TOUBAL Sofiane Groupe 3 Cass. Com. 28 septembre 2010 Le gé rant d'une socié té

TOUBAL Sofiane Groupe 3 Cass. Com. 28 septembre 2010 Le gé rant d'une socié té à responsabilité limité e qui commet une faute constitutive d'une infraction pé nale intentionnelle, sé parable comme telle de ses fonctions sociales, engage sa responsabilité civile à l'é gard des tiers à qui cette faute a porté pré judice. En l’ espè ce, des é poux confiè rent la ré alisation de travaux de ré novations de leur appartement à la socié té STS. En raison de malfaç ons et d'inexé cutions diverses, ces particuliers souhaitent obtenir la ré paration de leur pré judice. Ils n'agirent pas contre la socié té STS, leur cocontractant initial, mais contre la gé rante de cette SARL. La socié té ayant é té mise en liquidation judiciaire, leur seul espoir d'obtenir la ré paration de ces dé sordres reposait sur l'engagement de la responsabilité personnelle de la gé rante pour faute sé parable des fonctions, faute constitué e selon eux par l'absence de souscription de l'assurance obligatoire de responsabilité dé cennale au moment de l'ouverture du chantier. Par un arrê t du 4 fé vrier 2009, la Cour d'appel de Douai les dé bouta de leur demande, jugeant que le dé faut de souscription d'une assurance obligatoire n'é tait pas sé parable des fonctions du dirigeants, fut-il "constitutif du dé lit pré vu et ré primé par les articles L.111-34 du Code de la construction et de l'habitation et L.243 du Code des assurances, et caracté risant une abstention fautive à la gé rante de la socié té STS assujettie à l'obligation d’ assurance." Ainsi, la question qui se posait é tait de savoir si la ré union, en la personne du dirigeant social, des é lé ments constitutifs de l’ infraction pé nale qui sanctionne un dé faut d’ assurance obligatoire suffit-elle pour engager sa responsabilité civile ? Pour sa part, la Cour de cassation é nonce, dans un attendu de principe placé en chapeau de l'arrê t, que "le gé rant d'une socié té à responsabilité limité e qui commet une faute constitutive d'une infraction pé nale intentionnelle, sé parable comme telle de ses fonctions sociales, engage sa responsabilité civile à l'é gard des tiers à qui cette faute a porté pré judice" et relè ve que les juges du fond avaient constaté que la gé rante avait "sciemment" accepté de dé buter le chantier litigieux sans assurance garantissant la responsabilité dé cennale des constructeurs ; l'arrê t d'appel est alors cassé et annulé pour violation de la loi. Jusqu’ en 2003, toute faute qui se rattachait maté riellement à l’ accomplissement des fonctions directoriales n’ é tait pas considé ré e comme sé parable. Certaines voix se sont alors é levé es pour dé noncer le caractè re introuvable de cette faute et la protection maximale des dirigeants sociaux derriè re l’ é cran de la personne morale (M. Laurier, L ’ introuvable responsabilit é du dirigeant social envers les tiers pour fautes de gestion). L’ arrê t Sati du 20 mai 2003 a explicitement admis qu’ une faute dans l'exercice des fonctions pouvait ê tre sé parable et qu'il en est ainsi "lorsque le dirigeant commet intentionnellement une faute d'une particuliè re gravité incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales" (Cass. com 20 mai 2003). Depuis les exemples ne manquent pas. Toutefois, la formule retenue laisse une place importante à l’ appré ciation des juges du fond, de sorte que les arrê ts par lesquels la Cour de cassation exerce son contrô le de qualification sont pré cieux. Ainsi, si la solution est rendue au double visa des articles L.111-34 du Code de la construction et de l'habitation et L.243 du Code des assurances, sa porté e va bien au-delà des gé rants de SARL et des assurances obligatoires en matiè re de construction : l'é tablissement d'une faute sé parable du dirigeant (I) en cas d'infraction pé nale intentionnelle permet d'engager sa responsabilité civile (II) à l'é gard des tiers à qui elle a causé pré judice. 1 TOUBAL Sofiane Groupe 3 2 I . L’ institution d’ une faute sé parable du dirigeant En n’ ayant pas souscrit d’ assurance obligatoire, la gé rante de la SARL s’ exposait à une sanction pé nale. Selon la chambre commerciale, cela constitue bien une faute, et mê me une faute sé parable (A), dans la mesure où elle a é tabli un lien entre l’ infraction pé nale intentionnelle sanctionnant le dé faut d’ assurance obligatoire et la faute civil sé parable (B) A - Le dé faut d’ assurance obligatoire de responsabilité dé cennale est une faute sé parable La chambre commerciale confirme, au moyen d’ une argumentation qui confè re une porté e plus grande à sa solution, que le dé faut d’ assurance obligatoire de responsabilité dé cennale est une faute sé parable. Arrê tons-nous quelques instants sur la question du dé faut d’ assurance. Cette derniè re se pose souvent lorsque l’ on reproche aux intermé diaires de n’ avoir pas souscrit de garantie particuliè re. Certains usages ou dispositions contractuelles peuvent imposer la souscription d’ une assurance, et dans ce cas, le dé faut de souscription s’ analyse en un manquement contractuel de celui qui ne l’ a pas souscrite (Cass. 1er civ. 3 mars 1993). Qu’ en est t’ il lorsqu’ une assurance est obligatoire et que son dé faut de souscription est pé nalement sanctionné ? La non-souscription d’ une assurance obligatoire est une faute civile : celui qui avait l’ obligation d’ assurer engage donc sa responsabilité . Mais qu’ en est t’ il lorsque celui qui aurait dû s’ assurer est une personne morale ? Est-ce la personne morale qui est en faute ou son dirigeant ? Par le jeu de la repré sentation lé gale, l’ inaction du dirigeant rejaillit sur la socié té . Mais ne peut-on pas é galement relever une faute du dirigeant de nature à engager sa responsabilité , sachant que l’ article L. 243-3 du Code des assurances vise « quiconque » et non pas seulement la personne dont l’ activité devrait ê tre assuré e, puisque la responsabilité pé nale du dirigeant peut alors ê tre engagé e. En l’ espè ce, les é lé ments constitutifs de l’ infraction intentionnelle de non souscription d’ une assurance obligatoire é taient bien ré unis du chef de la gé rante de la socié té STS. Un doute é tait possible s’ agissant de l’ é lé ment intentionnel de l’ infraction puisqu’ en droit pé nal, la qualification d’ infraction intentionnelle implique la preuve d’ un dol gé né ral, autrement dit la conscience de son auteur de violer une disposition pé nale qu’ il sait ré pré hensible. Mais, en l’ espè ce, la gé rante savait bien qu’ elle devait souscrire une assurance obligatoire, puisqu’ elle avait entamé des né gociations avec une compagnie d’ assurances dans ce but. Faut t-il alors engager la responsabilité civile du dirigeant social lorsque les é lé ments constitutifs de l’ infraction pé nale sanctionnant un dé faut d’ assurance obligatoire sont ré unis ? Les ré ponses apporté es par la Cour de cassation divergent. Tandis que pour la troisiè me chambre civile, la ré ponse est né gative (Cass. 3e civ., 4 janv. 2006), les autres chambres optent pour l’ affirmative (Cass. com. 4 juill. 2006, Cass. crim. 7 sept. 2004, Cass. com, 18 mai 2010). Il convient cependant de rappeler qu’ un entrepreneur peut dé cider de ne pas souscrire cette assurance en raison de la taille des chantiers qu’ il effectue ou, tout simplement, en vue de demeurer compé titif puisque l’ assurance a un coû t. En se basant sur cet argument, la troisiè me chambre civile dé cide t-elle que, certes, le dirigeant commet bien une faute civil, mais que n’ est pas suffisamment grave pour ê tre dé claré e sé parable de ses fonctions. B - Le rapport entre infraction pé nale intentionnelle et faute sé parable Enonç ant de maniè re gé né rale que la « faute constitutive d’ une infraction pé nale intentionnelle » est « sé parable comme telle de ses fonctions sociales » , la chambre commerciale é tablit un lien direct entre infraction pé nale intentionnelle et faute sé parable, ce qui ne va pas de soi. On l’ a rappelé , la qualification d’ infraction intentionnelle implique à tout le moins la preuve d’ un dol gé né ral qui se distingue de l’ é lé ment intentionnel qui caracté rise la faute intentionnelle et la faute commise intentionnellement, visé es par la jurisprudence pour retenir une faute sé parable. 3 En effet, en droit civil, la faute intentionnelle suppose que son auteur ait cherché à causer un dommage, tandis que la faute commise intentionnellement implique seulement la conscience de commettre une faute, de sorte que sur l’ é chelle des fautes, la faute intentionnelle est plus uploads/S4/ cass-com-28-septembre-2010.pdf

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  • Publié le Dec 29, 2022
  • Catégorie Law / Droit
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