JEANNE D'ARC TOME I 5ème édition 1879 Henri Wallon JEANNE D'ARC PAR H. WALLON S
JEANNE D'ARC TOME I 5ème édition 1879 Henri Wallon JEANNE D'ARC PAR H. WALLON Secrétaire perpétuel de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres Doyen de la Faculté des lettres de Paris OUVRAGE QUI A OBTENU DE L'ACADÉMIE FRANÇAISE LE GRAND PRIX GOBERT CINQUIÈME ÉDITION TOME PREMIER PARIS LIBRAIRIE HACHETTE ET Cie 79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79 1 8 7 9 Tous droits réservés. AVERTISSEMENT DE LA DEUXIÈME ÉDITION. L'Académie française en décernant à cet ouvrage, si simple qu'en soit la forme, le grand prix Gobert, m'a imposé l'obligation de le revoir soigneusement avant de le représenter devant le public. Elle-même m'avait rendu ce devoir facile en mêlant à ses éloges des critiques dont j'ai surtout fait mon pro- fit : on s'en apercevra, je l'espère, aux remanie- ments que le livre a subis en plusieurs points. J'ai ajouté au récit, j'ai retranché du procès, sans d'ailleurs en changer l'ordonnance. Il y aurait péril à confondre en un même exposé les témoignages du procès de condamnation et du procès de réha- bilitation sur les interrogatoires de Jeanne d'Arc; mais il y a nécessité de rétablir, en plus d'un lieu, devant le procès-verbal des premiers juges, qui JEANNE D'ARC. I—-1 2 AVERTISSEMENT DE LA DEUXIÈME ÉDITION. donne la trame du récit, les attestations qui peu- vent en faire apprécier la nature. Il y aurait incon- vénient à se trop mêler par la discussion au débat; mais il est bon d'en éclairer la marche par quel- ques indications rapides, et il n'est pas superflu d'en signaler l'esprit en usant discrètement de ce droit de juger qui est la sanction de la loi morale dans l'histoire. Tout ce qui, hors de là, pouvait sembler utile à l'éclaircissement ou du récit ou du procès a été rejeté en note ou en appendice. PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION. La vie de Jeanne d'Arc est un des épisodes les plus émouvants de nos annales : c'est comme une légende au milieu de l'histoire; c'est un miracle placé au seuil des temps modernes comme un défi à ceux qui veulent nier le merveilleux. Jamais matière ne parut plus digne de la haute poésie : elle réunit en soi les deux conditions de l'épopée, sujet national, action surnaturelle. Mais jamais sujet ne tenta plus malheureusement les poëtes. La poésie vit de fictions, et la figure de Jeanne ne comporte aucune parure étrangère. Sa grandeur se suffit à elle-même; elle est plus belle dans sa simplicité. A ce titre rien ne devait attirer davan- tage, et mieux récompenser le zèle des historiens; et la récente publication de M. J. Quicherat, qui réunit à l'édition des deux procès les fragments 4 PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION. des chroniqueurs et les actes de toute sorte relatifs à la Pucelle, devait donner une impulsion nouvelle à ces études. J'y ai cédé comme plusieurs autres; et peut-être est-il tard maintenant pour offrir au public le résultat de ce travail suspendu pendant quelque temps par d'autres travaux : la grandeur du sujet n'est pas à elle seule une excuse, ni les facilités offertes aux recherches une recommanda- tion pour une nouvelle histoire. Cependant, j'ai pensé qu'après tant de récits qui s'autorisent de noms célèbres, la vie de Jeanne d'Arc pouvait en- core être racontée. Ce n'est pas seulement parce que les récits dont je parle, étant pour la plupart des pages détachées d'une histoire générale, ont dû se réduire aux proportions du livre d'où ils sont tirés : replacés en leur lieu, ils pourraient racheter cet inconvénient par l'avantage de mieux paraître dans la suite de l'histoire. S'il m'a semblé qu'on pouvait tenter quelque chose encore, c'est clans l'usage et dans l'appréciation des documents où doivent puiser toutes les histoires de la Pucelle. On sait combien ils sont nombreux. Un fait si plein d'éclat, à une époque déjà féconde en chro- niques et en écrits de toute sorte, a agi sur tous les esprits et laissé sa trace dans tous les écrivains du temps; et les deux procès qui ont poursuivi tour à tour par tant d'interrogatoires et d'enquêtes PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION. 5 la condamnation de Jeanne d'Arc et sa réhabilita- tion, ont recueilli une masse de témoignages qui, sans cette cause toute providentielle, eussent été perdus pour l'histoire. Or, il y a un double écueil parmi tant de richesses : c'est tout à la fois de trop confondre et de trop distinguer. Le plus souvent, on a trop confondu. L'histoire a paru si merveilleuse en elle-même, qu'on n'a pas vu grand inconvénient à y joindre la légende. Tout se mêle alors sans que rien laisse voir ce qui est de l'une ou de l'autre. Il semble que l'exposition n'y perde rien ; mais en proposant du même ton au lecteur les choses qui dérivent des traditions les moins autorisées et celles qui s'appuient des témoignages les plus forts, on l'amène nécessaire- ment, même dans les livres les plus éloignés de l'esprit de système, à les recevoir ou à les rejeter de la même sorte. Et pourtant, quand on les juge- rait au fond de même nature, encore serait-il bon d'en signaler et d'en discuter l'origine, afin que chacun pût voir ce qu'il en doit prendre ou laisser. D'autres fois, au contraire, on établit plus de distinction qu'il ne faut. Les deux procès ont un caractère et un esprit bien opposés; mais, peut-on dire qu'ils nous font de Jeanne d'Arc deux portraits différents? et M. J. Quicherat, qui comme éditeur 6 PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION. de tous les deux, les pouvait voir du même œil l'un et l'autre, a-t-il raison de juger ainsi le se- cond, dans ses Aperçus nouveaux : « Le procès de réhabilitation vint ensuite donner une tournure de commande aux souvenirs, qu'il eut au moins le mérite de fixer : il est la source de tout ce qu'ont écrit les chroniqueurs favorables à la Pucelle; il a fourni les traits de cette froide image qui a trop longtemps défrayé l'histoire, image d'une chaste fille venue pour rendre cœur à son roi, d'abord prise en défiance, puis écoutée et suivie ; malheu- reuse de sa réussite, puisque la reconnaissance du monarque, en la retenant plus qu'il n'aurait fallu, la précipita vers une funeste fin1? » S'il fallait, de toute nécessité, choisir entre les deux documents, mon choix ne serait pas douteux : je préférerais le premier au second ; et en cela je ne croirais pas nuire à Jeanne. Dans le second procès nous voyons un portrait de la Pucelle, tracé par ceux qui ont conversé avec elle à toutes les époques de sa vie ; dans le premier nous la voyons elle-même, et elle est assez grande pour se mon- trer imposante encore au milieu des retranche- ments et des altérations que sa parole a pu subir. Mais pourtant on ne peut pas tout dire sur soi- 1. Aperçus nouveaux sur l'histoire de Jeanne d'Arc, p. 156 PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION. 7 même, et les juges ont supprimé les témoins. Le premier procès a donc des lacunes; c'est avec le second qu'il les faut remplir. Le second procès d'ailleurs, autant qu'il l'a pu faire, a puisé, s'il est permis de le dire, aux sources du premier. Il en a appelé non pas les témoins, mais les acteurs, les hommes les plus intéressés à le défendre: Jean Beaupère, le second de Pierre Cauchon ; Thomas de Courcelles, qui mit le procès- verbal en latin; les greffiers, l'huissier, et presque tous les assesseurs encore vivants ; et quand bien même les autres dépositions recueillies pourraient être regardées comme produites au nom de l'accu- sée, elles ne feraient encore que rendre au premier procès un élément qu'on ne peut, sans injustice, retrancher de la cause. Leur appréciation ne res- semblera pas à celle des juges; mais apprécieront- ils moins justement? Et Jeanne, dans leurs témoi- gnages, sera-t-elle autre qu'on ne la voit quand elle se montre elle-même dans son procès? Sont-ce les dépositions de Dunois, de Louis de Contes et du duc d'Alençon qui ont subi cette « tournure de commande » et « fourni les traits de cette froide image » des histoires postérieures? Où trouve-t-on Jeanne plus vive, plus pleine de vigueur et d'en- train, soit que, arrivant devant Orléans, et s'en voyant séparée par la Loire, elle interpelle rude- 8 PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION. ment Dunois sur le détour que la timidité des chefs a fait prendre, en la trompant, au convoi qu'elle amène; soit que se réveillant à la nouvelle de l'attaque de Saint-Loup, elle gourmande son page: « Ah! sanglant garçon, vous ne me disiez pas que le sang de France fût répandu! » soit qu'à Jargeau elle entraîne aux murailles, criant au duc d'Alençon qui veut attendre: «Ah! gentil duc, as- tu peur? » Est-elle moins ferme et moins prompte à la réplique dans le témoignage de Seguin, un des examinateurs de Poitiers, que dans le procès-ver- bal des juges de Rouen?... Mais il nous faudrait reprendre dans cette pré- face les traits les plus uploads/S4/ henri-wallon-jeanne-d-x27-arc-t1.pdf
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Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jul 21, 2022
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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