Séance 8 – La Constitution et le droit supranational Le droit supranational se
Séance 8 – La Constitution et le droit supranational Le droit supranational se définit comme « toute norme juridique issue ou non d’une convention internationale et formée dans un cadre dépassant celui du seul État-nation » (Guillaume Drago, Contentieux constitutionnel français). Le droit supranational comprend le droit international et le droit européen. I. Le droit international Le droit international recouvre deux types de règles : Le droit international public qui régit les relations entre les États ou autres sujets de droit international – les organisations internationales et, dans une moindre mesure, les organisations non gouvernementales. Et le droit international privé qui régit les relations entre des personnes privées dans un cadre international. Le droit international a connu une importante mutation au cours du XXe siècle : Sur un plan quantitatif, la volonté de bâtir une société internationale régie par le droit a entraîné une multiplication des normes internationales engageant les États ; Exemple : La France était partie à moins de 200 conventions internationales multilatérales en 1945. Aujourd’hui, elle est partie à plus de 6 000 traités et en conclut entre 250 et 400 par an. Sur un plan qualitatif, le droit international tend à ne plus être un simple droit des États, réglant des questions diplomatiques, mais à devenir un droit des individus. Il ne vise plus seulement les États, sujets de droit international par excellence, mais également les personnes physiques et morales de droit privé, leur conférant des droits et même des obligations. Cette double mutation culmine en Europe avec la mise en place d’une Union européenne créatrice d’un droit abondant et directement invocable par l’individu. Énumérées à l’article 38 du statut de la Cour internationale de justice, les sources du droit international sont au nombre de 4 : les conventions internationales (I), la coutume internationale (II), les principes généraux du droit international (III) et les sources auxiliaires (IV) A)Les conventions internationales Défini à l’article 2 de la convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités, le traité est un accord de volontés entre des sujets de droit international, destiné à produire des effets juridiques et régi par le droit international. Les traités internationaux peuvent être bilatéraux ou multilatéraux. Les traités bilatéraux présentent le plus souvent un caractère synallagmatique en prévoyant des obligations réciproques. Quant aux traités multilatéraux, ils peuvent être regardés comme synallagmatiques s’ils comportent des obligations d’État à État. B) La coutume internationale L’existence d’une coutume suppose la réunion de deux éléments : Un élément objectif : une pratique générale, constante et cohérente des États ; Un élément subjectif : « l’opinio juris », c’est-à-dire la conviction que cette pratique correspond à l’exécution d’une obligation juridique ou, pour le dire plus simplement, est obligatoire. C) Les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées. Les principes généraux du droit international ne doivent pas être confondus avec la coutume internationale. En effet, ils s’en distinguent en ce qu’ils sont formés non pas à partir d’une pratique générale des États regardée comme étant le droit, mais à partir d’une comparaison et d’une systématisation de divers droits internes. D) Les sources auxiliaires : les décisions judiciaires et la doctrine des publicistes. Attention : Cette liste des sources du droit international appelle deux précisions. Si elle mentionne les décisions de justice comme un simple moyen auxiliaire de détermination des règles de droit, les décisions de justice ont depuis acquis une grande importance et le juge est bien plus que la simple « bouche des normes internationales ». Il convient également de mentionner les sources secondaires du droit international, à savoir les résolutions et les recommandations prises par les organisations internationales qui sont généralement dépourvues de portée contraignante. II. Le droit européen Le droit européen comprend le droit issu de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (CESDH) et le droit de l’Union européenne (UE). A)Le droit de la CESDH Le système conventionnel européen résulte de l’adoption, le 4 novembre 1950, de la CESDH par le Conseil de l’Europe, organisation intergouvernementale créée le 5 mai 1949 et désireuse de se démarquer de l’idéologie communiste en gestation à l’Est du continent. Cette convention est l’emblème de la nécessité vitale affirmée après-guerre, de protéger coûte que coûte les droits de la personne humaine contre toute ingérence en provenance des pouvoirs constitués de l’État. Entrée en vigueur le 3 septembre 1953, elle a été ratifiée en 1974 par la France. Au texte même de la convention s’ajoutent 16 protocoles auxquels les États peuvent ou non adhérer. Certains droits protégés par la CESDH sont intangibles ou indérogeables – le droit à la vie, l’interdiction de la torture, l’interdiction de l’esclavage et du travail forcé – tandis que d’autres sont susceptibles de faire l’objet de restrictions. Exemple : Le droit au respect de la vie privée et familiale. La CESDH prévoit non seulement un catalogue de droits, mais également un mécanisme de contrôle du respect de ces droits par la CEDH. B) Le droit de l’UE Le droit de l’UE se compose du droit originaire (1) et du droit dérivé (2). (1) Le droit originaire comprend essentiellement les traités européens, à savoir le traité sur l’Union européenne (TUE) et le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). (2) Quant au droit dérivé, il comprend les actes juridiques édictés par les institutions communautaires conformément aux habilitations fixées par le droit originaire. En vertu de l’article 288 du TFUE, pour exercer les compétences de l’Union, les institutions peuvent adopter : Des règlements Les règlements européens désignent des actes à portée générale, obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans tous les États membres. Ils se substituent ainsi aux législations et réglementations nationales dans les domaines où l’Union bénéficie d’une compétence exclusive. Exemple : le Parlement européen et le Conseil ont adopté le 27 avril 2016 un règlement relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données. Des directives Les directives européennes sont des actes à portée générale qui lient les États membres destinataires quant aux objectifs à atteindre, tout en les laissant libres quant à la forme et aux moyens à employer pour y parvenir. Elles nécessitent ainsi des mesures de transposition. Exemple : Le Parlement européen et le Conseil ont adopté le 25 octobre 2011 une directive relative aux droits des consommateurs. Des décisions Les décisions sont obligatoires dans tous leurs éléments. Lorsqu’elles désignent des destinataires, elles ne sont obligatoires que pour ceux-ci. Exemple : la Commission a pris le 27 août 2015 une décision sur la participation de l’UE à l’action de plusieurs organisations luttant contre le terrorisme. Des recommandations et des avis. Ils ne lient pas les États membres. Autrement dit, ils ne sont pas obligatoires. Exemple : Le Conseil a en 2015 recommandé aux autorités judiciaires des pays membres de l’UE d’améliorer leur usage de la visioconférence afin de renforcer la collaboration transfrontière entre les services judiciaires. Exemple : Le Comité des régions a publié en 2014 un avis sur le train de mesures « Air pur pour l’Europe ». III. L’incorporation du droit supranational en droit interne L’essor qualitatif et quantitatif du droit supranational pose nécessairement la question de son insertion dans le droit interne. Traditionnellement, il existe deux systèmes d’incorporation du droit supranational en droit interne : le système dualiste et le système moniste. Dans le système dualiste, « Les normes supranationales constituent un ordre juridique séparé de l’ordre national et la réception des normes supranationales impose donc une conversion de celles-ci en normes internes, selon les règles constitutionnelles propres à l’ordre juridique national » (Guillaume Drago, Contentieux constitutionnel français). La séparation stricte entre droit international et droit interne prévaut en Italie et au Royaume-Uni. En effet, en Italie, la transposition du droit international dans l’ordre juridique interne est assurée par la loi. Dans le système moniste, « les normes supranationales se superposent aux normes nationales, formant ainsi un ensemble unique qui ne nécessite pas de réception formelle ou de conversion de la norme supranationale en norme interne » (Guillaume Drago, Contentieux constitutionnel français). Cette doctrine trouve sa source dans l’arrêt Foster et Elam v. Neilson de 1829 de la Cour suprême des États- Unis En France, jusqu’en 1946, aucun choix n’avait été expressément fait dans les Constitutions françaises successives entre le système moniste et le système dualiste. Toutefois, le système retenu était en pratique celui d’une séparation étanche entre ordre interne et ordre international. En 1946, la France, soucieuse d’affirmer le respect des principes du droit international et d’en assurer l’effectivité en droit interne, a rompu avec cette approche en s’engageant dans la voie du monisme juridique. Cette rupture ressort très clairement de l’alinéa 14 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et de l’article 26 de cette constitution. Ce choix du monisme juridique a été confirmé par le constituant en 1958 (article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958). A)Les conditions d’applicabilité des normes internationales Le droit international est soumis à une certaine uploads/S4/ cours-optimise-jurislogic-8.pdf
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- Publié le Mai 29, 2021
- Catégorie Law / Droit
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