Sujet théorique Le juge administratif protecteur de l’ordre juridique national
Sujet théorique Le juge administratif protecteur de l’ordre juridique national Remarques : La dissertation appelle une définition précise des termes du sujet en particulier de la notion d’ordre juridique auquel est adjoint c’est important le qualificatif national. La conjugaison des termes « protection » et « national » permet de délimiter le sujet et de souligner son intérêt et ses enjeux. Elle suggère que le juge administratif est appelé à appliquer des normes élaborées à l’extérieur de l’ordre juridique, règles dont il lui faut vérifier l’applicabilité et dont la mise en œuvre peut faire échec à l’application des normes élaborées par les autorités nationales y compris législative et constitutionnelle. Une bonne compréhension du sujet conduira donc à orienter l’essentiel de développements sur les rapports entre les règles de droit international et l’ordre juridique national. A ce titre, il conviendra nécessairement de distinguer entre le droit international stricto sensu et le droit de l’Union européenne sans toutefois bâtir le plan du devoir autour de cette distinction sauf à faire perdre au sujet toute sa dynamique. Les développements portant sur l’ordre juridique national et le rôle du juge au service du principe de légalité seront réservés à l’introduction. Les copies ne comportant aucune référence au droit international doivent être considérées comme hors sujet à moins que les développements portent exclusivement sur le juge administratif et le principe de légalité. Ce qui reviendrait à traiter le sujet de l’examen blanc et avoir une vision par trop lacunaire du sujet. Une « bonne copie » ayant fait ce choix de délimitation du sujet ne peut prétendre avoir plus de 8 y compris si les connaissances sur les questions abordées sont bonnes. Les copies ayant opté pour une compréhension large du juge (protection de la légalité dans l’ordre interne et protection de l’ordre interne face au droit non national) ne peuvent prétendre à une note supérieure à 13 à condition d’avoir abordé même rapidement la plupart des développement attendus (conditions d’incorporation, invocabilité directe, distinction droit de l’Union européenne/ droit international, conflit avec la Constitution) Corrigé Toute règle de droit, y compris celles susceptibles d’être invoquées devant le juge administratif, est inséré dans un ordre juridique L’ordre juridique se définit comme un ensemble des règles ordonné par le principe de hiérarchie des normes et ayant vocation à s’appliquer sur le territoire d’un Etat aux autorités publiques et aux personnes privées. Historiquement, la constitution de l’ordre juridique est consubstantiel de la construction de l’Etat- nation : l’ensemble des règles juridiques découlant de la loi et de la Constitution, expressions hiérarchisées de la souveraineté nationale. Depuis sa création par la Constitution de l’an VIII, la protection du principe de légalité et plus largement de l’ordre juridique est une mission traditionnelle de la juridiction administrative, soucieuse d’assurer la subordination de l’administration à la loi. Afin de servir cet objectif , la jurisprudence administrative a créé de manière prétorienne un recours de nature objective : le recours pour excès de pouvoir dont l’arrêt Dame Lamotte de 1950 a fait un principe général du droit ouvrant la possibilité à tout administré de demander au juge administratif d’annuler les actes administratifs entachés d’illégalité. Dans le silence des textes, le Conseil d’Etat a également consacré la théorie des principes généraux du droit dans l’optique, à une époque où la Constitution n’avait qu’une force juridique relative, de soumettre l’administration au respect de règles supérieures pour l’essentiel tirés de la Déclaration de 1789 ou du Préambule de 1946. La diversification des sources du droit a confronté le juge administratif 1980 a un problème inédit : Avec le droit international, il se trouve confronté à des règles qui élaborées en dehors de son propre ordre juridique, sont l’expression de la volonté juridique d’un organe extérieur à l’Etat (autre Etat, organisation internationale). Si le juge administratif a fait application très tôt des traités internationaux à l’administration (CE 1952 Dame Kirkwood) et accepte de faire prévaloir l’ensemble des règles internationales y compris coutumière (CE 1997 Aquarone) son inclinaison première a été de s’ériger en gardien de l’ordre juridique national. La soumission du juge administratif à la loi l’a ainsi amené à limiter l’effectivité au principe de la hiérarchie des normes à l’égard des traités internationaux y compris issus de la Communauté européenne (CE 1968 Syndicat national des fabricants de semoule de France) ou encore à s’opposer à l’effet direct des directives européennes non transposée(CE 1978 Conh-Bendit). Il a ainsi été reproché au Conseil d’Etat avant 1989 ne faire preuve d’un « nationalisme ombrageux » Mais l’intensification de la coopération juridique internationale, l’adhésion de la France a des institutions internationales notamment européennes et plus particulièrement à l’Union européenne qui constitue un ordre juridique intégré à l’ordre national, la multiplication des traités et accords internationaux venant garantir les droits des individus dans leurs relations avec les Etats dont ils sont ressortissants ont profondément changé les données du problème en soulevant la question, réglé par la Constitution, des rapports entre l’ordre juridique national et les règles de droit international. Face au droit international, deux conceptions sont ainsi envisageables : la conception moniste qui voudrait que le droit international s’applique directement dans l’ordre juridique interne et une conception dualiste qui exige qu’un acte de droit interne une loi vienne reprendre le texte international pour permettre son application. La Constitution française en 1946 puis en 1958 a opté pour une approche nuancée : un monisme teinté de dualisme comme l’expriment les articles 54 et 55 de la Constitution bientôt complété par l’article 88 qui règle spécialement et de manière différente les rapports entre l’ordre juridique national et les Traités de l’Union européenne selon une logique d’intégration juridique propre à la construction européenne. Gardien d’un ordre juridique dont le Préambule de la Constitution rappelle depuis 1946 que « la République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international » la position du juge administratif est ainsi celle d’une ouverture toujours plus grande au droit international dont la violation est devenu un moyen régulièrement soulevé devant lui par des justiciables toujours plus nombreux. Ainsi depuis l’arrêt Nicolo de 1989 le Traité international prévaut devant le juge administratif sur les lois françaises même adoptées postérieurement et les directives européennes non transposés peuvent trouver à s’appliquer dans toutes sortes de litige (CE 2007 Madame Perreux) Conformément au monisme nuancé qui caractérise la Constitution française, le juge administratif joue un double de rôle dans la protection de l’ordre juridique interne face au développement du droit international. Ce rôle est d’abord technique l’amenant ainsi à vérifier au préalable dans quelle mesure la règle de droit international invoquée devant lui répond aux conditions d’incorporation et d’invocabilité nécessaire à son application à l’administration. Ce rôle est ensuite plus politique dès lors que contrairement aux principes du droit international, il fait prévaloir le respect de la Constitution sur toute autre considération. Si la position du juge administratif n’est pas dénuée pas d’ambigüité à l’égard du droit international. Elle est d’autre part ambivalente dès lors que la nature particulière du droit de l’Union européenne, prévue par la Constitution, a amené le juge à appliquer des solutions particulières tant à l’égard de l’invocabilité des textes européens qu’à l égard de la suprématie de la Constitution. I. Une protection technique Le fait que la règle de droit international est élaborée en dehors de son propre ordre juridique et soit l’expression de la volonté juridique d’un organe extérieur à l’Etat (autre Etat, organisation internationale) justifie qu’un certain nombre de préalables soit levé avant de pouvoir conclure à l’application de la règle de droit international au litige. Ces préalables d’ordre technique tiennent à la vérification des conditions d’incorporation de la règle de droit international en droit interne et du contenu de la règle internationale dès lors qu’elle peut ne comporter aucun effet juridique à l’égard du justiciable qui en sollicite l’application. Dans les deux cas, l’application du droit de l’Union européenne appelle des solutions particulières. A. La vérification des conditions d’incorporation de la règle de droit international. C’est au juge administratif d’assurer cette mission dès lors que les conditions d’incorporation soit fixées par le droit interne. L’application du droit de l’UE soulève toutefois des problèmes : le juge administratif étant appelé à en vérifier la bonne intégration en droit interne 1)La définition par le droit interne des conditions d’incorporation de la règle de droit international Les règles de droit international se positionnent sur deux espaces juridiques distinct (l’ordre international / l’ordre national) posant des problèmes d’articulation complexe qu’il revient au juge administratif de résoudre Or c’est à chaque ordre juridique national qu’il revient de définir à sa manière les conditions d’intégration en son sein de la règle internationale (ou au moins d’accepter les modalités de son intégration telle que fixée par la convention à laquelle l’Etat adhère). Ainsi l’entrée en vigueur d’un traité dans l’ordre interne résulte de sa publication au Journal officiel de la République française et non de la date prévue par le texte international (CE 7 juillet 2000 Fédération nationale des uploads/S4/ dissertation-corrige-mai-2019.pdf
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- Publié le Apv 19, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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