La preuve électronique des transactions commerciales au maroc à la lumière de l

La preuve électronique des transactions commerciales au maroc à la lumière de la loi n°53-05 A la veille du XXI siècle se dessine un mouvement de dématérialisation de la preuve, mouvement qui accompagne l’ensemble de la pratique des affaires. Ainsi, dans le droit des valeurs mobilières, «le mot titre désigne non plus un instrument matériel mais une valeur scripturale sans individualité»[1].Cette dématérialité se trouve dans le droit de la preuve à travers l’influence des nouvelles technologies de l’information. C’est pourquoi, par la coexistence à l’intérieur de notre système juridique de l’exigence de la preuve écrite - preuve légale- et la dématérialisation de la preuve, soit par le fait de la loi - comme c’est le cas en matière de valeurs mobilières - soit par le fait de la convention des parties. Notre culture juridique parvient à une étape décisive de son développement : celle où l’écrit n’est plus un procédé commode pour établir la preuve. Figée une fois pour toutes de tout accord de volontés, mais où seule un appareil dont - c’est précisément la fonction - permet d’en rendre compte. Il s’agit d’un transfert de matérialité de l’acte juridique à l’instrument utilisé qui, déjà, s’est produit, avant même que le droit ait surgi pour déterminer quel devrait être l’efficacité probatoire de ces instruments qui nous sont de plus en plus indispensables[2]. Quelle est en effet, la garantie que la preuve technologique fournit au défenseur contre la prétendue adéquation de l’allégation du demandeur et de la réalité ? Dans quelle mesure le demandeur peut il avoir recours à ce type d’instrument alors que la loi érige pour principe la preuve par écrit des actes juridiques ? C’est d’une autre façon que, dans le domaine des faits juridiques se présente ce transfert de matérialité et ces problèmes. En effet, si le principe veut que la preuve puisse être rapportée par tous moyens, quelle efficacité probatoire attacher à un élément produit par un instrument dont le contrôle est abandonné à l’une ou l’autre partie. Mais que ce soit dans le domaine des actes juridiques ou des faits juridiques se pose désormais le problème de la preuve technologique, c’est à dire de la preuve rapportée au moyen d’un instrument des nouvelles technologies de l’information. Ce recours à la technique pour constituer la preuve est singulier, il introduit entre la volonté du débiteur et l’établissement de la preuve de son obligation un système intermédiaire dont il n’a pas nécessairement le contrôle. A la limite, ce phénomène « d’intermédiarisation » peut avoir pour effet de substituer à la preuve d’un acte juridique, de son existence ou de son contenu, la preuve d’un fait juridique enregistré par un appareil. Peut on dès lors considérer que le débiteur est à l’origine de l’obligation qu’on lui impose ? Le commerce électronique conduit à un bouleversement des pratiques juridiques actuelles. La préoccupation de la sécurité[3] que pose le souci du développement des transactions électroniques consiste donc à devoir inventer de nouveau mode de preuves acceptables sur le plan juridique en tenant compte du double constat. Le commerce électronique, du fait de la dématérialisation des relations qu’il induit, requiert des preuves supplémentaires inutiles dans le commerce traditionnel ; Les modes de preuve traditionnels sont totalement inadaptés à la dématérialisation des relations. Après avoir exposé les deux systèmes probatoires en place et identifié les obstacles au commerce électronique que créent les systèmes juridiques actuels (section1) .Il est opportun d’envisager en quoi consistent les modifications apportées par la nouvelle législation introduite par la loi n°53 - 05 dans notre système probatoire (section 2). Section 1 : les obstacles juridiques à l’adoption de la preuve électronique . Alors même que l’environnement international concernant l’acceptation des actes dématérialisés dans le corpus de la preuve devient de plus en plus favorable, le débat relatif à la valeur probante des actes dématérialisés été ouvert. La difficulté d’appréhender, de lire et d’accepter la preuve électronique d’un système juridique à un autre constitue a déjà constitué un obstacle quant à son adoption. Il y a lieu donc avant de traiter le régime de preuve en droit Marocain (paragraphe 2), d’exposer les deux grands systèmes de preuve en place (paragraphe 1). Paragraphe 1 : les systèmes probatoires en place. Les nouvelles technologies de l’information ont permis le développement de nouvelles techniques de traitement des informations et de conclusions des transactions, ces techniques soulèvent des questions juridiques difficiles, notamment en matière de droit de la preuve. Le traitement et la conservation d’information sous forme de documents informatiques (listings d’ordinateurs, bandes magnétiques, disques, microfilms de sortie d’ordinateur) constituent-ils la préconstitution valable d’une preuve à faire valoir en cas de litige ? Ces procédés sont-ils conformes au droit positif ? Les transactions qui peuvent aujourd’hui se réaliser par le biais d’ordinateurs répondent-elles aux exigences légales de preuve des actes juridiques ? Les réponses à ces questions seront envisagées successivement dans deux systèmes juridiques: le droit anglo-saxon d’une part (A) et le droit civil d’autre part (B). A- la preuve dans la common Law. Le système anglo-saxon donne aux parties un pouvoir d’initiative important dans la recherche et la production de la preuve. Les nombreuses techniques de « discovry[4] » qu’offre ce système facilitent considérablement la recherche de la preuve. Ainsi, la communication des pièces, les interrogatoires…donne aux parties au litige l’opportunité, entre autres, d’étudier les documents de la partie adverse. Ce mécanisme préliminaire permet aux parties d’obtenir de l’adversaire des faits et des informations relatifs à l’affaire, qui les aident dans la préparation du procès, leur permet de mieux connaître le dossier, voir d’obtenir des aveux ou d’aboutir à un accord. Le droit anglo-saxon de la preuve qui se caractérise par la richesse (1), la précision et la technicité de ses règles connaît deux principes fondamentaux qui semblent constituer des obstacles majeurs à l’admissibilité des documents d’origine électronique à titre de preuve des informations qu’ils contiennent (2). L’approche juridique anglo-saxonne Il existe essentiellement trois types de preuve en droit anglo-saxon[5] : la preuve testimoniale, qui est la déposition de témoins sous serment et qui est considérée comme le mode privilégié de preuve dans le système de common Law ; La preuve littérale, qui consiste en la présence d’un écrit à la cour ; Ainsi que la preuve matérielle, c’est à dire la preuve rapportée au moyen d’objets matériels, à distinguer des déclarations de témoins concernant les dits objets. Ces trois types de preuve sont, par essence, admissibles, pourvu qu’ils présentent un intérêt au regard de la question soulevée par le litige en cause, qu’ils soient pertinents, c’est à dire qu’ils soient authentiques et aient une valeur probatoire et qu’ils ne soient pas exclus par des règles spéciales. Obstacles à l’admissibilité des documents électroniques : question de recevabilité Les trois barrières principales à la recevabilité de preuve littérale sont l’authenticité, la règle de « la meilleure preuve » (Best Evidence Rule) et la règle de l’interdiction de la preuve par oui-dire (« Hearsay Rule »)[6]. Dans un système juridique de Common Law, la première difficulté soulevée par l’utilisation de tels documents informatiques comme mode de preuve est leur authenticité. Cela soulève un problème en matière de commerce électronique. Tout d’abord, le document n’est pas un manuscrit, ensuite, les données informatiques ne sont pas inaltérables, introduites dans l’ordinateur par une personne, les données peuvent être modifiées par une deuxième personne, voire par l’ordinateur lui même lors de la sauvegarde automatique de telles données. C’est pourquoi il est légitime de considérer ces documents électroniques comme irrecevables dans la mesure où personne ne pouvait témoigner de leur authenticité, compte tenu du nombre de personnes ayant pris part à leur création. L’interdiction de la preuve par ouï-dire constitue, également, un obstacle à la production de documents informatiques comme mode de preuve. Le fondement essentiel de l’exclusion de la simple preuve par oui–dire est l’impossibilité pour la partie adverse de procéder à un contre-interrogatoire de l’auteur de la déclaration en cause. En effet, en vertu de la règle de l’ouï-dire, le témoignage, mode de preuve privilégié en droit anglo-saxon, n’est pas recevable que s’il émane de celui qui a eu connaissance des faits qu’il expose. C’est donc la seule personne qui peut être valablement soumise à l’examen contradictoire[7]. Appliquée aux écrits, cette règle signifie qu’un document est irrecevable si son auteur n’est pas présent pour témoigner de son contenu devant le tribunal. Or, lorsque des données sont introduites dans un ordinateur, puis présentées sous forme de documents de sortie d’ordinateur, l’information originaire est passée dans plusieurs « mains » ; celles de l’auteur du document original, et celles de l’encodeur qui n’est pas nécessairement la même personne ni même dépendant de cette dernière, et en fin, celle de l’ordinateur puisque celui-ci en traitant et/ou conservant l’information, est susceptible de la transformer. L’ordinateur ne pouvant, par sa nature, être soumis à l’examen contradictoire. La doctrine[8] et la jurisprudence [9]ont toujours considéré les documents de sortie d’ordinateur comme preuve par ouï-dire. Néanmoins, la règle de la preuve par ouï-dire tombe quand le document entre dans le champs du business records uploads/S4/ la-preuve-electronique-des-transactions-commerciales-au-maroc-a-la-lumiere-de-la-loi-n53-05.pdf

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  • Publié le Jul 31, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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