du même auteur AZF – Une affaire au sommet de l’État, Éditions du Rocher, 2013.
du même auteur AZF – Une affaire au sommet de l’État, Éditions du Rocher, 2013. La Chute des idoles, Michalon, 2015. ARNAUD ARDOIN « PRÉSIDENT, LA NUIT VIENT DE TOMBER » Le mystère Jacques Chirac COLLECTION DOCUMENTS Vous pouvez consulter notre catalogue général et l’annonce de nos prochaines parutions sur notre site : www.cherche-midi.com Direction éditoriale : Ariane Molkhou © le cherche midi, 2017 30, place d’Italie 75013 Paris Mis en pages par Soft Office – Eybens (38) Dépôt légal : octobre 2017 ISBN numérique : 9782749150192 Couverture : M. C. Photos : © Christian Vioujar « Cette oeuvre est protégée par le droit d’auteur et strictement réservée à l’usage privé du client. Toute reproduction ou diffusion au profit de tiers, à titre gratuit ou onéreux, de tout ou partie de cette oeuvre, est strictement interdite et constitue une contrefaçon prévue par les articles L 335-2 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle. L’éditeur se réserve le droit de poursuivre toute atteinte à ses droits de propriété intellectuelle devant les juridictions civiles ou pénales. » Mardi 18 juillet 2017, dans son appartement du 9e arrondissement de Paris, « la nuit » de Daniel est définitivement tombée. Ce livre lui est dédié. Un hommage à cet homme de l’ombre qui a consacré une grande partie de sa vie à Jacques Chirac. Le président, comme il l’appelait, fut à la fois son idole, un frère d’armes dont il saisissait la subtilité des silences. Un homme auquel Daniel vouait un amour et un respect sans bornes. Au crépuscule de la vie de Jacques Chirac, il fut un compagnon méticuleux, cherchant inlassablement à lui transmettre cette énergie vitale, capable de lui redonner la force de se battre et d’affronter le temps qui passe, inexorablement… 1 VIVRE POUR MIEUX BRÛLER L’ENNUI Mieux vaut la fin d’une chose que son commencement, mieux vaut patience que superbe. L'ECCLÉSIASTE Paris – octobre 2015 La place Saint-Georges est déserte ou presque. Il est neuf heures trente précises. L’air est doux, l’automne n’est pas encore arrivé, l’été s’éternise un peu. Comme chaque matin, depuis trois mois, le chauffeur du président a garé la Vel Satis grise au numéro 28. Les premiers jours, les habitants de ce quartier bobo, un peu surpris, ont tourné la tête vers la berline d’où ils ont aperçu, par la fenêtre entrouverte, le visage de Jacques Chirac. Puis, au fil des semaines, la voiture du président s’est fondue dans le décor. Daniel, en costume cravate, descend la rue Notre-Dame-de-Lorette et rejoint le véhicule sur la place, Sketch au bout de sa laisse, un westie, une race écossaise robuste et rustique… Daniel ouvre la portière, toujours côté gauche, aide son chien qui grimpe péniblement sur la banquette arrière car l’animal est malade. En temps normal, Daniel prend le métro, mais quand le président a su que son chien était malade, il a exigé que son chauffeur et lui viennent les chercher pour éviter à l’animal trop de fatigue. Daniel plie sa grande carcasse et s’engouffre dans la voiture, salue respectueusement le président assis à droite sur la banquette arrière, c’est sa place. Daniel est un fidèle parmi les fidèles, un homme de l’ombre : de ces personnages qui fuient la lumière pour se réfugier dans le clair-obscur, jamais sur les photos, parfois cité par un journaliste de presse écrite, jamais au premier plan, mais jamais bien loin non plus. L’ancien chef d’État porte beau. Un costume gris, une chemise bleue à fines rayures, la cravate et la pochette composent un camaïeu sobre et élégant. Il a les yeux dans le vague, le visage collé à la vitre. Sans dire un mot, le président pose sa main sur le chien, comme chaque matin. Ce n’est pas vraiment une caresse, mais quelque chose d’autre, un geste indéchiffrable. Sa longue main aux doigts fins constellés de taches de vieillesse s’est doucement posée sur la petite bête blottie au fond de la banquette en cuir. La main du président, celle que des millions de Français ont observée à la télévision lorsque Jacques Chirac débattait, se défendait, essayait de convaincre du bien-fondé de sa politique, des mains pleines d’énergie, des mains qui ont fait sa force. La voiture démarre lentement, traverse le quartier – direction rue de Lille, là où le président a installé ses bureaux, à quelques mètres de l’endroit où, trente- neuf ans auparavant, Charles Pasqua et lui ont créé le RPR 1, une machine à victoires qui allait propulser Jacques Chirac au pouvoir. Comme si sa vie, foisonnante, multiple et complexe, avait effectué une boucle parfaite pour revenir au même point, à quelques mètres près, là où tout a commencé, là où tout se termine. Depuis que la maladie a frappé à sa porte en 2005, qui lui fait perdre doucement ses facultés intellectuelles, le président aime ces moments de liberté car ses journées sont devenues d’étranges parenthèses. La vitre grande ouverte, il observe avec gourmandise ces visages et ces corps inconnus qui défilent sur le trottoir, la vraie vie, brouillonne, simple, qui lui brûle, chaque matin, les rétines. La main toujours posée sur le chien qui ne bouge pas, le président regarde le monde, hume l’odeur de la ville, sa ville qu’il façonna, celle dont il fut le maire pendant dix-huit ans, un mois et vingt-six jours. Cette ville lumière, Daniel la connaît lui aussi sur le bout des doigts. À vingt- cinq ans, encore jeune étudiant en droit, il se retrouve dans le bureau de Pasqua. Le destin. Le « patron » lui demande d’arpenter la ville, de la labourer, arrondissement par arrondissement, de visiter chaque permanence afin de préparer la campagne électorale éclair en vue des élections municipales de 1977. Jacques Chirac a créé le RPR en 1976. Il s’agit alors d’un tout jeune parti politique et il faut convaincre que le seul homme capable de gagner Paris, c’est Chirac. Daniel est un gamin de vingt-cinq ans qui cherche un débouché à sa vie… Chirac, il le connaît à peine, mais il prend sa mission très à cœur. Daniel a croisé Jacques Chirac en 1972 dans la propriété creusoise du puissant Pierre Juillet. Juillet est alors conseiller du président Pompidou aux côtés de Marie-France Garaud. Tous deux deviendront les mentors de Jacques Chirac. Pierre Juillet est un homme discret, amoureux de la nature, à la recherche du silence. Régulièrement, pour s’éloigner des bruits de la ville, il descend dans la Creuse : il marche en forêt, il tond ses moutons qu’il attrape sans vergogne, comme un paysan aguerri, tout en réfléchissant aux stratégies qu’il échafaudera de retour dans la capitale. Daniel se souvient, l’image a imprimé sa rétine : Pierre et Jacques sont postés comme des soldats à l’entraînement et s’amusent à faire des cartons avec des revolvers sur des emballages de bouteilles de whisky Glenfiddich vides. Le souvenir est intact, jusqu’à la marque de la bouteille. Ce jour-là, Daniel ne se doute pas de ce qui va lui arriver et Jacques Chirac non plus d’ailleurs, aveuglés par leur jeunesse. Ils ignorent que débute la plus longue et peut-être la plus belle histoire de leur vie. Quarante ans aux côtés de Jacques Chirac, sans un nuage, sans une ride. Daniel l’a vu se transformer sous ses yeux, ils ont grandi ensemble, aujourd’hui ils vieillissent ensemble, l’un beaucoup plus vite que l’autre. Daniel a pris le bateau RPR en 1976 pour ne jamais plus mettre pied à terre. Un voyage au long cours, tumultueux, harassant, excitant, l’aventure d’une vie : la conquête de Paris, le nouveau parti gaulliste et son appareil qu’il faut tenir, puis les meetings qui s’enchaînent à une vitesse folle avec chaque soir, en vedette américaine, le fringant Jacques Chirac. Un bel homme, si l’on en croit le succès qu’il a auprès des femmes. Si un peintre devait le croquer, il lancerait, dans un geste vif, un trait au fusain, souple et élégant, comme une fulgurance inaccessible. Jacques Chirac, c’est un mouvement, une énergie brute sous les lumières d’une estrade de province. À ses côtés, Daniel mène une vie de saltimbanque, un soir ici, un autre là, jusqu’en 1995, l’année de la consécration : l’Élysée. Daniel devient chef de cabinet adjoint du président de la République. La ville défile lentement derrière les vitres de la berline. Les deux hommes sont assis l’un à côté de l’autre, silencieux. Un calme brisé parfois par un passant, un homme, souvent une femme, qui a reconnu dans la voiture le président de la République. Étonné de voir en chair et en os celui qu’il a toujours vu à la télé. Il est entré dans le cœur des Français, qui semblent lui avoir tout pardonné. Jacques Chirac aime ces moments, des moments qu’il a toujours affectionnés d’ailleurs, même lorsqu’il détenait le pouvoir, même lorsque le protocole était un éteignoir, bridant ses folles envies. « Daniel, arrêtons-nous, j’aimerais fumer une cigarette et boire un verre ! – Monsieur le président, il est interdit de fumer dans les cafés, vous le savez bien, c’est vous qui avez fait voter cette uploads/S4/ arnaud-ardoin-president-la-nuit-vient-de-tomber.pdf
Documents similaires










-
26
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jan 27, 2022
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
- Taille du fichier 1.1828MB