Abdallah KHIAL Docteur d’Etat en droit Conseiller juridique L’arbitrage en droi
Abdallah KHIAL Docteur d’Etat en droit Conseiller juridique L’arbitrage en droit marocain L’arbitrage est un mode de règlement des litiges consistant à recourir à une ou plusieurs personnes privées ( arbitres) choisies par les parties pour obtenir une décision impérative, en dehors des juridictions étatiques. La caractéristique fondamentale de l’arbitrage réside dans la soustraction aux tribunaux étatiques des litiges qui relèvent normalement de leur compétence. L’importance de l’arbitrage est indéniable eu égard aux avantages qu’il procure aux partenaires, à savoir célérité de la procédure, confidentialité et maîtrise des coûts. Ce mode alternatif de règlement des litiges a pour objectif de préparer un environnement favorable à l’investissement. C’est un moyen pour avoir la confiance de l’investisseur étranger et national, c’est une assurance supplémentaire pour leur patrimoine. C’est dans ce cadre que la loi n°08-05 abrogeant et remplaçant le chapitre VIII du Code de procédure Civile a été promulguée par le dahir n° 1-07-169 du 30 novembre 2007 et publiée au bulletin Officiel n° 5584 du Jeudi 6 Décembre 2007. L’apport de la loi susvisée qui s’inspire de la loi type élaborée par la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International (CNUDCI) concerne particulièrement, l’adaptation de la procédure d’arbitrage à l’évolution de l’organisation judiciaire du Maroc et le développement des procédures et organes d’arbitrage en adéquation avec les besoins nouveaux des opérateurs économiques confrontés à la lenteur des procédures judiciaires. La loi a accordé un grand intérêt à la consolidation des droits des parties dans les procédures arbitrales en prévoyant des sanctions en cas de violation des droits de la défense, en permettant aux parties de récuser les arbitres, en obligeant lesdits arbitres à motiver leurs décisions et en les astreignant au secret des délibérations. La loi n°08-05 a réorganisé l’arbitrage interne (I), mis en en place un dispositif régissant pour la première fois l’arbitrage international (II) tout conférant à la médiation une place particulière comme mode alternatif de résolution des conflits(III). 2 I- L’arbitrage interne : La loi n° 08.05 précitée a introduit de nouvelles dispositions relatives à l’organisation de l’arbitrage interne notamment en ce qui concerne la clause d’arbitrage, le tribunal arbitral et la sentence arbitrale. A- l’adaptation de la procédure d’arbitrage à l’évolution de l’organisation judiciaire a) Définitions. La loi distingue : - la clause d’arbitrage qui est l’engagement des parties de soumettre à la résolution par l’arbitrage des litiges qui pourraient naître ultérieurement. La clause d’arbitrage n’est valable qu’entre commerçants. - du compromis d’arbitrage qui est la convention par laquelle les parties d’un litige déjà né s’accordent à soumettre celui-ci à l’arbitrage. La loi a consacré le principe de l’autonomie de la clause d’arbitrage par rapport aux autres clauses du contrat. A cet effet, l’article 308 de la loi dispose que « la clause d’arbitrage est réputée être une convention indépendante des autres clauses du contrat. La nullité, la résiliation ou la cessation du contrat n’entraine aucun effet sur la clause d’arbitrage comprise avec ledit contrat lorsque celle-ci est valable en soi ». L’article 313 de la loi précise que la convention d’arbitrage doit toujours être établie par écrit, soit par acte authentique ou sous seing-privé, soit par procès-verbal dressé devant le tribunal arbitral choisi. L’alinéa 2 de l’article 313 de la loi donne une indication sur les modalités de l’établissement de la convention d’arbitrage, qui peut « être consignée dans un document signé par les parties ou dans un échange de lettres, de communications, télex, de télégrammes ou de tout autre moyen de télécommunication considéré comme convention et qui en atteste l'existence, ou encore dans l'échange de conclusions en demande ou de conclusions en défense, dans lesquelles l'existence d'une telle convention est alléguée par une partie et n'est pas contestée par l'autre» La souplesse de ces dispositions relatives à l’établissement de la preuve de la convention d’arbitrage a mis fin la rigidité des dispositions de l’ancien article 309 (alinéa 2) du code de procédure civile de 1974 qui disposait que « les parties peuvent, lorsque le contrat concerne un acte de commerce, désigner à l’avance dans la convention même, le ou les arbitres. Dans ce cas, la clause doit être écrite à la main et spécialement approuvée par les parties, à peine de nullité ». b) Le champ d’application de l’arbitrage: La loi a élargi le champ d’application de l’arbitrage à toutes les personnes qui ont la capacité civile de souscrire un compromis d’arbitrage sur les droits dont elles ont la libre disposition. Toutefois, les droits personnels qui ne font pas l’objet de commerce sont exclus de l’arbitrage. Les litiges relatifs aux actes unilatéraux de l’Etat, des collectivités locales ou autres organismes dotés de prérogatives de puissance publique ne peuvent faire l’objet d’arbitrage. Toutefois, les contestations pécuniaires qui en résultent peuvent faire l’objet d’un compromis d’arbitrage à l’exception de celles concernant l’application d’une loi fiscale. Par ailleurs, les litiges relatifs aux contrats conclus par l’Etat ou les collectivités locales peuvent faire l’objet d’une convention d’arbitrage dans le respect des dispositions relatives au contrôle ou à la tutelle. 3 c) le tribunal arbitral : La loi distingue entre l’arbitrage ad hoc ou institutionnel. Lorsque l’arbitrage est ad hoc, l’article 319 de la loi précise que le tribunal arbitral se chargera de l'organiser en fixant la procédure à suivre, sauf si les parties en conviennent autrement ou choisissent un règlement d'arbitrage déterminé. En revanche, lorsque l’arbitrage est porté devant une institution d'arbitrage, celle-ci se chargera de l'organiser et d'en assurer le bon déroulement conformément à son règlement. En ce qui concerne les conditions requises pour exercer la profession d’arbitre, l’article 320 de la loi apporte le changement suivant : « La mission d'arbitre ne peut être confiée qu'à une personne physique en pleine capacité et n'ayant pas fait l'objet d'une condamnation devenue définitive pour des faits contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs ou le privant de la capacité d'exercer le commerce ou de l'un de ses droits civils ». Toutefois, la loi conditionne l’exercice de la profession d’arbitre à une declaration auprès du procureur général près la cour d’appel dans le ressort de laquelle se trouve le siege social de la personne morale (article 321de la loi). L’alinéa 2 de l’article 321 de la loi dispose « qu’après examen de leur situation, le procureur général délivre un récépissé de la déclaration et inscrit les intéressés sur une liste des arbitres près la cour d'appel concernée ». Ces dispositions ont suscité de nombreuses critiques de la part des professionnels de l’arbitrage qui se sont interrogés sur la portée d’une telle déclaration et sur les conséquences juridiques d’une sentence arbitrale prononcée par un arbitre non inscrit sur la liste dressée par le procureur général de la cour d’appel concernée. d) La procédure d’exécution des sentences arbitrales : L’ordonnance d’exequatur (décision par laquelle un tribunal étatique donne force exécutoire à une décision arbitrale) n’est plus prononcée par le tribunal de première instance, mais par le tribunal de commerce dans le ressort duquel la sentence a été rendue, ou s’il a été compromis sur l’appel d’un jugement par la cour d’appel. Pour les litiges dans lesquels l’Etat est partie, c’est le tribunal administratif du lieu d’exécution de la convention qui est compétent en matière d’exequatur. En revanche, lorsque la sentence concerne l’ensemble du territoire c’est le tribunal administratif de Rabat qui est compétent. B –Développement des conditions et modalités de l’arbitrage : Tout en reprenant certaines dispositions en vigueur sur l’arbitrage, la loi susmentionnée précise et développe les mesures permettant de combler les insuffisances inhérentes à ce mode de règlement. Par ailleurs, pour encourager le recours à l’arbitrage, la loi a ouvert la possibilité aux parties de compromettre sur un litige déjà soumis à une juridiction de l’Etat. La loi précise également les modalités de choix des arbitres par les parties et les conditions de leur récusation ou révocation, ou bien leur désignation par le juge en cas de désaccord des parties. Elle a doté les arbitres de prérogatives importantes notamment l’initiative de statuer sur la validité ou les limites de leur compétence et la possibilité de prononcer des mesures provisoires ou conservatoires dans les limites de leur mission. De même, la loi fixe la forme et le contenu de la sentence arbitrale, détermine ses effets vis-à-vis des parties et des tiers et précise les conditions d’une possibilité de recours en annulation contre la sentence arbitrale. Elle détermine également la forme de l’ordonnance d’exequatur. 4 II- L’arbitrage international : Jusqu’à la promulgation de la loi °08-05 précitée, l’arbitrage international ne disposait pas de législation spécifique à part les conventions internationales en la matière ratifiées par le Royaume du Maroc. Il y a lieu de préciser que le Royaume du Maroc fait partie des pays ayant ratifié la convention de New York pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales du 10 juin 1958 et ce par dahir du 12 février 1959. Le Maroc a également signé le 11 octobre 1965 (décret royal du 31 octobre 1966) la Convention de Washington du 18 mars 1965 instituant le Centre uploads/S4/ l-x27-arbitrage-en-droit-marocain.pdf
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- Publié le Sep 18, 2021
- Catégorie Law / Droit
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