ont été successivement le fauvisme, l’expressionnisme, le cubisme, le futurisme. La place que l’art abstrait occupe aujourd’hui intègre les positions de ses fondateurs qu’on a trop souvent voulu opposer les uns aux autres, en considérant d’un côté l’ascétisme protestant de Piet Mondrian qui le conduit au néoplasticisme (« L’art n’a de sens que s’il exprime le « non-matériel » car c’est ainsi qu’il permet à l’homme de s’élever au-dessus de lui-même »), de l’autre le lyrisme de Wassily Kandisky qui lui fait écrire dès 1910 que « les objets nuisaient à sa peinture », ou encore le nihilisme de Malevitch qui l’amène au Carré blanc sur fond blanc en 1918. Certes, les artistes eux-mêmes, plus tard, se sont positionnés en acceptant pour les uns (voire en s’en revendiquant) d’être considérés comme des « artistes abstraits géométriques », pour les autres, en se réclamant de la « nécessité intérieure » de Kandinsky, tandis que d’autres encore, comme Bazaine estimaient que « les formes qui passent à travers nous, si peu figuratives soient-elles, proviennent de la nature, qu’elles sont traduites par l’artiste » (Bazaine, 1948). Les développements de l’abstraction au lendemain de la première guerre mondiale. La place particulière de l’art abstrait réside en ce qu’il irrigue toute la société à travers la volonté exprimée dès l’origine de lier entre elles les différentes disciplines artistiques dans l’idéal d’un « Art total ». Sa longévité repose sur le fait que depuis la fin de la guerre de 1914-1918, il a imprégné l’esprit du Bauhaus, où l’enseignement d’artistes aussi différents que Wassily Kandinsky, Benjamin Itten, Paul Klee, ou bien encore Walter Gropius, Laszlo Moholy-Nagy, et Mies Van der Rohe, imposa « l’artiste-artisan » comme figure participant à la refonte de toute la société . C’est cette même orientation qui a fait le ciment du néoplasticisme et de De Stijl et qui guida Van Doesburg dans ses expérimentations architecturales élémentaristes menées avec Van Eesteren dans le milieu des années 20. Elle trouva un prolongement en France et en Belgique au sein du groupe réuni autour de Vouloir, revue devenue sous la direction de Del marle en 1927 un organe du néoplasticisme. C’est en URSS enfin, que Lunatcharski, Commissaire du peuple à l’éducation et à la culture fonde au lendemain de la Révolution russe, en 1918, l’IZO (Département des Beaux Arts au Commissariat populaire à l’Instruction publique). Celle- ci donne un nouveau statut à Malevitch, Tatline, El Lissitzky, Rodtchenko, qui se voient confier la constitution de nouvelles écoles d’art et la direction de nouveaux musées. De 1923 à 1928, Malevitch habite dans la Galerie de Petrograd où il dirige un laboratoire d’art expérimental axé sur une nouvelle architecture. L’apport de ces artistes de l’avant-garde est considérable, pour ne prendre que l’exemple de Pevsner ou de Gabo, dont l’art dématérialisé trouve ses prolongements uploads/s3/ realites-nouvelles.pdf

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