Groupe ISP – Droit pénal LA PRESOMPTION D’INNOCENCE L’affirmation que tout homm
Groupe ISP – Droit pénal LA PRESOMPTION D’INNOCENCE L’affirmation que tout homme est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été reconnue par un jugement irrévocable a valeur de droit fondamental. Ainsi énoncée, la présomption d’innocence est d’abord une règle de preuve selon laquelle il appartient aux parties poursuivantes de prouver la culpabilité de la personne poursuivie. Mais la présomption d’innocence est aussi une règle de fond, l’expression d’un véritable droit subjectif pour toute personne, qui s’impose au législateur, aux autorités publiques, comme au juge. Né à l’occasion des luttes menées à l’encontre des procédures répressives de l’ancien droit, c’est par les révolutionnaires français que fut consacré le principe de la présomption d’innocence. Proclamé à l’art. 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, le principe fut ensuite repris par le pacte international relatif aux droits civils et politiques (art. 14§2) et par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales dans son art. 6§2. Dans sa décision du 19 et 20 janvier 1981 relative à la loi dite « Sécurité et Liberté » le Conseil Constitutionnel a élevé ce principe au rang de norme à valeur constitutionnelle. Enfin, la loi du 15 juin 2000 a donné l’occasion au législateur d’introduire le principe du respect de la présomption d’innocence dans un article préliminaire à notre code de procédure pénale. La portée de la présomption d’innocence déborde aujourd’hui la seule procédure pénale. En effet, prenant acte de la notion de matière pénale dégagée par la CEDH, la jurisprudence judiciaire a étendu son champ d’application aux sanctions administratives répressives ainsi qu’aux pénalités fiscales. C’est néanmoins le seul domaine de la procédure pénale qui retiendra ici notre attention. En cette matière, la présomption d’innocence doit être respectée à tous les stades du procès, depuis l’enquête de police jusqu’à la condamnation définitive. La réponse étatique à la commission d’infractions pénales nécessite, dans une société construite sur le modèle Etat - société libérale, que soient conciliés plusieurs intérêts contradictoires. En tant que gardien des intérêts de la société, notre système répressif doit apporter une réponse rapide et efficace au phénomène infractionnel. Mais l’intérêt général consiste également dans le respect du principe de la présomption d’innocence, laquelle ne peut être sacrifiée au bénéfice de la protection de l’ordre public. Notre procédure pénale doit ainsi concilier des objectifs, qui pour être tous légitimes, n’en demeurent pas moins, en apparence, contradictoires. Une question essentielle se pose dès lors : comment le droit positif garantit-il la présomption d’innocence face aux atteintes que peuvent lui porter la recherche d’une répression efficace, mais aussi l’exercice d’autres droits et libertés fondamentaux ? Si certaines réformes législatives illustrent la réaffirmation et le renforcement contemporain de la présomption d’innocence (I), son effectivité demeure relative (II). I – Le renforcement contemporain de la présomption d’innocence L’affirmation de la présomption d’innocence, bien qu’elle date de la Révolution, n’avait donné lieu, jusqu’à la loi du 15 juin 2000, qu’à des mesures de protection éparses et incomplètes. Aussi, les dérives de l’exploitation médiatique des affaires judiciaires d’une part, et l’impulsion européenne d’autre part, ont révélé la nécessité de renforcer le dispositif protecteur de la présomption d’innocence. Les dispositions nouvelles visent à protéger la présomption d’innocence non seulement des tiers à la procédure (A), mais aussi des intervenants à cette procédure (B). A - Renforcement de la présomption d’innocence à l’égard des tiers à la procédure http://www.prepa-isp.fr Groupe ISP – Droit pénal Les dérives de la surexploitation médiatique des affaires judiciaires ont rendu nécessaire un renforcement du dispositif protecteur de la présomption d’innocence à l’égard des tiers à la procédure, et notamment des journalistes. Ce dispositif a été renforcé à la fois par la voie du droit pénal et par la voie du droit civil. Certaines violations de la présomption d’innocence peuvent constituer une infraction pénale, par exemple le délit de diffamation ou de dénonciation calomnieuse, de violation du secret professionnel ou du secret de l’instruction. La loi du 15 juin 2000 a créé de nouvelles incriminations dans la loi sur la presse de 1881, pour protéger la présomption d’innocence. Constitue désormais une infraction le fait de diffuser sans son accord, par tous moyens et quelqu’en soit le support, l’image d’une personne identifiée ou identifiable, mise en cause à l’occasion d’une procédure pénale, mais n’ayant pas fait l’objet d’un jugement de condamnation, faisant apparaître que cette personne porte des menottes ou entraves ou qu’elle est placée en détention provisoire ; le fait de réaliser, publier ou commenter un sondage d’opinion ou toute autre consultation portant sur la culpabilité d’une personne pénalement impliquée ou sur la peine susceptible d’être prononcée à son encontre, ou encore le fait de donner des indications permettant d’accéder à un tel sondage. La présomption d’innocence fait ainsi l’objet d’une protection pénale de plus en plus élaborée contre les atteintes qui pourraient lui être portées par les tiers à la procédure et notamment les journalistes. Mais le dispositif protecteur de la présomption d’innocence a également été renforcé par le biais du droit civil. Avant 1993, les atteintes à la présomption d’innocence commises par voie de presse étaient sanctionnées par le biais de la mise en œuvre de la responsabilité civile de leur auteur sur le fondement de l’article 1382 du code civil. Si la protection de la présomption existait effectivement, celle-ci restait limitée dans la mesure où la réparation imposait la preuve d’un préjudice subi par la personne impliquée. Ce dispositif s’est en premier lieu trouvé renforcé par la loi du 4 janvier 1993 insérant dans le code civil un article 9-1, selon lequel « chacun a le droit au respect de la présomption d’innocence ». Cette disposition a indéniablement constitué une avancée dans la protection de la présomption d’innocence, dans la mesure où le préjudice ouvrant droit à réparation découle de la seule atteinte à cette présomption. Après avoir été revu et corrigé par la loi du 24 août 1993, l’article 9-1 al. 2 c. civ., rétabli dans sa version d’origine par la loi du 15 juin 2000, prévoit désormais que « lorsqu’une personne est présentée publiquement, avant toute condamnation, comme coupable de faits faisant l’objet d’une enquête ou d’une instruction judiciaire, le juge peut, même en référé, ordonner toute mesure, telles que l’insertion d’une rectification ou la diffusion d’un communiqué aux fins de faire cesser l’atteinte à la présomption d’innocence… ». La nouvelle rédaction de l’art. 9-1 permet donc de s’adresser au juge des référés, alors même qu’on ne fait l’objet d’aucune mesure de garde à vue, de mise en examen, de citation à comparaître, de réquisitoire nominatif du parquet ou d’une plainte avec constitution de partie civile. Il n’est donc plus besoin, comme c’était le cas après la loi du 24 août 1993, d’être mis en cause par la justice pour voir sa présomption d’innocence protégée. Quant à la réparation des atteintes à la présomption d’innocence émanant de tiers à la procédure, elle sera décidée par le juge civil ou le juge pénal statuant en matière civile : les personnes qui s’estiment victimes d’une atteinte à leur présomption d’innocence peuvent en demander réparation en justice sur le fondement de l’art. 1382 C.civ., indépendamment des conditions de l’art. 9-1. Dans les cas les plus graves, la jurisprudence est allée jusqu’à ordonner la saisie des livres (affaires Gaudinot et Piat). Mais ce n’est pas seulement contre les atteintes susceptibles d’être portées à la présomption d’innocence par des tiers à la procédure que le dispositif protecteur s’est trouvé renforcé, le législateur a également jugé nécessaire de mieux protéger la présomption d’innocence des intervenants à la procédure. B - Renforcement de la présomption d’innocence à l’égard des autorités judiciaires et policières http://www.prepa-isp.fr Groupe ISP – Droit pénal La présomption d’innocence implique le droit de ne pas être présenté comme coupable avant toute condamnation. Le juge lui-même doit respecter la présomption d’innocence en ne portant pas de pré-jugement sur la personne accusée. Il est cependant de nombreuses mesures mises en place par notre procédure pénale et nécessaires à son efficacité, qui, par leur nature même, portent atteinte au droit de ne pas être présenté comme coupable avant toute condamnation. La garde à vue, la détention provisoire et la mise en examen nous apparaissent en être les exemples les plus significatifs. L’un des objectifs affichés de la loi du 15 juin 2000 consistait précisément dans la protection de la présomption d’innocence de la personne impliquée dans une procédure pénale contre les atteintes qui pourraient lui être portées par les autorités judiciaires et policières. Ainsi, le législateur de 2000 a opéré un renforcement du dispositif protecteur de la présomption d’innocence à la fois dans la phase d’enquête et dans celle de l’instruction. Les réformes profondes intéressent ainsi principalement la garde à vue, la mise en examen et la détention provisoire. Les mesures de garde à vue et de détention provisoire, permettant de priver de sa liberté une personne dont la culpabilité n’a pas encore été démontrée, sont par nature attentatoires à la présomption d’innocence. Par plusieurs dispositions, le législateur uploads/S4/ la-presomption-d-x27-innocence 1 .pdf
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- Publié le Apv 07, 2021
- Catégorie Law / Droit
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