1 UNIVERSITE DE REIMS CHAMPAGNE ARDENNE FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCES POLITIQ
1 UNIVERSITE DE REIMS CHAMPAGNE ARDENNE FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCES POLITIQUES THESE POUR LE DOCTORAT EN SCIENCES JURIDIQUES DE DROIT PRIVE Sur LA NOTION DE NOVATION Présentée et soutenue publiquement Le 05 Septembre 2006 Par SENE Pape Demba Sous le Direction de Mr. Marc BILLIAU Professeur à l’Université de Paris XII Membres du jury Mr. Marc BILLAU : Professeur à l’Université de Paris XII Mr. Stéphane PIEDELIEVRE : Professeur à l’Université de Paris XII Mr. Jacques MOURY : Professeur à l’Université de Reims Mme Sandrine CLAVEL : Professeur à l’Université de VANNE Mme Anne DE WINCKELE BAZELA : Maître de conférence à Lille 2 2 « La mort et la naissance en un même lieu et un même temps, n’est-ce pas surprenant ? Un tel lieu où se transmute la vie, ne serait-il pas plus approprié de l’appeler le « POINT VIE » plutôt que le « point mort » ? » M.L. Dioptaz, « Sarbacana et perceptions trans-paradoxales » INTRODUCTION 1- « Inépuisable théorie des obligations ! Vieille comme le droit, elle a toujours la fraîcheur d’un système né d’hier. Parce que l’infinie diversité des situations qu’elle régit en réactive toujours l’acuité. Parce que l’évolution des idées qu’elle reflète en infléchit sans cesse les conceptions. Parce que le renouveau des figures qu’elle affronte en sollicite sans fin les schémas. Il arrive même que l’épreuve tourne en défi » 1 ; ce pourrait être le cas de la novation qui, pour n’être pas de l’inédit, n’en constitue pas moins une énigme piquante et durable. 2- Quoi de commun, en effet, entre l’extinction d’une obligation et la création d’une autre sinon d’être les parangons de la novation ? Cet accouplement baroque illustre à la fois la difficulté d’une définition de la notion et son omniprésence au contentieux. La novation est une notion aussi simple dans sa définition qu’elle apparaît d’autant plus compliquée dans ses applications ; elle est également une notion aussi couramment invoquée au contentieux qu’elle semble d’autant plus redoutée dans son observation. 1 DIDIER R. Martin, Du changement de contractant, D. 2001, n° 39, Chron. Doctr., p. 3144 3 3- Consacrée, au chapitre V du titre III du livre III du code civil qui traite de l'extinction des obligations, la novation est réglementée par les articles 1271 à 1281. Deux de ces articles, 1275 et 1276, se rapportent, cependant, à la délégation, mécanisme sensiblement distinct, mais qui, dans l'une de ses variantes, la délégation parfaite, comporte une novation. Les rédacteurs du code ont fait état dans ces articles, des différentes manières dont peut s'opérer la novation, de ses conditions et de ses effets. Cependant, ces dispositions ne donnent que quelques éléments d'une définition de la novation. De fait, sur la foi de textes obscurs, sa construction demeure essentiellement prétorienne. Mais l’on sait les inconvénients des constructions jurisprudentielles qui ont ainsi présenté des contours incertains et fuyants de la notion. 4- Il est d’ailleurs curieux de remarquer que cette novation, qui a acquis droit de cité et qui reste toujours une institution mystérieuse, mal définie, n’ait pas l’objet d’une étude d’ensemble à l’époque contemporaine 2. 2 On peut cependant citer la thèse de M.-A. VAN WINCKELE-BAZELA, La notion de novation, Lille 2001. Cette absence étonnante de monographies relatives à la novation contraste avec le grand nombre d’études doctrinales qui lui furent consacrées tout au long du 19ième siècle. De nombreuses thèses furent ainsi écrites : LOMPRE Alexandre, De la novation contractuelle, thèse Paris 1856 ; DUPLESSIS, Etudes sur la novation et la délégation en droit Romain et en droit français ancien et moderne thèse Paris, LGDJ 1869; Ch. LEROUX, De la novation en droit romain et droit français, thèse Paris, éd. Mourgues 1861 ; GIDE P, Etude sur la novation et le transfert de créance en droit romain, thèse Paris, Larose 1879 ; V. L. VERONREVILLE, Etude sur la novation en droit romain et en droit français, thèse Bordeaux 1873 ; CHANOIT M., De la novation en droit romain et en droit français, thèse Caen, éd. Valin 1880 ; G. D’AUVERVILLE, De la novation en droit romain et en droit français, thèse Lyon, 1882. Il ne faut pas aussi oublier les thèses écrites au début du 20ième siècle : TATOVICI, De l’évolution de la novation, thèse Paris 1908; NEGRE Pierre, Des conditions d’existence et de validité de la novation en droit romain, thèse Aix-en-provence 1925. 4 5- Peut-être faut-il voir là une conséquence de cette réputation, assurément exagérée, d’encombrement et de complexité que la novation s’est faite à travers le temps. MARTY, RAYNAUD et JESTAZ déclarent ainsi : « pratiquement la novation impossible gêne ceux qui souhaitent apurer le passé tandis que la novation obligatoire gêne ceux qui veulent la conserver. En toute hypothèse l’institution de la novation gêne tout le monde par l’incertitudes de ses limites et sans préjudice de la brutalité de ses effets » 3. 6- Toujours est-il qu’il résulte de cette absence de monographie une certaine méconnaissance de l’institution perceptible sur deux plans : D’abord, dans son domaine. En effet, la novation, par son polymorphisme est à même d’intervenir les domaines les plus dissemblables. Cette disparité du domaine de la novation, selon certains auteurs, aurait pour conséquence, non seulement une altération de son originalité, mais aussi une décadence de son utilité pratique : 7- Altération de son originalité car la novation, par les utilisations qu’on en fait, semble être un moule juridique susceptible d’application diverses : On peut d’abord considérer, lorsqu’elle se fait par changement d’une des parties, que la novation constitue soit un moyen de cession indirecte de l’obligation par changement d’un des sujets dans rapport 3 G. MARTY, P. RAYNAUD et Ph. JESTAZ, Les obligations, tome 2, Le régime, p. 380, n° 410. 5 juridique, soit une technique d'extinction dans les rapports complexes lorsqu’elle intègre le mécanisme de la délégation. Ensuite, la novation, lorsqu’elle s’effectue entre les mêmes parties, peut consister en une modification de l’obligation. Bref, comme le rappelle Mr. Philipe MALINVAUD 4 « …par ses multiples possibilités, la novation apparaît comme une sorte de « joker » juridique ». Or un joker 5 n’a aucune originalité, il est ce que les parties en font. 8- Inutilité de la notion car la novation, n’ayant pas de domaine propre, fait une concurrence inutile à des mécanismes prétendus plus adaptés. En effet, dans une matière qui laisse aujourd’hui une grande place à une prétendue cessibilité de l’obligation et à une possible modification 6 de celle-ci, sans subir les conséquences drastiques qu’aurait entraîné une novation, cette dernière fait figure d’institution désuète. Autrement dit, la novation, étant originalement perçue comme un mécanisme qui permet à des parties contractantes d’obtenir des résultats très voisins de ceux d’un transfert actif ou passif de l’obligation ou d’une modification de celle-ci, sa mise en œuvre se heurte à leur existence de mécanismes plus adaptés : elle serait ainsi 4 Philipe MALINVAUD, Droit des Obligations « Les mécanismes juridiques des relations économiques », 6éme éd. LITEC , p. 378, n° 304. 5 Voir Dictionnaire, Le Robert, Paris 1995 : « Carte à jouer à laquelle on est libre d’attribuer une valeur ». 6 ALAIN GHOZI, « La modification de l’obligation par la volonté des parties », thèse Paris II , LGDJ 1980, préf. Denis TALLON. 6 évincée par la cession de créance, la modification, le mutuus dissensus et la dation en paiement 7. 9- Dès lors l’utilité pratique et originale de la novation apparaît comme vaine. Cette prétendue régression de l’utilité et de l’originalité de la novation conduira d’ailleurs la doctrine contemporaine à parler d’une crise de la novation 8 et même à préconiser sa disparition 9 . La simple référence au mot ‘novation’ suscite chez les auteurs contemporains prudence et scepticisme ; la seule unanimité qui puisse se construire autour de la notion a trait à la rigueur de son effet extinctif et à sa désuétude. 7 R. LIBCHABER, « Les conséquences de la nullité de la convention novatoire lorsque celle-ci est imputable au créancier », D. 1996, somm. p. 334, n° 3 : «La novation est, on le sait, une cause d’extinction et de création d’obligations qui fait l’objet d’un statut enviable : le code civil l’a réglementée en elle-même, les tribunaux continuent de lui accorder une attention constante, et les parties de s’en servir. Pourtant l’arrêt évoqué montre bien que la novation ne mérite aucun excès d’honneur : derrière l’institution transparaît sans cesse le contrat de substitution d’obligation, et celle-là n’apporte rien qui ne soit réductible à celui-ci. On disait parfois, hier, que la novation n’avait pas de titre véritable à l’existence : par changement d’objet elle n’était guère qu’une dation en paiement aménagée, et par changement de débiteur une cession de créance. La novation survit manifestement à ces interrogations de fond ; mais on constate qu’elles demeurent aujourd’hui aussi fondées qu’hier, et qu’il arrive que la réglementation spéciale d’une convention nommée n’emporte aucun supplément par rapport à ce qui résulterait de la seule théorie générale des obligations ». 8 COLIN et CAPITANT, « Cours élémentaires de uploads/S4/ ged-00000298.pdf
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- Publié le Oct 04, 2022
- Catégorie Law / Droit
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