ROMERO Cyril Les sources internationales et européennes de la légalité administ
ROMERO Cyril Les sources internationales et européennes de la légalité administrative Les normes internationales et les normes du droit de l’Union Européenne ont été des sources de contentieux menant à des décisions jurisprudentielles importantes. Si de nos jours certaines problématiques telle que la place de ces normes au sein de l’ordre juridique interne français ont trouvé une réponse que ce soit à travers la législation ou la jurisprudence, ce n’est pas le cas pour chacun des problèmes posés par l’intégration de ces normes. L’arrêt ci-dessous est un exemple, assurément il est question de savoir si les traités ayant été ratifié et signé sous réserve par l’État français ont une valeur supra législative. En l’espèce, le 13 juin 2012, des agents de polices ont réalisé un contrôle dans un salon de coiffure détenu par une SARL. À la suite de ce contrôle inopiné, l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration estime que la société emploie dans l’illégalité deux salariés étrangers sans titre de séjours ou autorisations de travail, et par une décision du 13 novembre 2013 il condamne la société à payer deux sommes d’une valeur de trente-quatre mille euros et quatre mille six cent dix-huit euros. Mécontente, la SARL intente une action en justice. Le demandeur saisit donc le tribunal administratif de Paris qui par un jugement du 21 octobre 2014 décharge partiellement les contributions spéciales et forfaitaires mises à la charge de la société et la décharge totalement de l'obligation de payer les sommes qui lui étaient réclamées. Le demandeur et le défendeur sont tous deux mécontents : le demandeur car il doit toujours payer une partie des contributions et le défendeur puisque le jugement permet au demandeur de ne pas payer les sommes prévues, ils interjettent appel. Par un arrêt en date du 30 décembre 2016, la Cour administrative d’appel de Paris rejette l’appel de la société et le surplus de conclusion de l’Office, condamnant alors la société à payer les contribution spéciales et monétaires. À la suite de cette décision, elle se pourvoi en cassation et demande subsidiairement de saisir la Cour européenne des droits de l'homme. Il est possible de savoir que l’argumentation du demandeur repose sur l’absence d’un élément intentionnel et car selon lui il aurait bien respecté les normes nationales. De plus, il invoque le principe du « non bis in idem » sur le fondement de l’article un du protocole numéro seize de la CEDH pour demander l’annulation de la décision de la Cour d’appel. Il s’agira de se demander ici si le juge administratif est compétent pour interpréter le principe du « non bis in idem » malgré une réserve émise par l’État français. Le Conseil d’État, par un arrêt d’assemblé rendu le 10 aout 2018 rejette le pourvoi formé par la société. Assurément, il estime que la société a fait grief à l’article L.8253-1 du Code du travail ainsi que l’article L.626-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Le Conseil d’État en décidant de ne pas appliquer le principe du « non bis in idem » se juge incompétent pour apprécier les modalités de réserve et ce faisant il affirme la supériorité des normes européenne vis-à- vis de la législation nationale même en cas de réserve. Cet arrêt est donc constant vis-à-vis des jurisprudences antérieures tendant à l’affirmation de la supériorité des normes internationales sur les normes législatives. Il s’agira de se demander dans ce commentaire d’arrêt si le juge est compétent pour contrôler et interpréter une réserve émise par l’État français sur une norme internationale. Au regard de cette observation linéaire la réponse à cette interrogation épousera deux axes principaux notamment I) Le rappel nécessaire de la compétence du juge vis-à-vis des normes internationales d’une part, et II) La portée de l’appréciation du Conseil d’État vis-à-vis du principe « non bis in idem ». I) Le rappel nécessaire de la compétence du juge vis-à-vis des normes internationales Afin de déterminer quel est le rôle du juge administratif par rapport aux réserves émises par l’État français, le Conseil d’État fait en premier un rappel affirmant que les normes internationales ont une autorité plus importante que les normes législatives (A) ; pour ensuite en un second lieu se positionner et décider si l’interprétation des réserves rentre dans son champ de compétence (B). A) L’autorité des normes internationales est supérieure à celle des normes législatives L’article cinquante-cinq de la Constitution de 1958 affirme que « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie »1, cet article est donc une affirmation de la volonté du législateur à se soumettre aux accords et traités internationaux. Il signifie que pour qu’un traité international soit valablement applicable dans l’ordre juridique interne français, ce dernier doit respecter plusieurs principes notamment être régulièrement reconnu comme valide et respecter le principe de réciprocité et doit respecter un certain principe de publicité. Le Conseil d’État a reconnu le fait que le traité soit régulièrement ratifié par un arrêt du avril 1951 nommé « élections de Nolay ». Le principe de réciprocité a été confirmé par la jurisprudence lors d’un arrêt dît « Prosagore » en date du 30 octobre 1964 Les principes de supériorité et de réciprocité quant à eux à travers deux arrêt célèbre, tout d’abord l’arrêt Nicolo du 20 octobre 1989 qui consacre la suprématie des traités internationaux sur la législation nationale et l’arrêt Sarran du 30 octobre 19982. Si un de ces principes n’est pas respecté alors le traité n’est pas valable, de plus si les États cocontractant ne respecte pas leur engagement alors la France peut invoquer l’exception d’inexécution. Les juges vérifient donc l’application des conditions énoncées à l’article cinquante-cinq de la Constitution au cas d’espèce. Dans cette affaire, le traité provient de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il est donc régulièrement ratifié par plusieurs États qui l’appliquent réciproquement, le principe de publicité est également respecté car les juges ne relèvent pas de problème sur ce principe. En effet le Conseil d’État affirme que les conditions énoncées à l’article cinquante-cinq de la Constitution sont respectées car les articles « L. 8253-1 du code du travail et de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile » assurent « la transposition des articles 3, 4 et 5 de la directive 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 ». Par conséquent, il a donc une valeur supra législative, et c’est pour cela que le demandeur utilise cet argument pour essayer de faire annuler sa condamnation. L’arrêt « SARL Super Coiffeur » ne porte pas d’évolution jurisprudentielle vis-à-vis de l’autorité et de la place des normes internationales et notamment des normes du droit de l’Union Européenne dans sa décision. En effet, elle suit les jurisprudences dégagées par les arrêts Nicolo et 1 https://www.legifrance.gouv.fr/loda/article_lc/LEGIARTI000006527541 2 https://www.conseil-constitutionnel.fr/nouveaux-cahiers-du-conseil-constitutionnel/l-arret-sarran-entre- apparence-et-realite#:~:text=L'arr%C3%AAt%20Sarran%20constitue%20sans,1094 Sarran. Le point de cette solution dégageant une évolution jurisprudentielle est la position que prend le juge par rapport aux réserves émises par la France lors de la ratification du traité. B) La décision du juge administratif vis-à-vis des réserves En droit public, et plus précisément en droit international, le terme de réserve désigne le fait pour un État de réaliser un acte unilatéral qui manifeste sa volonté de ne pas appliquer la disposition d’un traité ou de privilégier sa propre interprétation. Ce principe du droit international est prévu par l’article onze de la convention de Vienne3 de 1969, une convention signée et régulièrement ratifiée par l’État français. La question ici est de savoir est-ce que le juge administratif est compétent pour décider ou non de la validité de la réserve. En l’espèce, le Conseil d’État affirme « Lorsqu'un traité ou un accord a fait l'objet de réserves, visant, pour l'Etat qui exprime son consentement à être lié par cet engagement, à exclure ou à modifier l'effet juridique de certaines de ses clauses dans leur application à son endroit, il incombe au juge administratif, après s'être assuré qu'elles ont fait l'objet des mêmes mesures de publicité que ce traité ou cet accord, de faire application du texte international en tenant compte de ces réserves ». Cela signifie que malgré la présence de la réserve, le juge administratif est compétent pour vérifier la bonne application des principes dégagés par l’article cinquante-cinq de la Constitution. Cependant il rajoute « De telles réserves définissant la portée de l'engagement que l'Etat a entendu souscrire et n'étant pas détachables de la conduite des relations internationales, il n'appartient pas au juge administratif d'en apprécier la validité. », ce point est important car le Conseil d’État se juge incompétent pour contrôler la validité d’une réserve de l’État français. Assurément, selon les juges du fond cette compétence se rapproche plus du Conseil Constitutionnel ou de la Cour de Justice Européenne car il s’agit de contrôler directement la volonté de l’État dans ses uploads/S4/ commentaire-d-x27-arret-sarl-super-coiffeur 1 .pdf
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- Publié le Nov 24, 2022
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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