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VOTRE DOCUMENT SUR LABASE-LEXTENSO.FR - 16/05/2020 11:29 | UNIVERSITE DE SAVOIE Aux origines du droit public allemand contemporain * Issu de Revue du droit public - n°3 - page 817 Date de parution : 01/05/2007 Id : RDP2007-3-008 Réf : RDP 2007, p. 817 Auteur : Par Rainer Wahl, Professeur émérite à l'Université Albert-Ludwig de Fribourg-en-Brisgau (RFA) SOMMAIRE I. _ LE TEMPS DES FONDATIONS COMME RÉVOLUTION JURIDIQUE A. _ Centralité de la Loi fondamentale B. _ La phase de fondation d'une société post-dictatoriale C. _ La subjectivité juridique et l'image de l'homme D. _ Conséquences de la subjectivisation fondamentale du droit E. _ L'exemple de l'interdiction sous réserve d'autorisation F. _ Le rôle croissant de la jurisprudence G. _ La diversité des rôles joués par la Constitution II. _ LE TEMPS DES FONDATIONS ET LA FIXATION DES CARACTÈRES STRUCTURELS DU DROIT PUBLIC ALLEMAND A. _ Aperçu des caractères essentiels du droit allemand B. _ Un droit administratif dominé par les droits fondamentaux C. _ Le rôle spécifique du droit administratif général comme instance de médiation entre le droit constitutionnel et le droit administratif spécial D. _ Un droit administratif focalisé sur la jurisprudence E. _ La juridicisation, un caractère général du droit public après 1949 Cette étude participe du projet plus large d'une « historisation » du droit public en vigueur. Il ne s'agit pas de décrire le développement des institutions et des doctrines prises séparément. En effet, on ne peut comprendre le droit public allemand des dernières décennies que si l'on en a saisi le caractère spécifique, son originalité propre. Une telle « historisation » doit aussi servir à se mieux connaître soi-même. Il ne s'agit pas seulement, dans cette perspective, de suivre des lignes d'évolution qui relieraient le moment actuel à son passé mais, en sens inverse, de reconnaître les empreintes durables que le droit actuel a reçu de l'époque initiale. S'agissant du droit public d'après 1949, la question est de savoir si les conditions de départ ont imprimé une orientation et un visage au droit administratif, si elles ont pour ainsi dire fixé une loi sous l'empire de laquelle ce droit se tiendrait aujourd'hui encore. Pour approcher le coeur d'une époque juridique ou ses racines, il faut en saisir les décisions fondamentales, c'est-à-dire les normes qui, parmi toutes les règles de détail, doivent être considérées comme des moments décisifs. Ces moments décisifs fixent à un ordre juridique son chemin d'évolution (Entwicklungspfad). L'historisation du droit positif rend alors attentif à ce que ce droit n'est pas né de discussions arbitraires sur la validité ou l'opportunité de telles ou telles solutions juridiques, mais que le rôle décisif a été joué par une situation historique concrète et sous le sceau intellectuel d'une époque donnée. Il y a des raisons pour lesquelles le droit allemand est marqué par une forte juridicisation et un haut niveau de protection juridique, par l'encadrement strict de l'administration et l'intensité du contrôle juridictionnel. Mettre à jour ces raisons est une tâche essentielle de la science juridique et de la formation des juristes, celle-ci socialisant les étudiants dans une certaine conception du droit et de la pensée juridique. Il est temps, désormais, de procéder à cette historisation du droit public de la République fédérale. Mais l'appartenance à la Communauté européenne et aujourd'hui à l'Union européenne a modifié le droit allemand d'une manière considérable et sans précédent. Le droit public allemand est de ce fait entré dans une seconde phase de son évolution. De façon de plus en plus prégnante, le droit est de plus en plus vécu par comparaison avec les autres ordres juridiques. La comparaison permanente est devenue la situation normale. Et ce non pas seulement pour le comparatiste académique, mais aussi pour le praticien. L'historisation de notre droit positif est un élément essentiel de ce dialogue nécessaire entre les ordres juridiques. Car pour entrer dans ce dialogue, il ne suffit pas de savoir que le droit allemand, sur telles ou telles questions, apporte des solutions autres que le droit anglais ou le droit français. Il faut avant tout savoir pourquoi le droit allemand est tel qu'il est. Seule l'historisation du droit positif peut permettre de l'expliquer. Ici, l'on se bornera à explorer et comprendre la rupture que fut, pour la rénovation du droit allemand, l'adoption de la Loi fondamentale, à considérer comment, après la dictature, cette rupture avec l'ancien droit public, celui du national-socialisme bien sûr, mais aussi celui de Weimar, fut rapide et profonde. C'est donc la première phase du droit public allemand qu'on examinera2, en précisant ce que fut la révolution juridique accomplie durant la phase de refondation après la dictature nazie (1), puis en considérant les caractéristiques structurelles du droit public allemand telles qu'elles furent fixées durant cette première phase de son évolution (2). I. _ LE TEMPS DES FONDATIONS COMME RÉVOLUTION JURIDIQUE A. _ Centralité de la Loi fondamentale L'entrée en vigueur de la Loi fondamentale constitua le coeur intellectuel et le moment décisif de la rénovation du droit après 19453. Réintroduction d'anciens principes constitutionnels et formulation de principes nouveaux : il y avait des précédents immédiats au sein des Länder qui venaient d'être constitués. C'est la Loi fondamentale, toutefois, qui devint déterminante et dont le rayonnement s'imposa même là où elle confirmait et renforçait les développements des quatre premières années. Comme l'on sait, la Loi fondamentale acquit dès les années 50 une force singulière. On ne peut ici évoquer dans leurs détails ces puissantes impulsions qu'imprima la Loi fondamentale à la rénovation du droit public. Il convient cependant de les 1/9 rappeler à grands traits avant de traiter principalement des innovations qu'a connues le droit administratif. La Loi fondamentale et son développement rapide, fruit d'une intense activité d'interprétation, jouèrent le premier rôle dans cette évolution du droit. Les premiers travaux4 cherchaient à caractériser ce que la Loi fondamentale contenait de nouveau et, dans un premier temps, ce furent les règles d'organisation de l'État qui occupèrent le devant de la scène5. Plus tard, on s'intéressa de manière privilégiée aux droits fondamentaux et principalement à celui qui dominait tout, l'art. 1 LF6. À côté de l'interprétation axiologique des droits fondamentaux qui promettait d'apporter une nouvelle base matérielle à la Loi fondamentale en général et à son titre 1 en particulier7, l'attention se fixa sur l'interprétation de la portée constitutionnelle nouvelle que donnait l'art. 1, al. 3 LF aux droits fondamentaux. « De la légalité de l'administration à la constitutionnalité de la loi » : par cette formule, on s'efforça de mettre en évidence l'étape importante qui avait été franchie par rapport à l'état du droit sous Weimar8. Un autre saut évolutif considérable, à savoir le développement et l'approfondissement sans précédent du principe de proportionnalité au niveau de la loi, peut être décrit et compris au moyen d'une formule analogue. Le triomphe du principe de proportionnalité signifie une évolution qui va « de la réserve de loi à la réserve de la loi proportionnée ». De plus, le débat autour des droits fondamentaux, qui amplifia considérablement le rôle de ces droits, et l'interprétation de ceux-ci comme l'expression d'un système de valeurs (la dimension objective des droits fondamentaux) contribuèrent largement à cette montée en puissance du droit constitutionnel. Mais, par-dessus tout, l'on ne saurait ignorer le triomphe de la juridiction constitutionnelle et de son activité interprétative, avec l'enrichissement du droit constitutionnel qui s'ensuivit9. B. _ La phase de fondation d'une société post-dictatoriale De tels efforts d'appropriation de ce qu'il y avait de « neuf dans la Loi fondamentale », on peut les observer et les étudier non seulement dans la science et la théorie du droit public, mais aussi dans la pratique juridique. Dans la législation comme, naturellement, dans la jurisprudence se manifestent les exigences de l'époque nouvelle et ce pour une raison particulière : telle est la caractéristique des ordres juridiques après une dictature surmontée qu'ils ont une phase nettement visible de fondation (ou de refondation)10. Bien sûr, dans la politique comme dans la vie juridique, il n'existe jamais de « moment zéro » véritable, de réelle tabula rasa. On remarque plutôt une situation initiale complexe et mitigée, faite d'éléments radicalement nouveaux, pris dans l'air du temps d'une part, et, d'autre part, d'éléments qui ont fait leurs preuves, repris à l'époque pré-dictatoriale. Après 1945, le nouvel ordre juridique se donnait pour tâche de revenir à l'État de droit et, en conséquence, de détruire et remplacer le droit public national-socialiste, un droit antilibéral et extrêmement interventionniste11. On peut qualifier la dimension négative de cette mission de rénovation comme un travail _ monumental _ de déblaiement. Il fallait réussir à transformer radicalement le droit établi par le régime national-socialiste avant et pendant la guerre en un droit public conforme aux idées nouvelles d'ordre et de liberté. Il fallait déblayer les lois répressives, bien sûr, mais aussi les réglementations générales, les habilitations excessivement étendues, les conditions vagues et imprécises, la discrétionnarité à peine limitée ainsi que l'abolition des droits individuels. Mais ces travaux de déblaiement et d'élimination, après 1945, ne visaient pas à un simple retour uploads/S4/ aux-origines-du-droit-public-allemand-contemporain-16-05-2020-11-29-43.pdf

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  • Publié le Apv 05, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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