Revue juridique de l'Ouest Du nouveau en matière d'arbitrage interne au Liban :
Revue juridique de l'Ouest Du nouveau en matière d'arbitrage interne au Liban : commentaire de la loi du 29 juillet 2002 Mme Fabienne Quilleré-Majzoub Citer ce document / Cite this document : Quilleré-Majzoub Fabienne. Du nouveau en matière d'arbitrage interne au Liban : commentaire de la loi du 29 juillet 2002. In: Revue juridique de l'Ouest, 2003-1. pp. 7-41; doi : 10.3406/juro.2003.2717 http://www.persee.fr/doc/juro_0990-1027_2003_num_16_1_2717 Document généré le 13/06/2016 DOCTRINE DU NOUVEAU EN MATIERE D'ARBITRAGE INTERNE AU LIBAN : COMMENTAIRE DE LA LOI DU 29 JUILLET 2002 par Fabienne QUILLERÉ-MAJZOUB Docteur en droit public, Professeur de droit des Universités francophones du Liban INTRODUCTION Le droit libanais de l'arbitrage vient de fêter ses 19 ans par une nouvelle loi portant réforme de certaines dispositions et articles du nouveau Code de Procédure Civile (NCPC) libanais. La loi n°440 du 29 juillet 20021 s'inscrit dans une évolution continue depuis 19832, date à laquelle le législateur libanais a remanié l'ancien Code de Procédure Civile (ACPC) de 19333 et a adopté une nouvelle réglementation de l'arbitrage. Depuis cette date, cette réglementation a connu trois modifications : le Décret-loi n° 20 du 23 mars 19854, la loi n° 529 du 20 juin 19965 et la loi n° 440 du 29 juillet 20026. Cette dernière modification vient réformer certaines dispositions et articles du NCPC, à savoir les articles 77, 762, 770, 789, 795, 804 et 821 du NCPC. Elle s'inscrit dans un contexte particulier et tente d'apporter des réponses à des problèmes qui ont vu le jour ces dernières années. Ses motifs, s'ils ne sont 1 - Publiée au J.O.R.L. n° 43 en date du 1er août 2002, pp. 5183-5184. 2 - Décret-loi n° 90 du 16 septembre 1983. Voir les traductions françaises du Nouveau Code de Procédure Civile de 1983 in Abdul Hamid EL-AHDAB, L'arbitrage dans les pays Arabes, Economica, Paris, 1988, pp. 1133-1143, et Rev. arb., 1993, pp. 750-761. 3 - Voir la traduction française de l'Ancien Code de Procédure Civile (ACPC) libanais, in les Éditions Librairies Antoine, Beyrouth, 1966. 4 - Ce décret a, entre autres, ajouté l'alinéa 2 à l'article 795 du NCPC, a modifié l'ai. 1 de l'article 798, a rajouté un dernier alinéa à l'article 804 et a remplacé l'ai. 2 de l'article 808 par un nouvel alinéa. 5 - Cette loi a modifié, entre autres, le dernier alinéa de l'article 804 du NCPC. 6 - Le texte de cette nouvelle loi est placé en Annexe du présent article. DOCTRINE pas mentionnés dans la loi elle-même, sont cependant connus et ont fait l'objet d'une énonciation partielle7 dans l'avant-projet de loi8 et peuvent être regroupés en trois objectifs majeurs. Tout d'abord, il s'agit pour le législateur d'établir la compétence ratione personnae de l'Etat et des personnes morales de droit public à recourir à l'arbitrage interne. Dans cet établissement non équivoque, il faut voir une volonté implicite d'écarter définitivement l'application du principe d'interdiction de recours à l'arbitrage en matière administrative reconnue et appliquée dans la jurisprudence du Conseil d'État libanais (CEL)9. Si la volonté de la loi n° 440 d'écarter cette jurisprudence est établie10, allant plus loin encore, cette volonté implicite vise à effacer toutes les conséquences néfastes de cette jurisprudence, et tout particulièrement des deux arrêts du 17 juillet 2001 du CEL11. Aussi, les modifications apportées visent à écarter la compétence présente et à venir de la juridiction administrative libanaise sur le contentieux des contrats administratifs prévoyant le recours à l'arbitrage. Ensuite, il s'agit de moderniser et d'uniformiser les règles régissant l'arbitrage interne et incidemment l'arbitrage international. Cet objectif fait ainsi intervenir des modifications relatives à la procédure et en particulier aux voies de recours ouvertes contre les sentences arbitrales. 7 - Les motivations avouées ne concernent que les articles 77, 762, 770 et 804 du NCPC. 8 - Voir La revue libanaise de l'arbitrage arabe et international, 2001, n° 20, pp. 58-59. 9 - Voir pour l'arbitrage interne : CEL, arrêt État - Ministère des finances contre Société Medreco, n° 23 du 1er février 1988, in la Revue de la juridiction administrative au Liban, n° 5, 1990-1991, pp. 37-40 ; et pour l'arbitrage international : CEL, arrêt n° 639/2000-2001 du 17 juillet 2001, État contre Compagnie F.T.M.L. (plus connue sous le nom de Cellis), non publié, et CEL, arrêt n° 638/2000-2001 du 17 juillet 2001, État contre Compagnie Libancell s.a.l, non publié. 10 - Voir en ce sens Ibrahim Najjar, « Avant-Propos au N° 23 », in La Revue libanaise de l'Arbitrage, p. 3, §2. 1 1 - Voir en ce sens Abdel Hamid EL-AHDAB, « Le projet libanais relatif aux deux contrats de téléphonie mobile : 1 —La modification de la loi sur l 'arbitrage après l 'annulation par le Conseil d'État de la clause compromissoire » {en arabe), in Al-Hayat (quotidien arabe paraissant à Londres) du 16 novembre 2002, p. 13 et « Le projet libanais relatif aux deux contrats de téléphonie mobile : 2 - Garanties pour les investisseurs et réforme vers une loi moderne de l'arbitrage » {en arabe), in Al-Hayat du 17 novembre 2002, p. 13. Voir également du même auteur, « The Lebanese legislator amends the arbitration law » {en arabe), in Arab Arbitration Journal (à paraître dans le prochain numéro). Me Abdel Hamid El-Ahdab est le Secrétaire général du Conseil de l'arbitrage international à Paris et Secrétaire général-adjoint de l'Union arabe de l'arbitrage international sis au Caire. Voir également en ce sens Ibrahim NAJJAR, Propos recueillis dans le quotidien libanais As-Safir en date du 15 août 2002 {en arabe), § 1 . DOCTRINE Enfin et surtout, il s'agit d'encourager les investissements. En fait, tous les motifs de la loi n° 440 ont pour but ultime de donner - voire de redonner - confiance dans la possibilité de recourir à l'arbitrage pour l'État et les personnes morales de droit public. Cette confiance est essentielle dans la phase de reconstruction que connaît actuellement le pays des cèdres. La nouvelle mouture du NCPC a donc pour objectif premier d'encourager les investissements12 en clarifiant l'état actuel du droit, et en particulier du NCPC, concernant la validité des clauses compromissoires et autres compromis passés par l'État et ses démembrements. Et pour ce faire, les modifications apportées par la loi n°440 ont pour but d'encourager l'arbitrage interne au Liban13. I - DE L' ARBITRABILITE DES LITIGES Les modifications apportées aux articles 77 et 762 du NCPC sont destinées à mettre fin aux interprétations divergentes des dispositions du NCPC concernant l'étendue du droit de l'État et des personnes morales de droit public de recourir à l'arbitrage interne. Ainsi, le nouvel article 762 du NCPC affirme la compétence ratione personae des personnes de droit public à recourir à l'arbitrage interne (A), alors que le nouvel article 77 du NCPC intervient pour reconnaître la compétence ratione materiae de ces mêmes personnes à recourir à l'arbitrage dans les contrats de concession (B). A - L'affirmation du droit de recours à l'arbitrage interne pour l'État et ses démembrements Fortement inspiré par la législation française en la matière, le législateur libanais avait repris la distinction faite entre l'arbitrage interne et l'arbitrage international. L'article 762 du NCPC étant un article relatif à l'arbitrabilité des litiges inclus dans les dispositions relatives à l'arbitrage interne, ses nouvelles dispositions interviennent exclusivement sur l'arbitrabilité interne des litiges14. 12 - Voir Ibrahim NAJJAR, op. cit, As-Safir, § 2 ; et Abdel Hamid El-Ahdab, Propos recueillis dans As- Safir en date du 15 août 2002 (en arabe), § 2. 13 - Sur le choix de l'arbitrage interne comme élément favorisant l'investissement, voir nos remarques infra, Conclusion, paragraphes sur notes (84) et (85). 14 - Par ailleurs, c'est l'article 809 du NCPC qui fixe l'arbitrabilité internationale des litiges. 10 DOCTRINE L'article 762 du NCPC mentionnait expressément qu'il revenait aux contractants dans les contrats commerciaux et civils d'insérer une clause compromissoire relative aux litiges susceptibles de transaction. En omettant d'inclure explicitement dans cette liste exhaustive les contrats administratifs, l'article 762 excluait implicitement la possibilité de recourir à l'arbitrage interne lorsque des litiges portaient sur de tels contrats. Cette lecture était confirmée par la définition des litiges susceptibles de transaction telle qu'elle ressort du Code des Obligations et des Contrats (COC) au Liban15. Dans sa volonté de mettre un terme à cette interdiction, le législateur libanais a fait preuve d'originalité puisqu'il définit cette arbitrabilité en référence aux deux éléments qui la composent, à savoir l' arbitrabilité objective et l' arbitrabilité subjective. Tout d'abord, l'alinéa 1 de l'article 762 reprend la même définition de l' arbitrabilité objective, c'est-à-dire les matières qui peuvent faire l'objet d'un arbitrage. Il s'agit bien sûr des contrats civils et commerciaux. De façon plus générale encore, les matières qui peuvent être soumises à l'arbitrage sont toujours celles qui sont soumises à transaction. Ensuite, l'alinéa 2 de l'article 762 dans sa nouvelle version définit P arbitrabilité subjective, c'est-à-dire les personnes aptes à recourir à l'arbitrage. La nouveauté est ici la reconnaissance explicite et sans équivoque de la capacité de l'État et des personnes morales de droit public à recourir à l'arbitrage interne, « quelque soit la uploads/S4/ l-x27-arbitrage-libanais 1 .pdf
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- Publié le Sep 06, 2022
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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