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Vous pouvez consulter notre catalogue général et l’annonce de nos prochaines parutions sur notre site : www.cherche-midi.com © le cherche midi, 2018 30, place d’Italie 75013 Paris Mis en pages par Soft Oece Dépôt légal : mars 2018 ISBN 978-2-7491-5806-8 « Cette oeuvre est protégée par le droit d’auteur et strictement réservée à l’usage privé du client. Toute reproduction ou difusion au proTt de tiers, à titre gratuit ou onéreux, de tout ou partie de cette oeuvre, est strictement interdite et constitue une contrefaçon prévue par les articles L 335-2 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle. L’éditeur se réserve le droit de poursuivre toute atteinte à ses droits de propriété intellectuelle devant les juridictions civiles ou pénales. » D AVERTISSEMENT ans tous les événements qui seront relatés ici, il n’y a pas un fait, pas une phrase qui aient en quoi que ce soit été inventés ou même déformés. Certains noms, et parfois les dates, ont été modi“és. Principalement ceux des entreprises dans lesquelles j’ai œuvré et des personnes avec lesquelles j’ai interagi. Les identi“er n’a aucune importance. Chaque fait décrit, chaque anecdote mentionnée ne sont pas propres à une entreprise en particulier, mais symptomatiques d’un système, d’une idéologie qui constituent aujourd’hui la norme. Toutes les entreprises sont touchées, certaines plus que d’autres. Les unes en parfaite connaissance de cause, les autres par ignorance, par instinct grégaire, par lâcheté ou par paresse. J PRÉFACE e travaille aux ressources humaines. C’est ce que laissent penser mon titre, l’intitulé de mon poste et ma place dans l’organigramme de l’entreprise. Ma réalité quotidienne est pourtant bien loin de l’image d’Épinal que véhiculent les ressources humaines elles-mêmes. J’aime mon métier qui consiste à aider l’entreprise à remplir ses fonctions grâce à ses salariés 1. Ce métier a beaucoup évolué, mais ces changements peuvent se résumer aisément : les objectifs ne sont plus atteints grâce aux salariés, mais aux dépens de ces derniers. Et les ressources humaines sont là pour veiller à ce qu’il ne reste plus une seule goutte de jus dans le citron avant de le jeter. Je ne suis pas un grand sentimental, les dégâts humains collatéraux de la “nanciarisation des entreprises et du management ne m’empêchent pas de dormir, sans doute car je crois encore à ce doux mensonge que m’avait dit un syndicaliste : « Toi, au moins, tu essaies de rendre l’ignoble moins ignoble. » Ma prise de conscience avait débuté avec le siècle, bien qu’initialement modeste le processus s’accéléra rapidement. J’avais rejoint WorldCompany. Mon travail n’était pas différent de ce que j’avais fait par le passé. Cependant, chez WorldCompany, je ne devais pas me contenter de raconter des salades (nos valeurs, blabla, méritocratie, blablabla, gestion des talents, employee engagement…), il fallait aussi que j’y croie. Comme ailleurs, il fallait licencier des salariés pour des raisons futiles ou pour améliorer le cheptel salarial (voir la vitality curve, p. 263), mais avec enthousiasme et, surtout, convaincu que cela était nécessaire à la bonne santé de l’entreprise. Comme précédemment, j’allais enfreindre le Code du travail, sauf qu’ici des avocats m’expliqueraient, plutôt que de me mettre en garde et d’évaluer avec moi les risques et les autres solutions, que l’entreprise était toujours dans son droit même quand elle perdait un procès. Manque de chance pour eux, le ver était dans le fruit : j’avais commencé à ré”échir. J’avais compris avant cela que je ne faisais plus des ressources humaines depuis longtemps, mais au moins avais-je l’impression que ce que je faisais était un moindre mal nécessaire à l’entreprise, que ma fonction avait une utilité. En réalité, pas du tout. Merci, WorldCompany. Mes expériences suivantes me permirent de constater que la majorité des entreprises se rangeaient dans l’une ou l’autre de deux catégories : celles qui étaient déjà gangrenées et celles qui allaient l’être. 1. Dans la novlangue d’entreprise, le terme de salarié est maintenant remplacé par d’autres plus dans l’air du temps de l’endauffe généralisée. Ainsi, dans cet ouvrage, une personne travaillant pour une entreprise, dans un lien de subordination à cette dernière, au travers d’un contrat de travail et en échange d’un salaire sera le plus souvent appelée « salarié », mais selon les situations il pourra également être nommé « futur ex-salarié », « futur chômeur », « déchet », « inutile », « parasite », « victime », « cible », « coût », « citron », « kleenex »… J’utiliserai beaucoup plus rarement les très en vogue : « talent », « membre d’équipage », « équipier », « best asset » et l’indémodable « collaborateur ». D INTRODUCTION ans 1984, de George Orwell, le ministère de la Paix s’occupe en fait de la guerre. Le ministère de la Vérité est le ministère de la propagande et du mensonge. Le ministère de l’Amour est chargé de la répression et de la torture. Le ministère de l’Abondance organise la famine. L’entreprise moderne est bien plus ef“cace que l’Eurasia 2 d’Orwell. La propagande, la répression et la disette ont été centralisées en une seule structure à laquelle, comme dans les États totalitaires du roman, il a été donné un nom qui inspire con“ance et dissimule ses “nalités : les ressources humaines. Qu’elles soient déclinées en départements, services ou fonctions, comment peut-on encore s’appeler ressources humaines quand la plupart des salariés ne comprennent pas votre rôle, vous identi“ent majoritairement à un service purement administratif, vous ignorent ou, pire, vous craignent ? Et sur ce dernier point, ils ont raison. Cette fonction est aujourd’hui devenue le bras armé des directions, des actionnaires et de leur politique de la terre brûlée. Cela serait anecdotique si les ressources humaines ne jouaient pas un rôle essentiel dans l’explosion des burn-out et des troubles psychosomatiques, le développement du mal-être au travail, le désengagement des salariés et le manque de ”exibilité de l’entreprise face aux nouvelles réalités sociologiques, technologiques et sociétales. La fonction ressources humaines est aujourd’hui l’exécutrice des basses œuvres, la fossoyeuse des salariés devenus inutiles et la conteuse qui habille ces pratiques pour les rendre plus acceptables. Elle les justi“e au nom de l’ef“cacité et de la loi du marché et, en“n, donne bonne conscience aux dirigeants, aux autorités et à certains salariés, qui ne sont pas tous que des victimes innocentes. En moins de trois décennies, les ressources humaines sont devenues l’antithèse de ce qu’elles devraient être et ne servent plus aujourd’hui qu’à promouvoir et supporter les initiatives visant l’accroissement des pro“ts au détriment des salariés et de la société. Les fonctions administratives mises à part, elles sont de plus en plus à la peine lorsqu’il s’agit de justi“er une contribution positive et constructive au bon fonctionnement et au développement de l’entreprise. Heureusement, il y a encore trois domaines dans lesquels les ressources humaines brillent : l’enfumage, le pipotage et le fossoyage. Enfumage car ce sont elles qui portent et répandent les « valeurs » de l’entreprise, qui travaillent à convaincre les salariés de la justesse, de la sagesse et de la légitimité de toutes les décisions prises par ses dirigeants. Pipotage car elles maîtrisent l’art de traiter les salariés et les instances représentatives du personnel comme des enfants un peu attardés et, surtout, irresponsables. Fossoyage car il faut bien s’occuper de « traiter » ceux qui sont devenus inaptes, que l’entreprise a brisés, qui ne plaisent plus ou dont les compétences ne servent plus ses objectifs. Dans la majorité des entreprises, les « missions » de la fonction ressources humaines sont rassemblées autour de quatre axes : attirer, lobotomiser, casser et jeter. Attirer plutôt que recruter, car la dé“ance des salariés envers l’entreprise est telle qu’ils hésitent à quitter un poste pour un autre. Ils rechignent à démissionner, à abandonner les privilèges liés à leur ancienneté et à prendre les risques inhérents à la période d’essai. L’expérience leur a souvent enseigné que l’herbe n’était pas plus verte ailleurs. En“n, comme toutes les ressources humaines se nourrissent des mêmes pseudo-théories vendues par les mêmes consultants, les salariés savent que leur environnement de travail, la manière dont ils seront évalués, les prétendues valeurs auxquelles on leur demandera d’adhérer seront très semblables à celles qu’ils connaissent dans leur poste actuel. Ils ont conscience que la réalité décrite lors du processus de recrutement a été enjolivée et que des déconvenues sont inévitables. Bref, changer d’entreprise, c’est chou vert et vert chou, les risques en plus. Lobotomiser, car la meilleure personne pour vous ”iquer (et ”iquer les autres), pour vous pousser à vous dépasser, à vous surinvestir, pour vous faire accepter de faire passer vos loisirs, votre famille et votre santé après le boulot, c’est vous. Pour cela, il aura fallu ancrer en vous quelques croyances qui relèvent bien plus du fantasme et de la propagande que de la réalité. •L’entreprise vous offrirait bien plus qu’un travail. Elle vous permettrait de vous réaliser, de participer à une œuvre plus grande que vous. Ainsi, ne laissez pas des concepts ridicules et petits-bourgeois, tels que famille, amis, loisirs, équilibre et santé, vous distraire du grand destin qui sera uploads/S4/ drh-la-machine-a-broyer.pdf

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  • Publié le Sep 19, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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