AUDIT INTERNE ET RESPONSABILITÉ L’auditeur interne étant un salarié, sa respons

AUDIT INTERNE ET RESPONSABILITÉ L’auditeur interne étant un salarié, sa responsabilité ne peut être légalement définie que selon les termes du droit commun. C’est dire qu’il ne saurait être tenu pour responsable du fait de ses activités professionnelles, hormis le cas où sa responsabilité pénale serait personnellement engagée. L’auditeur interne se distingue en cela du commissaire aux comptes dont la responsabilité civile peut être recherchée sur le fondement de l’article 234 de la loi du 24 juillet 1966 et des articles 1382 et suivants du code Civil en sus des cas où sa responsabilité est pénalement engagée. Un commentaire sur la responsabilité de l’auditeur interne pourrait donc s’arrêter à ce simple constat. Mais la diversité des situations et la complexité des organisations conduisent à pousser plus loin le raisonnement et à s’interroger sur le devenir de la notion de responsabilité lorsque d’une part se développent les codes de conduite, ou codes d’éthique, et que d’autre part le législateur étend la responsabilité aux personnes morales. La déontologie En se situant précisément dans le cas de l’existence du « code de déontologie de l’auditeur interne », celui-ci ne risque-t-il pas de créer au-delà de l’obligation morale évidente, une obligation réelle susceptible d’être sanctionnée ? Lorsque la norme 1220 précise que « la conscience professionnelle n’implique pas l’infaillibilité » n’y a-t-il pas là une restriction conséquente et réaliste à la limitation de la responsabilité ? À cette question, on peut répondre « oui » et de deux façons : - « Oui » car l’auditeur interne qui n’a pas respecté les normes professionnelles peut se voir sanctionné de deux façons : – sanctionné par l’organisation professionnelle (The Institute of Internal Auditors) qui peut lui interdire l’adhésion à tout Institut d’audit interne ; – mais également – et surtout – sanctionné par son organisation dans sa rémunération et/ou sa carrière professionnelle si le niveau de management approprié a eu l’information. La sanction peut sans nul doute aller jusqu’au licenciement si, par exemple, le non-respect de la confidentialité de données essentielles est considéré comme une faute grave. Tout ceci va dépendre bien évidemment des circonstances de fait, mais le risque est réel. - On peut aller plus loin encore quant aux conséquences des actes professionnels de l’auditeur interne : la dissémination d’informations non autorisées et qui aurait entraîné un grave préjudice pour l’entreprise ne peut-elle pas faire l’objet de la mise en oeuvre d’une responsabilité civile dès l’instant qu’un code d’éthique ou une norme édicte une interdiction formelle ? En d’autres termes, ne pourrait-on considérer que dans une semblable situation l’auditeur interne a agi avec malignité – éventuellement par intérêt – et s’est alors situé en dehors du cadre légal de son contrat de travail ? Il n’y a pas, à ma connaissance, d’exemples d’une telle extension mais il n’est pas interdit de l’imaginer. Le droit pénal Plus grave et plus pertinente est l’incidence de la nouvelle législation pénale. L’extension de la responsabilité pénale aux personnes morales s’est accompagnée d’une extension jurisprudentielle de la responsabilité des personnes physiques. Et l’on voit la responsabilité des dirigeants de plus en plus souvent mise en cause pour des fautes de gestion, la notion de dirigeant étant parfois interprétée de façon extensive : on y inclut non seulement les membres du comité de direction mais également les trésoriers ou autres membres de la direction. Dès lors qu’une facture mal réglée peut faire l’objet d’un délit pénal à charge du responsable doté d’une délégation de pouvoirs, on peut imaginer un traitement identique pour le directeur de l’audit interne « coupable » d’avoir émis des rapports passant sous silence des faits essentiels, et ce d’autant plus que ledit directeur se situe à un niveau élevé de la hiérarchie. Et on peut se demander dans quelle mesure le Sarbanes-Oxley Act n’est pas susceptible d’avoir – dans ses composantes pénales – des retombées sur les auditeurs internes des sociétés auxquelles il s’applique. Mais au-delà de ce texte spécifique c’est toute la réglementation et la législation française sur le sujet qui traduisent la tendance lourde à la judiciarisation de la vie économique. Certes, nous sommes encore ici dans le domaine spéculatif mais on perçoit bien que ces spéculations sont dans l’air du temps et qu’on ne peut les ignorer. Moins spéculatif et plus ordinaire est le cas de complicité dans lequel l’auditeur interne est convaincu d’avoir participé en connaissance de cause au délit pénal d’un dirigeant ou de toute autre personne d’ailleurs. Certes, on est ramené ici au cas banal de la responsabilité pénale de la personne. Mais ce cas banal peut prendre une dimension originale selon la manière dont la complicité est appréciée. Le code Pénal exige que l’action ait été faite « en connaissance de cause » (on retrouve ici curieusement la même terminologie que celle du code de déontologie des auditeurs internes) mais cette notion peut être interprétée de façon extensive. Et passer sous silence un fait qui ne pouvait objectivement être ignoré de l’auditeur peut mettre ce dernier en situation dangereuse. L’utilisation de la « note confidentielle » peut être de ce point de vue un facteur aggravant. Dénonciation et devoir de réserve Au-delà des textes il reste ce qui n’est pas écrit et, souvent, ne peut l’être. En d’autres termes l’auditeur interne doit-il tout dire, peut-il tout dire ? Question longuement débattue dans un numéro spécial de la revue Audit1 dans lequel Philippe Christelle rappelle à juste titre l’équilibre à sauvegarder entre le devoir de réserve et l’exigence de ne rien cacher. Mais au-delà des principes les solutions pratiques restent à inventer. Faut-il aller jusqu’à la dénonciation ? Assimiler le devoir d’alerte à la délation ? Et si oui dans quels cas ? À la différence des commissaires aux comptes la question n’est pas réglementée, du moins pas encore… Reste l’application du droit commun qui, si l’on n’y prend garde, peut réserver de désagréables surprises. Ainsi donc, l’auditeur interne, et singulièrement le responsable de la fonction, n’est pas à l’abri de tout, protégé par son contrat de travail. Quelle peut être la meilleure des protections contre ces risques croissants ? À coup sûr, un professionnalisme sans reproche ; le respect des normes professionnelles reconnues internationalement, l’adhésion à un Institut d’audit interne sont autant de garanties dont l’auditeur pourra se prévaloir. Lorsque l’environnement devient dangereux, il importe de s’unir et de travailler avec rigueur. Mais pour quoi faire ? Quelle est la finalité de l’audit interne ? uploads/S4/ audit-interne-et-responsabilite.pdf

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  • Publié le Aoû 09, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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